Une crise de la livre sterling imminente

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Une crise de la livre sterling imminente
Londres - 30 juin 2016
Les répercussions d’un pari perdu
Avant le referendum, le Premier Ministre anglais David Cameron avait toutes les chances de renégocier en sa
faveur de meilleurs accords entre le Royaume-Uni et l’Europe. Il avait toutes les cartes en main, dans la mesure où
la plupart des États membres étaient prêts à tout pour maintenir le Royaume-Uni au sein de l’Union Européenne
(UE). La menace était prise au sérieux. Dans la théorie des jeux, il s’agit d’une étape clé pour maximiser son
pouvoir de négociation. Si les britanniques s’étaient prononcés pour le maintien, cela aurait été un triomphe pour
les pragmatiques du parti conservateur dirigé par David Cameron. Cependant, les britanniques s’étant prononcés
pour une sortie de l’Union Européenne, ce qui aurait pu être un succès s’est transformé en un véritable
cauchemar en vue des négociations à venir.
Si on considère que le résultat du référendum engage la responsabilité de la classe politique britannique,
alors, le pouvoir de négociation du prochain gouvernement britannique est extrêmement faible. En effet, la
menace d’une éventuelle sortie de l’UE a disparu. Le seul atout du Royaume-Uni reste les dommages liés à la
pesante incertitude générée par d’interminables négociations. Cette stratégie à la Yanis Varoufakis est
malheureusement vouée à l’échec. Tout coup porté aux 27 États membres restants aura un impact huit fois plus
important sur l’économie britannique. En laissant la situation s’envenimer tout au long des six premiers mois de
l’année 2015, Yanis Varoufakis, alors conseiller d’Alexis Tsipras, espérait qu’en refusant de négocier avec les autres
membres de la zone euro tout en maintenant un niveau d’incertitude élevé, il parviendrait à infliger d’importants
dégâts financiers à la zone euro. Comme prévu, cette stratégie a échoué pour la simple raison que les dommages
se sont fait ressentir de manière disproportionnée sur l’économie grecque. Cette stratégie d’immobilisme s’est
donc révélée de plus en plus contreproductive par rapport au pouvoir de négociation du gouvernement grec. En
fin de compte, les coûts engendrés par cette stratégie ont amplifié la récession et abouti à l’adoption d’un accord
plus contraignant pour la Grèce.
Plus l’incertitude sur la suite des événements perdure, plus le Royaume-Uni paiera le prix fort sur le plan
économique. Comme dans le cas de la Grèce, le pouvoir de négociation du gouvernement britannique devrait
progressivement s’affaiblir comparé à celui des 27. Il faudra malheureusement un certain temps avant que la
clarté politique revienne au Royaume-Uni. David Cameron désormais démissionnaire, a fixé un calendrier
prévoyant l’élection d’un nouveau dirigeant conservateur avant le 2 septembre 2016. Le nouveau chef de file du
parti prendra ses fonctions d’ici le mois d’octobre. Ce nouveau premier ministre devrait déclencher l’article 50
avant la fin de l’année, et officialiser la décision prise par les britanniques récemment. D’autres scénarios
politiques peuvent être envisagés, quand bien même ils sont moins probables à ce stade : une révolte des
députés conservateurs en faveur du maintien qui entraînerait des élections législatives anticipées, ou encore le
refus du nouveau gouvernement conservateur de déclencher l’article 50, et ce contre la volonté du peuple
britannique. Les deux sont difficilement envisageables. Premièrement, les députés conservateurs disposent d’une
majorité absolue au parlement qui leur confère les pleins pouvoirs décisionnels jusqu’en 2020. Parier sur des
élections législatives anticipées n’a pas beaucoup de sens, même pour les députés conservateurs en faveur
du « Bremain », dans la mesure où les électeurs britanniques se sont déjà exprimés. Il est donc fortement
probable d’assister à la formation d’un gouvernement conservateur chargé de gérer la sortie du Royaume-Uni de
l’UE. Etre au pouvoir dans une période aussi stratégique représente une incroyable opportunité que le parti
conservateur n’est pas prêt à laisser passer.
Le rythme lent de la politique britannique et les coûts liés à l’incertitude soulèvent deux questions. La
première est de savoir si le coût économique bouleversera le calendrier politique attendu. La seconde est de
savoir si ce coût amènera le futur gouvernement et les britanniques à revenir sur leur décision de quitter l’Union
Européenne. La première question est sans conséquence sur le résultat final, et ne ferait qu’accélérer le
processus à la fois sur le plan de la politique britannique mais aussi dans les négociations avec l’UE.
Accessoirement, cela aboutirait à une meilleure issue que l’approche attentiste de Yanis Varoufakis. La seconde
question est plus complexe. Cela revient à se demander si le Royaume-Uni peut réellement quitter l’UE.
