Nous avons lu

publicité
312
LIVRES
UNION DES PROFESSEURS DE PHYSIQUE ET DE CHIMIE
Nous avons lu
Comprendre le changement climatique
par Jean-Louis FELLOUS et Catherine GAUTIER
Éditeur : Odile Jacob - Collection Sciences - 2007 - 298 pages - 29,90 € ISSN/ISBN : 978.2.7381.1845.5
Public visé : Grand public averti Enseignants de sciences.
« La prévision est un art difficile, surtout quand il s’agit de l’avenir ». Cet aphorisme, attribué à plusieurs auteurs (mais on ne prête qu’aux riches) aurait pu être mis en exergue
de cet ouvrage qui fait un bilan des connaissances actuelles sur le changement climatique.
Il présente la particularité d’avoir été écrit « à quatre mains » par une équipe franco-américaine : il comporte treize chapitres dont onze, plus l’introduction et la conclusion, sont rédigés par
deux spécialistes, l’un français, l’autre américain. Presque tous sont ou ont été membres du GIEC
(Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), aussi les textes en gardent-ils un
fort parfum, entre autres les précautions oratoires auxquelles les divers rapports nous ont habitués.
D’autre part, l’accent est mis sur les facteurs scientifiques purs et durs, seul le treizième
chapitre donnant un aperçu des implications sociales et des relations – difficiles à établir – entre
climatologues et chercheurs en sciences sociales. Signalons par ailleurs que les auteurs ont utilisé
les technologies de communication les plus élaborées (messageries électroniques et visioconférences) pour limiter l’émission de gaz à effet de serre lors de la réalisation de l’ouvrage.
Cela étant, les divers chapitres abordent chacun un thème particulier de façon à donner in fine
une vue d’ensemble de la question. Le premier chapitre est bien entendu consacré au GIEC. Les
suivants traitent de l’effet de serre, du rôle, encore mal compris, des aérosols, du cycle hydrologique, de l’océan, des zones glaciaires, du cycle du carbone, de l’arctique, le « canari » du changement climatique (allusion au rôle des canaris dans la détection du grisou au XIXe siècle), à la
chimie atmosphérique et au système d’observation du climat. Suit, nous l’avons déjà signalé, le
chapitre sur les relations entre climat et société et la conclusion. L’ouvrage est complété par un glossaire assez détaillé, une bibliographie de cent quarante-neuf références, complétant celles fournies
à la fin de chaque chapitre, un index et l’indispensable table des matières. De-ci de-là, des indications de sites Internet, que j’aurais aimé voir rassemblées en une netographie spécifique, pour en
faciliter la consultation, les habituels moteurs de recherche étant à mon goût beaucoup trop prolixes.
L’ouvrage est abondamment illustré, les auteurs étant bien placés pour obtenir des renseignements de première main. Pour des questions de coût, j’imagine, les illustrations en couleurs ont été
rassemblées en un cahier de huit pages au centre du livre. Un petit reproche : les auteurs (ou l’éditeur ?) ont voulu en mettre le maximum, et du coup certaines sont peu lisibles, par exemple les
planisphères des troisième et septième pages du cahier couleur.
La double casquette sciences et GIEC fait que la rédaction est mesurée : j’ai parlé plus haut
des précautions oratoires, sans rien cacher des doutes ni des incertitudes rencontrés au cours des
études. Un accent particulier est mis sur les zones d’ombre qui subsistent en de nombreux domaines
comme les nuages, les aérosols, ou même l’océan dont l’influence est encore mal comprise. Cela
nous change agréablement des affirmations péremptoires de certains auteurs, d’autant plus catégoriques que leurs connaissances sont moins assurées.
Le Bup no 901
PA R U S O U À PA R A Î T R E
313
La rédaction est agréable et, visiblement, les éditeurs ont beaucoup exigé des auteurs pour les
contraindre à une belle unité de style, en même temps qu’à choisir un vocabulaire maintenant une
indéniable rigueur scientifique tout en en limitant le jargon. Pour qui veut s’informer sur les changements climatiques, voilà indéniablement l’un des meilleurs ouvrages récents sur la question, dont
je ne saurais trop recommander la lecture.
Michel HENRY
Atmosphère, océan et climat
par Robert DELMAS, Serge CHAUZY, Jean-Marc VERSTRAETE et Hélène FERRÉ
Éditeur : Belin - Collection Pour la science : Bibliothèque scientifique - 2007 282 pages - 29 € - ISSN/ISBN : 978.2.7011.4508.2
Public visé : Tout public.
L’ouvrage est organisé en cinq parties principales :
♦ Tout d’abord, trois parties reprenant les mots-clés du titre (mais dans un autre ordre...).
En premier, une introduction au climat de la Terre sous deux points de vue ; d’une part l’approche « machine thermique » (flux de chaleur, saison, zone climatique), d’autre part l’approche
« historique » (glaciation, évolution, influence anthropique…). Ensuite une étude de la physique
de notre atmosphère sous différents aspects : thermodynamique (composition, température, pression, …), condensation et nuages, dynamique de l’atmosphère (vent, circulation des masses
d’air, brise thermique…). Enfin une description de l’océan (son rôle de « thermostat », sa structure en masse d’eau et sa stratification…), de ses mouvements (marée, courant de dérive, thermohaline…) et de ses échanges (tout particulièrement en CO2).
