WT/L/826 Page 1 Organisation Mondiale du Commerce WT/L/826

ORGANISATION MONDIALE
DU COMMERCE
WT/L/826
18 novembre 2011
(11-6004)
Conseil général
30 novembre 2011
Original: espagnol
CUBA - ARTICLE XV:6 DE L'ACCORD GÉNÉRAL SUR LES
TARIFS DOUANIERS ET LE COMMERCE DE 1994
Rapport présenté par le gouvernement cubain au titre
de la Décision du 15 décembre 2006
La communication ci-après, datée du 14 novembre 2011, est distribuée à la demande de la
délégation de Cuba.
_______________
Conformément aux dispositions de l'article IX:4 de l'Accord instituant l'Organisation
mondiale du commerce (OMC), le gouvernement de la République de Cuba présente le cinquième
rapport annuel concernant la reconduction, accordée le 15 décembre 2006, de la prorogation de la
dérogation approuvée le 20 décembre 2001. Cette dérogation a été accordée à Cuba en vertu de la
décision adoptée le 14 octobre 1996 (WT/L/182), au sujet de l'article XV:6 de l'Accord général sur les
tarifs douaniers et le commerce de 1994 (GATT de 1994).
Cuba réitère que les conditions qui ont justifié la dérogation en 2006 demeurent
fondamentalement inchangées; en particulier, le blocus économique, commercial et financier que les
États-Unis d'Amérique continuent d'imposer avec tant de rigueur à notre pays. Les fondements
juridiques de cette politique restent les mêmes et les mécanismes politiques, administratifs et
répressifs destinés à en assurer l'application la plus efficace ont été renforcés, en particulier les
sanctions et le harcèlement subis par les Cubains dans leurs transactions commerciales et financières
avec le reste du monde. À cela s'ajoutent les retombées néfastes de la crise économique et financière
mondiale et les phénomènes météorologiques des cinq dernières années qui ont coûté au pays plus de
10 milliards de pesos; ce sont autant d'obstacles à la signature d'un accord spécial de change avec
les Membres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
La politique de blocus, inflexible et hostile, qui est exercée contre Cuba depuis plus d'un
demi-siècle reste le principal frein au développement économique du pays: elle entrave l'activité de
tous les secteurs de l'économie nationale, car elle provoque une flambée des coûts financiers et fait
barrage aux flux de financement extérieurs et, parallèlement, elle empêche les importations de
produits essentiels comme les denrées alimentaires, les médicaments et les combustibles.
Le blocus constitue une violation flagrante du droit international, ainsi que des principes de
liberté du commerce et de navigation inscrits dans de nombreux instruments juridiques internationaux,
y compris les règles de l'OMC. Il est contraire aux objectifs et aux principes de la Charte des
Nations Unies, il bafoue le droit à la paix, au développement et à la sécurité d'un État souverain.
WT/L/678.
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Les mesures de blocus appliquées par le gouvernement des États-Unis, en totale contradiction
avec le principe de libre-échange, consistent notamment en:
l'interdiction pour le gouvernement et tous les organismes publics cubains d'effectuer
des transactions commerciales et financières avec l'étranger en dollars des États-Unis,
ce qui oblige Cuba à recourir aux monnaies de pays tiers, alors que ses principaux
produits d'exportation sont cotés en dollars sur le marché mondial. Par voie de
conséquence, le pays a subi des pertes considérables, dues à l'appréciation et à la
dépréciation du dollar par rapport aux monnaies de ses partenaires commerciaux, en
plus de l'instabilité occasionnée pour les entreprises par le double risque de change.
des poursuites et sanctions à l'encontre des entreprises et investisseurs désireux de
mener des activités commerciales ou d'investir à Cuba, qui empêchent le déroulement
normal de toutes les activités économiques extérieures et l'accès aux ressources pour
le financement du développement.
l'interdiction pour les organismes financiers multilatéraux et régionaux d'accorder des
crédits à Cuba, ce qui prive le pays de l'accès à des sources de financement à long
terme à des conditions favorables et l'oblige donc à contracter des emprunts de courte
durée assortis de taux d'intérêt élevés et à faire appel à des bailleurs de fonds dont les
financements sont beaucoup moins souples que ceux des institutions financières et
ceux de caractère officiel.
l'imposition de sanctions aux agences maritimes qui transportent des cargaisons au
départ ou à destination de Cuba, limitant la liberté de transit.
l'interdiction pour les filiales d'entreprises des États-Unis implantées dans des pays
tiers de faire du commerce avec Cuba.
l'application de sanctions aux ressortissants des États-Unis qui se rendent à Cuba, ce
qui empêche le développement du tourisme entre les deux pays.
Le siège économique, commercial et financier imposé depuis 1961 par les gouvernements
successifs des États-Unis soumet Cuba à des restrictions de portée extraterritoriale qui affectent aussi
d'autres Membres de l'OMC.
