Kinésithérapie au lit et au fauteuil chez la personne âgée

Ann. Kinésithér., 1987, t. 14, nO 1-2, pp. 29-34
©Masson, Paris, 1987
Kinésithérapie au lit
et au fauteuil chez la personne âgée
SIVIGNON A., DANES J.P., THÉVENON A.
Travail de l'Unité de Rééducation (Pr. Delcambre), c.s.P.A. (Pr. Dewailly), C.H.R. de LILLE
MÉMOIRE
Chez la personne âgée, l'alitement forcé
provoquépar un traumatisme ou une affection
aigüe nécessiteune kinésithérapieprécocepour
éviter les complications de décubitus, voire
l'installation d'un syndrome de glissement.
La perte des automatismes moteurs gêne
considérablement les déplacements dans le lit
et l'équilibre assis. Quelques conseils techni-
ques sont proposés pour faciliter cette
rééducation.
La survenue chez la personne âgée d'un
traumatisme ou d'une affection aigüe, condui-
sant à un alitement, s'accompagne souvent d'une
désorganisation psychomotrice aggravant l'im-
potence fonctionnelle et favorisant les complica-
tions de décubitus. Cet état est caractérisé par
des troubles psychiques avec ralentissement
intellectuel et tendance dépressive (3, 4) associés
à une perte des automatismes moteurs, immobi-
lisant le malade dans son lit et induisant des
troubles de l'équilibre lorsqu'on l'en sort (4).
Ces perturbations par leur importance sont
susceptibles de déconcerter le rééducateur. Nous
proposons ici quelques conseils techniques pou-
vant faciliter le retour à l'autonomie de la
personne âgée.
Tirés àpart: A. THÉVENON, C.S.P.A. (Pr. Dewailly), C.H.R.
de Lille, 104, avenue du Peuple Belge, 59000 Lille.
Le travail doit suivre un certain ordre: travail
analytique, puis déplacements latéraux au lit,
puis retournements, puis travail de l'équilibre
assis, puis passage de la position couchée à la
position assise.
Au cours de cette progression il faut veiller
à conserver les acquis. Les gestes appris par le
patient doivent être effectivement réalisés dans
la vie quotidienne.
Cela suppose une liaison entre rééducateurs
et équipe soignante, et une implication de
celle-ci.
Nous n'insisterons pas sur la rééducation au
lit, analytique, passive et active, qui ne diffère
pas de celles habituellemeent proposées (1, 5).
Rappelons toutefois l'importance de la tonifica-
tion des muscles du tronc, et de la récupération
des mouvements actifs du rachis cervical qui
joue souvent un rôle initiateur dans les mouve-
ments qui vont suivre.
Le soulèvement du bassin se travaille avec ou
sans perroquet. Il développe la contraction
synchrone des muscles du tronc à laquelle
s'associe une poussée des jambes et un travail
des membres supérieurs, la traction sur le
perroquet étant beaucoup plus aisée que la
poussée sur le lit en extension-rétropulsion
fig. 1).
Les transferts s'effectuent alors facilement, on
demande au patient de plier les genoux, de
déplacer latéralement la tête, d'associer au
soulèvement du bassin une translation latérale,
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FIG 1. - Travail des extenseurs du tronc, àl'aide d'une poussée
des jambes et d'un travail des membres supérieurs.
"""
FIG 2. - Travail de la rotation du bassin, puis de la rotation
des épaules.
puis de réaligner les membres inférieurs sur la
tête et le tronc.
L'étape suivante comprend l'apprentissage du
retournement au lit. Au préalable on fera
effectuer au patient quelques déplacements
latéraux vers le côté du lit opposé au retourne-
ment pour que lors de l'exercice la proximité
soudaine du bord du lit et du vide ne l'effraient
pas et n'entravent pas la manœuvre.
Le mouvement se fait en partant du décubitus
dorsal genoux fléchis. Le retournement peut
s'amorcer soit par une rotation du bassin, soit
par une rotation de la ceinture scapulaire.
Généralement l'une des deux ceintures prédo-
mine et on laissera le mouvement commencer
spontanément par celle-ci. De même le mouve-
ment est plus facile d'un côté. Lorsqu'on
commence par une rotation du bassin, celle-ci
FIG 3. - Exercice de retournement commençant par une rotation
de la ceinture scapulaire.
FIG 4. - Aide fournie aux patients tropfaibles pour se retourner
seuls. Proscrire la traction sur le membre supérieur.
devra se poursuivre jusqu'à ce que les genoux
touchent le plan du lit (fig. 2), la rotation des
épaules se fait alors le plus souvent sans
problème. Au début, le thérapeute pourra aider
le patient soit en bloquant les genoux, soit en
plaçant le genou supérieur fléchi en avant de
l'autre.
Lorsque le retournement débute par la cein-
ture scapulaire, il convient d'y' associer une
rotation homolatérale de la tête. Une antépul-
sion suffisante de l'épaule et du bras supérieur
est indispensable (fig. 3). Au début, on pourra
accompagner la rotation d'une poussée manuelle
sur la tête ou l'épaule (fig. 4). On évitera la
traction sur le membre supérieur car elle rompt
le schéma moteur recherché. Pour que l'antépul-
sion du bras soit efficace, il faut que celle-ci
s'effectue tangentiellement à la rotation, et il
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FIG 5. - Travail de l'équilibre au bord du lit, jambes pendantes.
faudra combattre la tendance spontanée du
malade à s'aggriper au bord du lit ou au'xdraps.
