Bac blanc du 6 novembre 2009 : Commentaire de texte littéraire
Propositions de pistes pour une étude systématique du portrait de Gnathon par La Bruyère
Gnathon ne vit que pour soi, et tous les hommes ensemble sont à son égard comme s'ils n'étaient point.
[…]
Il embarrasse tout le monde, ne se contraint pour personne, ne plaint personne, ne connt de maux que les
siens, que sa plétion et sa bile, ne pleure point la mort des autres, n'appréhende que la sienne, qu'il
rachèterait volontiers de l'extinction du genre humain.
1. Analyse détaillée de la phrase n° 1 :
« ne vit que pour soi » : grammaire, négation restrictive
« tous les hommes ensemble » : rhétorique, redondance
« n’étaient point » : verbe être au sens d’exister
« point » : lexique et grammaire, négation mais aussi définition de « néant »
« Gnathon » : composition, 1er mot de la phrase = importance, thème
« vit » + « sont » : grammaire, présent de rité générale, ou de définition
« à son égard » : La Bruyère nous place en position omnisciente, par le point de vue interne de Gnathon.
Vivre + être : lexique contextuel, deux synonymes de exister
« et » : grammaire, coordination au sens d’une antithèse, d’une opposition
Phrase disproportionnée en deux membres très inégaux, et le premier, très court, écrase et annule le second,
pourtant plus long : parallélisme entre le sens et la forme.
Opposition entre le singulier Gnathon et les pluriels collectifs (par anticipation : on trouvera parfois dans le
reste du texte des singuliers collectifs) : signification morale d’une guerre, d’un conflit, d’une séparation
totale du monde en deux catégories, dans l’opinion du personnage présenté en premier.
Interprétation initiale pour trouver un premier axe de lecture : portrait d’un égoïste.
2. Analyse détaillée du rythme de la phrase finale :
Phrase finale : grammaire de phrase et rtorique, composition en trois groupes ternaires de plus en plus
grands : « Il embarrasse tout le monde = 1.1, ne se contraint pour personne = 1.2, ne plaint personne =
1.3, ne connaît de maux que les siens= 2.1, que sa réplétion = 2.2 et sa bile = 2.3, ne pleure point la mort
des autres= 3.1, n'appréhende que la sienne = 3.2, qu'il rachèterait volontiers de l'extinction du genre
humain. = 3.3 » première série : Gnathon gêneur ; deuxième série : Gnathon plaintif ;troisième rie :
Gnathon et la mort. Gradation vers un paroxysme qui débouche sur l’égoïsme suprême : supprimer les
autres.
Confirmation de l’axe de lecture n° 1.
3. Analyse moins détaillée, et incomplète, du reste du texte :
« Non content de … » : grammaire et rhétorique, renchérissement, préparation d’une hyperbole
« remplir » … « occupe » … « se rend maître » « fait son propre » « s’attache à » … « s’il enlève » …
« il se fait » « établissement » « se conserver » « ce qu’il trouve » … : champ lexical de la prise de
possession, de l’occupation de l’espace
« la première place […] celle de deux autres » : rtorique, description, évocation du volume, de la forme de
Gnathon
« pour lui et pour toute la compagnie » : grammaire, coordination niée par le verbe « il oublie que »
« ne se sert à table que de ses mains » : grammaire, négation restrictive, portrait d’un impoli en société
« il manie les viandes, les remanie, démembre, déchire » : rtorique, énumération, montrant la sauvagerie et
la précipitation du personnage, sa gloutonnerie
« démembre, chire » : lexique de l’animalité + « la table est pour lui un telier » : rhétorique, taphore
de l’animalité
« Il ne leur épargne aucune de ces mal propretés dégoûtantes » : énonciation, sous-entendu : La Bruyère nous
épargne et ne nous raconte pas tout, il ne veut pas nous dégoûter complètement
« le jus et les sauces lui dégouttent du menton et de la barbe […] il le répand en chemin dans un autre plat et
sur la nappe ; on le suit à la trace. [ …] haut et avec grand bruit ; il roule les yeux en mangeant ; la table est
pour lui un râtelier ; il écure ses dents, et il continue à manger » portrait en action, récit, échantillon d’actions
enchaînées seulement pour ce récit ? Ou énumération à prendre comme un minimum ? c’est un portrait, on
peut choisir la deuxième solution
« il roule les yeux en mangeant » : rhétorique, description étonnante et inquiétante ? animalité ?
interprétation : il regarde autour de lui et surveille les autres
Composition : Gnathon présenté, l. 1 ; Gnathon à table, l. 2 à 12 ; Gnathon en socté, l. 12-13 ; Gnathon en
voyage, l. 14-18 ; Gnathon sumé, l. 18-21. la table représente les moyens de vivre matériellement, la
société, le voyage, représentent le rapport au monde : les deux se rejoignent dans la mesure Gnathon
mange tout., donc élimine le reste du monde
Interprétation pour un deuxième axe de lecture : portrait à visée morale, faisant réagir le lecteur.
