De l`analyse complexe `a la répartition des nombres premiers

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Mémoire de première année de
Magistère de mathématiques
De l’analyse complexe à la répartition des
nombres premiers
réalisé par Emilie Kaufmann
sous la direction de Henri Carayol
Strasbourg, le 17 septembre 2008
Table des matières
Introduction
4
Notations
5
I
Fonctions arithmétiques et séries de Dirichlet
7
1.1
Définition et domaine de convergence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
8
1.1.1
Abscisse de convergence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
8
1.1.2
Prolongements des séries de Dirichlet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
10
1.1.3
Produit de convolution de deux séries de Dirichlet . . . . . . . . . . . . . . . .
11
II
1.2
Formule du produit Eulérien
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
12
1.3
Quelques exemples liés à la fonction ζ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
13
1.4
La fonction de Von Mangoldt, Λ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
14
1.4.1
Dérivation d’une série de Dirichlet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
14
1.4.2
Dérivée logarithmique et fonction de Von Mangoldt . . . . . . . . . . . . . . .
14
Caractères de groupes abéliens finis et fonctions L
2.1
III
17
Théorie des caractères . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
18
2.1.1
Caractère d’un groupe abélien fini . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
18
2.1.2
Relations d’orthogonalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
18
2.1.3
Caractères de Dirichlet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
21
2.1.4
Caractère primitif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
22
2.2
Fonctions L de Dirichlet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
22
2.3
Dérivée logarithmique des fonctions L . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
24
Fonctions sommatoires
26
3.1
Fonctions sommatoires et fonctions sommatoires lissées . . . . . . . . . . . . . . . . . .
27
3.2
Exemples importants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
28
2
3.3
3.4
3.5
3.6
3.2.1
Fonctions π et ψ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
28
3.2.2
Théorèmes des nombres premiers et fonctions ψ . . . . . . . . . . . . . . . . . .
29
Transformée de Fourier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
33
3.3.1
Définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
33
3.3.2
Exemple important . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
33
3.3.3
Formule d’inversion de Fourier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
34
3.3.4
Formule de Poisson . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
34
3.3.5
Etude des fonctions θ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
34
Transformée de Mellin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
36
3.4.1
Définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
36
3.4.2
Etude de l’exemple de Γ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
37
3.4.3
Formule d’inversion de Mellin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
39
Formule intégrale évaluant une fonction sommatoire lissée . . . . . . . . . . . . . . . .
40
3.5.1
Formule intégrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
40
3.5.2
Application à des fonctions connues . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
41
Technique de déplacement du contour d’intégration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
43
IV Prolongement analytique des fonctions L sur Re(s) > 0 et théorème de la
progression arithmétique
46
V
4.1
Prolongement sur Re(s) > 0 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
47
4.2
Non annulation des fonctions L en 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
49
4.3
Théorème de la progression arithmétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
51
Prolongement des fonctions L sur C
5.1
5.2
VI
55
Le cas de la fonction ζ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
56
5.1.1
Equation fonctionnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
56
5.1.2
Prolongement de ζ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
58
Equation fonctionnelle plus générale et singularités des fonctions L . . . . . . . . . . .
58
5.2.1
Equation fonctionnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
58
5.2.2
Conséquences sur les propriétés des fonctions L . . . . . . . . . . . . . . . . . .
63
Zéros des fonctions L
6.1
67
Zéros de fonctions holomorphes d’ordre 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
68
6.1.1
Fonction d’ordre fini . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
68
6.1.2
Formule de Jensen . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
70
3
6.1.3
Application aux fonctions d’ordre 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
72
6.2
Zéros triviaux des fonctions L . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
74
6.3
Zéros non triviaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
75
VII
7.1
7.2
Théorèmes des nombres premiers
85
Le théorème des nombres premiers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
86
7.1.1
Non annulation de ζ sur σ = 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
86
7.1.2
Démonstration du théorème des nombres premiers . . . . . . . . . . . . . . . .
88
7.1.3
Equivalence avec la non-annulation de ζ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
89
7.1.4
Théorème des nombres premiers avec un terme d’erreur . . . . . . . . . . . . .
90
Le théorème de nombres premiers en progression arithmétique . . . . . . . . . . . . . . 101
7.2.1
Résultats sur des sommes lisses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
7.2.2
Démonstration du théorème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106
VIII Hypothèse de Riemann et amélioration du terme d’erreur pour le théorème
des nombres premiers
109
8.1
Retour sur les termes d’erreur des théorèmes précédents . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
8.2
Hypothèse de Riemann et théorème des nombres premiers . . . . . . . . . . . . . . . . 110
8.3
Hypothèse de Riemann généralisée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112
Conclusion
112
Remerciements
114
4
Le but de ce mémoire est de présenter quelques résultats importants de théorie analytique des
nombres. Il s’agit d’utiliser des outils d’analyse complexe (estimation de sommes à l’aide d’intégrales
sur des contours bien choisis, théorème des résidus, résultats sur les zéros fonctions des holomorphes
d’ordre fini...) et d’arithmétique (nombre premiers, caractères de Dirichlet et fonctions L...) pour montrer des résultats sur la répartition des nombres premiers.
Un des objectfis de ce mémoire est la démonstration du théorème des nombres premiers : en notant
x
π(x) le nombre de nombres premiers inférieurs ou égaux à x il s’agit de montrer que π(x) ∼ lnx
lorsque
x tend vers l’infini. Ce théorème a été démontré simultanément par Hadamard et de la Vallée Poussin
en 1896 en se servant de l’analyse complexe, avec notamment la fonction ζ et sa non-annulation au
voisinage de la droite Re(s) = 1. Dans ce mémoire, on trouvera une démonstration de ce type du
théorème des nombres premiers. Mais on montrera des résultats plus généraux sur la répartition des
nombres premiers congrus à a modulo q avec le théorème de la progression arithmétique et le théorème
des nombres premiers en progression arithmétique. Le théorème des nombres premiers est en fait un
corollaire de ce dernier résultat, mais il sera démontré séparément, de manière un peu différente. Nous
verrons enfin le lien entre le théorème des nombres premiers et la célèbre conjecture de Riemann
Le lien que nous ferons entre l’arithmétique et l’analyse complexe passe tout d’abord par les séries
de Dirichlet, auxquelles nous allons nous intéresser dans la première partie. La somme d’une série associée à une fonction arithmétique donnée peut en effet être vue comme une fonction complexe dont on
peut étudier les propriétés. La fonction ζ est l’exemple le plus simple d’une série de Dirichlet, et nous
nous intéresserons aussi à la fonction de Von Mangoldt qui intervient dans la dérivée logarithmique de
ζ. Si le théorème des nombres premiers a un lien avec la seule fonction ζ, pour étudier la répartition des
nombres premiers congrus à a modulo q, il faut s’intéresser aux fonctions L de Dirichlet, ce que nous
ferrons dans la seconde partie. Nous verrons en effet comment transformer des sommes ne prenant en
compte que des termes congrus à a modulo q en faisant intervenir des caractères de Dirichlet.
Nous étudierons ensuite les propriétés des fonctions sommatoires, qui apparaissent intuitivement
lorsqu’on étudie des fonctions du type π(x), qui peuvent se voir comme des sommes de fonctions
arithmétiques. Certaines fonctions sommatoires, ψ(x) ou ψ(x; q, a) sont très importantes car l’étude
de leur comportement asymptotique suffit à montrer les théorèmes des nombres premiers. Nous introduirons également les fonctions sommatoires lissées, que nous utiliserons pour démontrer le théorème
des nombres premiers en progression arithmétique et à la fin de la 3ème partie nous obtiendrons une
formule intégrale exprimant une fonction sommatoire lissée comme une tranformée de Mellin inverse.
En l’appliquant aux fonctions ψ(x) et ψ(x; q, a), on obtient des formules intégrales faisant intervenir
0 (χ,s)
0 (s)
les fonctions − LL(χ,s)
et − ζζ(s)
pour le théorème des nombres premiers.
Comme la dérivée logarithmique des fonctions L intervient, nous devrons prolonger ces fonctions de
manière méromorphe sur C (ce que nous ferons dans la cinquième partie) mais aussi étudier leurs zéros
(sixième partie). Nous verrons qu’il existe une autre façon de prolonger ces fonctions, sur Re(s) > 0,
que nous mettrons en oeuvre dans la cinquième partie. Pour donner une première application à ce prolongement, nous démontrerons également dans cette partie le théorème de la progression arithmétique :
il existe une infinité de nombres premiers congrus à a modulo q.
La septième partie est consacrée aux démonstrations des deux théorèmes des nombres premiers, qui
se basent surtout sur la transformation des formules intégrales précédemment obtenues. Enfin, nous
étudierons dans la dernière partie plusieurs formulations équivalentes de la conjecture de Riemann et
montrerons en particulier en quoi elle donne un bon terme d’erreur dans le théorème des nombres
premiers.
5
Notations
Dans toute la suite on désignera par s une variable complexe et on écrira s = σ + it, où σ est la
partie réelle de s et t sa partie imaginaire.
Si m et n sont deux entiers, (n, m) désigne leur pgcd.
On notera P l’ensemble des nombres premiers, et p désignera un entier premier.
Si x est un réel, [x] désigne la partie entière de x, soit le plus grand entier inférieur ou égal à x.
On rappelle la définition du symbole de Landau O. Soit f (s) une fonction à valeurs dans C et g(s)
une fonction à valeurs dans R.
f (s) = O (g(s))
dans une région R de C si il existe une constante A telle que pour tout s dans la région R on ait :
|f (s)| ≤ A g(s)
A est appelée constante implicite (relative au O) : lorsque la fonction f dépend de plusieurs
paramètres, on peut être amené à préciser de quels paramètres cette constante dépend. La constante
est ici uniforme sur tout la région R : ce sera toujours le cas lorsqu’on donnera aucune précision
supplémentaire.
Lorsqu’on parle de O au voisinage d’un certain point, cela signifie qu’il existe un voisinage du point
considéré sur lequel on a une majoration de ce type (la constante A dépend alors du voisinage).
On utilisera la notation log(x) pour désigner la détermination principale du logarithme sur C, qui
coı̈ncide avec le logarithme népérien sur R. On pourra donc énoncer indifféremment le théorème des
nombres premiers des deux manières suivantes :
π(x) ∼
x
log(x)
ou
6
π(x) ∼
x
ln(x)
Première partie
Fonctions arithmétiques et séries de
Dirichlet
7
1.1
Définition et domaine de convergence
Définition 1.1.1 (Fonction arithmétique) Une fonction arithmétique est une application
f : N∗ −→ C : c’est une suite de nombres complexes.
Une fonction arithmétique est dite multiplicative si
∀(m, n) ∈ N2 | (m, n) = 1, f (mn) = f (m)f (n)
Une fonction arithmétique est dite totalement multiplicative si
∀(m, n) ∈ N2 , f (mn) = f (m)f (n)
Définition 1.1.2 (Série de Dirichlet associée à une fonction arithmétique) La série de Dirichlet associée à la fonction arithmétique f est définie en s par :
Df (s) =
X
f (n)n−s
n≥1
On note parfois an au lieu de f (n), puisque cela correspond à une suite de nombres complexes.
Cette définition est
à l’origine par Dirichlet, mais on peut généraliser ce concept à
P celle donnée
−λ
s
n
avec λn nombre complexe dont la partie réelle tend vers l’infini
une série de la forme n≥1 f (n)e
lorsque n → ∞. Le cas précédent correspond alors à λn = ln(n). Dans la suite, on ne s’intéressera
qu’aux séries de Dirichlet définies dans 1.1.2.
Une fonction arithmétique telle que la série de Dirichlet associée converge dans un domaine du
plan complexe est dite à croissance modérée.
1.1.1
Abscisse de convergence
On s’intéresse maintenant aux parties du plan complexe sur lesquelles une série de Dirichlet
converge.
Si f (n) = O nβ , alors f (n)n−s = O nβ−σ et la série de Dirichlet Df (s) converge absolument
dans la région σ > β + 1.
On note σconv = inf {Re(s) | Df (s) < ∞}, abscisse de convergence d’une série de Dirichlet. On
peut également définir de la même façon σabs , abscisse de convergence absolue d’une série de Dirichlet.
P∞
−s converge pour s = s alors elle converge uniThéorème 1.1.1 Si la série g(s) =
0
n=1 an n
formément sur tout domaine de la forme Re(s − s0 ) ≥ 0, |arg(s − s0 )| ≤ α avec α < π2 .
Démonstration
La démonstration repose sur le résultat suivant
−αz
−βz −e
e
≤
|z| −αRe(z)
e
− e−βRe(z)
Re(z)
si 0 < α < β
8
En effet,
e
−αz
−e
Z
−βz
β
e−tz dt
= z
α
Z
−αz
−βz −e
e
≤ |z|
β
e−tRe(z) dt =
α
|z| −αRe(z)
e
− e−βRe(z)
Re(z)
Nous allons maintenant montrer la convergence uniforme de la série de Dirichlet sur la zone
considérée en utilisant le critère de Cauchy uniforme. Soit > 0
P
−s0 converge, il existe N tel que si n, n0 ≥ N alors
Comme la série ∞
n=1 an n
0
n
X
−s0 ak k ≤ k=n
Soit n, n0 ≥ N .
Notons An,n0 =
Pn0
k=n−1 ak k
−s0
et Sn,n0 (s) =
Pn0
k=n ak k
0
n
X
Sn,n0 (s) =
0
ak k
−s0 −(s−s0 )
k
=
k=n
0 −1
nX
=
−s .
n
X
(An,k − An,k−1 ) k −(s−s0 )
k=n
An,k k −(s−s0 ) − (k + 1)−(s−s0 ) + An,n0 n0−(s−s0 )
k=n
0 −1
nX
=
An,k e−(s−s0 )ln(k) − e(s−s0 )ln(k+1) + An,n0 n0−(s−s0 )
k=n
Et en notant x la partie réelle de s − s0
Sn,n0 (s) ≤
0 −1
nX
|An,k | e−(s−s0 )ln(k) − e(s−s0 )ln(k+1) + An,n0 n0−x
k=n
0 −1
nX
|s − s0 | −xln(k)
e
− e−xln(k+1) + n0−x
x
k=n
!
n0 −1
|s − s0 | X −x
≤ k − (k + 1)−x + n0−x
x
k=n
|s − s0 | −x
0−x
0−x
n −n
+n
≤ x
≤ (2k + 1)
≤
en notant k =
|s−s0 |
x
=
1
cos(arg(s−s0 ))
≤
1
cos(α)
donc
Sn,n0 (s) ≤ 2
+1
cos(α)
P
La série n≥1 an n−s vérifie le critère de Cauchy uniforme sur Re(s − s0 ) ≥ 0, |arg(s − s0 )| ≤ α,
elle converge donc uniformément dans cette région.
9
Corollaire 1.1.1 Si une série de Dirichlet converge pour s = s0 , elle converge uniformément sur tout
compact du demi-plan Re(s) > σ0 : en particulier elle converge sur le demi-plan de convergence
σ > σconv . Df (s) est donc une fonction holomorphe sur σ > σconv .
Démonstration
Ce corollaire est immédiat, puisque tout compact de ce demi-plan s’inclut dans une zone du type
celle donnée dans le théorème 1.1.1 avec α suffisamment proche de π2 . On a convergence uniforme sur
tout compact, la somme de la série est donc une fonction holomorphe.
1.1.2
Prolongements des séries de Dirichlet
On a vu qu’une série de Dirichlet définit une fonction holomorphe sur le demi-plan de convergence.
Nous allons voir que dans certains cas, bien qu’une série de Dirichlet ne converge que sur une zone du
type σ > σconv , on peut la prolonger analytiquement à gauche en une fonction holomorphe : ce sera
le cas par exemple pour les fonctions L de Dirichlet.
En revanche, dans le cas des séries de Dirichlet à coefficients réels positifs (ie. la fonction arithmétique
f prend ses valeurs dans R+ ), on ne peut pas prolonger Df en une fonction holomorphe à gauche de
l’abscisse de convergence. Pour justifier ceci, montrons le théorème suivant :
P
−λn s une série de Dirichlet à coefficients a réels positifs.
Théorème 1.1.2 Soit g(s) =
n
n≥1 an e
Supposons que f converge pour σ > ρ avec ρ ∈ R et que f soit prolongeable analytiquement en une
fonction holomorphe au voisinage de s = ρ. Alors il existe > 0 tel que f converge pour σ > ρ − .
Démonstration
On peut se ramener par translation au cas ρ = 0.
Comme g est holomorphe au voisinge de zéro, il existe tel que sur le disque fermé de centre et
de rayon 2, g est somme de sa série de Taylor en .
g(z) =
∞
X
1
(z − )p g (p) ()
p!
p=0
Mais on a aussi par dérivation terme à terme :
g (p) (z) =
∞
X
an (−λn )p e−λn z
n=1
Et en prenant z = on obtient :
10
∞
∞
X
X
1
p
g(z) =
(z − )
an (−λn )p e−λn p!
p=0
∞ X
∞
X
g(−) =
p=0 n=1
∞ X
∞
X
g(−) =
n=1
1
(−2)p an (−λn )p e−λn p!
an e−λn p=0 n=1
1
(2λn )p
p!
On a une série double à termes positifs qui est sommable car en sommant d’abord par rapport à
p, la série converge.
g(−) =
∞
X
an e−λn e2λn =
n=1
∞
X
an eλn < +∞
n=1
La série de Dirichlet converge en s = − donc sur Re(s) > − d’après le théorème 1.1.1.
Ce théorème justifie l’affirmation précédente, car si un prolongement holomorphe était possible
au niveau de l’absisse de convergence, la série convergerait pour un σ < σconv , ce qui est exclu par
définition de l’abscisse de convergence.
Par contre, un prolongement méromorphe est possible pour les série à termes positifs, mais avec
dans ce cas un pôle en s = σconv : c’est le cas pour la fonction ζ, comme on le verra plus loin.
1.1.3
Produit de convolution de deux séries de Dirichlet
Soit f (resp. g) une fonction arithmétique à croissance modérée telle que la série de Dirichlet
associée converge pour σ > σf (resp. σg ). Soit σ > max(σf , σg ). On a
Df (s) × Dg (s) = Dh (s) =
X
h(n)n−s
n≥1
où h est une fonction arithmétique appelée produit de convolution de Dirichlet de f et g.On
note h = f ∗ g et
h(n) =
X
f (d)g
d|n
n
d
=
X
f (a)g(b)
ab=n
La convolution de deux fonctions arithmétiques est clairement commutative, comme le montre la
dernière formule obtenue.
Inverse pour la convolution
On définit la fonction arithmétique δ par :
δ(n) =
1 si n = 1
0 sinon
11
Dδ = 1, δ est donc l’élément neutre pour la convolution de deux fonctions arithmétiques.
Proposition 1.1.1 Il existe une inverse (f ∗ )−1 de f pour la convolution (ie f ∗ (f ∗ )−1 = δ) si et
seulement si f (1) 6= 0.
Démonstration
Supposons que (f ∗ )−1 existe. Notons h la convolution de f et (f ∗ )−1 . h(1) = 1 donc
f (1)(f ∗ )−1 (1) = 1 d’où f (1) 6= 0.
De plus, on peut alors définir (f ∗ )−1 de manière unique, par récurrence. En effet,
(f ∗ )−1 (1) =
1
f (1)
Ensuite on a
(f ∗ )−1 (n) = −
n
1 X
f (d)(f ∗ )−1
f (1)
d
d|n
d>1
1.2
Formule du produit Eulérien
Proposition 1.2.1 (Formule du produit Eulérien) Si f est une fonction arithmétique multiplicative,
à croissance modérée, alors pour tout s tel que Df (s) converge absolument, on a :
Df (s) =
∞
X
f (n)n−s =
n=1
Y
p∈P


X

f (pk )p−ks 
(1.1)
k≥0
Démonstration
Montrons d’abord la convergence absolue du produit ci-dessus. On note (pn )n∈N∗ la suite croissante
des nombres premiers.
pn X
pn X Y
Y
k −kσ
k −ks f (p )p ≤
≤
f (p ) p
p=2 k≥0
p=2 k≥0
≤
X
|f (m)| m−σ0
X
|f (m)| m−σ
m≥1
m ayant des
f acteurs premiers
∈[|2;pn |]
= A< ∞
m≥1
Montrons maintenant la convergence de ce produit vers la série de Dirichlet de f . Pour cela, notons
E(N ) l’ensemble des entiers dont tous les diviseurs premiers sont inférieurs à N .

Y

X

p≤N
f (pk )p−ks  =
k≥0
X
n∈E(N )
12
f (n)n−s
r )q −rs = f (pk q r )(pk q r )−s = f (m)m−s où m ∈
En effet, f est multiplicative donc f (pk )p−ks
Qf (q
Q
αi
is
E(N ). Réciproquement, tout n ∈ E(N ) s’écrit pi d’où f (n)n−s = f (pαi i )p−α
, qui est bien un
i
terme du produit de gauche.
X
f (n)n−s −
n∈N
X
f (n)n−s =
X
f (n)n−s
n∈L(N )
n∈E(N )
où L(N ) = { entiers ayant un diviseur premier > N }.


Y X
k
−ks
Df (s) −

f (p )p  ≤
p≤N
k≥0
X
|f (n)|n−s
n∈L(N )
X
≤
|f (n)|n−s −→ 0 lorsque N → ∞
n≥N
d’où la limite souhaitée
Cette formule, due à Euler, permet de faire un lien important entre les séries de Dirichlet et les
nombres premiers : on passe en effet d’une somme à un produit sur l’ensemble des nombres premiers.
1.3
Quelques exemples liés à la fonction ζ
La fonction ζ de Riemann est définie sur σ > 1 par
ζ(s) =
∞
X
1
ns
n=1
Il s’agit en fait d’une série de Dirichlet, associée à la fonction arithmétique f : n → 1. Le produit
Eulérien nous donne alors le lien entre cette fonction et les nombres premiers :
ζ(s) =
YX
p−ks =
p∈P k≥0
Y
p∈P
1
1 − p−s
Cette formule est valable pour σ > 1, région sur laquelle ζ converge absolument.
Nous allons maintenant voir maintenant à titre d’exemple que les séries de Dirichlet des fonctions
arithmétiques connues ont un lien avec la fonction ζ.
Fonction de Möbius µ
On rapelle que µ(1) = 1 , µ(n) = (−1)k si n est produit de k nombres premiers distincts, µ(n) = 0
si n possède un facteur premier multiple. Pour σ > 1, la série de Dirichlet associée à µ converge
absolument et on peut utiliser la formule du produit Eulérien :
Dµ (s) =
Y
(1 + µ(p)p−s ) =
p∈P
Y
p∈P
13
(1 − p−s ) = (ζ(s))−1
Donc si σ > 1 :
Dµ (s)ζ(s) = 1
(1.2)
Fonction nombre de diviseurs τ
P
On définit τ (n) = d|n 1, ie τ (n) est le cardinal de l’ensemble des diviseurs de n.
Dτ (s) =
X
τ (n)n−s =
n≥0
YX
YX
τ (pk )p−ks =
p∈P k≥0
(1 + k)p−ks
p∈P k≥0
car pk possède k + 1 diviseurs : 1, p, ..., pk−1 , pk .
Dτ (s) =
YX
(k)(p−s )k−1 =
p∈P k≥1
Y
p∈P
1
= ζ 2 (s)
(1 − p−s )2
donc si σ > 1,
Dτ (s) = ζ 2 (s)
Fonction d’Euler φ
φ(n) ≤ n donc Dφ converge si σ > 2 et la formule n =
convolution : Id = φ ∗ 1. Et donc DId = Dφ · ζ.
P
Or DId (s) = n≥1 n−s+1 = ζ(s − 1). Donc, si σ > 2 :
Dφ (s) =
1.4
1.4.1
P
d|n φ(n)
peut s’interpréter comme une
ζ(s − 1)
ζ(s)
La fonction de Von Mangoldt, Λ
Dérivation d’une série de Dirichlet
On suppose que Df (s) converge absolument pour σ ≥ σ0 . Alors on peut dériver terme à terme et
on a :
Df0 (s) =
X
(−log(n))f (n)n−s
n≥1
(Df )
0
= D−f log
Démonstration
|−log(n)f (n)n−s | ≤ log(n)|f (n)|n−σ0 , série convergente : on peut donc dériver terme à terme.
1.4.2
Dérivée logarithmique et fonction de Von Mangoldt
Si f est à croissance modérée et telle que f (1) 6= 0, sur la zone de convergence absolue on peut
définir (Df )0 et Df ∗ −1 . On définit alors la dérivée logarithmique d’une série de Dirichlet comme un
produit de convolution :
14
−
(Df )0 (s)
= −(Df )0 (s)Df ∗ −1 (s)
Df (s)
Définition 1.4.1 (Fonction de Von Mangoldt) La fonction de Von Mangoldt, Λ est définie par
rapport à la dérivée logarithmique de la fonction ζ, qui peut être considérée comme une série de
Dirichlet :
−
X
ζ 0 (s)
Λ(n)n−s
= DΛ (s) =
ζ(s)
n≥1
0
(s)
D’après (1.2), la formule − ζζ(s)
= DΛ (s) est équivalente à
−ζ 0 (s)Dµ (s) = DΛ (s)
Λ se présente donc comme le produit de convolution de log(n), fonction arithmétique correspondant
à l’opposé de ζ 0 et de µ. Λ = log ∗ µ = µ ∗ log d’où
X
n
µ(d)log( ) =
µ(d)(log(n) − log(d))
d
d|n
d|n