L'intensification des sanctions contre les transactions financières de Cuba avec l'étranger, y
compris celles effectuées par les organismes multilatéraux dans le cadre de la coopération avec le
pays, a été une des caractéristiques de l'application de la politique de blocus. Le Bureau de contrôle
des avoirs étrangers (OFAC) du Département du Trésor a ainsi imposé à des établissements bancaires
des États-Unis et étrangers des sanctions et des amendes de plusieurs millions pour avoir réalisé des
transactions avec Cuba. Par voie de conséquence, les relations entre Cuba et ces établissements ont
été rompues et/ou Cuba a effectuer ses transactions dans des conditions plus difficiles et plus
onéreuses.
Des sanctions similaires ont été imposées à plusieurs entreprises qui réalisaient des
transactions commerciales avec Cuba. Les sanctions et le harcèlement visant des personnes physiques
et morales de pays tiers ont atteint des niveaux alarmants, ce qui confirme le caractère extraterritorial
du blocus.
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Le corpus de dispositions réglementaires et administratives qui sert de fondement juridique à
ces actions contre Cuba reste le même. Il se compose principalement de:
La Loi sur le commerce avec l'ennemi (sigle anglais: TWEA), qui a été promulguée
en 1917 à titre de mesure de guerre pour restreindre le commerce avec des nations
considérées comme hostiles. Cette loi a servi de base aux premières dispositions qui
régissaient le blocus contre Cuba de 1962. Le 13 septembre 2011, le
Président Barack Obama a annoncé sa prorogation, qui suppose dans la pratique la
poursuite du blocus contre Cuba.
La Loi sur l'aide à l'étranger, qui a été promulguée en septembre 1961 par le Congrès
des États-Unis. Elle autorise le Président des États-Unis à établir et à maintenir "un
embargo total sur le commerce entre les États-Unis et Cuba". En outre, elle interdit
l'octroi de toute forme d'aide au gouvernement cubain.
La Loi sur l'administration des exportations (sigle anglais: EEA), qui a été adoptée en
1979 et autorise le Président des États-Unis à contrôler les exportations et
réexportations de biens et de technologies en général et, en particulier, les
exportations et réexportations de biens et de technologies qui sont considérées comme
une menace pour la sécurité intérieure des États-Unis.
La Loi pour la démocratie cubaine (sigle anglais: CDA), plus connue sous le nom de
"Loi Torricelli", qui a été signée par le Président Bush père en octobre 1992. Cette
loi a renforcé les mesures économiques contre Cuba et a établi un fondement
juridique pour l'extraterritorialité du blocus. Entre autres restrictions, elle interdit que
des filiales d'entreprises des États-Unis implantées dans des pays tiers effectuent des
transactions avec Cuba ou avec des ressortissants cubains et elle impose un lai de
180 jours aux navires de pays tiers qui auraient fait escale dans des ports cubains
avant d'entrer sur le territoire des États-Unis.
La Loi pour la solidarité démocratique et la liberté cubaine, connue comme la "Loi
Helms-Burton", qui a été approuvée par le Président Clinton en mars 1996. Elle a
pour principal objet d'empêcher et de dissuader l'investissement étranger, et
d'internationaliser le blocus contre Cuba. Elle a codifié les dispositions régissant le
blocus, a limité les prérogatives du Président concernant la suspension de cette
politique et a étendu la portée extraterritoriale de cette dernière. Elle refusait l'entrée
sur le territoire des États-Unis aux dirigeants d'entreprises étrangères (et à leurs
proches) qui avaient investi dans des propriétés cubaines "confisquées" et permettait
de les attaquer en justice devant les tribunaux des États-Unis.
Le Règlement d'administration des exportations (sigle anglais: EAR), qui régit les
exceptions à la Loi sur l'administration des exportations ou celles qui sont autorisées
par le biais de licences délivrées par le Bureau de l'industrie et de la sécurité du
Département du commerce. Il est fondé sur la Loi sur le commerce avec l'ennemi et
la Loi sur l'administration des exportations.
Il ressort du champ d'application des lois et des règlements susmentionnés qu'aucun blocus n'a
été plus étendu ni plus brutal que celui que les États-Unis continuent d'exercer contre Cuba.
Les répercussions de ces mesures sur l'économie cubaine se chiffraient en décembre 2010 à
104 milliards de dollars, en prix courants. Ce montant dépasserait 247 milliards de dollars si le calcul
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intégrait l'inflation des prix au détail aux États-Unis
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, et 975 milliards de dollars si la dépréciation du
dollar par rapport à l'or sur le marché financier international était prise en considération.
En dépit de tout ce qui vient d'être exposé, l'économie cubaine a poursuivi sa phase de reprise,
à un rythme de 3,7 pour cent par an en moyenne entre 2006 et 2010. Cette période a été marquée par
une évolution positive des indicateurs macro-économiques fondamentaux et par de très bons résultats
monétaires, financiers et budgétaires, si bien que le pays doit produire un effort colossal pour
conserver ces acquis.
