Censure Quand les
multinationales utilisent le
droit pour faire taire leurs
critiques
L’attaque n’est-elle pas la meilleure des défenses ? Face aux
voix critiques qui mettent en lumière les atteintes aux droits
occasionnées par leurs activités, de plus en plus
d’entreprises répondent en leur intentant des procès. Dans son
bilan annuel sur la responsabilité juridique des
multinationales, le Centre de ressources sur les entreprises
et les droits humains attire l’attention sur le phénomène des
« procès stratégiques » initiés par les grandes entreprises
pour faire pression sur les militants ou les syndicalistes qui
dénoncent leurs agissements. Une pratique qui concerne aussi
certains groupes français.
© Liana Lopez/Flickr
Siège de Chevron à Houston
Dans de nombreux pays opèrent les grandes entreprises
transnationales, les militants et défenseurs des droits des
travailleurs et des communautés locales sont encore exposés à
toute une série de menaces et de violences physiques, y
compris jusqu’à voir leur vie mise en danger. Comme le montre
le bilan 2013 du Centre de ressources sur les entreprises et
les droits humains, ce genre de pratique est de plus en plus
complété (sinon remplacé), y compris cette fois dans des pays
aux mœurs théoriquement plus démocratiques, par le recours à
des poursuites judiciaires.
Poursuites (ou menaces de poursuites) contre des militants
syndicaux, des lanceurs d’alerte, des activistes locaux, des
journalistes ou des auteurs d’ouvrages… Tous les moyens sont
bons pour dissuader les critiques d’engager une bataille
politique, juridique et médiatique éprouvante et
potentiellement risquée. Ce type de procès est désigné en
anglais par l’acronyme SLAPP (strategic lawsuit against
public participation, procès stratégiques contre la
participation publique). Il se base fréquemment sur le droit
de la diffamation, du préjudice moral ou de la protection des
marques. Une approche qui a, pour les firmes impliquées, le
double avantage d’intimider les critiques, mais aussi de
détourner l’attention du public des faits que ces critiques
dénonçaient initialement.
Certaines entreprises ont poussé cette logique très loin.
L’entreprise pétrolière Chevron, dans le cadre de sa bataille
judiciaire contre l’Équateur suite aux graves pollutions
occasionnées par Texaco (intégrée aujourd’hui à Chevron) dans
la région amazonienne du pays, a ainsi fait saisir la
correspondance électronique des avocats de ses adversaires. Le
géant pétrolier a d’ailleurs usé des mêmes procédés envers
l’un de ses propres actionnaires, un fonds d’investissement
responsable (lire ici).
Les groupes français également concernés
Le rapport ne les mentionne pas explicitement, mais les
groupes français ne se privent pas d’assigner en justice
syndicalistes, associations ou médias. France Télécom/Orange a
ainsi récemment initié des poursuites contre deux
syndicalistes en Guinée, les accusant d’actes de sabotage
durant un mouvement social. Depuis, l’un d’eux est porté
disparu. De même, la firme de surveillance Qosmos a porté
plainte contre la Ligue des droits de l’homme pour
dénonciation calomnieuse, après que cette organisation ait
porté plainte contre l’entreprise pour avoir fourni du
matériel de surveillance au régime syrien.
En Sierra Leone, le groupe Bolloré a intenté un procès contre
des militants locaux qui dénonçaient les accaparements de
terre du groupe (lire Sierra Leone : arrestation de paysans en
lutte contre la Socfin et Bolloré). Il a lancé des poursuites
contre l’association Sherpa, sur le même sujet au Cameroun,
avant de les retirer suite à une procédure de médiation dans
le cadre du « Point de contact national » français.
Alter-médias, association éditrice de l’Observatoire des
multinationales et de Basta !, est également poursuivie par le
groupe Bolloré pour un article sur l’implication de groupes
français dans l’accaparement des terres, lequel analyse la
participation de plusieurs des filiales du groupe à ce
phénomène. Bolloré a estimé que plusieurs passages de cet
article étaient diffamatoires. Sur cette affaire, on peut lire
les commentaires de Survie, Greenpeaceet de Mediapart.
Plusieurs États ou provinces nord-américaines se sont dotés de
lois destinées à prévenir les SLAPP, mais ces dispositifs de
protection des militants des droits humains restent ignorés en
Europe.
Pendant ce temps, l’impunité des multinationales reste la
règle
Le bilan annuel 2013 du Centre de ressources sur les
entreprises et les droits humains liste 52 cas de procédures
légales en cours au niveau international, intentées contre ou
par des entreprises sur des questions de droits humains. Une
liste qui va de A pour Adidas à V pour Vinci, l’entreprise
française de BTP (y figurent également la SNCF, Trafigura,
Eramet, Alstom, Veolia, Amesys, Qosmos et Trafigura, pour ne
citer que les françaises). 52 procédures légales qui ne
représentent certainement qu’une fraction des violations
présumées des droits humains occasionnées directement ou
indirectement par les grandes entreprises dans le monde [1].
Ce bilan est l’occasion d’un tour d’horizon complet sur l’état
du droit et de la jurisprudence sur ces questions au niveau
international, et d’un aperçu sur les principaux défis actuels
et futurs. Le bilan accorde ainsi une large place au jugement
rendu en 2013 par la Cour suprême américaine dans l’affaire
Kiobel v. Shell. Ce jugement a considérablement réduit la
portée de l’Alien Tort Act, loi américaine qui a joué un rôle
historique crucial pour rendre possible les poursuites
judiciaires internationales contre les grandes entreprises.
L’inadaptation du droit national et international à la réalité
des grands groupes transnationaux, les complicités entre
élites économiques et politiques, la faiblesse ou la
corruption du pouvoir judiciaire, l’absence de libertés
syndicales et de droits démocratiques… autant d’obstacles qui
continuent de s’opposer au droit des victimes à obtenir
justice.
L’une des conclusions principales de ce bilan est que malgré
l’adoption récente des Principes directeurs des Nations Unies
sur les entreprises et les droits humains, gouvernements et
milieux économiques tendent encore à négliger ce qui constitue
en théorie le « troisième pilier » de ces Principes, l’accès à
la justice pour les victimes.
Conclusion qui rejoint très exactement celle d’un rapport
récemment publié par la Coalition européenne pour la
responsabilité sociale et environnementale des entreprises
(European Coalition for Corporate Justice, ECCJ) et ses
partenaires britanniques et américains. Selon ce rapport, la
situation se serait même aggravée dans certains pays, comme le
Royaume-Uni, le gouvernement a mis en place des obstacles
supplémentaires aux poursuites contre les firmes
transnationales.
http://www.multinationales.org/article218.html
Quand les signes du krash de
1929 réapparaissent…
L’année 2014 sera-elle porteuse d’un nouveau et tragédique «
Black Thursday » similaire à celui survenu en octobre 1929 ?
C’est ce que semblent indiquer plusieurs signes révélateurs
pointés du doigt par certains journalistes et économistes.
N’en déplaise au doux illuminé faisant office de dirigeant de
notre nation, j’ai nommé Hollandouille (le mou, le gentillet…)
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