X
X
= log(n) 
µ(d) −
µ(d)log(d)
Λ(n) =
X
d|n
Or
P
d|n µ(d)
d|n
= 0 si n ≥ 1 donc
Λ(n) = −
X
µ(d)log(d)
d|n
α2
Λ(pα1
1 p2 ) = −(µ(p1 )log(p1 )+µ(p2 )log(p2 )+µ(p1 p2 )log(p1 p2 )) car on supprime les diviseurs contenant un nombre premier à une puissance supérieure à 1 (µ est nul pour de tels nombres). Alors
α2
Λ(pα1
1 p2 ) = −(log(p1 ) + log(p2 ) − log(p1 p2 )) = 0. De manière générale, si n possède au moins deux
facteurs premiers distincts, on voit que Λ(n) = 0.
A l’aide de la formule du produit Eulérien, calculons maintenant Λ(pk ).
−
ζ 0 (s)
ζ(s)
=
YX
log(pk )p−ks
p∈P k≥0
=
Y
Y
(1 − p−s )
p∈P
log(p)p−s
p∈P
X
kp−ks
k≥0
Y
(1 − p−s )
p∈P
Y log(p)p−s
=
1 − p−s
p∈P
YX
=
log(p)p−ks
p∈P k≥1
Donc Λ(pk ) = log(p) par identification avec la formule du produit.
15
Finalement :
Λ(n) =
log(p) si n = pk avec k ≥ 1
0
sinon
La fonction de Von Mangoldt est particulièrement importante car la fonction sommatoire associée,
que nous étudierons dans la partie suivante joue un rôle important en théorie analytique. Nous verrons
notamment que pour démontrer le théorème des nombres premiers, il suffit d’étudier le comportement
asymptotique de cette fonction sommatoire.
16
Deuxième partie
Caractères de groupes abéliens finis et
fonctions L
17
2.1
2.1.1
Théorie des caractères
Caractère d’un groupe abélien fini
Définition 2.1.1 Soit G un groupe abélien fini de cardinal n.
Un caractère de G est un morphisme χ : G −→ C∗ de G dans le groupe multiplicatif C∗ .
Propriétés
– Comme G est de cardinal n, pour tout x, xn = e d’où χ(x)n = 1 : χ(x) est donc une racine de
l’unité, d’où |χ(x)| = 1
– Pour un groupe cyclique, un caractère est déterminé de manière unique par l’image d’une
générateur s (qui est forcément une racine n-ième). Les caractères sont alors les χω : sa 7−→ ω a
où ω ∈ Wn , ensemble des racines n-ièmes de l’unité
– L’ensemble des caractères forme un groupe pour la multiplication des applications, appelé
groupe dual et noté Ĝ. L’élément neutre est le caractère trivial χ0 tel que ∀x ∈ G, χ0 (x) = 1
(il sera parfois aussi noté 1) et l’inverse d’un caractère χ est le caractère conjugué χ̄ tel que
χ̄(x) = χ(x). En effet,
χ(x)χ̄(x) = χ(x)χ(x) = |χ(x)|2 = 1
Proposition 2.1.1 (Prolongement d’un caractère d’un sous-groupe) H un sous-groupe de G
Tout caractère de H peut-être prolongé en un caractère de G.
Démonstration
La démonstration se fait par récurrence sur [G : H], indice de H dans G.
– Si [G : H] = 1, G = H et le « prolongement » est évident
– Supposons la proposition vraie pour un indice ≤ k.
Soit H d’indice (k + 1) et χ un caractère de H.
Soit x ∈
/ H. G/H est fini donc il existe r tel que xr = 1 dans G/H ie xr ∈ H : on prend r le
plus petit entier vérifiant cette condition (r > 1) et on se donne ω ∈ C tel que χ(xr ) = ω r .
Soit H 0 le sous-groupe de G engendré par H et x. Tout élément h0 de H 0 s’écrit h0 = hxa , h ∈ H
et a ∈ Z . On définit un caractère sur H 0 par
χ0 (h0 ) = χ(h)ω a
H ( H 0 d’où [G : H 0 ] < [G : H]. On peut alors par hypothèse de récurrence prolonger χ0 en un
caractère χG de G.
χG coı̈ncide avec χ sur H donc on a bien prolongé χ en un caractère de G.
– La proposition est donc vraie quel que soit l’indice de H dans G
2.1.2
Relations d’orthogonalité
Les deux relations données par la proposition suivantes sont appelées relations d’orthogonalité sur
les caractères.
18
Proposition 2.1.2
X
Card(G) si χ = 1
0
si χ 6= 1
Card(Ĝ) si x = 1
0
si x 6= 1
χ(x) =
x∈G
X
χ(x) =
χ∈Ĝ
Démonstration
Montrons d’abord la première relation
• Si χ = 1, la formule est évidente
• Si χ 6= 1, il existe x1 tel que χ(x1 ) 6= 1
χ(x1 )
X
X
χ(x) =
x∈G
χ(x1 x) =
x∈G
X
χ(x)
x∈G
car l’aplication x 7−→ x1 x est bijective
(χ(x1 ) − 1)
X
χ(x) = 0
x∈G
X
χ(x) = 0
x∈G
Montrons la seconde relation
• Si x = 1 la formule est évidente
• Si x 6= 1, il existe un caractère χ1 tel que χ1 (x) 6= 1
En effet, H =< x >6= {1} est un sous-groupe de G d’ordre k > 1. Posons χ(x) = ω où ω est une
racine k-ième de 1 différente de 1. On définit ainsi un caractère χ sur le groupe cyclique H, que l’on peut
d’après la proposition 2.1.1 prolonger à un caractère χ1 sur G qui vérifie alors χ1 (x) = χ(x) = ω 6= 1.
χ1 (x)
X
χ∈Ĝ
X
χ(x) =
χ1 χ(x) =
χ∈Ĝ
X
χ(x)
χ∈Ĝ
On a alors
(χ1 (x) − 1)
X
χ(x) = 0
χ∈Ĝ
X
χ(x) = 0
χ∈Ĝ
Ces formules sont appelées « relations d’orthogonalité » car elles sont liées à un produit scalaire.
Soit V = {f : G −→ C}. C’est un C − ev de dimension Card(G) = n (une base est celle des
applications fi définies par fi (xj ) = δi,j où xj est un élément de G et 1 ≤ i ≤ n).
19
On munit V du produit scalaire :
hf |gi =
1 X
f (x)g(x)
|G|
x∈G
Proposition 2.1.3 Les caractères forment une base orthonormée de V pour le produit scalaire cidessus.
Démonstration
hχ|χ0 i =
1 X
1 X
χ(x)χ̄0 (x) =
(χχ̄0 )(x)
|G|
|G|
x∈G
x∈G
D’après la première relation d’orthogonalité,
P
Si χχ̄0 = 1 (ie χ = χ0 ) alors x∈G (χχ̄0 )(x) = |G|
P
Si χχ̄0 6= 1 (ie χ 6= χ0 ) alors x∈G (χχ̄0 )(x) = 0
Donc
hχ|χ0 i = δχ,χ0
Montrons maintenant que cette famille libre orthogonale est aussi génératrice, en montrant que
{χ ∈ Ĝ}⊥ = {0}.
Soit f : G −→ C telle que pour tout χ ∈ Ĝ, hf | χi = 0 et soit y ∈ G
X
χ(y)hf |χi = 0
χ∈Ĝ
X
1 X
χ(y)
f (x)χ̄(x) = 0
|G|
χ∈Ĝ
x∈G
X
1 X
f (x)
χ(y)χ̄(x) = 0
|G|
x∈G
χ∈Ĝ
Or χ̄(x) = χ−1 (x) = χ(x−1 ) donc l’égalité devient :
X
1 X
f (x)
χ(yx−1 ) = 0
|G|
x∈G
Et
−1
χ∈Ĝ χ(yx )
P
χ∈Ĝ
= 0 sauf si yx−1 = 1 ie x = y, donc
1
f (y) × |G| = f (y) = 0
|G|
f (y) = 0 pour tout y donc f = 0
20
Corollaires
Comme V est de dimension n = Card(G) et que les caractères forment une base, on déduit que
Card(G) = Card(Ĝ)
On a aussi la formule de décomposition suivant les caractères. Pour tout f : G −→ C on a la
relation :
f (x) =
X
< f |χ > χ(x)
χ∈Ĝ
2.1.3
Caractères de Dirichlet
Définition 2.1.2 Soit q un entier ≥ 1
χ, caractère de (Z/qZ)× - groupe multiplicatif des éléments inversibles de l’anneau Z/qZ - est
appelé caractère modulo q.
On le prolonge sur Z en son caractère de Dirichlet associé (modulo q) de la manière suivante :
χ(n) =
0
si (n, q) 6= 1
χ(n̄) si (n, q) = 1
n̄ désigne la classe de n dans (Z/qZ)
Les caractères de Dirichlet modulo q forment un groupe fini d’ordre φ(q) (car Card((Z/qZ)× ) =
φ(q), où φ désigne l’indicatrice d’Euler).
Le caractère trivial modulo q est noté q est défini par q (n) = 1 si (n, q) = 1 et q (n) = 0
sinon. Le caractère trivial modulo q sera parfois abusivement noté 1.
On peut parler aussi de parité d’un caractère de Dirichlet. En effet, on a (χ(−1))2 = 1 donc
χ(−1) = ±1. Un caractère est dit
– pair si χ(−1) = 1
– impair si χ(−1) = −1
On vérifie que pour tout n, n0 appartenant à Z on a les propriétés :
χ(nn0 ) = χ(n)χ(n0 )
χ(n + kq) = χ(n)
Les caractères de Dirichlet sont donc des fonctions arithmétiques totalement multiplicatives. On a
par ailleurs la relation suivante, qui est la traduction de la formule d’orthogonalité pour les caractères :
1
φ(q)
X
χ(a)χ̄(n) =
χ mod q
1 si (a, q) = 1 et a ≡ n[q]
0 sinon
En effet,
X
χ mod q
χ(a)χ̄(n) =
X
χ̄(na−1 ) = φ(q) ssi na−1 ≡ 1[q]
χ mod q
21
(2.1)
Cette formule est très utile car elle permet de « détecter » la condition a ≡ n[q] : par exemple si
π(x; q, a) est le nombre de nombres premiers congrus à a modulo q inférieurs à x on pourra s’écrire
π(x; q, a) =
X 1
φ(q)
p≤x
X
χ(a)χ̄(p)
χ mod q
C’est pour cela qu’on étudie ici les caractères : ils vont intervenir dans les séries où on ne va
considérer que certaines nombres congrus à a modulo q.
2.1.4
Caractère primitif
χ un caractère de Dirichlet modulo q.
A partir de χ on peut construire un caractère χ1 modulo dq, d ≥ 2 de la façon suivante :
χ1 (n) =
0
si (n, dq) 6= 1
χ(n) si (n, dq) = 1 (⇒ (n, q) = 1)
χ1 est dit induit par χ
Définition 2.1.3 (Caractère primitif ) Un caractère de Dirichlet χ mod m est dit primitif s’il
n’est induit par aucun caractère mod m0 , où m0 est un diviseur propre de m.
Un caractère induit χ1 est égal au caracère primitif χ qui l’induit sauf aux points n tels que
(n, q) = 1 et (n, dq) 6= 1, où χ1 (x) = 0 mais χ(x) 6= 0
L’étude des caractères primitifs est très importante car tout caractère χ modulo q est induit par
un unique caractère primitif χ∗ (modulo q ∗ |q). On dit que q ∗ est le conducteur de χ (et du caractère
primitif χ∗ ).
2.2
Fonctions L de Dirichlet
Définition 2.2.1 Soit q ≥ 1, χ un caractère de Dirichlet modulo q. La fonction L de χ est la somme
de la série de Dirichlet associée à la fonction arithmétique χ :
L(χ, s) = Dχ (s) =
X
χ(n)n−s
n≥1
La série convergent uniformément sur tout compact de σ > 1, L est holomorphe sur σ > 1. De
plus on peut appliquer la formule du produit Eulérien (1.1), puisque χ et multiplicative. On va même
utiliser le fait qu’elle est totalement multiplicative.
Pour σ > 1
X
χ(n)n−s =
n≥1
YX
(χ(pk ))p−ks
p∈P k≥0
=
YX
(χ(p)p−s )k
p∈P k≥0
=
Y
p∈P
22
1
1 − χ(p)p−s
On a donc la formule
L(χ, s) =
Y
p∈P
1
1 − χ(p)p−s
(2.2)
pour σ > 1
Fonctions L et caractères primitifs
Proposition 2.2.1 Soit χ un caractère de Dirichlet modulo q induit par le caractère primitif χ∗
modulo q ∗ . On a
L(χ, s) = L(χ∗ , s)
Y
1 − χ∗ (p)p−s
(2.3)
p| qq∗
Démonstration
Soit s tel que σ > 1. On a d’après (2.2)
L(χ, s) =
Y
p∈P
1
1 − χ(p)p−s
Or χ(p) 6= χ∗ (p) ssi (p, q ∗ ) = 1 et (p, q) 6= 1 càd ssi p| qq∗ et (p, q ∗ ) = 1. Lorsque cette condition est
réalisée, χ(p) = 0 mais χ∗ (p) 6= 0. Ainsi,
L(χ, s) =
Y
p∈P
Y
1
1 − χ∗ (p)p−s
∗
−s
1 − χ (p)p
q
p| q∗
Et en réappliquant la formule (2.2),
L(χ, s) = L(χ∗ , s)
Y
1 − χ∗ (p)p−s
p| qq∗
Cette formule est a priori valable pour σ > 1, zone où on a pour l’instant défini les fonctions L,
mais les éventuels prolongements analytiques des fonctions L seront aussi égaux.
On peut appliquer le même raisonnement au caractère trivial :
Proposition 2.2.2 Soit q le caractère trivial modulo q
L(q , s) = ζ(s)
Y
1 − p−s
p|q
En effet, le caractère trivial modulo q est induit par le caractère trivial modulo 1, qui vaut 1 pour
tout n et dont la fonction L associée est la fonction ζ.
23
Ces deux propositions montrent qu’on peut restreindre notre l’étude à celle des fonctions L associées
à des caractères primitifs. En particulier, pour avoir des informations sur les fonctions L des caractères
triviaux, il suffit d’étudier la fonction ζ.
2.3
Dérivée logarithmique des fonctions L
Comme dans la partie 1.3 où on faisait le lien entre ζ et d’autres séries de Dirichlet, on va ici chercher
un lien entre les fonctions L et des séries de Dirichlet de fonctions arithmétiques bien connues.
Fonction nombre de diviseurs τ
Pour σ > 1 :
(L(χ, s))2 =
Y
(1 − χ(p)p−s )−2 =
p∈P
=
=
Y
∞
YX
k(χ(p))k−1 p−s(k−1)
p∈P k=1
∞
X
p∈P k=0
∞
YX
∞
YX
(k + 1)(χ(p))k p−s(k) =
τ (pk )(χ(p))k p−s(k)
p∈P k=0
(τ χ)(pk )p−s(k) =
X
τ (n)χ(n)n−s
n≥1
p∈P k=0
Ainsi,
(L(χ, s))2 =
X
τ (n)χ(n)n−s
n≥1
Fonction De Möbius µ
Pour σ > 1 :
Y
1
=
(1 − χ(p))
L(χ, s)
p∈P
X
µ(n)χ(n)n−s =
n≥1
YX
µ(pk )χ(p)k p−sk =
p∈P k≥0
Y
p∈P
car µ(pk ) = 0 si k ≥ 2 et µ(1) = 1, µ(p) = −1. On a donc
X
1
=
µ(n)χ(n)n−s
L(χ, s)
n≥1
Dérivée logarithmique et fonction de Von Mangoldt Λ
On a d’abord pour σ > 1,
L0 (χ, s) =
X
(−log(n))χ(n)n−s
n≥1
24
(1 − χ(p)p−s )
−
L0 (χ, s)
L(χ, s)
1
= −L0 (χ, s) ×
L(χ, s)


X
log(n)χ(n)n−s  × µ(n)χ(n)n−s
= 
n≥1


n n
X

 n−s
log(d)χ(d)µ
=
χ
d
d
n≥1
d|n


X X n

µ
=
log(d) χ(n)n−s
d
n≥1
d|n
X
Λ(n)χ(n)n−s
=
X
n≥1
On a effectué le produit de convolution des deux séries de Dirichlet −L0 (χ, s) et
P
rappelé que Λ(n) = d|n µ nd log(d). On a donc montré que :
−
L0 (χ, s) X
=
Λ(n)χ(n)n−s
L(χ, s)
n≥1
pour σ > 1
25
1
L(χ,s)
puis on s’est
(2.4)
Troisième partie
Fonctions sommatoires
26
3.1
Fonctions sommatoires et fonctions sommatoires lissées
Définition 3.1.1 (Fonction sommatoire) Soit f une fonction arithmétique. La fonctions sommatoire de f est la fonction Mf définie pour x ≥ 1 par
X
Mf (x) =
f (n)
1≤n≤x
C’est le comportement asymptotique de certaines fonctions sommatoires que nous étudierons par
la suite. Comme on le verra, les propriétés de Mf (x) sont étroitement liées à celles de Df (s), la série
de Dirichlet associée.
Pour certaines séries de Dirichlet, on peut grâce à une transformation d’Abel, technique intervenant
souvent en théorie analytique, exprimer Df (s) en fonction de Mf (x) :
Proposition 3.1.1 Soit f une fonction arithmétique vérifiant f (n) = O (nα ) (α ≥ 0). On a alors
X
Mf (x) =
f (n) = O x1+α
1≤n≤x
Et la formule suivante :
Df (s) =
X
f (n)n−s = s
∞
Z
Mf (x)x−s−1 dx
1
n≥1
pour σ > α + 1
Démonstration
Mf (s) ≤ K
X
nα ≤ K
1≤n≤x
X
xα ≤ Kx1+α
1≤n≤x
ce qui justifie la première assertion. Pour la deuxième formule, on effectue une transformation
d’Abel en posant f (n) = Mf (n) − Mf (n − 1). On ne détaille pas ici, mais il y aura plus loin d’autres
exemples d’utilisation de cette même technique.
Par la suite on verra une formule intégrale qui permettra d’exprimer une fonction sommatoire
en fonction de la série de Dirichlet associée. Pour des raisons de régularité, il est parfois plus simple
d’évaluer le comportement asymptotique de fonctions sommatoires lissées.
Définition 3.1.2 (Fonction sommatoire lissée) Soit f une fonction arithmétique. On appelle fonction sommatoire lissée associée à f et à la fonction de Schwartz φ la série suivante :
Mf (φ) =
X
n≥1
27
f (n)φ(n)
On rappelle la définition d’une fonction de Schwartz :
Définition 3.1.3 (Fonction de Schwartz) Une fonction de Schwarz φ : R → C est une fonction
de classe C ∞ telle que
∀(n, m) ∈ N2 |xn f (m) (x)|
−→
0
|x|→∞
f est donc une fonction à décroissance plus rapide que tout polynôme à l’infini
Parmi les fonctions de Schwartz on retrouve bien sûr les fonctions à support compact. On va
maintenant présicer la notion de majorant lisse d’une fonction caractéristique, qui est une catégorie
de fonctions à support compact.
Définition 3.1.4 (Majorant lisse) Soit y > 0. Un majorant lisse de la fonction caractéristique de
[0; y], d’amplitude ∆ > 1 est une fonction φ : [0; +∞[→ R qui est C ∞ , à support compact dans [0; ∆y]
et telle que
0≤
≤1
φ
φ(x) = 1 si x ≤ y
3.2
3.2.1
Exemples importants
Fonctions π et ψ
On peut citer en exemple les fonctions sommatoires qui comptent le nombre de nombres premiers :
X
π(x) =
1
p≤x
X
π(x; q, a) =
1
p≤x
p≡a[q]
Mais ce sont les fonctions ψ que nous utiliserons par la suite pour démontrer les théorèmes des
nombres premiers. Il s’agit des fonctions sommatoires associées à la fonction de Von Mangoldt définie
précédemment.
On a d’abord la fonction sommatoire de Λ :
ψ(x) =
X
Λ(n)
n≤x
On peut donner une application de la proposition 3.1.1 avec f (n) = Λ(n) ≤ log(n) = O (nα ) pour
tout α > 0. On obtient, pour σ > 1 :
ζ 0 (s)
−
=s
ζ(s)
Z
1
28
∞
ψ(x)
dx
xs+1
(3.1)
Pour s’intéresser à la répartition des nombres premiers congrus à a modulo q (a et q évidemment
premiers entre eux) on définit la fonction :
X
ψ(x; q, a) =
Λ(n)
n≤x
n≡a[q]
La fonction ψ(x; q, a) est liée aux caractères de Dirichlet modulo q. En effet, on peut utiliser la
formule (2.1) pour introduire la condition p ≡ a mod q :
ψ(x; q, a) =
X
Λ(n)g(n)
n≤x
où g(n) = 1 si la condition de congruence est remplie et 0 sinon. La formule (2.1) nous fournit un
candidat pour la fonction g(n) :

ψ(x; q, a) =
X
n≤x

1
Λ(n) 
φ(q)
X
χ̄(a)χ(n)
χ mod q
Et en intervertissant les deux sommes :

ψ(x; q, a) =
3.2.2
1
φ(q)
X
χ̄(a) 

