THÉÂTRE DE GENET: MATADORS, MONSTRES ET ILLUSIONNISTES @L'Hannatlan,2004 ISBN: 2-7475-5958-0 EAN : 9782747559584 Hédi KHÉLIL THÉÂTRE DE GENET: MATADORS, MONSTRES ET ILLUSIONNISTES L'Harmattan 5-7, rue de l'École-Polyteclmique 75005 Paris FRANCE L'Harmattan Hongrie Hargita u. 3 1026 Budapest HONGRIE L'Harmattan Italia Via Bava, 37 10214 Torino ITALIE Du même auteur: En français: . Québec. Canada. . coloniales d'André Gide. Éd. LA Nef/Déméter. . 1985, Journalisme, 1988, Sens/]ouissance. cinéphilie et télévision en Tunisie. MuTisme, Éd. N âaman. érotisme et argent dans deuxfictions Tunis. 1994, Résistance et utopies. Essais sur le cinéma arabe et africain. Éd. Sahar. Tunis. . . 1994, Nouvelles du cinéma. Essais/ Fiction. Sousse. 2001, Figures de l'altérité dans le théâtre de Jean Genet. Lecture des Nègres et des Paravents. Éd. L'Harmattan. Paris. . 2002, Le Parcours et la trace. Témoignages et documents sur le Cinéma tunisien. Éd. Médiacom. . 2003, De l'extranéité à l'altérité. Tunis. Figures Jean Genet. Éd. Academia-Bruylant. de l'écriture dans l'œuvre de Belgique. En arabe: . . 1995, L'œil désirant. Essais sur la télévision tunisienne. Éd. Sahar. Tunis. 1996, Les Arabes et la modernité cinématographique. Sud-Éditions. Tunis. . 1999, Le coup de dé. La télévision, le cinéma et la photographie. Essais sur l'image. Tunis. Liste US LB BA JV PF ND MR : : des abréviations utilisées Haute Surveillance Les Bonnes Le Balcon Journal du Voleur Pompes Funèbres N otre- Dame-des- Fleurs Miracle de la Rose. INTRODUCTION Dans l'œuvre multidimensionnelle de Genet, les poèmes (Le Condamnéà mort, un Chant d'amour), les romans (Miracle de la Rose, PompesFunèbres,Notre - Dame - des Fleurs, Qyerellede Brest), l'autobiographie (Journaldu Voleur),les essais sur l'art (L'Atelier d'Alberto Giacometti, Ce qui est resté d'un Rembrandt déchiré en petits carrés bien réguliers etfoutu aux chiottes, Le Secretde Rembrandt, Le Funambule) et le cinéma (Un Chant d'amour), racontent l'effort mené par Genet l'étranger pour entourer sa vie d'une auréole héroïque, lui conférer une magnificence légendaire et à la fois pour nuancer son image, la rendre plurielle et désamorcer ce qu'il y a de plus solidement ancré en elle, à savoir l'érotisme. A travers ses voyages et ses errances, un peu partout dans le monde, Genet rencontre les humiliés, les bannis et les réprouvés qui sont les élus de sa race. L'œuvre aurait pu, d'emblée, sonner le clairon d'une alliance communautaire animée par des homosexuels, travestis, lépreux, mendiants et voleurs. Dans le cas de Genet, il n'en fut rien. L'altérité n'est pas un acte social, mais une aventure solitaire. Il n'y a pas d'étranger dans l'ordre de l'homogène. L'extranéité, parce qu'elle est mouvante, est devenir. Ce devenir fait de déchirements, de Hédi Khélil, Théâtre de Genet crises, d'interrogations, mais guère de reniements, l'œuvre rend compte de ses retorses et rageuses mutations. Une extériorité égocentriste Dans le poème, l'étranger de couleur est naturellement présent. Le Nègre est une constellation tropicale, un bloc de radioactivité érotique dont Genet chante la fulgurance bénéfique et thérapeutique sur son corps et ses sens. Fantasme issu des colonies pénitentiaires, de l'univers des corsaires et des pirates, l'étranger est un climat charnel et une protection nocturne. L'étranger typé devient, dans Notre-Dame-des-Fleursl, un personnage principal à travers le viril dandy Seck Gorgui, et apparaît comme la plaque tournante d'un chassé-croisé érotique animé par des personnages tantôt femmes tantôt hommes, et qui, par le biais de cette figure de l'androgyne, installent l'ambiguïté et la mobilité identitaire. Le fard charbonneux dont s'enduisent certains personnages blancs, tel Querelle par exemple