4. Autres analyses à faire avant classement : examiner les champs déjà aperçus, éventuellement
en trouver d’autres qui confirment ce qu’on a trouvé.
Phrases presque toutes juxtaposées : grammaire et stylistique, accumulation, impression que le total n’est pas
crédible : une seule personne ne devrait pas avoir tous ces défauts ensemble ; La Bruyère regroupe des
caractéristiques appartenant à différentes sortes d’égoïsmes, donc sa visée est moralise, il fait un portrait
théorique.
Opposition permanente entre Gnathon, sujet de presque tous les verbes d’action quand le reste des hommes
est complément d’objet, Gnathon personnage sujet à la fois des verbes d’action et de pensée, et les autres
hommes, toujours victimes ; nous sommes spectateurs de ses actions, et au courant de ses opinions : mélange
de point de vue externe plus ou moins neutre, et de point de vue interne montrant l’égoïsme.
Importance des phrases négatives, grammaire, par lesquelles Gnathon nie autrui.
Composition d’ensemble : la phrase finale est une explicitation plus cruelle de la premre, et dit la me
chose, Gnathon seul rite de vivre, mais il vit mal …
Paradoxe : Gnathon mange beaucoup mais se plaint « de sa réplétion et de sa bile ». son égoïsme le punit,
mais il demeure égoïste. Donc, il est incurable.
Gnathon « ne se sert à table que de ses mains », « il manie les viandes, les remanie », « Tout ce qu'il trouve
sous sa main » : détail récurrent, Gnathon est présenté comme quelqu’un de très physique, sa main est un
instrument de prédation. La main est plus importante que la pensée ? Le ventre aussi est ts important, ainsi
que le volume physique du personnage, car la notion d’espace est permanente : « la première place », « celle
de deux autres », « répand en chemin dans un autre plat et sur la nappe », « on le suit à la trace », « et ne
souffre pas d'être plus pressé au sermon ou au théâtre que dans sa chambre », « S'il fait un voyage », « dans
la meilleure chambre le meilleur lit », « sa plétion » même est une manière d’occuper l’espace.
Absence totale de connecteurs logiques permettant de conclure : La Bruyère laisse le lecteur juger +
composition sous forme de série d’exemples = texte à visée démonstratrice, qui veut convaincre, texte à
déduction.
Tonalité apparemment très neutre, énonciation à la troisième personne du singulier, regard apparemment
extérieur, mais l’abondance des tails révèle une observation de la nature humaine en général, et on trouve
un peu de subjectivité gce à quelques indices de jugement par l’ironie qui animalise Gnathon.
Composition d’ensemble : une première partie plutôt pittoresque, accumulative, sur un seul domaine, le plus
remarquable, et une deuxième partie plus psychologique : les repas et l’animalité d’abord, Gnathon vu
comme un animal repoussant et inesttique, puis ses états d’âme : « il ne souffre pas .. », « si on veut l’en
croire, il pâlit et tombe en faiblesse », « il tourne tout à son usage », il « ne plaint personne », il ne « connaît
de maux que les siens », il « ne pleure point la mort des autres », il « n’appréhende » que sa propre mort.
5. Ainsi ces deux derniers aspects permettent de faire une autre sorte de plan : le comique par la
caricature satirique, et la moralité par l’analyse détachée et ironique du comportement.
6. Autres plans possibles (trouvés dans les copies) :
1°) Pourquoi étudier un égoïste ? D’abord en donner une finition, ensuite faire réagir le lecteur, lui
faire désapprouver cette conduite.
2°) Comment La Bruyère critique-t-il une certaine catégorie d’être humain ? D’abord en montrant
son égoïsme, puis sa saleté. Synthèse : les deux sont repoussants.
3°) D’abord l’attitude et la gloutonnerie de Gnathon, ensuite son manque de qualités morales,
provoquent et font réagir le lecteur.
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