X
Λ(n)χ(n)
(3.2)
n≤x
χ mod q
Théorèmes des nombres premiers et fonctions ψ
Nous allons maintenant voir en quoi ces deux fonctions jouent un rôle essentiel dans la démonstration
des théorèmes des nombres premiers, en montrant les propositions suivantes :
Proposition 3.2.1 Le théorème des nombres premiers, c’est-à-dire
x
ln(x)
π(x) ∼
lorsque x → ∞ est équivalent à
ψ(x) ∼ x
lorsque x → ∞
Proposition 3.2.2 Le théorème des nombres premiers en progression arithmétique, c’est-à-dire
π(x; q, a) ∼
1
x
φ(q) ln(x)
lorsque x → ∞ est équivalent à
ψ(x; q, a) ∼
lorsque x → ∞
29
x
φ(q)
On peut noter que la proposition 2 implique la proposition 1 (prendre q = 2 et a = 1), nous allons
donc démontrer cette dernière proposition uniquement.
Démonstration
1
x
φ(q) log(x)
• Montrons que π(x; q, a) ∼
implique ψ(x; q, a) ∼
x
φ(q)
Comme Λ(n) = log(p) si n est une puissance du nombre premier p et 0 sinon, on a :
ψ(x; q, a) =
X
log(p) +
p≤x
p≡a[q]
X
log(p) = θ(x; q, a) + R(x; q, a)
pk ≤x
k≥2
pk ≡a[q]
Comme pk ≤ x et k ≥ 2, on a 2 ≤ k ≤
log(x)
log(p) ,
log(x)
log(2) .
d’où 2 ≤ k ≤
X
R(x; q, a) ≤
log(p)
√
p≤ x
log(x)
2≤k≤ log(2)
√
On a donc R(x; q, a) ≤
x(logx)2
log(2)
√
soit R(x; q, a) = O( x(logx)2 ).
Notons N = E(x), et effectuons une transformation d’Abel dans le premier terme θ(x; q, a) :
θ(x; q, a) =
X
log(n)(π(n; q, a) − π(n − 1; q, a))
1≤n≤N
=
log(N )π(N ; q, a) +
X
π(n; q, a)(log(n) − log(n + 1))
1≤n≤N −1
θ(x; q, a) = log(N )π(N ; q, a) −
X
Z
n
1≤n≤N −1
= log(N )π(N ; q, a) −
X
n+1
π(n; q, a)
Z
n+1
1≤n≤N −1 n
1
dt
t
π(t; q, a)
dt
t
Ainsi :
N
Z
θ(x; q, a) = log(N )π(N ; q, a) −
1
π(t; q, a)
dt
t
(3.3)
π(t; q, a)
dt
t
(3.4)
On a de plus :
Z
x
0 = π(x; q, a)(log(x) − log(N )) −
N
En effectuant (3.3)+(3.4) on obtient pour tout x :
Z
θ(x; q, a) = log(x)π(x; q, a) −
1
On a donc :
30
x
π(t; q, a)
dt
t
π(x; q, a)log(x)φ(q) φ(q)
=
+
x
x
ψ(x; q, a)
x
φ(q)
Comme π(x; q, a) ∼
π(x;q,a)log(x)φ(q)
1
x
x
φ(q) log(x) ,
√
Comme R(x; q, a) = O( x(logx)2 ),
Montrons qu’on a aussi
φ(q)
x
Rx
Pour cela, montrons d’abord que
x
1
π(t; q, a)
R(x; q, a)φ(q)
dt +
t
x
→ 1 lorsque x → ∞.
R(x;q,a)φ(q)
x
π(t;q,a)
dt
t
1
Z
→ 0 lorsque x → ∞.
→ 0 lorsque x → ∞.
Rx
1
2 log(t) dt
∼
x
logx
:
En faisant une intégration par parties :
Z
x Z x
Z x
dt
dt
1
t
x
2
dt =
+
=
−
+
2
2
log(t)
log(t) 2
log(x) log(2)
2 (log(t))
2 (log(t))
x
2
Mais
1
(log(t))2
Rx
1
= o( log(t)
) et les intégrales divergent donc
dt
2 (log(t))2
Rx
= o( 2
dt
log(t) ).
D’où finalement l’équivalence voulue. On a par ailleurs
Z
1
x
π(t; q, a)
dt ∼
t
Z
2
x
π(t; q, a)
dt ∼
t
x
Z
2
t
dt
φ(q)log(t)t
car les intégrales divergent. Donc :
φ(q)
x
x
Z
1
π(t; q, a)
φ(q) 1
dt ∼
t
x φ(q)
Z
2
x
1
dt
log(t)
Ainsi :
φ(q)
x
Et finalement
ψ(x;q,a)
x
φ(q)
x
Z
1
π(t; q, a)
1 x
dt ∼
→0
t
x log(x)
→ 1, soit ψ(x; q, a) ∼
• Montrons que ψ(x; q, a) ∼
π(x; q, a) =
x
φ(q)
X
p≤x
p≡a[q]
x
φ(q) .
implique π(x; q, a) ∼
1=
1
x
φ(q) log(x)
X log(p)
X Λ(n)
X log(p)
=
−
log(p)
log(n)
log(pk )
k
p≤x
p≡a[q]
2≤n≤x
√
Le deuxième terme de cette somme, R(x; q, a) ≤
xlog 2 (x)
2log(2)
p ≤x
k≥2
pk ≡a[q]
√
donc R(x; q, a) = O( xlog 2 (x)).
On effectue une transformation d’Abel pour le premier terme, appelé θ(x; q, a), en écrivant Λ(n) =
ψ(n) − ψ(n − 1) et on obtient finalement :
31
ψ(x; q, a)
θ(x; q, a) =
+
log(x)
Z
x
ψ(t; q, a)
dt
t(log(t))2
Z
x
2
Ainsi :
π(x; q, a) log(x)φ(q)
ψ(x; q, a)φ(q) φ(q) log(x)
=
+
x
x
x
Comme ψ(x; q, a) ∼
ψ(x;q,a)φ(q)
x
x
φ(q) ,
2
ψ(t; q, a)
R(x; q, a)log(x)φ(q)
dt +
2
t(log(t))
x
→ 1.
√
Comme R(x; q, a) = O( x log2 (x)),
R(x;q,a) log(x)φ(q)
x
→ 0.
Et on a également :
φ(q)log(x)
x
x
Z
2
ψ(t; q, a)
log(x)
dt ∼
2
t(log(t))
x
Z
2
Et comme précédement, on montre en intégrant par parties
Z
x
2
x
1
dt
(log(t))2
Rx
1
2 (log(t))2 dt
que
1
x
dt ∼
2
(log(t))
(log(x))2
D’où finalement
φ(q)log(x)
x
Et
π(x;q,a)log(x)φ(q)
x
Z
2
→ 1, soit π(x; q, a) ∼
x
ψ(t; q, a)
1
dt ∼
→0
2
t(log(t))
log(x)
1
x
φ(q) log(x) .
Dans la suite on va chercher à évaluer ces fonctions sommatoires, à l’aide d’une formule intégrale
faisant intervenir des transformées de Mellin : pour montrer la formule d’inversion de Mellin qui va
nous servir, il faut d’abord faire quelques rappels concernant la transformation de Fourrier et plus
particulièrement l’inversion de Fourier.
32
3.3
3.3.1
Transformée de Fourier
Définition
Définition 3.3.1 Soit f ∈ L1C (R) On définit la transformée de Fourier de la fonction f :
T f (s) = f˜(s) =
Z
e−2iπsx f (x)dx
R
On définit aussi la transformée de Fourier conjuguée de f :
Z
e−2iπsx f (x)dx
T̄ f (s) =
R
3.3.2
Exemple important
2
Nous allons étudier la transformée de Fourier des foction fa (x) = e−ax où a > 0.
Proposition 3.3.1 La transformée de Fourier de la fonction fa est la fonction
f˜a (x) =
r
π − π 2 x2
e a
a
Démonstration
Soit s réel. f˜a (s) =
sous l’intégrale :
−ax2 e−2iπsx dx
Re
R
On peut dériver la transformée de Fourier par rapport à s
Z
Z
iπ
2
0
−ax2 −2iπsx
˜
fa (s) = −2iπ xe
e
dx =
(−2ax)e−ax e−2iπsx dx
a R
R
Z
iπ
2π 2 s ˜
2
= −
e−ax (−2iπs)e−2iπsx dx = −
fa (s)
a R
a
f˜a est donc solution de l’équation différentielle y 0 +
2 2
s
π
Il existe donc A telle que f˜a (s) = Ae− a
2π 2 s
a y
= 0.
. Et
A = f˜a (0) =
Z
e
−ax2
r
dx =
R
f˜a (x) =
r
π
a
π − π 2 x2
e a
a
2
Corollaire 3.3.1 L’application x 7−→ e−πx est invariante par transformation de Fourier
Cette application correspond en effet à fa avec a = π
33
3.3.3
Formule d’inversion de Fourier
Théorème 3.3.1 Si f et f˜ ∈ L1 (R) alors T̄ f˜(t) = f (t). C’est-à-dire :
Z
f (s) =
e2iπsx f˜(x)dx
R
3.3.4
Formule de Poisson
Proposition 3.3.2 (Formule de sommation de Poisson) Soit f : R −→ C une fonction de Schwartz.
Soit f˜ sa transformée de Fourier.
Pour tout x ∈ R on a :
X
f (x + n) =
n∈Z
X
f˜(h)e2iπ(hx)
h∈Z
En particulier, pour x = 0 :
X
f (n) =
n∈Z
3.3.5
X
f˜(h)
(3.5)
h∈Z
Etude des fonctions θ
Nous allons ici appliquer les formules précédentes (inversion de Fourier, formule de sommation de
Poisson) pour étudier certaines fonctions qui nous servirons plus tard, notamment pour le prolongement des fonctions L.
Fonction θ
Soit θ la fonction définie pour y > 0 par
θ(y) =
X
2y
e−πn
n∈Z
Proposition 3.3.3 On a pour tout y > 0
1
θ(y) = √ θ
y
1
y
(3.6)
Démonstration
2
Appliquons la formule (3.5) à f (x) = e−πx y dont la transformée de Fourier est f˜(x) =
(c’est une fonction de type fa avec a = πy). On a :
θ(y) =
X
n∈Z
e
−πn2 y
1 X − πny 2
1
1
=√
=√ θ
e
y
y
y
n∈Z
34
− πx
y
√1 e
y
2
Fonction θ(y; q, a)
On introduit dans cette fonction θ la condition de congruence modulo q.
X
θ(y; q, a) =
2y
e−πn
n∈Z
n≡a[q]
Proposition 3.3.4 Pour tout y > 0 on a :
1
θ(y; q, a) = √
q y
X
e
2iπax
q
θ
x mod q
1
; q, x
q2y
(3.7)
Démonstration
θ(y; q, a) =
X
2y
e−π(a+mq)
m∈Z
2
Calculons la transformée de Fourier de f (x) = e−π(a+xq) y .
f˜(x) =
=
Z
1 2iπax
2
2
−2iπu( xq )
e−πu y e
e−π(a+uq) y e−2iπux du = e q
du
q
R
R
1 2iπax − π2 x2
s
1 2iπax
˜
q
e
= √ e q e yq2
fπy
q
q
q y
Z
En appliquant la formule de Poisson on trouve alors :
X
−π(a+mq)2 y
e
m∈Z
2
1 X 2iπam
− π 2 m2
q
yq
= √
e
e
q y
m∈Z
2iπam
e q ne dépend que de la classe de m modulo q : on peut donc transformer cette somme en une
somme sur les éléments x de (Z/qZ) :
1
θ(y; q, a) = √
q y
X
e
2iπax
q
θ
x mod q
1
; q, x
q2y
Fonction θ(χ, y)
Soit q ≥ 1 et χ un caractère de Dirichlet modulo q. On définit la fonction
θ(χ, y) =
X
2y
χ(n)e−πn
n∈Z
On peut transformer cette somme selon la parité du caractère χ
– Si χ est pair,
θ(χ, y) = 2
X
n∈N∗
35
2y
χ(n)e−πn
(3.8)
– Si χ est impair, θ(χ, y) = 0
Proposition 3.3.5 Si χ est primitif on a pour y > 0 :
τ (χ)
1
θ(χ, y) = √ θ χ̄, 2
q y
q y
(3.9)
avec τ (χ) la somme de Gauss de χ définie par :
X
τ (χ) =
χ(x)e
2iπx
q
x mod q
Démonstration
On commence par scinder la somme suivant les classes modulo q :
X
θ(χ, y) =
χ(a)θ(y; q, a)
a mod q
On utilise alors la formule (3.7) pour chaque terme :
θ(χ, y) =
=
=
=
=
=
1
√
q y
X
X
χ(a)
a mod q
e
2iπax
q
θ
x mod q
1
; q, x
q2y
X
2iπax
1
θ
; q, x
χ(a)e q
2
q y
q y
x mod q
a mod q
X
X
2iπax
1
1
θ
; q, x χ̄(x)
χ(ax)e q
√
2
q y
q y
a mod q
x mod q
X
1
1
θ
; q, x χ̄(x)τ (χ)
√
q y
q2y
x mod q
τ (χ) X
1
χ̄(x)θ
; q, x
√
q y
q2y
x mod q
τ (χ)
1
√ θ χ̄, 2
q y
q y
1
√
X
(∗)
(*) : si x est premier avec a l’application a 7−→ ax est bijective et on obtient τ (χ) par changement
de variable, en revanche si ce n’est pas le cas, on utilise le fait que χ est primitif pour montrer que
τ (χ) = 0, de la même manière qu’on le fera plus loin pour démontrer le lemme 5.2.1
3.4
3.4.1
Transformée de Mellin
Définition
Définition 3.4.1 Soit f une fonction de Schwartz. On définit la transformée de Mellin de f :
fˆ(s) =
Z
∞
f (x)xs−1 f x
0
36
1
En l’infini, on a f (x)xs−1 = o xn+1−s
pour tout n donc la fonction est intégrable. f est continue
en 0 et xs−1 est intégrable en 0 ssi σ > 0.
fˆ est donc définie pour σ > 0
Soit a ∈]0; 1[ et b ∈]1; +∞[. Si Ré(s) ∈]a; b[, f (x)xs−1 est holomorphe sur cette bande et on a :
– si x ∈]0; 1], |f (x)xs−1 | ≤ |f (x)|xa−1 , fonction intégrable sur ]0; 1]
– si x ∈ [1; +∞[, |f (x)xs−1 | ≤ |f (x)|xb−1 , fonction intégrable sur [1; +∞[
fˆ est donc holomorphe sur la bande a ≤ σ ≤ b pour tout a ∈]0; 1[ et b ∈]1; +∞[. Donc fˆ est
holomorphe sur σ > 0.
Proposition 3.4.1 Soit f : [0; +∞[−→ C une fonction de Schwartz et fˆ sa transformée de Mellin.
Dans toute bande verticale A ≤ σ ≤ B avec 0 < A < B, on a pour tout k ≤ 1 :
lim sk fˆ(s) = 0
|t|→∞
Démonstration
Cette proposition se démontre par intégrations par parties successives. Montrons-la par exemple
pour k = 1
fˆ(s) =
fˆ(s) =
Z ∞
1
f (x)xs ∞
−
f 0 (x)xs dx
f (x)x dx =
s
σ
+
it
0
0
0
Z ∞
1
1
00
s
f (x)x dx
σ + it σ + 1 + it 0
Z
∞
s−1
On a donc lim |sfˆ(s)| = 0
|t|→∞
En faisant k + 1 intégration par parties, on montre la proposition pour k > 1
3.4.2
Etude de l’exemple de Γ
La fonction Γ est définie par
Z
Γ(s) =
∞
e−x xs−1 dx
0
La fonction Γ va jouer un rôle important puisqu’elle intervient avec les fonction L dans une équation
fonctionnelle (voir partie 5). C’est en fait la transformée de Mellin de la fonction f (x) = e−x (qui est
bien une fonction de Schwartz). Elle est donc holomorphe sur σ > 0.
On montre grâce à une intégration par parties que pour tout s tel que σ > 0,
1
Γ(s) = Γ(s + 1) = g(s)
s
La fonction g est méromorphe sur σ > −1 avec un pôle simple en 0 (de résidu 1). Or g coı̈ncide
avec Γ sur σ > 0. On peut donc prolonger la fonction Γ de manière méromorphe sur σ > −1. En
37
itérant ce processus, on prolonge Γ en une fonction méromorphe sur C admettant des pôles simples
en les −k, k ∈ N.
On peut montrer la formule suivante où Γ intervient, appelée formule des compléments :
Γ(s)Γ(1 − s) =
π
sin(πs)
π
Supposons qu’il existe s0 tel que Γ(s0 ) = 0. Comme sin(πs
6= 0, 1 − s0 est nécessairement un pôle
0)
de Γ. Mais on a vu que les seuls pôles de Γ sont les −k, k ∈ N, donc s0 ∈ N∗ . Ceci est impossible car
Γ(n) = (n − 1)!. Cette formule nous permet donc de voir que Γ ne s’annule pas sur C.
Les formules suivantes détaillent le comportement asymptotique de Γ.
Formules de Stirling
Proposition 3.4.2 Soit σ réel, on a alors la formule de Stirling :
Γ(σ)
√
∼
2πσ
σ σ
(3.10)
e
σ→∞
Uniformément dans la région a ≤ σ ≤ b, |t| ≥ 1 on a la formule de Stirling généralisée :
1
2
σ− 12 −π|t|
|Γ(σ + it)| = (2π) |t|
e
1
1+O
t
(3.11)
(la constante du O dépend de a et b)
On a aussi, uniformément pour |arg(s)| ≤ π − la formule de Stirling dérivée :
Γ0
(s) = log|s| + O
Γ
1
s
(3.12)
(la constante du O dépend de )
Démonstration
Les formules (3.11) et (3.12) sont des conséquences du développement de Stirling (qui se démontre
par exemple à l’aide de la formule d’Euler - MacLaurin) :
p
X (−1)h−1 Bh 1
1
1
log(Γ(z)) = zlog(z) − z − log(z) + log(2π) +
+ 2kz iπ + O
2
2
2h(2h − 1) z 2h−1
h=1
1
z 2p
Notons qu’on peut définir le logarithme de Γ car on a vu que Γ ne s’annule pas. Ce développement
fait intervenir les nombres de Bernoulli Bh . Pour obtenir (3.11) il faut prendre l’exponentielle des deux
membres et pour (3.12), il faut dériver.
On ne démontrera pas ici la formule de Stirling.
38
3.4.3
Formule d’inversion de Mellin
Posons s = σ + it avec σ > 0 fixé
fˆ(s) =
∞
Z
f (x)eslog(x)
Z0 ∞
=
dx
x
f (x)eσlog(x) eitlog(x)
0
dx
x
On effectue le changement de variable
u = log(x)
dx
du =
x
fˆ(s) =
+∞
Z
f (eu )eσu eiut du
−∞
u = −2πx
du = −2πdx
fˆ(s) = 2π
Z
f (e−2πx )e−2πσx e−2iπtx dx
R
fˆ(σ + it) = f˜σ (t) se présente comme la transformée de Fourier de la fonction
gσ (x) = 2πf (e−2πx )e−2πσx
Utilisons la formule d’inversion de Fourier :
Z
gσ (t) =
e2iπtx fˆ(σ + ix)dx
R
On en déduit donc en remplaçant gσ par son expression :
f (e
−2πt
−2πσt
)e
=
f (u)uσ =
Z
1
e2iπtx fˆ(σ + ix)dx
2π R
Z
1
u−ix fˆ(σ + ix)dx
2π R
avec u = e−2πt
f (u) =
f (u) =
Z
1
u−(σ+ix) fˆ(σ + ix)idx
2iπ R
Z
1
fˆ(s)u−s ds
2iπ (σ)
39
La notation (σ) indique que l’on intègre dans la plan complexe sur le contour constitué de la droite
verticale de partie réelle σ.
On vient de démontrer la formule d’inversion de Mellin :
Proposition 3.4.3 (Formule d’inversion de Mellin) Soit f : [0; +∞[→ C une fonction de Schwartz
et fˆ sa transformée de Mellin. Soit σ quelconque tel que l’intégrale définissant la transformée de Mellin
converge pour Re(s) = σ. Alors
1
f (x) =
2iπ
3.5
3.5.1
Z
fˆ(s)x−s ds
(3.13)
(σ)
Formule intégrale évaluant une fonction sommatoire lissée
Formule intégrale
Proposition 3.5.1 Soit φ une fonction de Schwartz, f une fonction aithmétique à croissance modérée.
Soit c > 0 tel que la série de Dirichlet Df (s) converge absolument sur la droite Re(s) = c, avec c > 1.
Alors
Mf (φ) =
X
n≥1
1
f (n)φ(n) =
2iπ
Z
Df (s)φ̂(s)ds
(3.14)
(c)
Démonstration
D’après la formule (3.13) appliquée à la fonction de Schwartz φ au point n, on a :
Z
1
φ̂(s)n−s ds
Mf (φ) =
f (n)
2iπ (c)
n≥1
Z
1 X
Mf (φ) =
φ̂(s)f (n)n−s ds
2iπ
(c)
X
n≥1
On peut intervertir série et intégrale grâce à la convergence absolue de Df . En effet :
Z
Z
−c
−s φ̂(s)f (n)n ds ≤ |f (n)|n
|φ̂(s)|ds ≤ K|f (n)|n−c
(c)
(c)
D’après la convergence absolue de la série de Dirichlet de f , |f (n)|n−c est le terme général d’une
série convergente. Ainsi :
∞ Z
∞
X
X
φ̂(s)f (n)n−s ds ≤ K
|f (n)|n−c −→ 0
(c)
n=N
n=N
lorsque N → ∞
On a donc
40
Mf (φ) =
Mf (φ) =
1
2iπ
Z
1
2iπ
Z
φ̂(s)
(c)
X
f (n)n−s ds
n≥1
φ̂(s)Df (s)ds
(c)
P
Dans la suite, on utilisera des sommes du type n≥1 f (n)φ nx avec φ une fonction de Schwartz
(par exemple une majorant lisse). L’application g : u 7−→ φ ux est une fonction de Schwartz et on a
d’après la formule précédente :
Mg (φ) =
1
2iπ
Z
ĝ(s)Df (s)ds
(c)
avec
∞
Z
φ
ĝ(s) =
0
u
x
s−1
u
∞
Z
φ(v)(vx)s−1 xdv = xs φ̂(s)
du =
0
Finalement on a la formule :
X
n≥1
1
=
f (n)φ
x
2iπ
n
Z
Df (s)φ̂(s)xs ds
(3.15)
(c)
Si on prend pour fonction φ un majorant lisse
P de [0; 1], la somme ci-dessus devient une somme
finie, proche de la fonction sommatoire Mf (x) = n≤x f (n).
3.5.2
Application à des fonctions connues
Cas des fonctions L
D’après la proposition 3.2.2, pour démontrer le théorème des nombres premiers en progression
arithmétique il faut étudier le comportement asymptotique de la fonction ψ(x; q, a). D’après la formule
(3.2), celle-ci est liée à la fonction sommatoire
MΛχ (x) =
X
Λ(n)χ(n)
n≤x
On peut grâce à la formule (3.15) évaluer une fonction sommatoire lissée approchant cette dernière
fonction sommatoire :
X
Λ(n)χ(n)φ
n
n≥1
x
=
1
2iπ
Z
DΛχ (s)φ̂(s)xs ds
(c)
pour c > 1. Or d’après la formule (2.4), la série de Dirichlet de la fonction Λχ est l’opposé de la
dérivée logarithmique de la fonction L associée à χ. Ainsi :
X
n≥1
Λ(n)χ(n)φ
n
x
=
1
2iπ
Z
41
−
(c)
L0 (χ, s)
(s)φ̂(s)xs ds
L(χ, s)
(3.16)
Cas de ζ
PourP
le théorème des nombres premiers « simple », il suffit de s’intéresser à la fonctions sommatoire
ψ(x) = n≤x Λ(n). Soit ηδ un majorant lisse de [0; 1], d’amplitude 1 + δ. On a d’après la formule
(3.14) :
X
Λ(n)ηδ
n
x
n≥1
=
1
2iπ
Z
−
(c)
ζ 0 (s)
η̂δ (s)xs ds
ζ(s)
(3.17)
Pour démontrer le théorème des nombres premiers en progression arithmétique on montrera d’abord
un résultat sur les sommes lisses. En revanche, on montrera le théorème des nombres premiers en estimant une intégrale ne faisant plus intervenir de fonction φ de lissage.
Soit x fixé.
Z
∞
1
Z
s−1
s−1
u
ηδ (u)u du =
0
0
Z 1+δ
1
ηδ (u)us−1 du
+
s
1
η̂δ (s) =
=
Z
1+δ
ηδ (u)us−1 du
du +
1
Z 1+δ
1 ≤
|ηδ (u)|uc−1 du
s
1
Z 1+δ
uc−1 du −→ 0
≤
η̂δ (s) −
1
δ→0
Ainsi η̂δ (s) converge vers
1
s
uniformément pour s tel que σ = c. D’où
ζ 0 (s)
lim
−
η̂δ (s)xs ds =
δ→0 (c)
ζ(s)
Z
Z
−
(c)
ζ 0 (s) xs
ds
ζ(s) s
D’autre part,
X
n≥1
Λ(n)ηδ
n
x
=
X
X
Λ(n) +
n≤x
Λ(n)ηδ
n
x<n≤(1+δ)x
X
= ψ(x) +
Λ(n)ηδ
x<n≤(1+δ)x
x
n
x
Et lorsque δ est suffisamment petit, il n’y a aucun entier entre x et (1 + δ)x donc
lim
δ→0
X
Λ(n)ηδ
n
n≥1
x
= ψ(x)
Finalement, en faisant tendre δ vers 0 dans la formule (3.17) , on obtient la formule suivante, ne
faisant plus intervenir de fonction φ de lissage :
ψ(x) =
1
2iπ
Z
−
(a)
42
ζ 0 (s) xs
ds
ζ(s) s
(3.18)
3.6
Technique de déplacement du contour d’intégration
Les formules précédentes permettent d’évaluer des fonctions sommatoires lissées dépendant de
x (ou même directement des fonctions sommatoires comme c’est le cas dans (3.18)) à l’aide d’une
intégrale sur la droite verticale Re(s) = σ. En pratique, le x que l’on choisira sera souvent très grand
(on veut étudier le comportement asymptotique de telles sommes).
Comme |xs | = xσ et x > 1 on est tenté de prendre σ aussi petit que possible afin de minimiser
: on voudrait même pouvoir prendre σ inférieur à 1 (σ > 1 était une des hypothèses de validité
de la formule (3.14)) : c’est ce qu’on appelle « déplacer le contour d’intégration vers la gauche ». Ceci
exige de pouvoir prolonger Df au-delà du somaine de convergence absolue.
|xs |
Exemple de déplacement du contour d’intégration
On se place sous les hypothèses suivantes :
– f une fonction arithmétique telle que ∀ > 0, f (n) = O (n )
– Df se prolonge à gauche de la zone σ > 1 en une fonction méromorphe
– il existe δ < 1 tel que Df soit méromorphe sur σ > δ et possède un nombre fini de pôles simples
s1 , s2 , ..., sk de résidus respectifs r1 , r2 , ..., rk dans δ < σ < c (avec c > 1)
– ∀, il existe C (dependant de ) telle que
|Df (s)| = O ((|s| + 1)c )
Soit > 0 tel que δ + < 1 et Df n’ait pas de pôle dans la zone δ < σ < δ + . Soit T tel que tous
les pôles de Df aient une partie imaginaire inférieure en valeur absolue à T . On considère le contour
CT suivant :
43
D’après le théorème des résidus, on a
1
2iπ
Z
Df (s)φ̂(s)y s ds =
k
X
CT
ri y si φ̂(si )
(3.19)
i=1
Et le calcul de l’intégrale en décomposant sur les 4 côtés donne
1
2iπ
Z
s
Df (s)φ̂(s)y ds =
CT
+
Z
1
Df (s)φ̂(s)y s ds
Df (s)φ̂(s)y ds +
σ=c
σ=δ+
2iπ
t∈[−T,T ]
t∈[−T,T ]
Z c
Z c
1
1
Df (t − iT )φ̂(t − iT )y t−iT dt −
Df (t + iT )φ̂(t + iT )y t+iT dt
2iπ δ+
2iπ δ+
1
2iπ
Z
s
Evaluons maintenant les intégrales sur les bords verticaux :
c
Z
Df (t ± iT )φ̂(t ± iT )y
t±iT
Z
dt ≤
c
|Df (t ± iT )φ̂(t ± iT )|y t dt
δ+
δ+
Or on a les majorations :
|Df (t ± iT )| = O ((1 + |t ± iT |)c )
1
|φ̂(t ± iT )| = O
(1 + |t ± iT |)k
∀k ∈ N
Ainsi,
Z
c
Df (t ± iT )φ̂(t ± iT )y
t±iT
δ+
Z
dt = O
c
δ+
y t dt
(1 + |t ± |)2
−→ 0
lorsque T → ∞. En faisant tendre T vers l’infini dans (3.19), on obtient :
1
2iπ
Z
s
Df (s)φ̂(s)y ds =
(c)
k
X
i=1
1
ri y φ̂(si ) +
2iπ
si
Z
Df (s)φ̂(s)y s ds
(δ+)
Sous les hypothèses précédentes, on a donc
X
n≥1
X
Z
k
1
n
si
f (n)φ
=
ri y φ̂(si ) +
Df (s)φ̂(s)y s ds
y
2iπ (δ+)
i=1
Ce qui nous donne l’estimation suivante pour la fonctions sommatoire lissée dépendant de y :
X
n≥1
X
k
n
f (n)φ
=
ri y si φ̂(si ) + O y δ+
y
i=1
44
Comme on l’a vu dans les exemples du 3.5.2, on voudra par la suite évaluer les deux intégrales
données dans les formules (3.16) et (3.18), c’est-à-dire :
Z
−
(c)
L0 (χ, s)
(s)φ̂(s)xs ds
L(χ, s)
Z
−
et
(a)
ζ 0 (s) xs
ds
ζ(s) s
On aimerait, comme on vient de le faire dans l’exemple, pourvoir utiliser le théorème des résidus
pour pouvoir exprimer ces intégrales en fonctions d’intégrales sur des droites du type Re(s) = σ < 1
(terme plus petit que l’intégrale sur σ = c).
0
(χ,s)
Mais ce déplacement du contour d’intégration n’est possible que si l’on peut prolonger − LL(χ,s)
0
(s)
(resp. − ζζ(s)
) à gauche de σ > 1 (nous verrons en pratique que même une fois ce prolongement effectué,
on ne pourra pas faire un déplacement exactement similaire à celui de l’exemple)
Nous allons donc d’abord prolonger les fonctions L sur C en des fonctions méromorphes, et nous
0 (χ,s)
nous intéresserons également aux zéros de telles fonctions : en effet LL(χ,s)
n’est holomorphe que si L
0
n’a pas de pôle (et donc L non plus) et L n’a pas de zéro dans une certaine région...
45
Quatrième partie
Prolongement analytique des fonctions
L sur Re(s) > 0 et théorème de la
progression arithmétique
46
Le théorème de la progression arithmétique est un premier résultat sur les nombres premiers en
progression arithmétique. Il a été démontré en 1838 par Dirichlet et son énoncé est le suivant :
Théorème 4.0.1 Soient a et q deux entiers non nuls premiers entre eux.
Il existe une infinité de nombres premiers congrus à a modulo q
Ce résultat est un corollaire du théorème des nombres premiers en progression arithmétique mais
il est intéressant de le démontrer séparement. En effet, sa démonstration nous donne une première
approche de la manipulation des fonctions L. En particulier, elle nécessite un prolongement de ces
fonctions sur Re(s) > 0, que nous pouvons faire directement, sans utiliser (comme on le fera plus loin)
une équation fonctionnelle.
4.1
Prolongement sur Re(s) > 0
Cas où χ = q = 1
Comme on l’a déjà vu, L(1, s) ne diffère de la fonction ζ que par une constante multiplicative : il
suffit donc de prolonger ζ sur Re(s) > 0 pour obtenir un prolongement de L(1, s).
1
Posons g(s) = ζ(s) − s−1
R n+1
R∞
P
1
Si Re(s) > 1, s−1
= 1 t1s dt = ∞
n=1 n
1
ts dt
X
Z n+1
∞ ∞ Z n+1 X
1
1
1
1
g(s) =
−
dt =
−
dt
ns
ts
ns t s
n
n=1
n=1 n
Z n+1 ∞
X
1
1
=
an (s)
avec an (s) =
−
dt
ns ts
n
n=1
On a a priori convergence de la série sur Re(s) > 1. Montrons qu’il y a aussi convergence uniforme
sur tout compact lorsque Re(s) ≥ > 0.
Z
|an (s)| ≤
n+1 1 − 1 dt
ns ts n
D’après la formule des accroissements finis appliquée à la fonction f : t 7−→
s
est f 0 (t) = − ts+1
, il existe r ∈]n; t[ tel que
1
ts
et dont la dérivée
1
s(t − n) |s|
1
|s|
|s|
− =
ns ts rs+1 ≤ |r|σ+1 ≤ nσ+1 ≤ n+1
D’où :
|an (s)| ≤
|s|
K
≤ +1
+1
n
n
sur un compact : la série converge donc uniformément sur tout tout compact de σ ≥ . g(s) est
donc holomorphe sur tout domaine de la forme σ ≥ donc sur le demi-plan σ > 0.
On en déduit que ζ est méromorphe sur σ > 0 avec
Q un pôle simple en 1 de résidu 1. L(1, s) est
donc méromorphe avec un pôle simple en 1 de résidu p|m (1 − p−1 ).
47
Cas d’un caractère non trivial
L(χ, s) =
P∞
n=1 χ(n)n
−s .
Posons
0
Sn,n0 (s) =
n
X
χ(k)k −s
et
Ak =
k
X
χ(r)
r=1
k=n
On a alors χ(k) = Ak − Ak−1 pour tout k ≥ 1 avec A0 = 0 par convention. Effectuons une
transformation d’Abel :
0
Sn,n0 (s) =
n
X
0
(Ak − Ak−1 ) k
−s
=
k=n
=
n0
X
n
X
0
Ak k
−s
k=n
Ak k
−s
−
k=n
0 −1
nX
Ak (k + 1)
−
n
X
Ak−1 k −s
k=n
−s
=
k=n−1
n0
X
Ak
k=n
1
1
−
s
k
(k + 1)s
+
An0
An−1
−
0s
n
ns
Montrons que (Ak ) est une suite bornée. D’après la relation d’orthogonalité pour les caractère :
X
χ(r) = 0
r∈Z/qZ
car χ 6= 1. Vu la façon dont χ est prolongé à un « caractère sur Z », on a :
q
X
(k+1)q
χ(r) = 0
ainsi que
r=1
Donc
Pk
r=1 χ(r)
=
Pk
h i χ(r)
r= kq
X
χ(r) = 0
r=kq
d’où
|Ak | ≤
k
X
r=
h
k
|χ(r)| ≤ (k −
)≤q
q
i
k
q
On a donc
|Sn,n0 (s)| ≤ q
0 −1 nX
!
1
1
1
1
−
k s (k + 1)s + |n0s | + |ns |
k=n
Supposons s réel avec s > 0. Alors
|Sn,n0 (s)| ≤ q
0 −1 nX
k=n
1
1
−
s
k
(k + 1)s
1
1
+ 0s + s
n
n
La série de gauche est clairement télescopique et on a :
|Sn,n0 (s)| ≤ q
1
1
1
1
− 0s + 0s + s
s
n
n
n
n
48
≤
2q
ns
!
Si s ≥ > 0 on a
|Sn,n0 (s)| ≤
2m
n
−→
0
n→∞
La suite des sommes partielles associée à la série de Dirichlet de χ vérifie le critère de Cauchy donc
la série de Dirichlet converge (R est complet) pour tout réel s > 0.
Soit > 0. La série de Dirichlet converge pour s = . D’après le corollaire 1.1.1 du théorème 1.1.1,
cette série de Dirichlet converge uniformément sur tout compact du demi-plan σ > .
L(χ, s) est donc holomorphe sur le demi-plan σ > pour tout donc sur le demi-plan σ > 0.
Bilan
– L(1, s) est méromorphe sur Re(s) > 0, avec un pôle simple en 1
– Si χ 6= 1, L(χ, s) est holomorphe sur Re(s) > 0
4.2
Non annulation des fonctions L en 1
Pour démontrer le théorème de la progression arithmétique, on utilisera le logarithme de L(χ, 1) :
il faut donc montrer que pour χ non trivial, L(χ, 1) 6= 0.
On définit la fonction ζq de la manière suivante :
Y
ζq (s) =
L(χ, s)
χmod q
Cette fonction est holomorphe sur σ > 0 sauf peut-être en 1. La fonction L(1, s) possède en effet
un pôle simple en 1, mais s’il existe un caractère non trivial tel que L(χ, s) s’annule en 1, ζq est
holomorphe en 1.
Etablissons d’abord une formule sous forme de produit pour ζq (s).
Pour σ > 1, d’après la formule du produit Eulérien,
L(χ, s) =
Y
p∈P
1
1 − χ(p)p−s
Si p|q, χ(p) = 0 donc
ζq (s) =
Y Y
χmod q p-q
ζq (s) =
Y
Q
p-q
Transformons maintenant
Q
χmod q
1
1 − χ(p)p−s
χmod
(1 − χ(p)p−s ).
49
1
(1
− χ(p)p−s )
q
(4.1)
Soit p - q. p̄ ∈ (Z/qZ)× . On note f (p) l’ordre de < p̄ > dans (Z/qZ)× . Déterminons tous les
caractères vérifiant χ(p̄) = ω, où ω est une racine f (p)-ième de l’unité donnée.
∀x ∈< p̄ >, il existe k tel que χ(x) = χ(p̄k ) = ω k donc χ est uniquement déterminé sur < p̄ >.
Soit x quelconque dans (Z/qZ)× : il existe k ∈ N tel que x = mp̄k avec m le représentant de x
dans (Z/qZ)× / < p̄ >
χ(x) = χ(m)(χ(p̄))k = χ(m)ω k
χ est déterminé de manière unique par sa restriction à (Z/qZ)× / < p̄ > : or il y a g(p) =
caractères de ce groupe.
φ(q)
f (p)
Il y a donc g(p) caractères de (Z/qZ)× vérifiant χ(p̄) = ω.
On a en notant W l’ensemble des racines f (p)-ièmes de l’unité
Y
(T − ω) = T f (p) − 1
ω∈W
On a donc :
f (p)
T
f (p)
−1 =
Y
w
ω∈W

