LES VOLVULUS DU COLON

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LES VOLVULUS DU COLON
N.M. KABA KANTE*, J. CAROLFI**
RESUME
Les volvulus du colon représentaient la principale cause d’occlusion dans nos régions et constituent la principale indication à une colectomie segmentaire.
Nous avons distingué deux types de volvulus.
- Type I = volvulus simple.
- Type II = volvulus compliqué.
En 7 ans, et sur 93 interventions pratiquées sur le
colon, 31 le furent pour occlusion par volvulus et
7 seulement pour sténose néoplasique de la jonction
rectosigmoïde.
Le volvulus est la torsion d’une partie du tractus digestif
autour d’un axe régulièrement représenté par un axe
vasculaire.
Cette torsion est fréquente surtout pour les segments libres
en partie ou en totalité du tube digestif : estomac, intestin
grêle ; mais surtout le colon (coecum ; transversé ; angle
gauche ; sigmoïde).
Le volvulus du colon est une complication du dolichocolon et du dolichomégacolon et survient à tous les âges
(de 18 à 67 ans).
Sur 93 interventions pratiquées sur le colon au cours des
7 dernières années, 31 le furent pour occlusion par volvulus
d’un segment du colon et seulement 7 pour sténose néoplasique de la jonction rectosigmoïde. Ce qui fait du volvulus
la principale cause d’occlusion du colon dans nos régions.
Les observations macroscopiques per-opératoires nous ont
amenés à distinguer deux types de volvulus et quatre stades
selon le degré de nécrose des anses volvulées.
A. 1/ - Type I ou volvulus simple : La torsion intéresse
exclusivement le colon dans ses différents segments libres
(coecum ; transverse ; angle gauche ; sigmoïde). Les torsions dans le type I sont à un ou deux tours de spires, rarement trois mais jamais plus.
Dans les volvulus récents (moins de six heures), il n’existe
qu’un ou deux tours de spire au plus. Alors que dans les
* Chirurgien C.H.R. Daloa B.P. 207 - Côte d’Ivoire
** Médecin-Chef - Service Médecine Générale Daloa
Médecine d'Afrique Noire : 1992, 39 (5)
volvulus vus après six heures nous avons régulièrement
constaté trois tours de spire.
Ces volvulus anciens sont ceux qui se compliquent de
nécrose colique hypothéquant les suites opératoires et
surtout le pronostic vital.
2/ - Type II ou volvulus compliqué
Le volvulus du colon entraîne au niveau de la racine du
mésocolon la torsion d’une ou plusieurs anses grêles.
L’iléon terminal est régulièrement impliqué. Ce qui
entraîne des résections doubles : colique et iléale avec des
anastomoses doubles.
Cette double résection suivie de la double anastomose
allonge le temps opératoire et nécessite une réanimation
souvent difficile et prolongée.
B. Toujours sur le plan macroscopique selon le degré
d’ischémie et de nécrose nous avons distingué quatre
stades lésionnels.
a) - Stade I Volvulus récent (moins de six heures présentant un “ballon” sigmoïdien ou colique macroscopiquement
normal. Une détorsion douce et progressive entraîne le
passage de l’air et est parfois suivie d’une débâcle diarrhéique sur la table d’opération (voir photo 1).
Photo 1 - Volvulus du colon - Type I Stade I
LES VOLVULUS DU COLON
Il est fort probable que ce colon apparemment sain après la
réduction du volvulus, soit à la base de la technique classique de détorsion. Vidange suivie de la fixation du colon.
Séduisante pour l’esprit, cette technique (tout comme celle
de l’intubation rectale) doit être abandonnée car elle
expose les malades à des récidives fréquentes et surtout à
des laparotomies itératives dont la morbidité et surtout la
mortalité ne sont pas nulles.
b) - Stade 2. Le volvulus simple mais découvert entre 8 et
12 heures après le début des symptômes. Les signes
d’ischémie et de nécrose sont évidents mais disséminés =
zones d’infarctus à côté des zones apparemment saines. Ce
qui donne l’aspect d’un “colon tigré”. Ce stade 2 préfigure
la gangrène. Dès que la laparotomie est pratiquée il faut
procéder à une large résection suivie de l’anastomose
termino-terminale et drainage.
c) - Stade 3. Volvulus simple, mais découvert plus de 12
heures après le début des symptômes, avec une gangrène
du colon ; “colon noir” (voir photo 2). Le tableau clinique
est dominé par la toxi-infection avec hypotension, tachycardie, sueurs profuses et pâleur des muqueuses. C’est un
véritable tableau de choc infectieux. L’urgence est médicochirurgicale ; réanimation avant, pendant et surtout après
l’intervention.
La résection doit être large et généreuse avec rétablissement immédiat de la continuité. Toilette péritoniale abondante au sérum tiède, drainage des zones de décollement et
du Douglas.
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d) - Stade 4. C’est le dernier stade. Il s’agit d’un volvulus
compliqué type II avec gangrène du colon et du grêle
volvulés. La double résection-anastomose allonge le temps
opératoire et rend préjoratif le pronostic vital. La rapidité et
la précision dans les gestes, sans être le but recherché,
serait d’un bon appoint pour améliorer le pronostic.
il existe quelque fois des types II stade 1 où l’on ne doit
reséquer que le colon et conserver le grêle.
