PAGE Lu n d i 22 f é v r i e r 2010
Dossier (suite)
Silence, on livre !
Depuis un an, des distributeurs et des transporteurs ont mené, au sein du Club Déméter
Environnement et Logistique, des expérimentations en partenariat avec la région
Île-de-France pour favoriser des livraisons plus silencieuses. En voici le premier bilan.
Réduire les nuisances so-
nores liées aux livraisons
urbaines. L’enjeu est de
taille, tant pour les dis-
tributeurs, en proie aux récrimi-
nations des riverains, que pour les
transporteurs, souvent accusés de
tous les maux. Une problématique
particulièrement sensible en Île-de-
France : avec 1 million de livraisons
et enlèvements par jour, la région
concentre 12 % des trafics de mar-
chandises de la France entière pour
pouvoir assurer les livraisons de
quelque 700.000 établissements.
Pour tenter de trouver des solu-
tions économiquement viables et en-
vironnementalement satisfaisantes,
le Club Déméter Environnement et
Logistique, qui réunit des acteurs
privés et publics de la chaîne logis-
tique globale, a lancé une expéri-
mentation grandeur nature depuis
le début 2009 sur la diminution des
nuisances sonores, en collaboration
avec des prestataires logistiques, des
fabricants de matériels et des dis-
tributeurs. Une initiative appuyée
par la région Île-de-France, qui a en
charge la révision du plan de dépla-
cement urbain (PDUIF).
Dans l’approvisionnement des
11 millions de Franciliens, le « der-
LA PLUPART DES OPÉ
RATEURS ONT FAIT EN
SORTE DE SE DOTER
DE VÉHICULES RÉPON
DANT AUX NORMES
EURO SUR LES
REJETS POLLUANTS.
Gilles ROlle/ReA
JupiteRimAGes
TNT, LEADER du trans-
port express aux en-
treprises, émet chaque
année des milliers
de tonnes de CO2.
Consciente de sa res-
ponsabilité, l’entre-
prise a annoncé, en
décembre dernier, vou-
loir devenir le premier
transporteur « car-
bone neutre » au monde. Pour atteindre cet objectif
ambitieux, l’entreprise investit dans des solutions de
livraisons urbaines propres. Déjà utilisé dans huit
villes françaises (Lyon, Bordeaux, Saint-Étienne, Di-
jon, Nancy, Rouen, Grenoble et Valence), TNT teste,
depuis le 12 janvier, un système de livraisons du cen-
tre-ville de Paris par triporteurs, baptisés Maxitrike.
Ce service, qui a déjà fait ses preuves que ce soit en
termes de fiabilité, d’ecacité, de qualité de service et
d’image, ne concerne pour débuter que les colis à des-
tination du IIIe et IVe arrondissements, mais s’étendra
progressivement au cœur de Paris pour concerner
quatre arrondissements en juin. Déjà 4.000 colis par
mois sont livrés avec ces quatre triporteurs dont le
nombre devrait tripler d’ici l’été. Outre un avantage
écologique, il permet à TNT de répondre aux impé-
ratifs de réduction du bruit et des polluants, tout en
anticipant les réglementations de plus en plus strictes
pour la livraison des centres urbains. Au moins trois
autres villes devraient suivre d’ici l’été. B. D.
PIONNIER des livraisons propres en centre-ville
dès 1998, Chronopost étoffe son équipement
en véhicules électriques pour la livraison ur-
baine avec quatre Chrono Van. Ces nouvelles ca-
mionnettes électriques G3 de la marque Goupil,
mieux adaptées aux contraintes de la livraison
urbaine avec une capacité d’emport augmen-
tée, s’ajoutent aux treize véhicules électriques,
aux trois fourgons fonctionnant au gaz naturel
et aux deux Chrono Trolley déjà existants au
sein de l’ELU (Espace de livraison urbaine) de
la Concorde. Chronopost compte ainsi réduire
l’impact causé par son activité dans les villes, en
matière de bruit, d’encombrement ou de pollu-
tion atmosphérique. Entre 2006 et 2008, l’ex-
ploitation des véhicules électriques de l’ELU
Concorde a permis une réduction des gaz à effet
de serre de 54 % pour les véhicules de ce site.
Par ailleurs, Chronopost va remplacer les hor-
loges existantes sur ses onze sites d’Île-de-France
par des horloges astronomiques, tenant compte
de l’heure exacte du lever et du coucher du soleil
ainsi que des horaires hiver-été. Des détecteurs
crépusculaires, de présence ou de passage seront
installés et les ampoules à incandescence rem-
placées par des modèles basse consommation.
L’ensemble de ces solutions doit permettre de
gagner de 2 à 9 heures d’éclairage par jour dans
les zones intérieures et 3 heures en moyenne
pour les éclairages extérieurs.