Y
(ω
−1
T − 1) =
ω∈W
Y
2ikπ
Y
e f (p)
(ωT − 1)
ω∈W
k=1

X
Y
Y
2iπ
= exp 
k
(ωT − 1) = eiπ(f (p)+1)
(ωT − 1)
f (p)
f (p)
ω∈W
k=1
– Si f(p) est pair, eiπ(f (p)+1) = −1 et
Q
(ωT − 1) =
ω∈W
1 − T f (p) =
ω∈W
Y
(ωT − 1) =
ω∈W
– Si f(p) est impair, eiπ(f (p)+1) = 1 et
1 − T f (p)
Q
Q
ω∈W
Y
(1 − ωT ) donc on a
(1 − ωT )
ω∈W
Q
(ωT − 1) = − ω∈W (1 − ωT ) donc on a
Y
Y
=−
(ωT − 1) =
(1 − ωT )
ω∈W
ω∈W
ω∈W
Ainsi, pour tout T et quel que soit la parité de f (p) on a :
Y
1 − T f (p) =
(1 − ωT )
ω∈W
Par ailleurs,
Y
χmod q
(1 − T χ(p)) =
Y
Y
(1 − T χ(p)) = (1 − T f (p) )g(p)
ω∈W χ|χ(p̄)=ω
En prenant T = p−s et en remplaçant dans (4.1) on obtient :
ζq (s) =
1
Y
p-m
(1 −
50
p−sf (p) )g(p)
(4.2)
De par sa définition, ζq (s) peut se voir comme le produit de convolution de φ(q) séries de Dirichlet,
donc comme une série de Dirichlet, qui a priori converge pour σ > 1. Cette dernière formule permet
1
de voir que c’est même une série de Dirichlet à coefficients réels positifs. En effet, si p est fixé, (1−x)
g(p)
est la dérivée (g(p) − 1)-ième de la fonction
1
1
(g(p)−1)! 1−x
et pour |x| < 1, on a alors
X
1
1
=
n(n − 1)(n − g(q) + 1)xn−g(q)+1
g(p)
(g(p) − 1)!
(1 − x)
n≥0
En remplaçant x par p−sf (p) on obtient alors :
ζq (s) =
YX
p∈P n≥0
1
n(n − 1)(n − g(q) + 1)p−sf (p)(n−g(q)+1)
(g(p) − 1)!
On reconstitue donc bien une série de Dirichlet à coefficients réels positifs.
Supposons maintenant qu’il existe un caractère χ tel que L(χ, 1) = 0. ζq est alors holomorphe sur
σ > 0 car holomorphe en 1 et sur le demi-plan σ > 0 privé de 1.
La série de Dirichlet à coefficients positifs ζq (s) converge pour σ > 1 et est prolongeable en une
fonction holomorphe sur σ > 0. D’après le théorème 1.1.2, la série converge pour σ > 0. En particulier,
la formule du produit Eulérien est valable pour σ > 0.
Prenons s > 0 réel. On a :
1
(1 − p−sf (p) )g(p)
= (1 + p−f (p)s + ... + p−kf (p)s + ...)g(p) > (1 + p−f (p)s + ... + p−kf (p)s + ...)
≥ (1 + p−φ(q)s + p−2φ(q)s + ...)
Donc
ζq (s) ≥
Y
p-q
Il y a divergence pour s =
1
φ(q)
1
1 − p−φ(q)s
=
X
n−φ(q)s
(n,q)=1
∈]0; 1[, en contradiction avec ce qui précède.
On a montré par l’absurde que pour tout caractère non trivial, la fonction L associée ne s’annule
pas en 1.
4.3
Théorème de la progression arithmétique
Nous allons montrer un résultat un peu plus fort que le théorème de la progression arithmétique,
en introduisant la notion de densité.
Définition 4.3.1 (Densité d’une partie A de P) Soit A une partie de P. Si il existe k ∈ N tel
que
P
lim
s→1
s>1
log
1
p∈A ps
k est appelée densité de la partie A
51
1
s−1
Montrons que la densité de P est 1 :
Proposition 4.3.1 Soit s un réel > 1
X 1
ps
∼
log
p∈P
1
s−1
s→1+
Démonstration
ζ(s) =
Y
p∈P
log(ζ(s)) =
X
log
p∈P
=
1
>0
1 − p−s
1
1 − p−s
=−
h(s) =
P
X
p∈P
Ainsi log(ζ(s)) ∼
k≥2
P
p∈P
(p−s )k
k
log 1 − p−s
p∈P
X X (p−s )k
X 1
X X (p−s )k
=
+
s
k
p
k
∗
p∈P k∈N
Notons h(s) =
X
p∈P
k≥2 p∈P
: cette fonction est bornée lorsque s tend vers 1 car si s > 1 :
X
X
X
1
1
1
1
=
≤
≤
2s
−s
s
s
p (1 − p )
p (p − 1)
p(p − 1)
n(n − 1)
p∈P
1
p∈P ps
P
< ∞
n≥2
p∈P
lorsque s tend vers 1
1
ζ(s) = s−1
+ g(s) avec g(1) 6= 0 donc log(ζ(s)) = log
voisinage de 1.
1
lorsque s tend vers 1
Ainsi, log(ζ(s)) ∼ log s−1
1
s−1
+ log(g(s)), avec log(g(s)) borné au
Par transitivité de l’équivalence, on a alors :
X 1
1
∼
log
ps
s−1
p∈P
On peut ainsi noter que quelle que soit la partie A de P la densité k est comprise entre 0 et 1.
En effet, pour tout s réel plus grand que 1,
P
1
p∈A ps
log
1
s−1
donc la limite aussi si elle existe.
52
≥0
P
log
1
p∈A ps
1
s−1
P
1
p∈P ps
≤
log
1
s−1
=1
il en est de même pour la limite éventuelle k.
On remarque également que la densité d’un ensemble fini est nulle.
Théorème 4.3.1 Soit q quelconque et a tel que (a, q) = 1
Notons Aa = {p ∈ P|p ≡ a[q]}
La densité de Aa est
1
φ(q)
Ce théorème nous montre que Aa est infini, car il est de densité non nulle, ce qui démontre le
théorème de la progression arithmétique.
Démonstration
χ(p)
p-q ps
Etudions d’abord fχ (s) =
P
• Si χ est trivial, f1 (s) =
P
1
p∈P ps
−
1
p|q ps
P
f1 (s) ∼
donc
X 1
1
∼
log
ps
s−1
p∈P
lorsque s est réel et tend vers 1 par valeur supérieure.
• Si χ est non trivial, montrons que fχ reste bornée.
L(χ, s) =
Y
p∈P
1
1 − χ(p)p−s
Soit s réel > 1. Alors L(χ, s) 6= 0 car aucun terme du produit infini n’est nul.
log(L(χ, s)) = −
X
log 1 − χ(p)p−s
p∈P
Et comme |χ(p)p−s | < 1 on a
log(L(χ, s)) =
X X χ(p)n
npsn
∗
p∈P n∈N
log(L(χ, s)) =
X χ(p) X X χ(p)n
+
ps
npsn
p∈P n≥2
p∈P
log(L(χ, s)) = fχ (s) +
X χ(p)
p|q
|
ps
X χ(p)n
npsn
p,n≥2
{z
}
+
g(s)
X χ(p) n X 1
1 X X −sn X
1
≤
≤
p
≥
npsn sn
np
2 p
p(p − 1)
p,n
p
p,n≥2
n≥2
53
< +∞
donc g(s) est bornée au voisinage de 1. Comme L(χ, 1) 6= 0, log(L(χ, s)) reste borné lorsque s tend
vers 1. Ainsi, fχ est bornée au voisinage de 1.
Montrons maintenant le théorème.
ga (s) =
X 1
ps
=
X 1
φ(q)
p∈P
p∈Aa
=
1
φ(q)
X
χ mod q
X
χ
χ̄(a)χ(p)
1
ps
χ̄(a)fχ(s)
mod q
Dans cette somme, tous les termes restent bornés d’après l’étude précédente des fonctions fχ , sauf
le terme correspondant au caractère trivial. On a donc
1
1
ga (s) ∼
f1 (s) ∼
log
φ(q)
φ(q)
Ceci montre que Aa a pour densité
1
φ(q)
1
s−1
et démontre le théorème
54
Cinquième partie
Prolongement des fonctions L sur C
55
5.1
Le cas de la fonction ζ
Pour σ > 1 on a déjà vu que
ζ(s) =
Y
X 1
1
=
s
n
1 − p−s
n≥1
p∈P
On a vu dans la partie précédente qu’on peut prolonger analytiquement la fonctions ζ sur σ > 0
en une fonction méromorphe ayant un unique pôle simple en 1 de résidu 1. Nous allons maintenant
prolonger ζ sur C.
5.1.1
Equation fonctionnelle
Proposition 5.1.1 Soit ξ la fonction définie par
s
ξ(s) = π − 2 Γ
s
2
ζ(s)
(5.1)
ξ est une fonction méromorphe sur C possédant deux pôles simples en 0 et en 1 et vérifiant
l’équation fonctionnelle :
ξ(s) = ξ(1 − s)
Démonstration
Z
∞
x
s
−1
2
e
−n2 πx
∞
Z
dx =
0
0
s
s
u 2s −1 −u du
2 − 2s
− 2s Γ 2
e
=
(n
π)
Γ
=
π
n2 π
n2 π
2
ns
Pour σ > 1 on a :
ξ(s) = π
Et
− 2s
Γ
s
2
ζ(s) =
X π − 2s Γ
R ∞ s −1 −n2 πx σ
2
e
dx converge vers π − 2 Γ
n≥1 0 x
∞
s
x 2 −1
0
XZ
=
∞
s
2 πx
x 2 −1 e−n
dx
n≥1 0
σ
2
P
ξ(s) =
ns
n≥1
Z
s
2
X
ζ(σ) donc on peut intervertir série et intégrale :
2 πx
e−n
dx
n≥1
2
D’après la proposition 3.3.1, la fonction y 7−→ e−πxy admet pour transformée de Fourier la
fonction y 7−→
√1 e−
x
πy 2
x
.
D’après la formule de sommation de Poisson,
X
2 πx
e−n
=
n∈Z
n∈Z
1+2
X
n∈N∗
1 X − πn2
√
e x
x
e
−n2 πx
=
1
√
x
56
1+2
X
n∈N∗
2
e
− πn
x
!
Avec la notation ψ(x) =
P
n∈N∗
2 πx
e−n
, la relation ci-dessus devient :
1
1
√
1 + 2ψ
x
x
1
1
1
1
√ ψ
+ √ −
x
x
2 x 2
1 + 2ψ(x) =
ψ(x) =
1
Z
s
−1
2
Z
∞
s
ψ(x)dx +
x 2 −1 ψ(x)dx
0
1
Z 1
Z ∞
s
s
1
1
1
1
−1
2
√ ψ
x
x 2 −1 ψ(x)dx
+ √ − dx +
x
x
2 x 2
0
1
Z 1
Z 1
Z ∞
Z 1
s
s
s
s
1
3
1
1
x 2 −1 ψ(x)dx
x 2 −1− 2 dx −
x 2 −1 dx +
x2−2 ψ
dx +
2
x
1
0
0

"0
#
#
"
1
1
s
1
s
1
s
Z
Z
+
∞
∞ s
1 2 2
1  x2−2
x2 
+
−
ψ
(u)du
+
x 2 −1 ψ(x)dx
s
s
1
2
u
1
1
2 0
2 − 2 0
! Z
∞
s
1
1
1
−1
− 2s − 12
2
−
+
u
ψ(u)du
+
u
s
2 s−1
1
2
2
ξ(s) =
x
=
=
=
=
Finalement, pour σ > 1
ξ(s) =
1
1
− +
s−1 s
Z
∞
s
1
s
x− 2 − 2 + x 2 −1 ψ(x)dx
(5.2)
1
P
2
2
−n2 πx
L’intégrale converge pour toute valeur de s car ψ(x) = o e−π x . En effet, eπ x ψ(x) = ∞
n=0 e
2 πx
et |e−n
2 π2
| ≤ e−n
si x ≥ 1. La série converge donc uniformément pour x ∈ [1; +∞[. On a donc
2
lim eπ x ψ(x) = 0
x→+∞
L’intégrande est holomorphe sur tout compact K de C et
s 1
σinf 1
σsup
s
−2−2
+ x 2 −1 ψ(x) ≤ x− 2 − 2 + x 2 −1 ψ(x)
x
où σinf et σsup correspondent aux valeurs extrêmes de la partie réelle de s dans K. D’après cette
majoration uniforme par une fonction intégrable, l’intégrale définit une fonction holomorphe sur tout
compact K de C et donc sur C.
1
La fonction ξ(s) − s−1
+ 1 holomorphe sur σ > 1 coı̈ncide sur ce demi-plan avec la fonction
s
R ∞ −s−1
s
g(s) = 1 x 2 2 + x 2 −1 ψ(x)dx, holomorphe sur C. D’après le principe du prolongement analy-
tique, ξ(s) −
1
s−1
+
1
s
est alors prolongeable sur C en la fonction holomorphe g(s).
La formule (5.1) est donc valable pour tout s ∈ C : ξ est donc méromorphe avec deux pôles simples
en 0 et en 1.
Cette formule nous ξ est invariante dans le changement s ↔ 1−s et donc que l’équation fonctionelle
est vérifiée.
57
5.1.2
Prolongement de ζ
Comme Γ(s) 6= 0 ∀s ∈ C, on peut écrire (pour par exemple σ > 1) :
ζ(s) =
ξ(s)
π Γ( 2s )
s
2
Comme Γ( 2s ) admet un pôle simple en 0, de même que ξ(s), la fonction
ξ(s)
s
π 2 Γ( 2s )
est holomorphe en
0. Elle admet un pôle simple en 1, de résidu 1 à cause du pôle de ξ. Elle est holomorphe sur C − {0, 1}
car ξ y est holomorphe et Γ ne s’annule pas, donc sur C{ 1}.
Ainsi, par prolongement analytique, ζ est méromorphe sur C avec un pôle simple en 1.
Comme Γ a des pôles simples en les −k, k ∈ N et ξ holomorphe en les −2k, k ∈ N∗ , on peut
également remarquer qu’on a
∀m≥1
ζ(−2m) = 0
Vu les propriétés de ζ, ζ 0 est également méromorphe sur C avec un unique pôle en 1, d’ordre 2 et
0 (s)
possède donc un pôle simple en 1 de résidu 1. Elle est holomorphe
de résidu -1. La fonction − ζζ(s)
sur σ > 1 puisque ζ ne s’annule pas dans cette région, mais on ne peut pas encore dire où elle est
holomorphe à gauche de σ = 1 : cela dépend des annulations éventuelles de ζ.
5.2
Equation fonctionnelle plus générale et singularités des fonctions L
Nous allons uniquement étudier ici les fonctions L associées à un caractère primitif. Le but est
de prolonger de telles fonctions L, ce qui nous donnera alors un prolongement pour une fonction L
quelconque, d’après la formule (2.3)
5.2.1
Equation fonctionnelle
On pose
τ (χ)
W (χ) = √
q
On rappelle la notation pour un somme de Gauss :
τ (χ) =
X
χ(x)e
2iπx
q
x mod q
Lemme 5.2.1 Soit χ un caractère primitif modulo q. Alors :
τ (χ̄) = χ(−1)τ (χ)
|τ (χ)|2 = q
Démonstration
58
X
τ (χ̄) =
χ̄(x)e
2iπx
q
x mod q
= χ(−1)
− 2iπx
q
X
=
χ(x)e
x mod q
X
χ(x)e
2iπx
q
X
=
χ(−x)e
2iπx
q
x mod q
= χ(−1)τ (χ)
x mod q
Ceci démontre la première formule. Pour la seconde, montrons d’abord que pour tout n ≥ 1 on a
X
2iπ nx
χ̄(x)e q
χ(n)τ (χ̄) =
(5.3)
x[q]
1er cas : (n, q) = 1
χ(n)τ (χ̄) =
X
χ(n)χ̄(x)e
2iπ xq
x[q]
Dans ce cas, n est inversible dans (Z/qZ) et
χ(n)τ (χ̄) =
X
χ̄(xn−1 )e
2iπ xq
x[q]
L’application x 7−→ xn−1 est bijective donc on a
χ(n)τ (χ̄) =
X
χ̄(x)e
2iπ nx
q
x[q]
2eme cas : (n, q) = d > 1
n∈
/ (Z/qZ)× donc χ(n) = 0. Pour montrer que la relation (5.3) est vraie, montrons que
X
χ̄(x)e
2iπ nx
q
=0
x[q]
On note n = dn1 et q = dq1 avec (n1 , q1 ) = 1.