♦ La quatrième partie aborde des aspects souvent moins connus en détail, concernant la chimie de
l’atmosphère. Tout d’abord une description des cycles de la matière (C, N, S) et de leurs
couplages, de la composition chimique de l’atmosphère actuelle et de leur répartition dans celleci, des différents (et nombreux) polluants, que ceux-ci soient produits au sol ou au sein de l’atmosphère. Puis une étude assez détaillée des différentes conséquences de cette pollution (sur les
milieux, sur les matériaux, la santé, la couche d’ozone…) y compris évidemment l’effet de serre
et les changements climatiques. On y évoque les prévisions et incertitudes en matière de changement climatique. Une précision : les auteurs ont tenu compte des derniers rapports du GIEC
parus cette année.
♦ Une dernière partie traite des « aléas » climatiques dont certains ont défrayé la chronique, que
ce soient des événements violents (tempêtes, orages, tornades…) ou des événements océaniques
majeurs (cyclones, tsunamis, El Niño, hausse du niveau des mers…). Il s’agit aussi de maladies
climato-dépendantes liées par exemple à l’humidité (paludisme, chikungunya…), la température
(choléra…), les poussières… ou de situations de santé publique (canicule…).
Comme souvent dans cette collection, un effort tout particulier a été fait pour la qualité d’approche du texte et sa « lisibilité » (vocabulaire précis, mais pas inutilement compliqué). Un second
point remarquable est la qualité des illustrations, tout particulièrement les nombreux schémas explicatifs très colorés et très explicites. On y trouve en particulier quantité de graphes, cartes et photographies satellitaires. Divers encadrés précisent des points techniques particuliers.
Vol. 102 - Février 2008
Parus ou à paraître
Si « nous sommes tous désormais conscients de la question du changement
climatique au coeur de nos choix politique et de société, … il nous manque souvent le socle de
connaissances qui permettrait d’en appréhender à la fois la complexité et les enjeux » déclarent les
auteurs dans leur avant-propos avant que de poursuivre : « ce livre a l’ambition d’expliquer, de
façon simple, précise et très illustrée, au grand public, aux élèves, aux étudiants et à leurs professeurs, les notions à la base du fonctionnement de l’atmosphère, de l’océan et du climat […] ».
Comment décrire plus efficacement l’objet de ce livre ?
314
UNION DES PROFESSEURS DE PHYSIQUE ET DE CHIMIE
L’ouvrage dispose évidemment d’un index et d’une bibliographie (2/3 « vulgarisation », 1/3
« universitaire », en particulier « physique et chimie de l’atmosphère » dû à l’un des auteurs
– « Échelles » chez Belin – et déjà présenté dans ces pages).
Voici un ouvrage qui sera tout à fait utile et efficace. Je le conseille tout particulièrement pour
un CDI (TPE, TIPE…).
Bruno VELAY
EINSTEIN : Un siècle contre lui par Alexandre MOATTI
Éditeur : Odile Jacob - Collection Sciences - 2007 - 304 pages - 21,90 € ISSN/ISBN : 978.2.7381.2007.5
Public visé : Tout public.
Le centenaire des articles fondateurs d’EINSTEIN a donné lieu depuis 2005 à de
nombreuses publications tant sur EINSTEIN lui-même que sur ses travaux scientifiques.
Ce que nous propose ici Alexandre MOATTI est très différent dans la mesure où il s’intéresse aux
réticences voire aux rejets parfois violents qu’ont provoqués les théories de la relativité restreinte
et de la relativité générale dans le milieu scientifique et intellectuel en France et en Allemagne. Il
serait vain ici de mentionner tous les opposants à EINSTEIN dont les critiques sont étudiées dans ce
livre, d’autant que l’auteur a eu la bonne idée de ne pas se limiter aux personnalités de premier plan
comme les mathématiciens PICARD et PAINLEVÉ, le philosophe BERGSON, les physiciens DUHEM,
STARK et LENARD, mais d’examiner aussi la contribution de personnages plus obscurs.
À la mesure de la complexité du sujet, l’auteur a choisi d’utiliser de nombreux axes d’études
complémentaires qui font de son livre une enquête foisonnante. J’ai particulièrement apprécié les
chapitres où l’auteur s’interroge sur les difficultés de diffusion des idées d’EINSTEIN en France et
les mettant en relation avec des spécificités françaises. Ainsi, la place importante de l’optique dans
la physique française depuis les travaux magistraux de FRESNEL rendait difficile l’abandon du
concept d’éther. De même, les faiblesses de la physique théorique en France dans la première moitié
du XIXe siècle expliquent le manque de passeurs français des travaux d’EINSTEIN en dehors de Paul
LANGEVIN qui restera célèbre pour la formulation du paradoxe des jumeaux. Enfin, l’auteur montre
comment le rattachement de l’enseignement de la mécanique newtonienne à celui des mathématiques et l’orientation très forte de l’école mathématique française vers l’analyse ont aussi freiné la
diffusion des théories d’EINSTEIN.
Plus généralement, le livre d’Alexandre MOATTI a le mérite, au-delà du foisonnement d’anecdotes, de faire réfléchir sur de nombreuses questions qui restent d’actualité en ce début de XXIe
siècle : relations entre sciences et politique, place du scientifique dans la société, places respectives
des mathématiques et de l’expérimentation dans la physique, diffusion des connaissances scientifiques… À sa lecture, j’ai aussi éprouvé une certaine nostalgie pour l’époque où les programmes
des classes secondaires et des classes préparatoires incluaient une modeste initiation à la relativité
restreinte.
Stéphane OLIVIER
Le Bup no 901
Téléchargement