B. D.
Des livraisons zéro
CO2 dans Paris avec
les triporteurs TNT
Chronopost étoe
son parc de véhicules
électriques
de manutention également label-
lisés PIEK. Pendant six semaines,
les livraisons ont été réalisées aux
alentours de 1 heure du matin et en-
tre 4 heures et 5 heures, permettant
ainsi de tester ces créneaux horaires
et l’organisation logistique adéqua-
te. Pour Casino, le test a également
porté sur des livraisons dans trois
magasins de Paris et de la proche
banlieue, sur deux créneaux : soirée
(20 heures-21 h 30) et tôt le matin
(7 heures-7 h 30), là aussi avec des
véhicules PIEK. Pour l’enseigne de
distribution, l’ob-
jectif de cette expé-
rimentation était la
migration définitive
vers une nouvelle or-
ganisation.
Les premiers en-
seignements sont
positifs : camions
et moyens de ma-
nutention plus si-
lencieux et moins
polluants, organi-
sation des points de réception des
marchandises permettant une
meilleure productivité, réduction
de la congestion des zones urbai-
nes et augmentation des charges
transportées par kilomètre parcou-
ru. Bref, « il nous faut maintenant
passer de la volonté d’expérimen-
ter à celle de faire et de déployer »,
arme Didier Thibaud, président
du Club Déméter. Mais là, c’est une
autre histoire.
BÉATRICE DELAMOTTE
DR
nier kilomètre » concentre l’es-
sentiel des problématiques. Cette
partie urbaine, essentiellement
eectuée en mode routier, impose
d’optimiser la répartition des flux
dans le temps, ainsi que les émis-
sions de gaz à eet de serre. La plu-
part des opérateurs (transporteurs
et distributeurs) ont déjà fait l’eort
financier nécessaire pour se doter
de véhicules répondant aux nor-
mes EURO sur les rejets polluants,
aménager l’intérieur des camions
avec des revêtements amortisseurs
de bruit, équiper
les véhicules de
phares à base de
LED et former les
chauffeurs-livreurs
à la conduite éco-ci-
toyenne. De même,
les nouveaux revê-
tements de voirie
absorbent de mieux
en mieux le bruit.
Un ensemble de
mesures qui concer-
ne toute la chaîne du silence, pour
laquelle existe désormais un label
(PIEK), inspiré de l’expérience des
Néerlandais.
Deux membres du Club Déméter
ont participé à ces expériences pilo-
tes : LR Services et Casino. Pour le
prestataire des restaurants McDo-
nald’s, l’expérimentation a porté sur
l’approvisionnement de trois éta-
blissements parisiens par des semi-
remorques PIEK avec des moyens
UN OUTIL POUR CALCULER
L’ÉCO-PERFORMANCE
Le projet « Supply Chain Meter » vient enfin d’être finalisé. Après
dix-huit mois de travaux menés sous la direction de Thierry Jouenne,
professeur associé au Cnam (Conservatoire national des arts et métiers),
cet outil regroupe les indicateurs clés de la performance éco-logistique
et a été ociellement lancé le 11 février. Plus qu’un nouvel outil d’éva-
luation, c’est toute une démarche d’amélioration continue que propose
Supply Chain Meter. Elle entend répondre à une demande persistante
de l’industrie de disposer d’indicateurs communs pour améliorer la per-
formance logistique globale. Or, le sujet n’est pas simple, tant la supply
chain est un système complexe dont il est dicile d’aligner les objectifs
et les mesures du fait de la diversité et de la multiplicité des acteurs,
des flux, des produits et des services.
Accessible via Internet, le référentiel Supply
Chain Meter se présente comme un concentré
d’expertise et d’innovation conçu pour toutes
les entreprises. Évolutif, il s’inscrit dans
une démarche d’amélioration continue.
Pour les concepteurs du projet, il était impor-
tant d’avoir la vision d’une chaîne logistique fia-
ble, eciente et réactive, dont les performances
puissent être facilement mesurées et traduites en
termes économiques et écologiques. Supply Chain
Meter permet de « matérialiser » deux chaînes de
performances, l’une opérationnelle, l’autre fonc-
tionnelle, afin d’avoir une vision d’ensemble des
indicateurs répartis tout au long de la chaîne.
Ses concepteurs estiment que cet outil per-
mettra de faciliter le dialogue, d’aligner les
objectifs de performance et d’améliorer le
volume d’aaires et la rentabilité de tous
les acteurs de la supply chain.
B. D.
Un triporteur de la société La Petite Reine,
spécialiste du transport terminal intra-
urbain de marchandises pour compte d’autrui.
DR
Thierry Jouenne,
professeur associé au Cnam.
La logistique
durable
est en
marche