X
2iπ nx
q
χ̄(x)e
x[q]
=
X
2iπ
χ̄(x)e
n1 x
q1
=
x[q]
X
x1 [q1 ]
e
2iπ
n1 x 1
q1

 X



χ̄(x)


x[q]
x≡x1 [q1 ]
On a regroupé P
les termes suivant leur classe modulo q1 . Montrons maintenant que pour tout x1 ,
la somme S1 (x) =
χ̄(x) est nulle.
x[q]
x≡x1 [q1 ]
Soit y ∈ (Z/qZ)× tel que y ≡ 1[q1 ].
χ̄(y)S(x1 ) =
X
x[q]
x≡x1 [q1 ]
Donc (1 − χ̄(y))S(x1 ) = 0.
59
χ̄(yx) = S(x1 )
(Z/q1 Z)× ∼
= (Z/qZ)× /K où K = {y ∈ (Z/qZ)× |y ≡ 1[q1 ]}. Si χ̄(y) = 1 pour tout y ∈ K,
χ̄(n) = χ̄(n̄) où n̄ est la classe de n modulo q1 , donc χ̄ coı̈ncide avec un caractère modulo q1 , ce qui
est exclu car χ est primitif. Il existe donc y ≡ 1[q1 ] tel que χ(y) 6= 1. D’où S(x1 ) = 0, ce qui démontre
que la somme est nulle.
Calculons maintenant |τ (χ)|2 :
¯ = χ(−1)τ (χ)τ (χ̄)
|τ (χ)|2 = τ (χ)τ (χ)

|τ (χ)|2 = χ(−1)
X
= χ(−1)
X
e
2iπ n
q
χ(n)τ (χ̄) = χ(−1)
n[q]
X
e
2iπ n
q

n[q]
χ̄(x)
X

X
2iπ nx
q
χ̄(x)e

x[q]
n(x+1)
2iπ q
e
n[q]
x[q]
La somme des exponentielles est nulle sauf si x = −1 et dans ce cas elle vaut q donc :
|τ (χ)|2 = χ(−1) × χ(−1)q = q
Cas d’un caractère primitif et pair
Proposition 5.2.1 Soit χ un caractère pair non trivial. La fonction ξ définie par
s
ξ(χ, s) = π − 2 Γ
s
2
L(χ, s)
est une fonction entière vérifiant l’équation fonctionnelle :
1
ξ(χ, s) = W (χ)q 2 −s ξ(χ̄, 1 − s)
Démonstration
Comme dans ce qu’on a fait pour ζ, la démonstration utilise la formule de sommation de Poisson,
par l’intermédiaire des fonction θ, qu’on avait étudié dans la partie 3.3.5.
s
2
π Γ
s
2
n
−s
=π
− 2s
∞
Z
x
s
−1
2
e
−x
dxn
−s
2
− 2s
= (n π)
0
0
Après la changement de variable x = n2 πu cela donne :
s
2
π Γ
s
2
Z
n
−s
Z
∞
=
0
60
2
s
e−πn x x 2 −1 dx
∞
s
x 2 −1 e−x dx
s
π− 2 Γ
s
2
s
L(χ, s) = π − 2 Γ
∞
X
=
n=1
∞
X
=
∞
s X
2
n=1
s
s
χ(n)π 2 Γ
2
∞
Z
n−s
s
2
e−πn x x 2 −1 dx
χ(n)
0
n=1
∞
X
∞
Z
χ(n)n−s
=
0
!
χ(n)e
−πn2 x
s
x 2 −1 dx
n=1
Justifions l’interversion série intégrale :
s
2
σ
2
|χ(n)e−πn x x 2 −1 | = e−πn x x 2 −1
Et
∞
Z
0
σ
σ
σ
2
e−πn x x 2 −1 dx = (πn2 )− 2 Γ( )
2
< +∞
On voit apparaı̂tre la fonction θ(χ, x). Comme dans la formule (3.8) ,
car le caractère est supposé pair. On a alors :
ξ(χ, s) =
1
2
Z
∞
P∞
n=1 χ(n)e
s
θ(χ, x)x 2 −1 dx
−πn2 x
= 21 θ(χ, x)
(5.4)
0
Les fonctions θ(χ, x) vérifient lorsque pour x ≥ 1
θ(χ, x) = O e−πx
En effet, eπx θ(χ, x) =
2
1
2
P
n∈N∗
2)
eπx(1−n
2
Et |χ(n)eπx(1−n ) | ≥ eπ(1−n ) pour x ≥ 1 : c’est le terme générale d’une série convergente. Grâce à
cette domination, on peut appliquer le théorème de convergence dominée pour montrer que
lim
X
x→∞
2)
eπx(1−n
n∈N∗
=
X
n∈N∗
2)
lim eπx(1−n
x→∞
=0
Donc eπx θ(χ, x) tend vers 0 lorsque x tend vers l’infini, cette grandeur est a fortiori bornée, d’où
le résultat.
Pour x ≥ 1 on peut donc majorer l’intégrande. En revanche, le comportement au voisinage de 0
est moins évident. On va donc séparer l’intégrale en deux et effectuer un changement de variable.
Soit α > 0
Z
∞
θ(χ, x)x
0
s
−1
2
Z
dx =
α
θ(χ, x)x
0
s
−1
2
Z
∞
dx +
s
θ(χ, x)x 2 −1 dx
α
On utilise la formule (3.9) pour remplacer θ(χ, x) dans la première intégrale :
61
α
Z
θ(χ, x)x
s
−1
2
0
Z
s dx
1
τ (χ) α 1
√ θ χ̄, 2
x2
dx =
q
q
x
x
x
0
Z +∞
1−s du
τ (χ)
=
q 1−s θ (χ̄, u) u 2
1
q
u
q2 α
Z +∞
s du
1
θ (χ̄, u) u 2
= W (χ)q 2 −s
1
u
2
q α
En choisissant α =
Z
∞
1
q
on a :
s
1
θ(χ, s)x 2 −1 dx = W (χ)q 2 −s
+∞
Z
θ (χ̄, u) u
1−s
2
1
q
0
1
2
ξ(χ, s) =
W (χ)q
1
−s
2
du
+
u
+∞
Z
θ (χ̄, u) u
∞
Z
s
θ(χ, x)x 2 −1 dx
1
q
1−s
−1
2
!
∞
Z
θ(χ, x)x
du +
1
q
s
−1
2
dx
(5.5)
1
q
σmax
s
s
A x fixé, s 7−→ θ(χ, s)x 2 −1 est holomorphe. De plus sur un compact K, θ(χ, x)x 2 −1 ≤Ce−πx x 2 −1
est une majoration uniforme en s (σmax est la partie réelle maximale sur le compact K) par une fonction intégrable.
R∞
s
g(s) = 1 θ(χ, x)x 2 −1 dx est donc une fonction holomorphe sur tout compact K de C donc sur C.
q
R +∞
1−s
On montre de même que h(s) = 1 θ (χ̄, u) u 2 −1 du est aussi holomorphe sur C.
q
Ainsi, ξ(χ, s) est prolongeable en une fonction entière sur C. Montrons qu’elle satisfait l’équation
fonctionnelle :
W (χ)q
1
−s
2
ξ(χ̄, 1 − s) =
=
Or W (χ)W (χ̄) =
W (χ)q
1
−s
2
1
2
1
2
τ (χ)τ (χ̄)
q
1
ξ(χ̄, 1 − s) =
2
W (χ)q
1
−s
2
W (χ̄)q
1
−(1−s)
2
+∞
Z
θ (χ, u) u
s
−1
2
du + W (χ)q
1
−s
2
1
q
+∞
Z
W (χ)W (χ̄)
θ (χ, u) u
χ(−1)|τ (χ)|2
q
s
−1
2
du + W (χ)q
1
−s
2
!
∞
Z
θ(χ̄, x)x
1−s
−1
2
dx
1
q
= 1 d’après le lemme 5.2.1. Ainsi :
+∞
Z
θ(χ̄, x)x
1
q
1
q
=
!
∞
Z
θ (χ, u) u
s
−1
2
du + W (χ)q
1
q
1
−s
2
!
∞
Z
θ(χ̄, x)x
1−s
−1
2
dx
= ξ(χ, s)
1
q
Cas d’un caractère primitif impair
Proposition 5.2.2 Soit χ un caractère impair non trivial. La fonction ξ définie par :
ξ(χ, s) = π
− s+1
2
Γ
62
s+1
2
L(χ, s)
1−s
−1
2
dx
est une fonction entière vérifiant l’équation fonctionnelle :
1
ξ(χ, s) = i−1 W (χ)q 2 −s ξ(χ̄, 1 − s)
Démonstration
La démonstration utilise la même technique que dans le cas pair : séparation de l’intégrale et
insertion d’une fonction θ : mais on ne peut pas utiliser la même fonction θ que dans le cas pair, qui
est nulle ici. On peut par exemple introduire la fonction :
θ1 (χ, y) =
X
2y
nχ(n)e−πn
n∈Z
et démontrer une formule analogue à (3.9) qui nous permettra de faire un changement de variable
comme dans le cas précédent.
Formule générale
On introduit les notations :
– tχ = 0 si χ est pair et tχ = 1 si χ est impair
– (χ) = i−tχ W (χ)
On peut dans ce cas avoir une formule générale pour l’équation fonctionnelle :
Proposition 5.2.3 Soit χ un caractère de Dirichlet non trivial modulo q. La fonction ξ définie par :
ξ(χ, s) = π
−
s+tχ
2
Γ
s + tχ
2
L(χ, s)
(5.6)
est une fonction entière vérifiant l’équation fonctionnelle :
1
ξ(χ, s) = (χ)q 2 −s ξ(χ̄, 1 − s)
5.2.2
Conséquences sur les propriétés des fonctions L
Prolongement des fonctions L
Si χ un caractère non trivial. On a pour σ > 1 par exemple :
s+tχ
ξ(χ, s)π 2
L(χ, s) =
s+tχ
Γ
2
Comme Γ ne s’annule pas sur C,
Γ
1
s+tχ
2
est entière, de même que ξ(χ, s)π
L(χ, s) est donc prolongeable en une fonction entière sur C.
63
s+tχ
2
.
Croissance des fonctions L
Montrons que dans toute bande verticale finie A ≤ σ ≤ B les fonctions L sont à croissance
polynômiale : c’est-à-dire qu’il existe une fonction polynômiale P (s) telle que dans cette bande,
L(χ, s) = O (P (|s|))
Plus précisemment, on peut montrer la proposition suivante :
Proposition 5.2.4 (1) Pour σ > 1 on a pour tout χ et pout tout t ∈ R
|L(χ, σ + it)| ≤ ζ(σ) = O
1
σ−1
(5.7)
(2) Soit A > 0. On a uniformément pour −A ≤ σ < 0 pour tout χ
1
|L(χ, σ + it)| = O (q(|t| + 2)) 2 −σ
(5.8)
(3) On a pour 0 ≤ σ ≤ 1 et pour tout χ
|L(χ, σ + it)| = O
1−σ
δ(χ)
+ (q(|t| + 2)) 2 +
|s − 1|
(5.9)
pour tout > 0 (la constante implicite du O dépendant de ). δ(χ) = 1 si χ est trivial, 0 sinon.
Démonstration
(1) L(χ, s) est dans ce cas somme d’une série de Dirichlet et
|L(χ, s)| ≤
X
n
−σ
= ζ(σ) = O
n≥1
1
σ−1
lorsque σ > 1
(2) On
utilise
l’équation fonctionnelle pour se ramener au cas précédent. En notant γ(s) =
s+tχ
π
on a :
Γ
2
−
s+tχ
2
1
L(χ, s) = (χ)q 2 −s L(χ̄, 1 − s)
γ(1 − s)
γ(s)
Comme 1 < 1 − s < 1 + A, on a
γ(1 − s) 1
−σ
L(χ, s) = O ζ(1 − σ)q 2 γ(s) Et ζ(1 − σ) = O σ1 = O (1) dans la zone considérée. Evaluons maintenant γ(1−s)
γ(s) à l’aide de la
formule de Stirling généralisée (3.11) :
Pour |t| ≥ 1 :
64
σ+tχ −1
t 2
|t|
1
−π
|Γ
| = (2π) e 2 1+O
2
t
1−σ+tχ −1
2
|t|
1 t
1 − s + tχ
1
e−π 2 1 + O
|Γ
| = (2π) 2 2
2
t
s + tχ
2
γ(1 − s) σ− 1
γ(s) = π 2
Comme
γ(1−s)
γ(s)
1
2
tχ −σ−(σ+tχ −1) 2
t
1
1
σ− 12
−σ
2
1
+
O
=
O
π
(|t|
+
2)
2
t
est bornée pour t ∈ [−1; 1], σ dans une bande verticale finie, pour tout t ∈ R :
γ(1 − s) = O π σ− 12 (|t| + 2) 12 −σ
γ(s) Et donc
1
L(χ, s) = O (q(|t| + 2)) 2 −σ
(3) Pour montrer (3), on utilise le lemme d’analyse complexe suivant, qu’on ne démontrera pas
(pour le démontrer, on peut utiliser le principe de Phragmen-Lindelöf) :
Lemme 5.2.2 Soit f une fonction holomorphe sur une bande verticale A ≤ σ ≤ B et a, b tels que
A<a<b<B
Si on a les hypothèses suivantes :
– ∀t ∈ R, |f (a + it)| ≤ C(a)|s|D(a) et |f (b + it)| ≤ C(b)|s|D(b) , où C et D sont des constantes
dépendant de a ou b
– ∃α ≥ 0 tel que f (s) = O (exp(|s|α )) pour a ≤ σ ≤ b
Alors pour tout a ≤ σ ≤ b on a
|f (σ + it)| ≤ C(a)l(σ) C(b)1−l(σ) |s|l(σ)D(a)+(1−l(σ))D(b)
où l(σ) est la fonction affine vérifiant l(a) = 1 et l(b) = 0
Fixons > 0. Montrons que L vérifie les hypothèses du lemme pour a = −, b = 1 + et par
exemple A = −2, B = 1 + 2.
Pour la première hypothèse, on prend d’une part C(b) = ζ(1 + ) et D(b) = 0 (on se trouve dans
la zone du (1)) et pour a on est dans la zone du (2) donc on utilise (5.7) :
|L(χ, − + it)| = O (q(|t| + 2))
1
+
2
= O |t|
1
on peut donc prendre C(a) = C1 q 2 + et D(a) =
1
1
+
2
1
2
D’après la formule (5.5) on a ξ(χ, s) ≤ (1 + q 2 −σ )
le caractère est pair est non trivial (par exemple)
65
1 + !
2
1
1
2
q 1+
≤ C1 q 2 + |t| 2 +
|t|
+ .
R∞
1
q
s
θ(x)(x 2 −1 + x
1−σ
−1
2
1
)dx = O 1 + q 2 −σ si
s
1
π 2 (1 + q 2 −σ )
s Γ
2
L(χ, s) = O
!
D’après la formule de Stirling généralisée, dans une bande verticale allant de −2A à 2B :
!
σ
L(χ, s) = O
π2
1
2
(2π) |t|
pour tout α >
π
2
σ− 12 −π
e
|t|
2
1+O
1
t
= O (exp|σ + it|α )
donc la deuxième hypothèse du lemme est vérifiée.
D’après le lemme on a alors dans la bande considérée (pour un caractère non trivial) :
1
1
1
|L(σ + it)| ≤ (C1 q 2 + )l(σ) (ζ(1 + ))1−l(σ) |s|l(σ)( 2 +) = O (q|s|)( 2 +)l(σ)
Or l(σ) =
1+
1+2
−
1
1+2 σ
= K(1 − σ) dans cette bande :
1
|L(σ + it)| = O (q|s| + 2)( 2 +)(1−σ)
En tenant compte du fait que χ peut être trivial, on obtient le majoration (5.9).
On a défini dans cette partie plusieurs fonctions ξ selon que la caractère χ est trivial ou non et
selon sa parité. Dans la suite, la fonction ξ désignera celle définie dans la formule (5.1) lorsque χ est
trivial, et celle définie dans la formule (5.6) dans le cas contraire.
Savoir que les fonctions L sont à croissance polynômiale sera utile par la suite, quand on parlera
de l’ordre de la fonction ξ (cf. partie 6.1.1)
66
Sixième partie
Zéros des fonctions L
67
Les résultats les plus délicats à montrer sont ceux concernant les zéros des fonctions L. A titre
d’exemple l’étude des zéros de la fonction ζ pose problème aux mathématiciens depuis plus d’un siècle.
Grâce à la formule du produit Eulérien, qui converge uniformément pour σ > 1, on sait que les
fonctions L ne s’annulent pas sur Re(s) > 1, mais ce qui nous intéresse est de trouver une zone à
gauche de 1 où elles ne s’annulent pas...
6.1
Zéros de fonctions holomorphes d’ordre 1
Une première propriété, vraie pour toutes les fonctions holomorphes est le fait qu’elles possèdent
un nombre dénombrable de zéros. En effet, dans tout compact, une fonction holomorphe a un nombre
fini de zéros (d’après le principe des zéros isolés) et l’ensemble des zéros de f peut s’écrire
[
E=
{z ∈ C | |z| ≤ n et f (z) = 0}
n∈N
et est dénombrable car réunion dénombrable d’ensembles finis. On pourra ainsi étudier des suites des
zéros de f .
On ne connait pas d’autres résultats généraux sur les zéros des fonctions holomorphes, mais on
verra que pour une certaine catégorie de fonctions, celles d’ordre fini, on peut obtenir des résultats
utiles en appliquant la formule de Jensen.
6.1.1
Fonction d’ordre fini
Définition 6.1.1 Une fonction entière f est dite d’ordre fini s’il existe un réel α tel que lorsque
|z| = r → ∞
α
f (z) = O(er )
f est d’ordre ρ si ρ est la borne inférieure des réels α tels que l’assertion ci-dessus soit vraie. Si
f est d’ordre ρ on a alors, pour tout > 0,
f (z) = O(er
ρ+
)
La constante correspondant au O dépend bien sûr de .
Certaines fonctions bien connues sont d’ordre fini : les fonctions polynômiales sont d’ordre zéro, la
fonction exponentielle est d’ordre 1. Dans la suite, on s’intéressera surtout aux fonctions d’ordre 1.
Proposition 6.1.1 La fonction
f (s) = (s(s − 1))δ(χ) ξ(χ, s)
est une fonction entière d’ordre 1
68
Démonstration
Si χ est non trivial, ξ est entière et si χ est trivial, ξ admet deux pôles simple en 0 et 1 donc f est
une fonction entière.
1+ Soit > 0. f vérifiant une équation fonctionnelle, il suffit de montrer qu’on a |f (s)| = O e|s|
uniformément sur σ > 0 par exemple.
Si σ > 1 ,
σ+tχ
σ + tχ
ζ(σ)
|f (s)| ≤ |s(s − 1)|π − 2 Γ
2
σ + tχ
−|s|1+
−|s|1+ − σ2
|f (s)|e
= O |s|e
π Γ
2
D’après la formule de Stirling
Γ
σ + tχ
2
q
σ + tχ σ
∼ 2π(σ + tχ )
2e
On a donc :
−|s|1+
|f (s)|e
− 21 |s|1+
= O |s|e
q
1 1+
log(π)
2π(σ + tχ )exp σ log(σ + tχ ) − 2e −
exp(− σ ) = O (1)
2
2
1+ Ainsi, sur σ > 1, f (s) = O e|s|
Si 0 < σ ≤ 1, on utilise la formule de Stirling généralisée et le résultat (5.9) obtenu pour les
fonctions L :
σ+tχ −1
2
|t|
1 t
σ
+
t
1
χ
−π 2
Γ
= (2π) 2 e
1
+
O
2
2
t
1−σ
δ(χ)
|L(χ, s)| = O
+ (q(|t| + 2)) 2 +
|s − 1|
1+ On montre alors que dans 0 ≤ σ ≤ 1 on a aussi |f (s)| = O e|s|
et on en déduit une majoration
de ce type pour s ∈ C.
f est donc d’ordre au plus 1.
1
n≥2 nσ
P
→ 1 lorsque σ → ∞.
σ
On a donc lorsque σ tend vers l’infini f (σ) ∼ σ 2δ(χ) π − 2 Γ σ2 et d’après la formule de Stirling :
Soit σ réel > 1. L(χ, σ) = 1 +
σ
f (σ) ∼ σ 2δ(χ) π − 2
√
πσ
σ σ
2e
Et on voit alors que f (σ)e−σ n’est pas borné lorsque σ → ∞ donc f ne peut pas avoir un ordre
plus petit que 1.
69
6.1.2
Formule de Jensen
Soit f une fonction holomorphe. Si on se place sur un disque |z| < R, f possède un nombre fini de
zéros que l’on peut ranger dans l’ordre croissant de leurs modules : |z1 | ≤ |z2 | ≤ ... ≤ |zn |. Les zéros
sont comptés avec multiplicité. Dans la suite, on notera pour simplifier |zi | = ri .
La formule de Jensen fait un lien entre les modules de ces zéros et le comportement de f sur un
cercle les englobant :
Théorème 6.1.1 f une fonction analytique pour |z| < R avec f (0) 6= 0. Soient z1 , z2 , ...zn les zéros de
f dans ce disque et r1 , r2 , ..., rn leurs modules rangés dans l’ordre croissant. Soit r tel que rn < r ≤ R.
Alors :
log
rn |f (0)|
r1 r2 ...rn
1
=
2π
2π
Z
0
log f (reiθ )dθ
Démonstration
f holomorphe sur |z| < R peut s’écrire sous la forme :
n Y
z
f (z) =
1−
Φ(z)
zi
i=1
où Φ est une fonction holomorphe qui ne s’annule pas sur le disque de rayon R.
Nous allons d’abord montrer la formule de Jensen pour deux catégories de fonctions : celles qui ne
s’annulent pas et celles du type f (z) = 1 − zzi .
Cas où f ne s’annule pas
Dans ce cas, log(f (z)) est holomorphe sur |z| ≤ r et d’après la formule de Cauchy :
log(f (0)) =
f (0) = |f (0)| ei
arg(f (0))
f (reiθ ) = f (reiθ ) ei
1
2π
2π
Z
log(f (reiθ ))dθ
0
d’où log(f (0)) = log(|f (0)|) + i arg(f (0))
arg(f (reiθ )
d’où log(f (reiθ )) = log(f (reiθ )) + i arg(f (reiθ ))
Ainsi on peut écrire :
1
log(|f (0)|) + i arg(f (0)) =
2π
Z
0
2π
Z 2π
1
iθ log f (re )dθ + i
arg(f (reiθ ))dθ
2π 0
Et en identifiant les parties réelles on obtient la formule de Jensen :
1
log(|f (0)|) =
2π
Z
0
70
2π
log f (reiθ )dθ
Cas où f (z) = 1 −
z
z1
Evaluons le module de f (z) :
2 z z1 2
|f (z)| = 1 − z1
z
2
r1
r
r1
|f (z)|2 =
(1 − ei(θ1 −θ) )(1 − e−i(θ1 −θ) )
2
r
r
r1
X
∞
∞
1 r1 m im(θ1 −θ) X 1 r1 m −im(θ1 −θ)
r
log |f (z)|2 = 2 log
−
−
e
e
r1
m r
m r
n=1
n=1
∞
X
m
1 r1
r
−2
cos(m(θ1 − θ))
log |f (z)|2 = 2 log
r1
m r
n=1
X
∞
r
1 r1 m
log |f (z)| = log
−
cos(m(θ1 − θ))
r1
m r
2
n=1
En intégrant :
1
2π
Z
0
2π
X
Z 2π
∞
r
1 r1 m 1
iθ log f (re )dθ = log
−
cos(m(θ1 − θ))dθ
r1
m r
2π 0
n=1
L’intégrale du cosinus sur une période étant nulle on obtient :
log
r
r1
=
1
2π
2π
Z
0
log f (reiθ )dθ
Soit la formule de Jensen car f (0) = 1 :
log
Cas général
Q Soit f (z) = ni=1 1 −
z
zi
log
log
r |f (0)|
r1
1
=
2π
Z
2π
0
Φ(z). On pose gi (z) = 1 −
rn |f (0)|
r1 r2 ...rn
rn |f (0)|
r1 r2 ...rn
= log
=
z
zi
n Y
rgi (0)
i=1
n
X
iθ log f (re )dθ
log
i=1
Or on sait la formule vraie pour les gi et pour Φ :
71
ri
rgi (0)
ri
!
+ log(Φ(0))
+ log(Φ(0))
log
rn |f (0)|
r1 r2 ...rn
Z 2π
Z 2π
n
X
1
1
log gi (reiθ )dθ +
log Φ(reiθ )dθ
2π 0
2π 0
i=1
#
Z 2π "X
n
1
=
log gi (reiθ ) + log Φ(reiθ ) dθ
2π 0
i=1
Z 2π
1
iθ log g1 ...gn Φ(re )dθ
=
2π 0
Z 2π
1
=
log f (reiθ )dθ
2π 0
=
Corollaire 6.1.1 Soit n(x) le nombre de zéros de f à l’intérieur du disque fermé |z| ≤ x.
r
Z
n(x)
1
dx =
x
2π
0
2π
Z
0
log f (reiθ )dθ − log |f (0)|
Démonstration
D’après la formule de Jensen,
1
2π
Z
2π
0
iθ log f (re )dθ − log |f (0)| = log
Il reste donc à montrer que log
log
rn
r1 r2 ...rn
rn
r1 r2 ...rn
= n logr −
=
Rr
n
X
0
rn
r1 r2 ...rn
n(x)
x dx
log(ri )
i=1
n
X
= n log(r) −
log(ri )(i − (i − 1))
i=1
= n(rn )(log(r) − log(rn )) +
n−1
X
i(log(ri+1 ) − log(ri ))
i=1
Z
r
= n
rn
Z
=
0
r
n−1
X
n(x)
dx +
n(ri )
x
i=1
Z
ri+1
ri
1
dx
x
n(x)
dx
x
6.1.3
Application aux fonctions d’ordre 1
Le théorème suivant est un résultat important sur les fonctions d’ordre 1 :
72
Théorème 6.1.2 Soit f une fonction entière d’ordre 1. Alors
1. Les zéros non nuls (ρn ) de f vérifient
1
< +∞
|ρ |1+
n∈N n
X
pour tout > 0
2. De plus pour tout z ∈ C
Y
z
z
1−
eρ
ρ
a+bz
f (z) = e
ρ6=0
où ρ parcourt l’ensemble des zéros non nuls de f et où a et b sont des constantes complexes.
Démonstration
Montrons d’abord que si on note n(x) comme dans le corollaire 6.1.1 on a n(r) = 0(r1+ ) pour
tout > 0. Ce résultat montre donc qu’une fonction d’ordre 1 a relativement peu de zéros dans une
région donnée...
f est d’ordre 1 donc ∀ > 0, il existe une constante A telle que ∀z ∈ C,
1+
f (reiθ ) ≤ A (er )
Soit positif. On a pour tout z = reiθ :
log f (reiθ ) ≤ log(A )r1+
D’après le corollaire 6.1.1
Z
r
0
n(x)
dx < log(A )r1+ + |log(f (0))|
x
Rr
Il existe donc une constante K telle quelle que
Z
r
2r
n(x)
dx ≥ n(r)
x
0
Z
2r
r
n(x)
x dx
< Kr1+ pour tout r > 0. Par ailleurs :
1
dx = n(r)log(2)
x
Donc :
1
n(r) ≤
log2
Z
r
2r
1
1
dx ≤
x
log2
Z
0
2r
1
1
dx ≤
Kr1+
x
log2
On a donc n(r) = 0(r1+ ).
En notant
P(ρn ) la suite des zéros (avec multiplicité) non nuls de f , de modules croissants, montrons
que la série n≥1 |ρ 1|1+ converge.
n
Soit > 0. Il existe A > 0 tel que pour tout r > 0, n(r) < Ar1+ . On a donc en prenant r = |ρn |,
sachant que n(|ρn |) = n,
1
1
1+ < A n1+
|ρn |
73
Et la série converge, son terme général étant majoré par celui d’une série de Riemann convergente.
Pour la démonstration de la deuxième partie de la proposition, considérons le produit infini :
Y
z
z
1−
e ρn
g(z) =
ρn
n∈N
z
z
− z
Ce produit converge uniformément car la série de terme général 1− 1 − ρzn e ρn = e ρn 1 − ρzn − e ρn
converge uniformément sur tout compact.
2
− z
En effet, 1 − ρzn − e ρn = o ρz2 lorsque n → ∞, terme général d’une série qui converge
n
uniformément sur tout compact.
(z)
est une fonction entière d’ordre au plus 1. De plus, h ne
On montre que la fonction h(z) = fg(z)
s’annule pas car f et g ont même zéros avec la même multiplicité.
On peu alors définir log(h(z)), fonction entière développable en série de Taylor au voisinage de
l’origine :
∞
X
log(h(z)) =
bn z n
n=0
Or log |f (z)| = O(r1+ ) implique que pour tout n ≥ 0, bn rn = O(r1+ ). Donc pour n ≥ 2,bn = 0.
Ainsi log(h(z)) = az + b et h(z) = eaz+b .
On a donc f (z) = g(z)eaz+b .
6.2
Zéros triviaux des fonctions L
On présente ici des résultats sur certains zéros des fonctions L associées à des caractères primitifs.
Proposition 6.2.1 L(χ, s) n’a pas de zéros sur le demi-plan σ > 1
Démonstration
Ce résultat est évident par la formule du produit Eulérien : L(χ, s) se présente pour σ > 1 comme
une produit infini absolument convergent donc aucun facteur n’est nul : le produit n’est donc pas nul.
Proposition 6.2.2 Si χ est primitif et pair, alors L(χ, s) a des zéros en s = −2k, k ≥ 1. Si χ est
non trivial, L(χ, s) s’annule également en s = 0
Démonstration
1er cas : χ est trivial
s
ξ(s) = π − 2 Γ 2s ζ(s) est méromorphe avec des pôles simples en s = 0 et s = 1. Γ a des pôles
en −k, k ∈ N, donc Γ 2s a des pôles en −2k, k ∈ N. Λ étant holomorphe en −2k, k ∈ N∗ on a
nécessairement des zéros de ζ en ces points.
2eme cas : χ est non trivial
s
ξ(χ, s) = π − 2 Γ 2s Λ(χ, s) est holomorphe : comme Γ 2s a des pôles en −2k, k ∈ N, L(χ, s), pour
que ξ soit holomorphe en ces points, on doit avoir L(χ, −2k) = 0 pour tout k ∈ N.
74
Proposition 6.2.3 Si χ est primitif et impair, alors L(χ, s) a des zéros en s = −2k − 1, k ∈ N.
Démonstration
La raisonnement est le même que dans la démonstration de la proposition précédente, en utilisant
s+1
L(χ, s)
cette fois la fonction entière ξ(χ, s) = π − 2 Γ s+1
2
Proposition 6.2.4 Pour tout χ primitif, il existe une infinité de zéros de L(χ, s) satisfaisant s 6= 0
et 0 ≤ σ ≤ 1.
Démonstration
Montrons que f (s) = (s(s − 1))δ(χ) Λ(χ, s) admet une infinité de zéros dans o ≤ σ ≤ 1 : ces zéros
correspondent alors à un zéro de L(χ, s) puisque le facteur Γ n’en a pas dans la région considérée.
f est d’ordre 1. D’après le théorème 6.1.2 il existe des constantes a et b telles que
f (z) = e
a+bz
Y
ρ zero6=0
z
z
1−
eρ
ρ
f (1 − s) = f (s), les zéros sont donc symétriques par rapport à la droite σ = 12 . Or si σ > 1, f n’a
pas de zéro (car ni Γ, ni L n’en ont). On peut donc réécrire
f (z) = e
a+bz
Y
ρ zero6=0
0≤Re(ρ)≤1
z
z
1−
eρ
ρ
Si ces zéros sont en nombre finis, il existe une constante b0 et une fonction polynômiale P telles
que
0
f (s) = ea+b s P (s)
√
f (σ)
σ σ
Or on a déjà vu que f (σ) ∼ σ 2δ(χ) πσ 2e
et alors P (σ)e
a+b0 σ tend vers l’infini lorsque σ → ∞,
ce qui est impossible.
Les zéros évoqués dans les propositions 6.2.2 et 6.2.3 sont appelés zéros triviaux des fonctions
L associées à des caractères primitifs. Les zéros triviaux sont des zéros de L(χ, s) mais pas de ξ(χ, s) :
ce sont en quelque sorte des zéros qui « compensent »les pôles de Γ pour que ξ soit holomorphe.
Les autres zéros éventuels des fonctions L sont appelés zéros non triviaux.
6.3
Zéros non triviaux
Le but de cette section est d’expliciter une zone sans zéros pour L un peu à gauche de 1, où la
0 (χ,s)
0 (χ,s)
sera alors holomorphe. Nous établirons également une majoration de LL(χ,s)
dans cette
fonction LL(χ,s)
zone, qui nous sera utile dans la démonstration du théorème des nombres premiers en progression
arithmétique.
Dans cette partie, on prendra la notion ρ = β + iγ pour désigner un zéro non trivial de L. Comme
les zéros triviaux n’annulent pas ξ à cause des pôles de Γ, et que par ailleurs la fonction Γ ne s’annule
pas, les zéros non triviaux correspondent exactement aux zéros de ξ(χ, s) (et donc de f (χ, s)).
75
Résultats préliminaires sur les zéros non triviaux de L
Lemme 6.3.1 q ≥ 1, χ un caractère primitif modulo q.
Il existe un nombre b(χ) ∈ C tel que pour tout s ∈ C qui n’est ni zéro ni pôle de L(χ, s) on ait :
L0 (χ, s)
= δ(χ)
−
L(χ, s)
1
1
+
s s−1
X 1
1
1 Γ0 s + tχ
1
−
+
+
− log(π) − b(χ)
s−ρ ρ
2Γ
2
2
(6.1)
ρ6=0
où on fait la somme sur les zéros non triviaux de L(χ, s)
Démonstration
D’après la proposition 6.1.1, f (s) = ((s − 1)s)δ(χ) ξ(χ, s) est une fonction entière d’ordre 1. Et
d’après le théorème 6.1.2 sur les fonctions holomorphes d’ordres 1, il existe a et b tels que :
δ(χ) −
((s − 1)s)
π
s+tχ
2
Γ
s + tχ
2
a+bs
L(χ, s) = e
Y
s
s
1−
eρ
ρ
ρ6=0
où on fait le produit sur les zéros de f , donc sur les zéros non triviaux de L.
En prenant la dérivée logarithmique, pour s ni zéro ni pôle de L :
δ(χ)
1
1
+
s s−1
1
1 Γ0
− log(π) +
2
2Γ
s + tχ
2
X
L0 (χ, s)
+
=b+
L(χ, s)
ρ6=0
1
1
+
s−ρ ρ
s
eρ
D’où la formule (6.1) : la constante b dépend en fait de χ.
Lemme 6.3.2 Soit χ un caractère primitif. Notons ρ = β + iγ les zéros de ξ(χ, s) (zéros non triviaux
de L). Il vérifient les propriétés suivantes :
(1) 0 ≤ β ≤ 1
(2) ρ est un zéro de ξ(χ, s) ssi ρ̄ est un zéro de ξ(χ̄, s), ssi 1 − ρ est un zéro de ξ(χ̄, s).
(3) Pour tout > 0, la série suivante converge absolument :
X
ρ6=0
1
|ρ|1+
(4) Pour tout s ∈ C qui n’est pas un zéro de ξ(χ, s), la série suivante converge absolument :
X
ρ6=s
Re
1
s−ρ
(5) Si b(χ) est le nombre complexe défini dans le lemme précédent, on a :
X
1
Re(b(χ)) = − log(q) −
Re
2
ρ6=0
76
1
ρ
(6.2)
Démonstration
(1) Comme L ne s’annule pas sur σ >, ξ ne s’annule pas dans cette zone. L’équation fonctionnelle
nous montre aussi que ξ ne s’anulle pas sur σ < 0. Les zéros de ξ sont donc situés dans la « bande
critique » 0 ≤ σ ≤ 1.
(2) Comme L(χ̄, s) = L(χ, s̄), on a aussi ξ(χ̄, s) = ξ(χ, s̄) et donc par l’équation fonctionnelle on a
le résultat souhaité
P
(3) Comme la fonction f est d’ordre 1, d’après la partie 1 du théorème 6.1.2, la série ρ6=0 |ρ|11+
converge absolument, en sommant sur les zéros non nuls de f . Or ξ et f ont les même zéros.
(4)
1
s−ρ
=
s−ρ
|s−ρ|2
donc
|Re(s − ρ)|
1
1
=
Re
=O
s−ρ |s − ρ|2
|ρ|2
La constante du O dépend de s, fixé. Or d’après la partie (3) de ce lemme,
P
1
ρ6=0 |ρ|2
< ∞ donc
X 1 Re
< ∞
s−ρ ρ6=s
(5) Soit χ non trivial (la cas trivial se traite de manière similaire). D’après l’équation fonctionnelle :
1
ξ(χ, s) = (χ)q 2 −s ξ(χ̄, 1 − s)
En prenant la dérivée logarithmique :
−
1
ξ 0 (χ, s) ξ 0 (χ̄, 1 − s)
+
= − log(q)
ξ(χ, s)
ξ(χ̄, 1 − s)
2
Or d’après le lemme précédent :
X
ξ 0 (χ, s)
= b(χ) +
ξ(χ, s)
ρ6=0
1
1
+
s−ρ ρ
En remplaçant dans l’équation précédente :
X 1
1
1
1
b(χ) + b(χ̄) +
+ +
+
= −log(q)
s − ρ ρ 1 − s − ρ̄ ρ̄
ρ6=0
D’après (2) on peut en effet noter ρ̄ les zéros de ξ(χ̄, s) où ρ désigne ceux de ξ(χ, s). Comme
L(χ̄, s) = L(χ, s̄), on voit en appliquant (6.1) à χ̄ que b(χ̄) = b(χ), donc :
2Re(b(χ)) = −
X 1
1
1
1
+ +
+
− log(q)
s − ρ ρ 1 − s − ρ̄ ρ̄
ρ6=0
1
s−ρ +
1 1−s−ρ̄ =O
1
|ρ|2
: cette série converge absolument, on peut donc réordonner les termes :
1
1
1
1
+
=
−
s − ρ 1 − s − ρ̄
s − ρ (1 − ρ̄) − s
77
Et 1 − ρ̄ est zéro de ξ(χ, s) d’après (2) donc
P
ρ6=0
1
s−ρ
+
1
1−s−ρ̄
= 0. Finalement :
X1
1
Re(b(χ)) = − log(q) −
2
ρ
ρ6=0
Lemme important
Lemme 6.3.3 Soit q ≥ 1 et χ un caractère primitif modulo q.
(1) Soit T ≥ 0. Le nombre m(T, χ) de zéros de L(χ, s) tels que 0 ≤ β ≤ 1 et T ≤ γ ≤ T + 1 vérifie
m(T, χ) = O (log(q(T + 2)))
(6.3)
(2) Pour 0 ≤ σ ≤ 2, et s n’étant ni zéro ni pôle de L(χ, s) on a :
L0 (χ, s)
= δ(χ)
−
L(χ, s)
1
1
+
s s−1
X
−
|s−ρ|≤1
1
+ O (log(q|s|))
s−ρ
(6.4)
(3) Soit σ ≥ 1. Alors pour tout sous-ensemble fini X de zéros non triviaux ρ de L(χ, s) on a
X
Re
ρ∈X
1
s−ρ
< Re
L0 (χ, s)
L(χ, s)
+ δ(χ)Re
1
s−1
+ O (log(q|s|))
(6.5)
Dans ces trois assertions, les constantes correspondant aux O sont absolues.
Démonstration
(1) Posons s = 2 + iT avec T ≥ 2. On a
0
X
ζ 0 (2)
Re L (χ, s) ≤
Λ(n)n−2 = −
= O (1)
L(χ, s)
ζ(2)
n≥1
Grâce à la formule de Stirling dérivée (3.12) on a par ailleurs, pour s quelconque dans 0 ≤ σ ≤ 2 :
Γ0
Γ
s + tχ
2
= O (log(1 + |t|))
On rappelle
que pour tout ρ, 0 ≤ β ≤ 1. On sait d’après le lemme 6.3.2 que la série de terme
1
général Re s−ρ converge. Minorons maintenant cette série :
Re
1
s−ρ
=
2−β
1
≥
2
2
(2 − β) + (T − γ)
4 + (T − γ)2
Si γ ∈ [T ; T + 1] alors (T − γ)2 ≤ 1 et Re
Si γ ∈
/ [T ; T + 1] alors (T −
γ)2
> 1 et Re
1
s−ρ
≥
1
5
1
s−ρ
≥
1
4(T −γ)2 +(T −γ)2
78
=
1
5|t−γ|2
Ainsi, Re
1
s−ρ
1
≥ 15 min 1, |T −γ|
2
En prenant la partie réelle de (6.1) :
X
min 1,
ρ6=0
1
|T − γ|2
≤ 5
X
1
s−ρ
L0 (χ, s)
L(χ, s)
Re
ρ6=0