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H2O Asset Management LLP, 10 Old Burlington Street, Londres W1S 3AG, Royaume-Uni
H2O Asset Management LLP est une société agréée et réglementée au Royaume-Uni par la Financial Conduct Authority sous le no. 529105.
Le Royaume-Uni peut-il réellement quitter l’Union Européenne ?
Sur le plan tactique, la décision de quitter l’Union Européenne est loin d’arriver au meilleur moment. Le
pays est confronté à des déficits jumeaux : le déficit courant, qui atteint les 5,2%, n’a jamais été aussi élevé
depuis la fin de la 2e guerre mondiale. Un déficit pareil nécessite £100 milliards d’afflux net de capitaux par an
pour que la livre sterling reste stable. Les investissements en général, et les investissements étrangers en
particulier, devraient fortement diminuer suite au vote. La simple décision de s’abstenir d’investir au RoyaumeUni suffit à peser sur la devise. La fuite des capitaux hors Royaume-Uni induite par la fin de l’accès au marché
unique (ou le simple risque de ne plus y accéder de nouveau) devrait s’étaler sur les prochains trimestres. Cela
devrait peser sur le compte de capital. Il convient de ne pas minimiser le risque de voir cette situation dégénérer
en une crise de change généralisée. C’est évident que plus l’incertitude politique et institutionnelle perdure au
Royaume-Uni, plus le pays est exposé au risque d’une dépréciation incontrôlée de la livre sterling.
L’endettement privé et le déficit budgétaire ont atteint des niveaux importants et le marché de l’immobilier
est en berne. Un ralentissement aussi marqué que celui prévu par la Banque d’Angleterre en cas de Brexit
entraînerait un creusement du déficit budgétaire, ce qui nécessiterait un retour à l’austérité pour préserver la
crédibilité du pays et retenir les investisseurs. La dépréciation rapide de la livre est nécessaire et pourrait se
révéler potentiellement bénéfique. Néanmoins, il ne faudrait pas franchir le cap à partir duquel les investisseurs
seraient
dissuadés
de
détenir
des
actifs
britanniques,
comme
en
janvier
2009.
Si cela se produisait, la Banque d’Angleterre s’attèlerait à défendre sa devise, en contradiction avec l’objectif de
réduction de l’endettement public. Un scénario catastrophe est tout à fait envisageable pour l’économie
britannique. Il est d’ailleurs surprenant de constater que la majorité des observateurs évitent manifestement
d’imaginer une telle éventualité.
C’est assez regrettable car le coût de l’ajustement économique lié à une sortie de l’UE aura probablement
une incidence sur la politique britannique et européenne. Premièrement, comme évoqué ci-dessus, les prix des
actifs britanniques vont conditionner le rythme d’un divorce en bonne et due forme. Mais plus important encore,
le coût économique pourrait, à partir d’un certain stade, inciter les britanniques à revenir sur leur décision de
quitter l’UE. Une fois de plus, la situation économique et politique initiale du Royaume-Uni est primordiale. Il ne
faut pas surestimer les fondamentaux structurels du Royaume-Uni. Ils ont donné lieu une nouvelle fois à
d’inquiétants déséquilibres conjoncturels qui pèseront davantage à court terme, à mesure que l’économie
britannique subit les coûts d’une sortie du marché unique pour un saut dans l’inconnu. Comme pour toute entité
souveraine, il y a un niveau de perte économique à partir duquel les accords existants n’ont plus de sens. Les
britanniques ont clairement indiqué qu’ils souhaitaient quitter l’UE, mais pas à n’importe quel prix. Les partisans
d’une sortie de l’UE ont fait l’impasse sur ce sujet, alors que les partisans du maintien ont dû se défendre face aux
accusations alarmistes. Le fait est qu’il est difficile de prévoir le coût d’une sortie. Néanmoins, la situation
politique et économique du Royaume-Uni n’est pas propice à des négociations rapides, ce qui pourrait peser sur
l’économie britannique au fil du temps. Quelles que soient les prévisions que chacun a pu entendre avant le
référendum, il est fort à parier que la réalité sera bien pire.
Le Royaume-Uni est une démocratie forte. Par conséquent, un revirement d’opinion sur un sujet aussi
important que l’appartenance à l’UE serait difficile à obtenir. Le niveau de souffrance que le peuple britannique
est prêt à endurer avant qu’il ne revienne sur sa décision est probablement très élevé. Cela laisserait une marge
de manœuvre importante aux spéculateurs si d’aventures, les cours des actifs britanniques venaient à dévisser.
Les investisseurs adorent profiter de l’agitation politique. Le pouvoir de négociation du Royaume-Uni dans le
processus de sortie de l’UE est si faible qu’un tel scénario pourrait se produire. Le Royaume-Uni pourrait même se
résoudre à rester dans l’Union Européenne, non pas parce qu’il le souhaite, mais parce qu’il n’a pas les moyens de
la quitter.
Publié à Londres, le 30 juin 2016.
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