dans Q;jerellede Brest2,montre que le masque est une stratégie défensive, une manière subtile pour le personnage de souligner son irréductible singularité et de tracer les limites infranchissables de sa propre réserve à l'instar de certains animaux sauvages qui marquent les repères de leur territoire en se servant de leur urine. L'étranger est un fard et une odeur. Mais, cet étranger de couleur est évoqué en fonction de Genet et de ses nombreux personnages, compagnons de détention, travestis, mendiants et pédérastes. L'ombre qu'il 1 Notre-Dame-des-Fleurs, in Œuvres complètes \1.2. éd. Gallimard, 2 Qyerellede Brest, in Œuvres complètes,\1.3, éd. Gallimard, 10 1951. Paris 1953. Hédi Khélil, Théâtre de Genet promène est celle de Genet. Les ténèbres qu'il couve, Genet les portait en lui dès sa naissance. La présence de l'Arabe ou du Nègre ne conduit pas l'œuvre vers une extériorité sans retour, mais participe elle-même d'une figure de l'ipséité au centre de laquelle trône l'étranger Genet. Une mutation décisive pointe, néanmoins, à l'horizon d'autant que la stratégie imaginaire mise en place est redoutablement sismique. Dans Journal du Voleur3,l'écrivain condense, affine les effets de sa différence et définit les ressorts théoriques de son univers fabuleux. Le récit autobiographique transcende la vie d'un Blanc mis au ban de la société, la libère des contingences banales de l'anecdote et la pousse vers les confins d'une épopée héroïque touchée par la grâce de ce que, à défaut de mots, Genet nomme lapoésie. Une dramaturgie balbutiante Le cinéma esquisse les premiers halètements d'une théâtralité dans laquelle prime le rituel des gestes et sont explorées les possibilités visuelles et oniriques du matériau filmique. Même s'il est dans l'œuvre de Genet une entreprise virtuelle, le cinéma répond au besoin de l'écrivain de s'exprimer dans une langue étrangère, c'est-à-dire une image affranchie de l'emprise de la parole. Mais, c'est dans les essais sur l'art qu'est mieux cernée et explicitée cette théâtralité en gestation. Par le biais d'une réflexion sur l'art, l'œuvre met en place les assises de sa trajectoire essentialiste. L'introjection de 3 Journal du Voleur.Éd. Gallimard, 1988. coll. Folio, Paris 1949. Tirage de Il Hédi Khélil, Théâtre de Genet l'étranger est projetée vers une fin extérieure à Genet. La blessure secrète est celle de tous les êtres humains. Genet découvre à travers le regard des autres humains, son incomplétude existentielle. Non seulement le « je » est un « autre», mais aussi l'autre est moi-même et ainsi de suite. La trame narcissique est tirée vers la vacuité. La scène ontologique de ce solipsisme qui est au cœur même de l'interrogation de Genet sur l'étranger, se précise. Mais la médiation artistique est à son tour une ruse pour échapper à l'emprise érotique et à la fixation narcissique. L'ipséité ne débouche pas encore sur une étrangeté exogène. La réflexion sur la dramaturgie du cirque préfigure le tournant théâtral. L'attirance pour les jeux cruels de l'arène théâtrale est nettement soulignée. Mais Le Funambule4est, en définitive, le texte d'un écrivain qui se recroqueville sur lui-même et se réfugie dans la magie de la création. Le modèle du texte, Abdallah, n'est qu'un prétexte. L'ontologie d'une extranéité à venir, compulsée ici et là, dans les poèmes, les romans, les films, les essais sur l'art, il est temps de lui trouver une architecture verbale et de lui camper une scène dramatique. Le théâtre est le support le plus apte à prendre en charge une telle entreprise d'autant que l'œuvre antérieure aspirait à cet horizon libérateur. 4 Le Funambule suivi de L'Enfant criminel. Éd. L'Arbalète, Décinés, 1958. 