1 Γ0
2Γ
s + tχ
+ Re
= 5 Re
2


X 1

= O 1 + log(T ) + Re(b(χ)) +
ρ
ρ6=0 
X1
1

− log(π) − Re(b(χ)) −
2
ρ
ρ6=0
P
D’après la formule (5) du lemme 6.3.2, Re(b(χ)) + ρ6=0 ρ1 = 12 log(q) donc
X
min 1,
ρ6=0
1
|T − γ|2
= O (log(qT ))
(6.6)
D’autre part,
X
min 1,
ρ6=0
1
|T − γ|2
=
X
1+
ρ6=0
T ≤γ≤T +1
X
ρ6=0
γ ∈[T
/ ;T +1]
1
= m(χ, T ) + A
|T − γ|2
A est une constante positive donc a fortiori, m(χ, T ) = O (log(qT ))
(2) Ecrivons la dérivée logarithmique de L de la manière suivante :
−
L0 (χ, s) L0 (χ, 2 + it)
L0 (χ, s)
=−
+
+ O (1)
L(χ, s)
L(χ, s)
L(χ, 2 + it)
On utilise cette écriture pour supprimer la constante b(χ) intervenant dans le développement de
la formule (6.1) :
L0 (χ, s)
−
L(χ, s)
X
X 1
1
1
1
1
1
= δ(χ)
−
+
− δ(χ)
+
+
+
+ O (1)
s−ρ ρ
2 + it 1 + it
2 + it − ρ ρ
ρ6=0
ρ6=0
X
1
1
1
1
1
1
= δ(χ)
+
+
−
− δ(χ)
+
+ O (1)
s s−1
2 + it − ρ σ + it − ρ
2 + it 1 + it
ρ6=0
X
1
1
1
1
= δ(χ)
+
+
−
+ O (log|t|)
(6.7)
s s−1
2 + it − ρ σ + it − ρ
1
1
+
s s−1
ρ6=0
Dans la somme sur les zéros, considérons séparemment les zéros proches de s, càd ceux vérifiant
|s − ρ| ≤ 1 et les zéros tels que |s − ρ| ≥ 1.
Si |s − q| ≥ 1, on a :
– |s − q|2 = (σ − β)2 + (t − γ)2 ≥ |t − γ|2 donc |s − q| ≥ |t − γ| Ainsi, |s − q| ≥ max(1, |t − γ|)
79
– |2 + it − q|2 = (2 − β)2 + (t − γ)2 ≥ |t − γ|2 donc |2 + it − q| ≥ |t − γ|
Comme il n’y a aucun zéro dans la bande 1 < σ ≤ 2 on a de plus |2 + it − q|2 ≥ 1. Ainsi,
|2 + it − q| ≥ max(1, |t − γ|)
1
1
|2 − σ|
1
2 + it − ρ − σ + it − ρ = |s − ρ||2 + it − ρ| ≤ 2 min 1, |t − γ|2
X
X
1
1
1
= O (log(q|t|))
−
min 1,
≤2
|t − γ|2
|s−ρ|>1 2 + it − ρ σ + it − ρ ρ6=0
(6.8)
d’après l’équation (6.6)
P
1
Estimons maintenant |s−ρ|≤1 2+it−ρ
. Comme on l’a déjà vu précédemment, pour tout ρ on a
1
|2 + it − ρ| ≥ 1 car il n’y a pas de zéro à droite de 1. Donc 2+it−ρ
≤ 1. Alors :
X
1
|s−ρ|≤1 2 + it − ρ
≤ Card{ρ | |s − ρ| ≤ 1} ≤ m(t, χ) = O (log(q|t|)
(6.9)
d’après (6.3). Reprenons maintenant l’équation (6.7) :
L0 (χ, s)
= δ(χ)
−
L(χ, s)
X
X
X 1
1
1
1
1
1
+
−
+
+
+
+O (log(q|t|))
s s−1
s−ρ
2 + it − ρ
s − ρ 2 + it − ρ
|ρ−s|≤1
|ρ−s|≤1
|ρ−s|>1
Compte tenu de (6.8) et (6.9) on a alors :
L0 (χ, s)
= δ(χ)
−
L(χ, s)
1
1
+
s s−1
−
X
|ρ−s|≤1
1
+ O (log(q|s|))
s−ρ
(3) Prenons maintenant s tel que σ ≥ 1
Re
1
s−ρ
=
σ−β
≥0
|s − ρ|2
(6.10)
En prenant la partie réelle dans la formule (6.4) :
X
Re
|ρ−s|≤1
Et Re
1
s
=
1
s−ρ
σ
σ 2 +t2
= Re
L0 (χ, s)
L(χ, s)
1
1
+ δ(χ) Re
+ Re
+ O (log(q|s|))
s
s−1
≤ 1.
Soit X un sous-ensemble fini de zéros de L et soit X 0 = X ∩ {ρ tq|s − ρ| ≤ 1}. Comme les sommes
sont à termes positifs d’après (6.10), on peut écrire :
X
ρ∈X 0
Re
1
s−ρ
≤
X
|ρ−s|≤1
Re
1
s−ρ
= Re
80
L0 (χ, s)
L(χ, s)
+ δ(χ)Re
1
s−1
+ O (log(q|s|))
X
Re
ρ∈X−X 0
1
s−ρ
≤
X
Re
|ρ−s|>1
1
s−ρ
X 1 ≤
s − ρ = O (log(q|s|))
|ρ−s|>1
Finalement,
X
Re
ρ∈X
1
s−ρ
= Re
L0 (χ, s)
L(χ, s)
+ δ(χ)Re
1
s−1
+ O (log(q|s|))
Zone sans zéros pour L
Grâce aux lemmes précédents, on peut maintenant démontrer ce théorème :
Théorème 6.3.1 Soit q ≥ 1. Il existe une constante c > 0 telle que pour tout caractère χ modulo q,
la fonction L(χ, s) n’a pas de zéro pour s = σ + it dans la région :
σ >1−
1
= 1 − 2σ(t)
c(log(q(|t| + 2)))
(6.11)
De plus, pour s dans la région
σ ≥ 1 − σ(t)
on a le majoration
L0 (χ, s)
=O
L(χ, s)
δ(χ)
+ O log 2 (q|s|)
|s − 1|
(6.12)
où les constantes implicites sont absolues
La figure suivante montre la zone sans zéro que l’on obtient alors :
81
(6.13)
Démonstration
Pour σ > 1 on a :
X
L0 (χ, s)
Λ(n)χ(n)n−s
=
L(χ, s)
n≥1
0
X
L (χ, s)
Λ(n)Re(χ(n)n−it )n−σ
=
−Re
L(χ, s)
−
n≥1
3|z|+4Re(z)+Re(z 2 ) = |z|(3+4cos(θ)+cos(2θ)) = |z|(2+4cos(θ)+2cos2 (θ)) = 2|z|(cos(θ)+1)2 ≥ 0
Cette inégalité appliquée à z = χ(n)n−it , de module 1 donne
3 + 4Re(χ(n)n−it ) + Re(χ2 (n)n−2it ) ≥ 0
En multipliant par n−σ et on sommant sur n on obtient, pour σ > 1 :
−3Re
ζ 0 (σ)
ζ(σ)
− 4Re
L0 (χ, σ + it)
L(χ, σ + it)
− Re
L0 (χ2 , σ + 2it)
L(χ2 , σ + 2it)
≥0
(6.14)
Soit X un sous-ensemble de zéros non triviaux de L(χ, s). Appliquons maintenant la formule (6.5) :
4
X
Re
ρ∈X
1
σ + it − ρ
L0 (χ, σ + it)
1
+ 4δ(χ)Re
+ O (log(q|s|))
L(χ, σ + it)
σ + it − 1
0 2
0
L (χ , σ + 2it)
1
ζ (σ)
− Re
+ 4δ(χ)Re
+ O (log(q|s|))
< −3Re
ζ(σ)
L(χ2 , σ + 2it)
σ + it − 1
< 4Re
d’après (6.14). On réapplique maintenant la formule (6.5) aux caractères 1 et χ2 en choisissant
pour ensemble fini de zéros X = ∅ :
ζ 0 (σ)
1
+ Re
+ O (log(q|s|))
ζ(σ)
σ−1
0 2
L (χ , σ + 2it)
1
2
0 < Re
+ δ(χ )Re
+ O (log(q|s|))
L(χ2 , σ + 2it)
σ + 2it − 1
0 < Re
D’où finalement la formule :
4
X
Re
ρ∈X
1
σ + it − ρ
3
≤
+ 4δ(χ)Re
σ−1
1
s−1
2
+ δ(χ )Re
1
σ − 1 + 2it
+ O (log(q|s|))
Précisons le terme d’erreur. Il existe une constante c > 0 telle que pour l(t) = c log(q(|t| + 2)) :
4
X
ρ∈X
Re
1
σ + it − ρ
3
≤
+ 4δ(χ)Re
σ−1
1
s−1
82
2
+ δ(χ )Re
1
σ − 1 + 2it
1
+ l(t)
2
(6.15)
Comme L(χ, 1) 6= 0 pour tout χ non trivial et que ζ possède un pôle en 1, il existe 0 < ≤ 21 tel
que pour tout χ modulo q, L(χ, s) ne s’annule pas dans le carré suivant de centre 1 et de côté 2 :
On s’intéresse maintenant aux zéros éventuels de L situés dans la zone 1− ≤ σ ≤ 1. Soit ρ = β +iγ
un zéro quelconque dans cette région.
Prenons s = σ + it avec 1 < σ ≤ 2 et t = γ. On a |t| > et (s − ρ) ∈ R.
1
4(σ − 1)
2
1
4Re
=
< 2 ≤ l(t)
2
2
s−1
(σ − 1) + t
4
pour c assez grand. De même on a
Re
1
σ − 1 + 2it
1
≤ l(t)
4
Prenons maintenant pour ensemble X dans la formule (6.15) la singleton X = {ρ} :
1
3
4Re
≤
+ l(γ)
(σ + iγ) − (β + iγ)
σ−1
3
4
≤
+ l(γ)
σ−β
σ−1
Cette formule devient fausse pour σ proche de 1 si β est trop proche de 1. Posons σ = 1 +
4
σ−β
4
7l(γ)
1
2l(γ)
≤ 7l(γ)
≤ 1−β+
β ≤ 1−
1
2l(γ)
1
14l(γ)
On a donc une relation entre la partie réelle et la partie imaginaire d’un zéro non trivial. Il n’y a
pas de zéro pour s = σ + it dans la zone :
σ ≥1−
1
14clog(q(|t| + 2))
et
|t| > 1
Pour c assez grand, on a même 14clog(2q)
≤ et dans ce cas, la formule devient aussi valable pour
|t| ≤ . Ainsi, il existe c tel que dans la région suivante, L(χ, s) n’admet pas de zéro :
σ ≥1−
1
clog(q(|t| + 2))
83
Soit s = σ + it dans la zone σ ≥ 1 − σ(t). s n’est pas zéro de L(χ, s) et on a d’après (6.4) :
L0 (χ, s)
−
= δ(χ)
L(χ, s)
1
1
+
s s−1
−
X
|s−ρ|≤1
1
+ O (log(q|s|))
s−ρ
où la constante implicite est indépendante de χ (possible car il y φ(q) caractères mod q)
Si ρ vérifie |γ − t| > 1, le zéro est tel que |s − ρ| > 1, donc on ne prend en compte dans la somme
ci-dessus que les zéros de L situés dans la bande horizontale
t−1≤γ ≤t+1
Soit t ≥ 1
Dans la zone t − 1 ≤ γ ≤ t, on a |s − ρ| ≥ σ(t) et au plus m(t − 1, χ) zéros
Dans la zone t ≤ γ ≤ t + 1 on a |s − ρ| ≥ σ(t + 1) et au plus m(t, χ) zéros
X
1 ≤
|s−ρ|≤1 s − ρ X
|s−ρ|≤1
1
1
1
≤ m(t − 1, χ) ×
+ m(t, χ) ×
|s − ρ|
σ(t)
σ(t + 1)
≤ K log(q(t + 2))log(q(t − 1 + 2)) + K 0 log(q(t + 1 + 2))log(q(t + 2))
= O log 2 (q|s|)
d’après (6.3)
P
Si t ≤ 1, |s−ρ|≤1
1 s−ρ ≤
1
|s̄−ρ̄≤1 |s−ρ|
P
Comme de plus |s| ≥ 1 − ≥
−
1
2
on a
1
s
et on se ramène au cas précédent.
= O (1). Ainsi :
L0 (χ, s)
=O
L(χ, s)
δ(χ)
+ O log 2 (q|s|)
|s − 1|
84
Septième partie
Théorèmes des nombres premiers
85
Soit q et a deux entiers premiers entre eux.
7.1
Le théorème des nombres premiers
Nous allons montrer le théorème suivant, équivalent au théorème des nombres premiers, comme
on l’a vu dans la partie 3.2 :
Théorème 7.1.1 Lorsque x tend vers l’infini, ψ(x) ∼ x
Nous allons d’abord montrer que ∀t ∈ R, ζ(1 + it) 6= 0 puis nous verrons que le théorème précédent
est équivalent à cette non-annulation de la fonction ζ sur la droite de partie réelle 1.
Avec un tel résultat sur la fonction zeta de Riemann on montre, comme on le verra :
ψ(x) = x + o(x)
Mais pour obtenir un terme d’erreur plus précis que le o(x) ci-dessus, il faut trouver une zone
une peu à gauche de la droite σ = 1 sur laquelle ζ ne s’annule pas. On pourra alors déplacer le
contour d’intégration
0 vers la gauche et obtenir le terme d’erreur grâce à des majoration de la dérivée
(s) logarithmique − ζζ(s)
dans de telles zones.
7.1.1
Non annulation de ζ sur σ = 1
Proposition 7.1.1 Pour σ > 1 on a
3
ζ (σ)ζ 4 (σ + it)ζ(σ + 2it) ≥ 1
(7.1)
Démonstration
On se place sur le domaine σ > 1. ζ(s) 6= 0 , à cause de la formule du produit infini. On peut donc
définir log(ζ(s)).
ζ(s) =
Y
p∈P
log(ζ(s)) =
X
1
1 − p−s
log(
p∈P
log(ζ(s)) =
X
1
)
1 − p−s
−log(1 − p−s )
p∈P
Comme |p−s | < 1, on a
log(ζ(s)) =
X X (p−s )n
p∈P n≤1