Au cours de cette période, le secteur des services a été la locomotive de l'économie cubaine,
du fait, principalement, de la croissance du tourisme; des télécommunications; et des services à forte
valeur ajoutée, parmi lesquels les services de santé et d'éducation ont enregistré les plus fortes
progressions ce qui témoigne de l'importance des investissements consacrés par le pays au
développement de son capital humain. Par ailleurs, le pays a mis en œuvre de très nombreux
programmes en vue d'améliorer ses services sociaux et la qualité de vie de sa population, qui ont
permis des progrès importants dans les domaines de l'éducation, de la santé et de la culture.
Le tourisme a continué d'afficher une tendance à la hausse ces cinq dernières années: à la fin
de 2010, on recensait 2,5 millions de visiteurs, soit une hausse de 14 pour cent par rapport à 2006.
La mise en œuvre du programme de modernisation s'est poursuivie dans le domaine des
télécommunications, en particulier de la téléphonie nationale, qui a connu un essor sans précédent
dans l'histoire du pays. À la fin de 2010, le nombre de lignes fixes était en progression de 16,7 pour
cent par rapport à 2006 et le taux de numérisation était de 98,7 pour cent, contre 92,2 pour cent en
2006.
Dans le secteur des biens, ce sont l'industrie non sucrière et les industries extractives qui se
distinguent par leur contribution à la croissance économique, notamment grâce aux pics de production
historiques de pétrole brut, de gaz naturel et de nickel. Il faut aussi mentionner l'essor significatif du
secteur de la construction dans le pays.
Le taux de chômage est descendu de 1,9 pour cent en 2006 à 1,6 pour cent en 2010, le taux le
plus bas enregistré dans la région. À la fin de 2010, le pays a engagé un processus de restructuration
de l'emploi visant à réduire les sureffectifs dans le secteur public, afin d'assurer une utilisation
rationnelle de la main-d'œuvre et de renforcer le rôle du salaire et sa corrélation avec les résultats du
travail.
Le taux de mortalité infantile a été de 4,5 pour mille enfants s vivants en 2010, le taux le
plus bas dans l'histoire du pays. Ce taux et l'espérance de vie, de 78 ans, sont des indicateurs de la
qualité de vie de la population cubaine.
Le budget de l'État a répondu aux besoins les plus pressants du pays grâce aux revenus de
l'économie et l'année 2010 s'est ainsi close sur un ficit égal à 3,8 pour cent du PIB, en baisse par
rapport à 2008 et 2009. En outre, plusieurs pistes de travail ont été explorées pour améliorer le
système fiscal, en particulier pour redéfinir la politique fiscale à appliquer face au développement du
travail indépendant induit par la restructuration de l'emploi dans le secteur public.
Quant à la liquidité monétaire, elle s'est accrue parallèlement à l'expansion économique; et
les institutions financières cubaines gagnent de plus en plus en crédibilité.
1
Calcul effectué au moyen de la calculatrice (CPI) du Département du travail du Bureau des
statistiques du travail des États-Unis (http://www.bls.gov).
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Compte tenu de la dynamique actuelle de l'économie cubaine, des particularités
exceptionnelles des relations économiques de Cuba avec l'étranger et des difficultés intérieures
existantes, le Parlement cubain a approuvé en 2011 un ensemble de mesures visant à mettre à jour et
améliorer le modèle économique en vigueur. Ces mesures doivent être mises en œuvre entre 2011 et
2015; toutefois, certaines sont déjà appliquées et d'autres sont en cours de mise en œuvre.
Depuis le 14 mars 2011, en vertu de l'Accord n° 30, le Comité de politique monétaire de la
Banque centrale de Cuba a fixé le taux de change officiel du peso convertible par rapport au dollar des
États-Unis à 1 x 1 sur l'ensemble du territoire national, aussi bien pour les opérations de change
effectuées par les entreprises que pour celles que les particuliers réalisent par l'intermédiaire des
bureaux de change (CADECA). Cette cision est un petit pas vers une amélioration de la balance
des changes du pays.
La taxe de 10 pour cent appliquée au montant en dollars des États-Unis dans le cadre des
opérations de change de pesos convertibles sur le territoire national, qui a été instaurée par la
Résolution n° 80/2004, est maintenue. Cette mesure avait été prise pour compenser les coûts et les
risques générés pour l'économie nationale par l'utilisation de dollars des États-Unis, du fait de
l'intensification des mesures prises par le gouvernement des États-Unis cette année-.
Il convient de souligner que les transformations menées à bien, ainsi que celles qui sont
prévues dans les domaines des changes et de la finance, n'ont eu et n'auront aucune incidence sur les
relations de Cuba avec les autres Membres de l'OMC, puisqu'elles ne contreviennent pas aux
principes du libre-échange entre les nations. Elles n'ont pas non plus lésé, ni ne léseront à l'avenir, les
intérêts des investisseurs étrangers à Cuba.
Cuba a démontré qu'elle respectait son engagement d'utiliser la dérogation sans nuire aux
objectifs de l'Accord général ni porter atteinte aux droits des Membres de l'OMC.
Compte tenu de ce qui précède, Cuba annonce qu'au prochain Conseil du commerce des
marchandises, elle sollicitera la reconduction de la prorogation de la dérogation accordée en
décembre 2006 pour une période de cinq ans.
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