Nous préférons débuter le travail de l'équili-
bre assis au fauteuil plutôt qu'au lit car le patient
a les pieds posés par terre et la présence des
accoudoirs le sécurise.
Le travail se fait au bord du fauteuil et il faut
donc apprendre au patient à s'y mettre, soit en
se soulevant d'un bloc vers l'avant par une
poussée des bras sur les accoudoirs, soit en
avançant progressivement une fesse puis l'autre.
Spontanément le sujet âgé assis a tendance à
tomber vers l'arrière. Pour aider le patient à
garder la position il est souvent utile de lui
donner un point de repère. Par exemple, le
thérapeute demande au malade de maintenir le
nez face à son index. Cet exercice peut s'effectuer
d'emblée bras croisés sans l'aide des mains.
Une fois l'équilibre assis acquis au fauteuil,
on le travaillera de la même façon au bord du-
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FIG 6. - Travail de l'équilibre dynamique: poursuite d'objets
dans l'espace.
lit jambes pendantes (fig. 5). Après acquisition
de l'équilibre statique, on passera aux exercices
d'équilibre dynamique.
Les classiques poussées multidirectionnelles
ne sont à notre avis pas suffisantes, nous
préférons demander également au sujet de se
placer lui-même en position instable à la limite
du déséquilibre :
- en effectuant des mouvements de flexion,
rotation, inclinaison latérale du tronc.
- en saisissant des objets placés en différents
points de l'espace (fig. 6).
- en suivant du bout du nez l'index du
thérapeute qui cette fois-ci se déplacera (fig. 7).
Ce type d'exercice de correction de l'équilibre
nous paraît plus proche des situations de la vie
quotidienne.
Le passage du décubitus dorsal à la position
assise exige l'acquisition préalable du retourne-
ment, puisqu'il se fait après passage en décubitus
IL
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FIG 7. - Travail de l'équilibre dynamique: poursuite du doigt
du kinésithérapeute.
latéral, et bien sûr celle de l'équilibre assis.
aussi on veillera à ce que le patient soit placé
suffisamment loin du côté du lit où il veut
s'asseoir; il effectuera donc en une ou plusieurs
fois un transfert latéral vers le bord opposé du
lit.Le passage en monobloc àla position assise
en sortant les membres inférieurs du lit et en
les utilisant comme contrepoids dans un mouve-
ment de balancier est rarement possible chez le
sujet âgé. On lui demandera plutôt de descendre
ses jambes du lit puis de procéder àun
retournement (fig. 8). Au terme de cette manœu-
vre le patient doit se trouver un appui sur le
coude fléchi. Dans les meilleurs cas cela se fait
en un temps lors du retournement, mais bien
souvent le patient se trouve en décubitus latéral
bras placé vers le tronc et il se mettra
progressivement sur le coude (fig. 9). La position
FIG 8. - Début du passage mono-bloc à la position assise.
FIG 9. - Premier appui sur un coude.
FIG 10. - Appui des deux mains en préalable à la position du
tronc érigée.
assise est alors aisée par une simple poussée sur
ce coude puis sur la main. Si cela est insuffisant,
il peut s'aider du bras controlatéral soit par un
appui antérieur (fig. 10) la main posée àplat en
FIG 11. - Dernier appui, mains posées derrière le tronc.
Fm 12. - Pour se recoucher, utiliser le contre-poids de la tête
et des membres supérieurs.
avant du coude fléchi, soit par un appUI
postérieur la main posée derrière le tronc
(fig. 11). Ce dernier contre-appui a en outre
l'avantage d'éviter la chute vers l'arrière lors du
redressement, assez fréquente, et qui laisse le
patient inconfortablement et définitivement al-
longé en travers du lit.
Pour se recoucher, le patient doit passer par
la position décubitus latéral genoux fléchis, en
utilisant le mouvement de contrepoids du tronc
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FIG 13. - Deuxième technique possible pour se recoucher: le
patient bascule latéralement au lit, jambes pendantes à
l'extérieur.
Fm 14. - Suite de la deuxième technique :remontée des
membres inférieurs dans le lit.
et de la tête pour remonter les membres
inférieurs sur le lit (fig. 12). S'il n'y arrive pas
il faudra répéter avec le kinésithérapeute ce
mouvement de bascule sur le côté du tronc et
des jambes.
Il existe une autre méthode: le patient bascule
latéralement de façon à se trouver sur le dos
parallèlement au bord du lit jambes pendantes
(fig. 13) puis par un mouvement de flexion-
abduction de hanche il monte la première jambe
dans le lit, (fig.14), la montée de la seconde
flexion-adduction est plus difficile. Pour réaliser
aisément cet exercice il est nécessaire que le
patient sache décoller chaque membre inférieur
tendu du plan du lit.
Conclusion
Bien sûr certains des exercices décrits ne
peuvent être mis en œuvre en raison du contexte
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