ζ(s) = exp 
n
=
X X p−sn
p∈P n≤1
X X p−sn
p∈P n≤1
86
n


n
Si s = exp(z), |s| = exp(Re(z)), donc :


|ζ(s)| = exp Re 
X X p−sn
p∈P n≤1

|ζ(s)| = exp 
XX
p∈P n≤1
Re
n



p−sn 
n
Or :
p−sn
n
=
=
p−σn p−itn
p−σn
=
exp(−itnlog(p))
n
n
p−σn
(cos(nlog(p)t) − i sin(nlog(p)t))
n
Donc :


|ζ(s)| = exp 
X X cos(nlog(p)t)
p∈P n≤1
npσn

Et pour tout k ∈ N on a alors


X
X
k cos(nlog(p)t) 
|ζ(s)|k = exp 
npσn
p∈P n≤1
Et finalement, grâce aux propriétés de l’exponentielle on a :
3
ζ (σ)ζ 4 (σ + it)ζ(σ + 2it) = |ζ(σ)|3 |ζ(σ + it)|4 |ζ(σ + 2it)|


X X 3 + 4cos(nlog(p)t) + cos(2nlog(p)t)

= exp 
npσn
p∈P n≤1
Posons φ = nlog(p)t. Alors 3 + 4cos(φ) + cos(2φ) ≥ 0. En effet :
3 + 4cosφ + cos(2φ) = 3 + 4cosφ + 2cos2 φ − 1
= 2(1 + 2cosφ + cos2 φ
= 2(1 + cosφ)2 ≥ 0
L’argument de l’exponentielle est donc positif d’où ζ 3 (σ)ζ 4 (σ + it)ζ(σ + 2it) ≥ 1.
Corollaire 7.1.1 Pour tout t ∈ R, ζ(1 + it) 6= 0
87
Démonstration
Prenons σ > 1 et supposons qu’il existe t0 ∈ R∗ tel que ζ(1 + it0 ) = 0.
3
4
3
3
ζ (σ)ζ (σ + it0 )ζ(σ + 2it0 ) = ζ (σ)(σ − 1)
ζ 4 (σ + it0 )
(σ − 1)4
(ζ(σ + 2it0 )(σ − 1))
Lorsque σ → 1, ζ 3 (σ)(σ − 1)3 est borné car ζ 3 possède un pôle d’ordre exactement 3 en 1. L’ex4 (σ+it )
0
est également bornée car ζ 4 possède un zéro d’ordre au moins 4 en 1 + it0 . Et
pression ζ (σ−1)
4
|ζ(σ + 2it0 )(σ − 1)| → 0 lorsque σ → 1.
Ainsi ζ 3 (σ)ζ 4 (σ + it)ζ(σ + 2it) → 0 lorsque σ → 1. En contradiction avec la proposition 7.1.1.
7.1.2
Démonstration du théorème des nombres premiers
La non-annulation de ζ que nous venons de prouver suffit à démontrer le théorème des nombres
premiers. Nous allons pour cela utiliser le théorème suivant, dû à Wiener et Ikehara, que nous admettrons.
ThéorèmeR7.1.2 (Théorème de Wiener-Ikehara) Soit α une fonction positive et croissante telle
∞
que f (s) = 0 e−su α(u)du soit définie pour σ > a > 0.
Si il existe A > 0 tel que f (s) −
A
s−a
soit holomorphe sur la droite σ = a. Alors
Aeau
∼
α(u)
u→∞
D’après la formule (3.1) on a l’expression suivante de la dérivée logarithmique de ζ :
ζ 0 (s)
−
=s
ζ(s)
∞
Z
1
ψ(x)
dx
xs+1
On obtient après le changement de variable x = eu :
ζ 0 (s)
−
=s
ζ(s)
∞
Z
ψ(eu )e−su dx
0
Donc
Z
f (s) =
∞
e−su ψ(eu )dx = −
0
La fonction f (s) −
1
s−1
1 ζ 0 (s)
s ζ(s)
est holomorphe sur σ = 1 car au vu de la non annulation de ζ sur cette
ζ 0 (s)
droite, la fonction − ζ(s) est méromorphe sur σ ≥ 1 avec un unique pôle simple en 1 de résidu 1.
D’après le théorème de Wiener-Ikehara, on a alors
ψ(eu )
∼
u→∞
88
eu
On a donc lim
x→∞
ψ(x)
x
= 1 soit :
∼
ψ(x)
x
x→∞
7.1.3
Equivalence avec la non-annulation de ζ
On a vu que ζ(1 + it) 6= 0 implique le théorème des nombres premiers, nous allons voir maintenant
que le théorème des nombres premiers implique que ζ(1 + it) 6= 0. Ces deux résultats sont donc
équivalents.
Proposition 7.1.2 Si ψ(x) ∼ x lorsque x → ∞, alors ζ(1 + it) 6= 0 pour tout t ∈ R
Démonstration
0
(σ+it)
Soit t 6= 0. Nous allons montrer que la fonction ζζ(σ+it)
n’admet pas de pôle lorsque σ → 1 : on
0
aura alors le résultat puisque le numérateur ζ (s) n’admet pas de pôle en s = 1 + it si t 6= 0.
On a pour s = σ + it avec σ > 1 et t 6= 0 , d’après (3.1) :
ζ 0 (s)
−
=s
ζ(s)
∞
Z
1
ψ(x)
dx
xs+1
Et d’après le théorème des nombres premiers, on peut écrire ψ(x) = x + δ(x), où δ(x) = o(x).
ζ 0 (s)
ζ(s)
ζ 0 (s)
−
ζ(s)
−
La fonction
s
s−1
Z ∞
1
δ(x)
dx
+
s
dx
s
x
xs+1
1
1
Z ∞
s
δ(x)
+s
dx
s−1
xs+1
1
Z
∞
= s
=
est holomorphe en 1 + it. montrons qu’il en est de même pour g(s) =
R∞
1
δ(x)
dx
xs+1
Comme δ(x) = o(x), pour tout > 0, il existe un réel x0 (dépendant de ) tel que pour tout x ≥ x0 ,
|φ(x)| ≤ x. Ainsi :
Z
|g(s)| ≤
1
Pour 1 < σ ≤ 1 +
x0
|δ(x)|
dx + xσ+1
Z
∞
x0
1
dx = K +
σ
x
σ−1
K− ,
|(σ − 1)g(s)| ≤ 2
(7.2)
Et |(σ − 1)g(s)| = |((σ + it) − (1 + it))g(σ + it)|.
Si g admet un pôle en 1 + it on a deux possibilités :
– Si ce pôle est simple, (σ + it) − (1 + it))g(σ + it) tend vers le résidu de ce pôle et donc vers une
limite non nulle lorsque σ tend vers 1
89
– Si ce pôle est multiple, |(σ + it) − (1 + it))g(σ + it)| tend vers l’infini lorsque σ tend vers 1
Dans les deux cas on a une contradiction avec l’inégalité (7.2), valable pour tout .
0
(s)
Donc la fonction g est holomorphe en 1 + it , ce qui implique que − ζζ(s)
l’est aussi et donc que ζ
ne s’annule pas sur cette droite.
7.1.4
Théorème des nombres premiers avec un terme d’erreur
Nous allons maintenant obtenir une version « améliorée » du théorème des nombres premier avec
un terme d’erreur le plus précis possible. Grâce à la formule d’inversion de Mellin on obtient, pour
a > 1 (cf. formule (3.18)) :
Z
−
ψ(x) =
(a)
ζ 0 (s) xs
ds
ζ(s) s
Comme ζ(1 + it) 6= 0, pour un réel fixé T , il existe une zone de la forme
1 − β(T ) ≤ σ ≤ 2
−T ≤
t
≤T
0
(s)
est méromorphe et n’a qu’un seul pôle, en 1. Le problème et que β(T ) peut tendre vers
où − ζζ(s)
0
s
(s) x
0 lorsque T tend vers l’infini... On ne peut donc pas se ramener à une intégrale verticale de − ζζ(s)
s
sur une droite du type σ = 1 − β. Dans la suite, on ne va donc pas directement déplacer le contour
d’intégration vers la gauche comme on l’avait fait dans la partie 3.6 pour passer de l’intégrale verticale
sur une droite située à droite de 1 à l’intégrale sur une droite veticale située à gauche de 1, mais on
0 (s) s
x
va intégrer la fonction − ζζ(s)
s sur un contour du type suivant pour essayer d’évaluer l’intégrale qui
définit ψ(x) à l’aide du théorème des résidus.
Fig. 7.1 – Contour d’intégration
90
0
(s)
Pour évaluer ψ, on aura besoin de pouvoir évaluer ζ(s), ζ 0 (s) ou encore − ζζ(s)
dans des rectangles
bien choisis : nous allons d’abord établir les estimations qui nous serons utiles par la suite.
0
Estimations de ζ, ζ 0 et − ζζ
Proposition 7.1.3 Soit n ≥ 1 quelconque.
Pour tout s tel que σ > 0 on a la formule :
ζ(s) =
n−1
X
k=1
n−s
1
n1−s
+
+
−s
ks
2
s−1
Z
∞
n
x − [x] − 12
dx
xs+1
(7.3)
Démonstration
Par intégration par partie, on a :
Z
n+1
n
1 −s
(x − [x] − ) s+1 dx =
2 x
=
Z n+1
1
1 1
1
−
+
dx
s
s
2 n
(n + 1)
xs
n
1
1
1
1
1 1
+
+
−
2 ns (n + 1)s
s + 1 (n + 1)s−1 ns−1
Et
N
X
1
ks
=
k=n
=
=
N −1 n−s X 1 1
1
N −s
+
+
+
2
2 ns (n + 1)s
2
k=n
N −1 Z k+1
N −1 [x] − x + 12
1 X
1
1
n−s N −s X
+
+
s
dx +
−
2
2
xs+1
s+1
k s−1 (k + 1)s−1
k
k=n
k=n
Z N
[x] − x + 12
n−s N −s
1
1
1
+
+s
dx +
−
2
2
xs+1
s + 1 ns−1 N s−1
n
[x]−x+ 1 Lorsque N tend vers l’infini, l’intégrale converge car xs+1 2 = O
1
xσ+1
et σ > 0.
On a donc lorsque N → ∞ la formule suivante, valable pour σ > 0 :
Z ∞
∞
X
[x] − x + 12
n−s
n1−s
1
+
+
s
=
dx
ks
2
s+1
xs+1
n
k=n
On en déduit la proposition
En utilisant cette nouvelle écriture de ζ montrons le théorème suivant :
91
Théorème 7.1.3 Soit A > 0 une constante. Il existe t0 > 0 tel que dans la région
1−
A
≤ σ ≤2
log|t|
|t| > t0 > 1
on ait ζ(s) = O(log|t|) uniformément.
En d’autres termes, il existe une constante K telle que pour tout s dans cette région,
|ζ(s)| ≤ K|log|t||
(la constante K dépend uniquement de A)
Démonstration
D’après la proposition 7.1.3 on a pour σ > 0
Z ∞
N
X
x − [x] − 12
1
N −s N 1−s
ζ(s) −
=
+
−
s
dx
ns
2
s−1
xs+1
N
n=1
On a donc :
Z
N
X
N 1−σ
N −σ
1 |s| ∞ 1
≤
dx
+
+
ζ(s)
−
ns 2 N x1+σ
|s − 1|
2
n=1
Et |s| =
√
σ 2 + t2 ≤
De plus, |s − 1| =
√
4 + t2 ≤ 5|t| pour |t| > 1 (par exemple)
p
(σ − 1)2 + t2 ≥ |t| donc
1
|s−1|
≤
1
|t|
Ainsi,
1−σ Z ∞
N
X
1 1
N
dx + O
+ O N −σ
ζ(s) −
= O |t|
s
1+σ
n |t|
N x
n=1
Si n ≤ |t|
|n
−s
log(n)
log|t|
|=n
−σ
≤1 ,
=e
(−σlog(n))
≤ exp − 1 −
A
log|t|
Prenons N = [ |t| ]. Dans ce cas si n ≤ N , n−s
N 1−σ = N N −σ = O(1).
Alog(n)
eA
−1
log(n) = n exp
≤
log|t|
n
= O n1 et de même, N −σ = O N1 . Enfin,
Finalement,
ζ(s) =
N
X
n=1
|t|
1
1
1
O
+O
+O
+O
n
N
|t|
N
= O (log(N )) + O (1) = O (log|t|)
92
Théorème 7.1.4 Dans la même région que dans le théorème 7.1.3
ζ 0 (s) = O log 2 |t|
Démonstration
On procède comme dans la démonstration précédente en partant de la relation :
ζ 0 (s) = −
N
X
log(n)
2
ns
Z
∞
+
N
[x] − x + 21
N 1−s log(N )
N 1−s
1
(1
−
s
log(x))dx
−
−
+ N −s log(N )
s+1
2
x
s−1
(s − 1)
2
Cette relation s’obtient en dérivant la relation (7.3) : on évalue ensuite chaque terme de la somme
en prenant N = [ |t| ] et voit apparaı̂tre un log|t| en facteur supplémentaire.
Théorème 7.1.5 Il existe une constante réelle positive c et t0 > 0 tels que ζ(s) n’a pas de zéro dans
la région
σ > 1−
c
log 9 |t|
|t| > t0
De plus dans cette même région,
1
= O log 7 |t|
ζ(s)
Démonstration
D’après la formule (7.1), pour σ > 1 on a
3
1
1
4
4
ζ(σ + it) ≤ |ζ(σ)| |ζ(σ + 2it)|
1
Et (σ − 1)ζ(σ) est borné au voisinage de 1 et dans la région 1 ≤ σ ≤ 2 donc ζ(σ) = O (σ−1)
dans cette zone. On se trouve en particulier dans la zone définie dans la théorème 7.1.3 (avec une
valeur de A quelconque que l’on fixe) donc ζ(σ + 2it) = O (log(|t|)). Ainsi :
1
ζ(σ + it) = O
Avec σ > 1 −
A
log(t) ,
1
log 4 |t|
!
3
(σ − 1) 4
|t| > t0 on a aussi :
Z
ζ(1 + it) − ζ(σ + it) = −
σ
ζ 0 (u + it)du = O (σ − 1)log 2 |t|
1
Il existe alors une constante A1 telle que
93
(7.4)
|ζ(σ + it)| − |ζ(1 + it)| < A1 (σ − 1)log 2 |t|
1 Et il existe A2 telle que ζ(σ+it)
<
1
1 log 4 |t|
3
A2
(σ−1) 4
(pour σ compris entre 1 et 2) et donc |ζ(σ + it)| >
3
4
. On a alors l’inégalité :
A2 (σ−1)
1
log 4 |t|
3
|ζ(1 + it)| > A2
(σ − 1) 4
1
4
log |t|
− A1 (σ − 1)log 2 |t|
Prenons maintenant σ − 1 = A3 log −9 |t|
3
|ζ(1 + it)| > (A2 A34 − A1 A3 )log −7 |t|
Pour A3 suffisement petit, le terme de droite et positif. Il existe donc B tel que
|ζ(1 + it)| > B log −7 |t|
(7.5)
Reprenons maintenant la formule (7.4) avec cette fois 1 > σ > 1 −
A
log|t| .
On a l’inégalité
|ζ(σ + it)| > B log−7 |t| − A4 (1 − σ)log 2 |t|
Prenons maintenant σ tel que 1 − σ < c log −9 |t| alors :
|ζ(σ + it)| > (B − A4 c)log −7 (|t|)
En prenant c suffisament petit, on réalise à la fois la condition B −A4 c >
B
2
A
et 1− log|t|
< 1− logc9 |t| .
On a alors l’existence d’un triplet (c, A, t0 ) tel que dans la région σ > 1 − c log −9 |t|, |t| > t0 on ait
uniformément :
|ζ(σ + it)| > Alog −7 |t|
En particulier, ζ ne s’annule pas dans cette zone et on a bien
1
= O log 7 |t|
ζ(s)
Théorème 7.1.6 Il existe c et t0 tel que dans la région 2 ≥ σ > 1 −
ζ 0 (s)
= O(log 9 (t))
ζ(s)
( la constante du O ne dépendant que de c)
Démonstration
Découle des théorème 7.1.4 et 7.1.5
94
c
,
log 9 |t|
|t| > t0
Demonstration du théorème des nombres premiers
Théorème 7.1.7 (Théorème des nombres premiers) Il existe une constante d telle que
1
ψ(x) = x + O xexp[−d(log(x)) 10 ]
lorsque x → ∞
Démonstration
Soit T > t0 . Posons s0 (T ) = 1 −
c
.
log 9 (T )
On choisit T tel que ζ n’ait pas de zéro dans le rectangle de sommet s0 (T ) + it0 , so (T ) − it0 , 2 − it0 ,
2 + it − 0 : cela existe car ζ ne s’annule pas sur σ ≥ 1. (t0 est la constante définie dans le théorème
7.1.5).
Prenons maintenant σ + it avec T > |t|
Posons a = 1 +
c
log 9 (T )
et b = 1 −
c
.
log 9 (T )
On considère le rectangle RT (cf. figure 7.2)
∀|t| > t0 à l’intérieur du rectangle ci-dessus on a σ > 1 −
c
log 9 (T )
>1−
c
log 9 |t|
donc :
ζ 0 (s)
= O(log 9 (T ))
ζ(s)
En particulier,
ζ 0 (σ ± iT )
= O(log 9 (T ))
ζ(σ ± iT )
0
est
A l’intérieur du rectangle considéré, ζ ne s’annule pas (voir figure) donc la fonction −ζ
ζ
méromorphe et possède un unique pôle simple, 1, de résidu 1. Appliquons le théorème des résidus
R
0 (s) s
x
pour évaluer l’intégrale (a) − ζζ(s)
s ds (qui vaut ψ(x)) :
Z
−
RT
ζ 0 (s) xs
ds = 2iπx
ζ(s) s
En décomposant l’intégrale sur chacun des côtés :
1
2iπ
Z
a+iT
a−iT
1
ζ 0 (s) xs
−
ds = x +
ζ(s) s
2iπ
Z
b−iT
a−iT
ζ 0 (s) xs
−
ds +
ζ(s) s
Z
b+iT
b−iT
ζ 0 (s) xs
−
ds +
ζ(s) s
Z
a+iT
b+iT
ζ 0 (s) xs
−
ds
ζ(s) s
D’autre part :
Z
−
(a)
ζ 0 (s) xs
ds =
ζ(s) s
Z
a−iT
−
a−i∞
ζ 0 (s) xs
ds +
ζ(s) s
Z
a+iT
−
a−iT
ζ 0 (s) xs
ds +
ζ(s) s
Z
a+i∞
−
a+iT
Des deux équations précédentes, on déduit que :
1
2iπ
Z
−
(a)
ζ 0 (s) xs
1
ds = x +
[I1 + I2 + I3 + I4 + I5 ]
ζ(s) s
2iπ
95
ζ 0 (s) xs
ds
ζ(s) s
Fig. 7.2 – Rectangle RT
96
avec les notation
ζ 0 (s) xs
a−i∞ − ζ(s) s ds
I1 =
R a−iT
I3 =
R b−iT
I5 =
R b+iT
a−iT
b−iT
0
I2 =
R a+i∞
I4 =
R a+iT
s
(s) x
− ζζ(s)
s ds
0
a+iT
b+iT
0
s
0
s
(s) x
− ζζ(s)
s ds
(s) x
− ζζ(s)
s ds
s
(s) x
− ζζ(s)
s ds
Evaluons chacune de ces intégrales :
Estimation de I1 et I2
Z
a+iU
I2 = lim
U →∞ a+iT
ζ 0 (s) xs
−
ds = lim
U →∞
ζ(s) s
∞
a+iU X
Z
a+iT
n=1
Λ(n) xs
ds
ns s
Comme la série converge uniformément pour σ > 1, on peut intervertir série et intégrale :
I2 = lim
U →∞
∞
X
Z
a+iU
x s 1
Λ(n)
n
a+iT
n=1
s
ds
(7.6)
Estimons maintenant l’intégrale, en faisant une intégration par parties :
a+iU
Z
x s 1
a+iT
n
s
"
ds =
#a+iU
x s
n
slog( nx )
a+iT
1
+
log( nx )
Z
a+iU
x s ds
n
a+iT
"
x
x
1 x a eiU log( n ) eiT log( n )
−
+
log( nx ) n
a + iU
a + iT
=
s2
Z U
T
x
eitlog( n )
ids
(a + it)2
#
On a donc
Z
a+iU
a+iT
x s 1
n
s
ds = O
!
Z U
x a 1
1
1
dt
+
+
2
2
log( x ) n
|a + iU | a + iT
T a +t
n
Or U > T et |a + iT | > T . D’autre part,
Z
a+iU
a+iT
RU
dt
T a2 +t2
x s 1
n
s
ds = O
<
R∞
T
T
dt
a2 +t2
x a
n
log( x )
n
lorsque T → ∞.
En majorant Λ(n) par log(n) on obtient donc pour (7.6) :
I2 = O
∞
xa X ln(n)n−a
log( x )
T
n
n=1
pour T assez grand.
97
=O
!
!
1
T
lorsque T → ∞. Ainsi :
Pour majorer la somme, on va étudier séparement 3 zones :
(i) n <
x
2
(ii)
x
3x
≤n≤
2
2
(iii) n >
3x
2
Pour n dans la région (i),
x log
> log(2)
n
Pour n dans la région (ii),
x n 3
= log
> log
log
n
x
2
Finalement pour n dans ces deux régions on a par exemple
x 1
log
>
n
10
On a alors :
X ln(n)n−a
X
1
−a
0
=
O
ln(n)n
=
O
ζ
(a)
=
O
log( x )
(a − 1)2
x
x
n
n< 2
(7.7)
n< 2
En effet, ζ 0 a un pôle d’ordre 2 en 1, donc (x − 1)2 ζ 0 (x) est continue (en tant que fonction réelle)
sur par exemple 0 ≤ x ≤ 2 et donc bornée. De même , on a
X ln(n)n−a
X
1
−a
0
ln(n)n = O ζ (a) = O
log( x ) = O
(a − 1)2
3x
3x
n
n>
n>
2
2
Pour n dans (ii), en posant z = 1 − nx , on vérifie que |z| ≤
l’expression :
log
x
n
1
2
et on peut développer en série entière
= log(1 − z)−1
z z2
= z 1+ +
+ ...
2
3
Si 0 ≤ z ≤ 12 ,
Si − 12 ≤ z ≤ 0,
(7.8)
z z2
1+ +
+ ... ≥ 1
2
3
z z2
3
ln(1 − z)
1+ +
+ ... = −
>
2
3
z
4
Finalement, il existe une constante c1 (qui vaut par exemple 34 ) telle que
98
x ≥ c1 z
log
n
Ainsi,
1
|log( nx )|
≤
c2
|z|
≤
c2 x
|x−n|
et


X
x
≤n≤ 3x
2
2
[x]
2 |
ln(n)n−a


ln(n)n−a
X
X
1 

 1−a
= O
=
O
x
log(x)
x




x
log( )
|x − n|
|x − n|
x
x
3x
3x
n
2
≤n≤
2
2
≤n≤
2
Notons x = [x]+δ. Dans la somme, |x−n| prend ses valeurs dans l’ensemble δ, |δ ±1|, |δ ±2|, ..., |δ ±
donc
X
x
≤n≤ 3x
2
2