12 Hédi Khélil, Théâtre de Genet L'objectivation dramatique Haute Surveillance,Les Bonnes et Le Balcon sont des pièces de théâtre publiées respectivement en mars 1947, mai 1947 et juin 1956. En 1954, sont publiées deux versions des Bonnes, précédées d'une lettre qu'envoie Genet à l'éditeur Jean:Jacques Pauvert. En 1959, Genet reprend Le Balcon et l'assortit d'un « Avertissement». En 1961, l'écrivain rédige « Commentjouer "LesBonnes"». En 1962, les éditions L'Arbalète de Marc Barbezat publient une troisième version, très remaniée, du Balcon précédée de « Commentjouer Le Balcon ». Genet travaille sans répit à son cycle théâtral qui est étroitement lié à des questions de représentation. Les remaniements de Genet et les index dont il encadre postérieurement ses pièces sont souvent déterminés par des considérations de dramaturgie et de mise en scène. L'écrivain redoute le détournement de ses textes à des fins dictées par des opportunités de conjoncture. Une théâtralité en rapport avec les spécificités du langage théâtral se précise et s'affirme dans les premières pièces de Genet. La théâtralité esquissée dans le scénario Le Bagne ou les essais sur Rembrandt et Giacometti dessinaient, à petits traits, les contours d'un style théâtral qui procède de l'alchimie. Dans ses pièces, Genet confère à cette théâtralité balbutiante une configuration dramatique. L'entreprise d'irréalisation menée par Genet dans ses romans et son autobiographie contre la société et ses faux-semblants, n'était pas suffisante, parce que compromise dans les vicissitudes de l'imagerie personnelle. Dans le théâtre, l'imaginaire 13 Hédi Khélil, Théâtre de Genet revanchard de Genet se donne de nouveaux moyens de déstabilisation. Le théâtre lui permet-il réellement d'inscrire une extériorité affranchie des affres de la blessure intérieure? Quels sont les étrangers qui habitent le théâtre de Genet? Sont-ils des hommes ou des femmes, des Blancs ou des Noirs, des Européens ou des non-Européens? Ces distinctions de sexe, de race et de nationalité sont-elles pertinentes dans le théâtre de Genet? Quelles sont les grandes figures autour desquelles s'organise, dans le théâtre, la machine imaginaire de l'étranger? 14 I LE DRAME DE L'ABSENCE Le désir de la représentation théâtrale est déjà présent dans les premiers textes de Genet et notamment ses romans. Une dramaturgie de l'altérité s'y profile en filigrane. L'écrivain indique les ressources et les accessoires de ces virtualités de mise en scène qu'il raconte. A- La projection théâtrale Des textes tels que Notre-Dame-des-Fleurs et Pompes Funèbres comportent de nombreux passages où Genet envisage des hypothèses de mise en scène. « S'il me jàllait jàire représenter une pièce théâtrale où des femmes auraient un rôle,J"exigeraisque ce rôlefût tenupar des adolescents,et)"en avertirais lepublic, grâce à unepancarte qui resteraitclouéeà droite ou à gauche des décors durant toute la représentation »5, écrit un Genet passionné de travestis. Ce vœu qu'émet Genet préfigure le théâtre qu'il écrira plus tard: un théâtre qui affectionne le leurre et n'hésite pas à recourir à des supports didactiques pour se dénoncer en tant que simulacre. Dans PompesFunèbres,voulant exorciser la vive douleur ressentie à la suite de la mort de son jeune ami Jean Decarnin, Genet évoque le pressant désir de faire renaître le disparu. C'est au théâtre qu'il confère le privilège d'une telle réincarnation: 5 ND, op. cit., p.140. 