Le diagnostic du volvulus est en grande partie clinique et
secondairement un abdomen sans préparation confirme le
diagnostic.
AU PLAN CLINIQUE : les douleurs sont vives, lancinantes mais peuvent être supportées pendant des heures
voire un à deux jours. Le ballonnement abdominal est
important, asymétrique avec un grand axe orienté de bas en
haut et de droite à gauche. La douleur est étouffante, le
malade respire de façon saccadée, le pouls est rapide parfois filant, la transpiration profuse. La tension artérielle
baisse, au fil des heures, pour être imprenable dans les cas
de toxi-infection (type II stade 4). La langue est sèche, les
muqueuses décolorées.
L’arrêt des gaz et des matières depuis le début des crises
douloureuses est constant et directement en rapport avec le
ballonnement.
C’est le tableau classique des occlusions par volvulus du
colon. Il s’agit d’une urgence chirurgicale qui ne doit pas
être différée. Un seul examen para-clinique est indispensable : le groupe sanguin.
Photo 2 - Volvulus du colon - Type I - Stade IV
B. Les 31 cas que nous rapportons se répartissent comme
suit :
1/ - Sexe :
Homme = 24
Femme = 7
La fréquence est trois fois plus grande chez les hommes
que chez les femmes.
2/ - Age :
de 18 à 67 ans.
3/ - Segments du colon intéressé :
- Coecum + iléon terminal
- Angle colique gauche
- Sigmoïde
- Sigmoïde + iléon
=
=
=
=
1
2
22
6
Médecine d'Afrique Noire : 1992, 39 (5)
N.M. KABA KANTE, J. CAROLFI
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4/ - Répartition selon le type et le stade
a)
b)
-
Type I Stade 1 = 8
Type I Stade 2 = 2
Type I Stade 3 = 3
Type I Stade 4 = 11
Type II Stade I = 1
Type II Stade 4 = 6
COMMENTAIRE
Il apparait ainsi que le volvulus intéresse plus souvent le
sigmoïde que le reste des segments coliques (28/31) et que
le malade présente une fois sur trois environ des lésions de
nécrose colique (type I stade 4), que tous types et stades
confondus, le malade doit subir une résection dans environ
1 cas sur 2 avec une double résection-anastomose chez
certains malades (type II stade 4 : 6 cas).
Les types I (24 cas sur 31) sont plus fréquents et on y rencontre tous les stades avec une plus grande incidence pour
les stades 1 et 4 (8 et 11 cas respectivement).
Dans tous les cas, nous avons pratiqué une résection du
sigmoïde avec anastomose directe colorectale termini-terminale.
Les types II sont moins fréquents, mais sont vus à un stade
malheureusement plus avancé avec nécrose du sigmoïde et
du grêle (stade 4 = 6 cas, contre stade 1 = 1 cas).
Il est souhaitable de faire beaucoup d’efforts pour poser le
diagnostic assez tôt et pouvoir épargner à l’intestin grêle
une résection étendue le plus souvent. Nous estimons qu’il
faut reséquer systématiquement le sigmoïde aussi bien
dans les types II que dans les types I quel que soit le stade.
Nous avons pratiqué dans tous les cas la même technique :
la colectomie segmentaire idéale avec rétablissement
immédiat de la continuité par une anastomose terminoterminale et drainage large des zones de décollement.
Ce faisant nous avons perdu 4 malades, tous à des stades
avancés avec nécrose massive, toxi-infection aiguë et anurie persistante (Type 1 stade 4 = 2, type II stade 4 = 2).
Malgré tous les efforts de réanimation et de réhydratation
bien menés, aucun des quatre n’a pu être sauvé.
Le retard dans l’indication opératoire peut faire basculer
facilement le malade d’un stade I aux stades suivants, ce
qui est préjudiciable surtout dans les types II, où il est
possible de ne reséquer que le sigmoïde au stade I et
d’épargner l’iléon, alors qu’aux stades suivants la double
résection-anastomose s’impose.
Enfin, le volvulus du colon, complication du dolichomégacolon, est la principale indication de la colectomie
segmentaire dans nos régions, de loin devant les tumeurs
malignes.
Une technique bien maîtrisée permet d’éviter la multiplication des techniques et surtout des temps opératoires à ces
malades souvent fragiles.
Notre préférence est à la colectomie segmentaire idéale
avec rétablissement immédiat de la continuité, même dans
les types II stade 4 et surtout dans les types I les plus fréquents, quel que soit le stade.
BIBLIOGRAPHIE
1 - B. CHICHE, P. MOULLE
Urgences Chirurgicales - PP 34 à 36 - Masson Ed. 1980
2 - PH. DETRIC
Chirurgie d’Urgences
Médecine d'Afrique Noire : 1992, 39 (5)
PP 393 à 396 - Masson Ed. 1985
3 - J. MIALARET, M. JULIEN, M. MALAFOSSE
In Pathologie Chirurgicale sous la Direction de C. PATEL.
3° Edition - Masson Ed. 1978
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