[x]
X
1
1
1
 = O (log(x))
< +
|x − n|
δ
k
k=1
Finalement, en combinant (7.7), (7.8) et les deux dernières équations, on obtient :
I2 = O
xa
T
1
1−a
2
+ x log (x)
(a − 1)2
On a la même majoration pour I4 (qui est valable pour T grand)
Estimation de I3 et I4
ζ 0 (u + iT ) xu+iT
−
du
ζ(u + iT ) u + iT
b
Z a 0
ζ (u − iT ) xu
|I4 | <
ζ(u − iT ) |u − iT | du
b
xa
|I4 | < K(a − b)log 9 (T )
T
a
x
|I4 | < 2Klog 9 (T )
T
Z
a
I4 =
On obtient une majoration du même type pour I3 . On a donc
I3 = O
xa 9
log (T )
T
et
I4 = O
xa 9
log (T )
T
Estimation de I5
ζ 0 (b + it) xb+it
−
idt
ζ(b + it) b + it
−T
Z T 0
ζ (b + it) xb
|I5 | <
− ζ(b + it) |b + it| dt
−T
Z T
1
b
9
√
|I5 | < Kx log (T )
dt
b2 + t2
−T
Z
T
I5 =
99
Et on a
RT
√ 1
−T b2 +t2 dt
=2
RT
√ 1
dt
0
b2 +t2
=O
R
T +|b| 1
t dt
|b|
= O (log(T ))
D’où finalement :
|I5 | = O xb log 10 (T )
On combinant ces estimations,
φ(x) − x = R(x)
avec
R(x) = O
xa
T
1
xa 9
1−a
2
b
10
+ x log (x) + log (T ) + x log (T )
(a − 1)2
T
(si T est assez grand)
Il s’agit maintenant de choisir T en fonction de x de manière à avoir un reste aussi petit que
possible : pour se « débarasser » du terme en xa , qui est prépondérant devant x, on pose T = xa−b :
a
on a alors xT = xb , terme négligeable devant x.
Demandons nous d’abord si un tel choix est possible. Comme a − b =
l’équation
2c
log 9 (T )
cela revient à résoudre
2c
= x log9 (T )
2c
log(T ) =
log(x)
log 9 (T )
log 10 (T ) = 2clog(x)
h
i
1
T = exp (2clog(x)) 10
T
On peut donc poser T = xa−b . Le O précédent est alors valable lorsque x tend vers l’infini.
R(x) = O xb log 18 (T ) + log 20 (T ) + xb log 9 (T ) + xb log 10 (T )
En effet, a − 1 =
c
log 9 (T )
donc
1
(a−1)2
= O log 18 (T )
De plus, log(x) = O log 10 (T ) et x1−a = O (1) lorsque x → ∞.
Finalement, R(x) = O xb log 20 (T ) lorsque T (et donc x) tend vers l’infini.
1− c
O xb log20 (T )
= O x log9 (T ) log20 (T )
c
= O x exp − 9
log(x) + 20 log(log(T ))
log (T )
1
= O x exp − log(T ) + 20 log(log(T ))
2
Comme
telle que
− 12 log(T )+20 log(log(T ))
log(T )
→ − 12 lorsque T → ∞, il existe une constante c3 (par exemple
100
1
4)
O xb log20 (T )
= O (x exp [−c3 log(T )])
1
= O x exp(−d (log(x)) 10 )
On a donc bien l’existence d’une constante d telle que
1
ψ(x) = x + O x exp[−d (log(x)) 10 ]
7.2
Le théorème de nombres premiers en progression arithmétique
Le théorème des nombres premiers
en progression arithmétique donne le comportement asymptoP
tique de la fonction ψ(x; q, a) =
n≤x Λ(n).
n≡a [q]
X
φ(x; q, a) =
Λ(n)χ[o;x] (n)
n≡a [q]
X
=
Λ(n)χ[o;1]
n
n≡a [q]
x
Or la fonction caractéristique de l’intervalle [0; 1] peut être approximée par un majorant lisse
d’amplitude très petite. Pour démontrer le théorème des nombres premiers en progression arithmétique,
on va d’abord établir un résultat pour la somme lissée , où on remplace χ[0;1] dans la somme ci-dessus
par un majorant lisse de [0; 1], qui est une fonction suffisamment régulière (en particulier une fonction
de Schwartz).
7.2.1
Résultats sur des sommes lisses
Théorème 7.2.1 Soit q ≥ 1, a ≥ 1 tel que (a, q) = 1. Soit η une fonction de Schwartz. Alors il existe
une constante c1 telle pour tout y suffisamment grand, on ait :
X
n≡a [q]
Λ(n)η
p
n
y η̂(1)
=
+ O y exp(−c log(y))
y
φ(q)
(7.9)
où η̂ désigne la transformée de Mellin de η.
La constante du O dépend de η uniquement.
Démonstration
Soit η une fonction de Schwartz (on peut alors définir sa transformée de Mellin).
X
n≡a [q]

X
n
Λ(n)η n × 1
Λ(n)η
=
y
y
φ(q)
∗
n∈N
101

X
χ mod q
¯

χ(a)χ(n)
On a ainsi introduit la condition n ≡ a [q] grâce à la formule (2.1).
X
n≡a [q]
n
Λ(n)η
=
y
1
φ(q)
=
1
φ(q)
avec la notation ψη (y, χ) =
P
n∈N∗
X
χ̄(a)
n
Λ(n)χ(n)η
y
∗
X
χ mod q
n∈N
X
χ̄(a)ψη (y, χ)
χ mod q
Λ(n)χ(n)η
n
y
D’après la formule (3.16), on a :
1
ψη (y, χ) =
2iπ
Z
−
(2)
L0 (χ, s) s
y η̂(s)ds
L(χ, s)
On veut maintenant déplacer le contour d’intégration vers la gauche et pour cela, il faut trouver
0 (χ,s)
une région la plus à gauche possible où on peut définir l’intégrale de − LL(χ,s)
y s η̂(s) : on va pour cela
utiliser la zone sans zéros obtenue dans le théorème 6.3.1, où l’intégrande est holomorphe.
1
On pose σ(t) = 2c(log(q(|t|+2))
comme dans le théorème 6.3.1. L(χ, s) ne possède pas de zéro dans
la région σ > 1 − 2σ(t).
0
(χ,s)
:
Soit Z le contour défini par s(t) = 1 − dσ(t) + it. A droite de Z, − LL(χ,s)
- n’a aucun pôle si χ est non trivial
- possède un pôle simple en 1 de résidu 1 si χ est trivial
On considère le contour fermé suivant, CT composé du segment [AB] compris entre 2 − iT et 2 + iT ,
du segement [BC] compris entre 2 + iT et s(T ), de la portion de courbe s(t) où t va de T à −T , et du
segment [DA] d’extremités s(−T ), 2 − iT .
102
D’après le théorème des résidus on a (en appelant g l’intégrande)
1
2iπ
Z
−
CT
L0 (χ, s) s
y η̂(s)ds = res(g, 1) = δ(χ)η̂(1)y
L(χ, s)
(7.10)
On peut ensuite découper le contour CT verticalement et horizontalement pour évaluer chaque
partie. Evaluons d’abord l’intégrale sur les bords horizontaux.
Le contour est contenu dans la région σ ≥ 1 − σ(t) donc d’après (6.13), il existe une constante C
telle que
L0 (χ, s)
1
≤C
+ O log 2 (q|s|)
L(χ, s)
|s − 1|
Sur le bord supérieur (le raisonnement serait le même pour le bord inférieur) on a par exemple
1
= O(1).
s = t + iT avec t ∈ [s(T ); 2]. Lorsque T > 1, on a |s−1|
√
|s| = σ 2 + T 2 ≤ σ + T ≤ 2 + T donc (log(q|s|)2 = O (log q(2 + T ))2
On a donc
L0 (χ, s)
= O (log q(2 + T ))2
L(χ, s)
sur le bord supérieur, pour T > 1. D’après la proposition 3.4.1 donnant la décroissance de la
transformée de Mellin :
lim |s|k fˆ(s) = 0
|t|→∞
pour tout k. Par exemple,
lim |σ + iT |2 |η̂(σ + iT )| = 0 donc lim (1 + T )2 |η̂(σ + iT )| = 0 et
T →∞
T →∞
η̂(σ + iT ) = O
1
1+T
2 !
lorsque T → ∞
Finalement, on peut majorer l’intégrale sur le bord supérieur :
Z
Z 2+iT
2+iT L0 (χ, s)
s −
η̂(s)y ds ≤
s(T )
L(χ, s)
s(T )
0
L (χ, s) σ
L(χ, s) |η̂(s)|y ds
!
Z 2+iT
2
2
−2
= O y
(log(q(T + 2))) (1 + T ) ds
s(T )
= O
y 2 (log(q(T
+ 2)))2
(1 + T )2
→0
lorsque T → ∞
L’intégrale sur les côtés horizontaux tend donc vers 0 lorsque T → ∞ donc l’égalité (7.10) devient :
103
1
2iπ
L0 (χ, s) s
1
−
y η̂(s)ds −
L(χ, s)
2iπ
(2)
Z
Z
−
Z
L0 (χ, s) s
y η̂(s)ds = δ(χ)η̂(1)y
L(χ, s)
D’où l’égalité
ψη (y, χ) = δ(χ)η̂(1)y +
1
2iπ
Z
−
Z
L0 (χ, s) s
y η̂(s)ds
L(χ, s)
P
1 P
¯
La somme n≡a [q] Λ(n)η ny = φ(q)
χ mod q χ(a)ψη (y, χ) qu’on veut évaluer est une somme finie
à φ(q) termes et on peut remplacer chaque φη (y, χ) par son expression précédente. La contribution
δ(χ)η̂(1)y n’est comptée que pour le caractère trivial. On a donc :
Z
X
X
1
L0 (χ, s) s
n
1
1
=
−
Λ(n)η
δ(χ)η̂(1)y +
y η̂(s)ds
y
φ(q)
φ(q)
2iπ Z L(χ, s)
χ mod q
n≡a [q]
Comme la somme sur les caractères est une somme finie, pour montrer le théorème, il suffit de
montrer que si χ est un caractère quelconque modulo q on a
−
p
L0 (χ, s) s
y η̂(s)ds = O y exp(−c1 log(y))
L(χ, s)
−
L0
(χ, 1 − dσ(t) + it)η̂(1 − dσ(t) + it)y −dσ(t)+it dt
L
Z
I=
Z
Montrons ce résultat :
Z
+∞
I=y
−∞
Pour évaluer l’intégrale, intégrons séparément sur les zones |t| ≤ A et |t| > A, où A > 0 est une
constante qui sera choisie ultérieurement pour obtenir la majoration la plus fine possible.
Si |t| ≤ A
D’après (6.13), on a
L0
(χ, 1 − dσ(t) + it) = O (log(q|1 − dσ(t) + it|))2 = O (log(q(|t| + 2)))2
L
= O (log(q(A + 2)))2
Z
∞
1−dσ(t)+it
η̂(1 − dσ(t) + it) =
Z
η(x)x
dx = O
Z 1
Z
d
1− 2clog(2q)
η(x)x
= O
+
η(x)x
0
0
∞
1−dσ(t)
dx
0
∞
η(x)x
1−dσ(A)
= Oη (1)
1
y −dσ(t)+it = O y −dσ(t) = O y −dσ(A) si y > 1
On a ainsi :
Z
A
−
−A
L0
(χ, 1 − dσ(t) + it)η̂(1 − dσ(t) + it)y −dσ(t)+it dt = O A(log q(A + 2))2 exp(−dσ(A)log(y))
L
104
Si |t| > A on a
L0
(χ, 1 − dσ(t) + it) = O (log(q|1 − dσ(t) + it|))2
L
= O (log(q(|t| + 2)))2
y −dσ(t)+it = O y −dσ(t) = O(1)
D’après la propriété de décroissance de la transformée de Mellin, on a également
η̂(1 − dσ(t) + it) = O
η, (1
+ |t|)−2−
pour tout > 0.
Soit > 0 quelconque mais fixé. On a :
L0
− (χ, 1 − dσ(t) + it)η̂(1 − dσ(t) + it)y −dσ(t)+it dt = O
L
|t|>A
!
Z
Z
(log(q(|t| + 2)))2 (1 + |t|)−2− dt
|t|>A
Z
= O
|t|>A
Or
(log(q(|t|+2)))2
(1+|t|)
(log(q(|t| + 2)))2
1
dt
(1 + |t|)
(1 + |t|)2
!
= O (1) , donc
L0
− (χ, 1 − dσ(t) + it)η̂(1 − dσ(t) + it)y −dσ(t)+it dt = O
L
|t|>A
Z
Z
|t|>A
dt
(1 + |t|)2
!
=O
1
1+A
En regroupant ces deux majorations, on conclut que
I=O y
1
d log(y)
+ A(log(q(A + 2)))2 exp −
1+A
2c log(q(A + 2))
Il s’agit maintenant de choisir
A pour obtenir la majoration souhaitée : on aimerait se ramener à
p
d
log(q(A + 2)) de l’ordre de log(y). On fixe une constante c2 telle que c22 < 2c
(on verra pourquoi
plus loin)
On fixe A défini par
p
log(q(A + 2)) = c2 log(y)
p
1
A =
exp(c2 log(y)) − 2
q
Pour y assez grand, on peut définir A > 0 ainsi. On a alors pour y assez grand
I=O y
1
d p
2
+ Ac2 log(y)exp −
log(y)
1+A
2cc2
105
D’une part
p
1
1
p
= 1
= O exp(−c2 log(y))
1+A
q exp(c2 log(y)) − 1
p
D’autre part, en posant B = Ac22 log(y)exp − 2cdc2 log(y) on a
p
1
d p
d p
2
2
B =
log(y) − 2c2 log(y)exp −
log(y)
exp(c2 log(y))c2 log(y)exp −
q
2cc2
2cc2
p
d
d p
c2
− c2
log(y) − 2c22 log(y)exp −
log(y)
= 2 log(y)exp −
q
2cc2
2cc2
p
d
= O log(y)exp −
− c2
log(y)
2cc2
Posons 2c1 = min c2 ,
d
2cc2
− c2 . c1 > 0 car on a choisi c22 <
d
2c .
Alors :
p
1
= O exp(−c1 log(y))
1+A
p
d p
2
Ac2 log(y)exp −
log(y)
= O log(y)exp(−2c1 log(y))
2c c2
p
= O yexp(−c1 log(y))
valable lorsque y est assez grand (et la constante du O dépend de η).
On a donc bien
p
I = O y exp(−c1 log(y))
7.2.2
Démonstration du théorème
Théorème 7.2.2 (théorème des nombres premiers en progression arithmétique) Soit des entiers q ≥ 1 et a tel que (a, q) = 1. Alors on a :
ψ(x; q, a) ∼
x
φ(q)
lorsque x → ∞. D’après la partie 3.2.2, ce résultat est équivalent à
π(x; q, a) ∼
1
x
φ(q) log(x)
lorsque x → ∞
106
Démonstration
Soit ηδ un majorant lisse d’amplitude δ de [0, 1].
X
φ(x; q, a) =
Λ(n)χ[0;1]
n
x
n≡a [q]
X
≤
Λ(n)ηδ
n
n≡a [q]
x
∼
xη̂(1)
φ(q)
d’après (7.13). En effet, y βe = o (y) lorsque y → ∞ (car βe est réel et < 1).
On a donc pour tout δ,
lim sup
x→∞
ψ(x; q, a)
δ̂(1)
≤
x
φ(q)
(7.11)
Et en faisant tendre δ vers 0 on obtient :
lim sup
x→∞
ψ(x; q, a)
1
≤
x
φ(q)
ηδ est un majorant lisse d’amplitude 1 + δ. En particulier, η est à support compact dans [0; 1 + δ]
et ηδ = 1 sur [0,1]. Posons δ (x) = ηδ ((1 + δ)x). La fonction δ est C ∞ , à support compact dans [0 ;1]
1
et vérifie δ (x) = 1 si x ≤ 1+δ
.
Fig. 7.3 – Fonctions approchant χ[0,1]
Lorsque δ tend vers 0, les fonctions δ et ηδ tendent vers χ[0,1] .
φ(x; q, a) ≥
X
Λ(n)δ
n
x
n≡a [q]
=
X
Λ(n)ηδ (1 + δ)
n≡a [q]
Posons y =
x
1+δ .
y → ∞ ssi x → ∞. Alors
107
n
x
φ(x; q, a) ≥
X
n≡a [q]
n
y ηˆδ (1)
xηˆδ (1)
Λ(n)ηδ
∼
=
y
φ(q)
(1 + δ)φ(q)
lorsque x → ∞. En faisant ensuite tendre δ vers 0 on obtient :
lim inf
x→∞
On déduit de (7.11) et (7.12) que
donc
ψ(x;q,a)
x
1
ψ(x; q, a)
≥
x
φ(q)
possède une limite et que cette limite vaut
π(x; q, a) ∼
(7.12)
1
φ(q) .
On a
x
1
φ(q) log(x)
lorsque x tend vers l’infini.
Remarque
Vu le terme d’erreur mis en avant dans le théorème 7.3.1, on peut en fait démontrer le théorème
des nombres premiers en progression arithmétique avec un terme d’erreur :
ψ(x; q, a) =
p
x
+ O x exp(−c1 log(x))
φ(q)
Pour passer à cette version « non lissée » du théorème, on peut utiliser des fonctions η de lissage
particulières, que nous ne détaillerons pas ici.
108
Huitième partie
Hypothèse de Riemann et amélioration
du terme d’erreur pour le théorème
des nombres premiers
109
8.1
Retour sur les termes d’erreur des théorèmes précédents
Dans un premier temps, on a démontré dans la partie précédente le théorème des nombres premiers
en donnant :
1
ψ(x) = x + O x exp −d(log(x)) 10
On a ensuite démontré le théorème des nombres premiers en progression arithmétique d’une autre
manière et obtenu le terme d’erreur suivant :
ψ(x; q, a) =
p
x
+ O x exp −c1 log(x)
φ(x)
Soit en prenant q = 2 et a = 1, on trouve :
p
ψ(x) = x + O x exp −c1 log(x)
La seconde démonstration nous a donné un terme d’erreur plus précis. En effet :
p
p
x exp −c1 log(x)
− 52
=
exp
log(x)
−c
+
d(log(x))
1
1
x exp −d(log(x)) 10
Or, lim
x→+∞
2
−c1 + d(log(x))− 5
= c1 < 0. Donc
p
x exp −c1 log(x)
=0
lim
1
x→+∞
x exp −d(log(x)) 10
Dans deuxième démonstration, on avait une zone sans zéros de ζ plus éloignée de la droite verticale
σ = 1 que dans la première. On voit donc que plus la zone sans zéros utilisée est située à
gauche, meilleur est le terme d’erreur.
8.2
Hypothèse de Riemann et théorème des nombres premiers
La conjecture de Riemann, qui dit que tous les zéros non triviaux de ζ sont sur la droite Re(s) = 12
nous fournit alors une zone sans zéros pour ζ bien plus grande que celles utilisées dans les démonstrations
précédentes et on obtient alors un bon terme d’erreur dans le théorème des nombres premiers.
C’est ce que nous pouvons constater avec l’équivalence suivante :
Proposition 8.2.1 Les énnoncés ci-dessous sont équivalents :
(1) Les zéros nons triviaux ρ de ζ(s) vérifient β =
1
2
(2) Pour tout > 0, on a si x ≥ 2
1 ψ(x) = x + O x 2 +
110
où la constante implicite dépend de .
(3) Pour tout > 0, on a si x ≥ 2
Z
π(x) =
2
x
1 1
dt + O x 2 +
log(t)
où la constante implicite dépend de .
Rx 1
On note parfois Li(x) = 2 log(t)
dt le logarithme intégral. On donne souvent le théorème des
x
nombres premiers sous la forme π(x) ∼ log(x)
mais on a aussi ψ(x) ∼ Li(x).
Démonstration
(1) ⇒ (2) On utilise directement la technique du déplacement du contour d’intégration comme on
l’avait exposée dans l’exemple de la partie 3.6.
Si φ est une fonction de Schwartz, on a :
1
2iπ
Z
ζ 0 (s)
1
ζ 0 (s)
s
−
−
φ̂(s)x ds = x +
φ̂(s)xs ds
1
ζ(s)
2iπ
ζ(s)
(2)
( +)
12 = x + O x 2 +
Z
(8.1)
Or, si ηδ est un majorant lisse de [0; 1] d’amplitude 1 + δ, on a :
ψ(x) =
1
2iπ
Z
−
(2)
ζ 0 (s) xs
1
ds = lim
δ→0 2iπ
ζ(s) s
Z
−
(2)
ζ 0 (s)
ηˆδ (s)xs ds
ζ(s)
En faisant un passage à la limite on obtient :
1 ψ(x) = x + O x 2 +
En réalité, on ne peut pas faire un passage à la limite de cette manière car le O de la formule
(8.1) dépend de δ... Il faut utiliser d’autres fonctions de lissages que les majorants lisses pour passer
de la version lissée à la version non lissée du théorème des nombres premiers. (cf. remarque à la fin du
chapitre précédent)
On montre l’équivalence de (2) et (3) en utilisant une transformation d’Abel, de la même façon que
dans la partie 3.2.2 où on avait fait le lien entre la fonction ψ et le théorème des nombres premiers.
Montrons par exemple que (2) ⇒ (3).
X Λ(n)
√
+ O x log x
log(n)
p≤x
n≤x
Z x
√
ψ(x)
ψ(2)
ψ(t)
=
−
+
dt + O x log(x)
2
log(x) log(2)
2 t(log t)
!
1
Z x
Z x
x
2
dt
x 2 +
dt
=
−
+
+O
+
1
2
log x log(2)
log(x)
2 (log t)
2 t 2 − (log t)2
Z x
1 dt
=
+ O x 2 +
2 log t
π(x) =
X
1=
111
Montrons maintenant que (2) ⇒ (1). D’après (3.1) on a :
ζ 0 (s)
−
=s
ζ(s)
Soit s = σ + it avec
1
2
Z
∞
1
ψ(x)
dx
xs+1
+ < σ < 1.
1 On a ψ(x) = x + δ(x) avec δ(x) = O x 2 + 2 alors :
ζ 0 (s)
−
ζ(s)
La fonction
s
s−1
est holomorphe sur
Z ∞
1
δ(x)
= s
dx + s
dx
s
x
xs+1
1
1
Z ∞
δ(x)
s
+s
dx
=
s+1
s−1
x
1
Z
1
2
∞
+ < σ < 1. Soit g(s) =
R∞
1
δ(x)
dx.
xs+1
1
+ 2
δ(x) 2
1
≤ Kx
= Kx−σ+ 2 − 2 ≤ x−1− 2
xs+1 σ+1
x
Comme on a une majoration de l’intégrande par une fonction intégrable, g est holomorphe. Ainsi,
0 (s)
pour tout > 0, − ζζ(s)
est holomorphe sur 12 + < σ < 1. Comme ζ n’a pas de pôle dans cette région, ζ
ne possède aucun zéro sur 12 + < σ < 1. On a aussi vu précédemment que ζ ne s’annulait pas sur σ = 1.
ζ n’a donc pas de zéro sur 21 < σ ≤ 1. D’après l’équation fonctionnelle, les zéros non triviaux de ζ
sont symétriques par rapport à σ = 21 . Les seuls zéros triviaux éventuels sont donc sur la droite β = 21 .
8.3
Hypothèse de Riemann généralisée
Il existe une conjecture plus générale que l’hypothèse de Riemann présentée ci-dessus, faisant
intervenir les zéros des fonctions L de Dirichlet. Cette hypothèse de Riemann généralisée est équivalente
à un bon terme d’erreur dans le théorème des nombres premiers en progression arithmétique.
Proposition 8.3.1 (Formulations équivalentes de l’Hypothèse de Riemann Généralisée) Les
deux assertions suivantes sont équivalentes :
(1) Pour tout caractère χ primitif modulo q, les zéros non triviaux ρ de L(χ, s) vérifient β = 12 .
(2) Pour tout a tel que (a, q) = 1 on a pour x ≥ 2
ψ(q; q, a) =
1 x
+ O x 2 +
φ(q)
où la constante implicite dépend de .
112
Conclusion
Pour conjecturer le théorème des nombres premiers en 1792, Gauss avait observé, en se fondant sur
1
des données numériques, que la probabilité qu’un nombre n soit premier était d’environ log(n)
. C’est de
n
là qu’il a tiré l’estimation bien connue π(n) ∼ log(n) . Avec ce mémoire, j’ai pu comprendre pourquoi il
a fallu attendre un siècle et le développement de l’analyse complexe pour pouvoir démontrer ce résultat.
J’ai en effet pu découvrir différentes techniques utiles en théorie analytique des nombres. La technique de la transformation d’Abel revient assez fréquement, pour passer d’une série de Dirichlet à
une fonction sommatoire. L’introduction des caractères de Dirichlet est aussi très importante, car ils
interviennent dans les progressions arithmétiques. Enfin, ce sont des théories comme celles de Fourier
ou Mellin qui permettent de démontrer la formule fondamentale exprimant une fonction sommatoire
lissée en fonction de la série de Dirichlet associée à l’aide d’une intégrale dans le plan complexe.
Cette formule est la base des deux démonstations que j’ai données des théorèmes des nombres
premiers. J’ai d’abord montré le théorème des nombres premiers était strictement équivalent à la nonannulation de ζ sur σ = 1 en me servant d’un théorème dû à Wiener et Ikehara. Je me suis ensuite
0 (s)
concentrée sur l’obtention d’un terme d’erreur. Pour cela, je me suis servie des estimations de − ζζ(s)
proposées notamment par Ayoub ou Titchmarsch dans leurs ouvrages datant repectivement de 1963
et 1986.
L’approche utilisée dans la démonstration de théorème des nombres premiers en progression
arithmétique est plus moderne, elle a été présentée d’une manière un peu différente par Emmanuel
Kowalski dans Un cours de théorie analytique des nombres (2004). Elle utilise les propriétés des fonctions entières d’ordre 1, et permet d’obtenir un terme d’erreur meilleur que le précédent.
Enfin ce mémoire m’a permis - et c’était là son objectif initial - de comprendre le lien entre la
formulation bien connue de la conjecture de Riemann, en termes de zéros de la fonction ζ et sa
formulation équivalente qui donne un bon terme d’erreur pour le théorème des nombres premiers.
113
Un grand merci à Henri Carayol pour toute l’aide qu’il m’a apportée ; pour les références qu’il
m’a fournies, les questions auxquelles il a patiemment répondu, quand bien même elles étaient
parfois plus analytiques qu’arithmétiques...
Un grand merci à mes parents et mes amis, qui m’ont soutenue et écoutée parler de choses
plus ou moins incompréhensibles, tout en admirant mes « hiéroglyphes » ...
114
Bibliographie
[1] Michèle Audin, Analyse complexe, 2007
[2] Raymond Ayoub, An introduction to the analytic theory of numbers, 1963
[3] Pierre Colmez, Eléments d’analyse et d’algèbre
[4] Hubert Delange, Distribution des nombres premiers et fonction ζ(s), 1960
[5] Jean Dieudonné, Calcul infinitésimal
[6] Claude Gasquet, Patrick Witomski, Analyse de Fourier et applications
[7] Emmanuel Kowalski, Un cours de théorie analytique des nombres, 2004
[8] Jean-Pierre Serre, Cours d’arithmétique, 1988
[9] E.C. Titchmarsch, Theory of functions, 1939
[10] E.C. Titchmarsch, The theory of the Riemann zeta-function, 1986
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