15 Hédi Khélil, Théâtre de Genet « Une âme endormie esPèreun corps; qu'il soit beau, celui qu'apporte pour un soir le comédien. Ce n'estpas unepetite affaire. Nous exigeonsla plus rare beauté et l'élégancepour ce corps chargéd'un soin terrible,pour cesgestes détruisant la mort et ce n'estpas trop que demander aux acteurs d'armer leurspersonnagesjusqu'à la crainte» 6. Ces indications pourraient facilement figurer dans le texte Lettres à Roger Blin publié en 1966 sauf que les pans de théâtre souhaités et entrevus, à travers les péripéties romanesques, restent lettre morte. L'entreprise théâtrale est incubée dans les romans, comme si Genet minait la typologie des genres littéraires et prospectait les transitions à venir. Dans les projets scéniques auxquels s'adonne Genet, ressort déjà une donnée chère à l'écrivain, à savoir le lien indissociable entre l'écriture théâtrale et la représentation. C'est surtout dans l'évocation du Führer que la théâtralité se fait insistante. Dans Pompes Funèbres écrit en 1947, Genet rend hommage à l'officiant de l'humiliation de la France, Hitler. Hitler est un personnage initialement programmé dans le trajet narratif du roman: « Il ne m'appartient pas encore de rechercher si le Führer des Allemands doit en général personnifier la mort, mais je parlerai mon amour pour Jean de ses soldats, et saurai peut-être jouent de lui, inspiré par le rôle secret qu'ils dans mon cœur »7. Le récit qui narre la fin de l'occupation de Paris est un travail du deuil qu'accomplit l'écrivain à la mémoire de son 6 PompesFunèbres, ~3, éd. Gallimard, 7 PE op. cit., p.l O. 16 Paris 1953, p.5 7. Hédi Khélil, Théâtre de Genet ami Jean Decarnin, jeune résistant communiste tué par la Milice. Hitler est associé à ce deuil et en devient l'un des principaux acteurs: «... Je parvenais à déléguer à Nuremberg cet acteur célèbre qui jouait le rôle que de ma chambre ou de ma place auprès du cercueil de Jean je lui soufflais. Il paradait, il gesticulait et hurlait devant une flule de S. S. médusés, délirants, ivres de se sentir lesfigurants nécessaires d'un théâtre qui sejouait dans la rue »8. L'intimité de la chambre mortuaire se meut en une <<Kermesse géante »9,orchestrée par un acteur devant un peuple allemand tout acquis à sa cause. Hitler est le metteur en scène hors-pair des liturgies de masse. L'écrivain l'évoque en termes de théâtre: « Il n'est guère possible, en effet, qu'un qffice théâtral se déroule dans la vie quotidienne, Jàisant les actes les plus simples participer à cet qffice, mais peut comprendre la beauté de ces représentations devant cent mille spectateurs-acteurs quand on sait que l'qfficiant sublime était Hitler J"ouant le rôle de Hitler. Il me représentait »10. Genet recrée un personnage historique à travers un autre espace qui n'est pas celui de l'Histoire, mais celui de la narration romanesque qui est tirée à son tour vers la fable théâtrale. L'écrivain opère donc un déplacement des signes du réel et ne retient du corps historique que sa masse de simulacres et les gesticulations qu'il a instituées. Hitler est tout 8 Ibid., p.58. 9 Ibid., p.58. 10Ibid., p.58. 17 Hédi Khélil, Théâtre de Genet entier théâtralité. La théâtralité est à entendre ici au sens de «l'émergenced'une brisure dans l'espace, le clivage dans le réelpour que puissey surgir une altérité»11, comme le précise Josette Féral. Cette théâtralité du Führer n'est pas une parade limitée et circonstancielle, mais la marque générique d'un destin. Hitler est un personnage qui ne peut trouver ses marques que dans un amphithéâtre ou dans l'arène d'un cirque. Il est essentiellement un personnage de la scène, de la représentation, bref de la mimésis: «... Ce petit Bonhomme [Hitler] n'abandonnaitjamais à elle-même l'image vivante gesticulant, de son double dressé à la tribune de Nuremberg»12. Cette nécessité mimétique fait du Führer un personnage instable et en perpétuel mouvement. Instable, Hitler l'est non seulement parce qu'il lui est toujours demandé de jouer un nouveau rôle, mais parce que son double est relayé, sur le mode de l'identification, par les autres personnages du roman, à savoir Paulo, le demi-frère de Jean Decarnin, Erik, le tankiste allemand et, bien sûr, Genet luimême. Aussi Hitler est-il partout: « Dans ma chambre d'hôtel je me regardais devant l'armoire à glace. Derrière moi, sur la cheminée, se réfléchissait dans la glace le portrait du Führer »13. Il Josette Féral, « La théâtralité. Recherche sur la spécificité du langage théâtral ». ln Poétiquen° 75. Paris, 1988, p.350. 12 PE op. cit., p.187. 13 Ibid., p.52. 18 Hédi Khélil, Théâtre de Genet L'identité sexuelle du personnage est ainsi brouillée. Hitler est-il un homme ou une femme? Cette indétermination procure du plaisir à Genet l'humilié: « Il me plaît que la France ait choisi [Hitler) ce travesti charmant d'une effroyable putain religieuse afin, comme Lorenzaccio sans doute, de mieux tuer son marlou »14. Hitler est un caméléon, un fantôme insaisissable et incandescent. L'hitlérisme est vidé de toute consistance réelle 15. Ce renversement qu'inflige Genet à l'Histoire est poussé à fond par le biais de l'inscription de la détermination sexuelle dans les enjeux idéologiques et politiques. La Résistance est racontée sur le mode de la sexualité. La Milice est une ruche de pédérastes et d'homosexuels, à en croire Genetl6. Dans Journal du Voleur,il évoque la Gestapo française 14 Ibid.,p.133 15 Pour un chercheur passionné, non pas par l'Histoire, mais par la fiction de l'Histoire, des voies fécondes peuvent être dégagées dans le cadre d'une réflexion sur Hitler, non seulement à travers le texte de Genet, mais aussi à travers d'autres œuvres majeures hantées par le personnage et le mythe, tels que le film de la réalisatrice allemande Léni Riefenstahl Triomphe de la volonté (1935), consacré aux rassemblements nazis de Nuremberg et dans lequel elle magnifie le cérémonial nazi et le culte du chef, ou celui du réalisateur allemand Hans:Jürgen Syberberg, Hitler, unfilm d~llemagne (1977), d'une durée de sept heures, fondé sur les principes du collage et du montage et dans lequel l'auteur tente d'exorciser le mythe le plus controversé du vingtième siècle. 16 PF: op. cit., p., 59. 19 Hédi Khélil, Théâtre de Genet qu'il magnifie à travers le prisme de la sexualité: «La Gestapo ftançaise contenait ces deux éléments fascinants: et le vol. Qy'on y qjoutât l'homosexualité, la trahison elle serait étincelante, inat- taquable. Elle possédait ces trois vertus quej'érige en théologales, capables de composer un corps aussi dur que celui de Lucien. Qye dire contre elle? Elle était hors du monde. Elle trahissait (trahir signifiant rompre les lois de l'amour). Elle se livrait au pillage. Elle s'exclut du monde, enfin, par le Pédérastie. Elle s'établit donc dans une solitude increvable»17. Genet apporte le scandale dans cette vision de l'Histoire, puisqu'il met l'accent sur une pratique qui était violemment censurée par l'idéologie nazie, à savoir l'homosexualité. Cet infléchissement de l'Histoire vers l'homosexualité est surtout souligné par la longue séquence dans laquelle Paulo fait l'amour à Hitler.18 Nous sommes dans l'ordre du scandale non d'un corps parlant, mais d'un corps jouissant: «Le petit gars de Paris [paulo) accomplit son travail avec vaillance. D'abord il eut peur dejàire du mal au Führer. De toute cette machine à supplice qu'était Paulo, la verge en était la pièce essentielle. Elle avait la perfection des rouages, des bielles jàbriquées avec précisiow>. 19 Les rapports sont inversés: le tortionnaire devenant la victime. Hitler qui a « enculé>~ola France se fait à son tour «enculer»par un Français aux idées politiques assez floues. L'indétermination des sexes persiste, puisque le Führer est 17 jv: 18 La 19 PE 20jv: op. cit., p. 167. séquence couvre les pages 104-106 de Pompes Funèbres. op. cit., p.105. op. cit., p.118. 20