DOSSIER DE PRESSE SEPTEMBRE 2016 -JANVIER 2017 EN COMPLÉMENT DU MAGAZINE N°6 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 COMMUNIQUÉ DE PRESSE ANNONCE DE LA PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 16/17 DU THÉÂTRE DE VIDY (SEPTEMBRE 2016 À FÉVRIER 2017) La troisième saison de Vincent Baudriller renforce et prolonge l’ouverture et le dialogue engagés depuis deux ans : ouverture à des formes théâtrales et chorégraphiques au plus grand nombre, dialogues entre des arts et des cultures de Suisse, d’Europe et du monde – notamment du pourtour méditerranéen –, rencontres entre des artistes majeurs de la scène internationale et des plus jeunes, collaborations avec de nombreuses institutions et acteurs culturels de la région. La première partie de cette nouvelle saison est composée de 22 spectacles – sur la cinquantaine présentée d’ici juin 2017. Le Théâtre de Vidy poursuit son engagement à être un théâtre de création avec, sur ces six prochains mois, dix spectacles répétés et créés à Vidy ainsi qu’une dizaine de spectacles en tournée. LE VIVANT ET L’ÉTRANGER Le théâtre est un lieu public où les questions de société se reformulent au travers des œuvres. Le rapport à l’étranger et l’interrogation sur le vivant qui marquent notre actualité sociale, politique et scientifique, traverseront cette programmation, tant par les sujets abordés que par l’expérience même de la représentation. Des textes du répertoire résonnent avec des enjeux d’aujourd’hui : Nathan le Sage de Lessing, mis en scène par l’Allemand Nicolas Stemann, Dom Juan de Molière incarné par Nicolas Bouchaud dans la mise en scène du Français Jean-François Sivadier et Mesure pour mesure de Shakespeare mis en scène par Karim Bel Kacem questionnent l’idéal de tolérance et la liberté individuelle face aux normes et aux dogmes. Plusieurs créations renvoient à l’urgence et la nécessité de prendre en compte l’autre dans ses différences, notamment Empire de Milo Rau sur la crise des réfugiés en Grèce, Nkenguegi du Congolais Dieudonné Niangouna sur le mouvement chaotique du monde, Lenga du GdRA sur la disparition des langues, de l’occitan en Europe au xhosa et merina en Afrique, ou encore Massimo Furlan proposant à un village basque d’accueillir des migrants dans Hospitalités. Un vivre-ensemble que questionnent les Italiens Daria Deflorian et Antonio Tagliarini sous l’angle de la ville et de l’urbanisme dans Le ciel n’est pas une toile de fond, Vincent Macaigne sous celui de l’amour et de la solitude dans En manque, Jérôme Bel sous celui de la pratique partagée de la danse dans Gala, ou encore le circassien Yoann Bourgeois qui présente, avec Celui qui tombe, une petite humanité en équilibre. Plusieurs spectacles résonnent avec la question du vivant qui occupe les débats politiques, écologiques et scientifiques : Nachlass, la nouvelle installation théâtrale de Stefan Kaegi et Dominic Huber, témoigne de ce que nous souhaitons laisser aux vivants après notre disparition. Dans 69 positions et 7 pleasures, la chorégraphe danoise Mette Ingvartsen interroge le corps et la nudité dans l’art et dans la société, et, dans La Nuit des taupes, Philippe Quesne observe la vie des taupes sous la terre. FAIRE DIALOGUER LES ÉPOQUES ET LES ARTS Ces interrogations d’aujourd’hui sont également abordées par le prisme de l’histoire et de l’héritage, prolongeant les thématiques de la saison passée : Décris-Ravage d’Adeline Rosenstein raconte l’histoire de la Palestine depuis 200 ans, Rouge décanté du Flamand Guy Cassiers évoque les traumatismes d’un homme interné, enfant, dans un camp en Indonésie, Modules Dada du metteur en scène et musicien Alexis Forestier recherche l’esprit du mouvement Dada. De nombreuses créations font dialoguer le théâtre avec d’autres langages artistiques. La musique 2 3 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 et le cinéma se croisent dans Yoshtoyoshto, le projet amazonien de Franz Treichler des Young Gods, du cinéaste Peter Mettler et de l’anthropologue Jeremy Narby, ou dans Blanche-Neige ou la chute du mur de Berlin, le spectacle-ciné-concert de la compagnie La Cordonnerie pour les enfants et leurs parents. Le cirque croise la danse avec Yoann Bourgeois ou le GdRA. Le Théâtre invite le photographe Christian Lutz avec une exposition, no man’s land, créée pour La Kantina de Vidy en collaboration avec Vevey Images, à partir de ses travaux sur les réfugiés, de l’île de Kos en Grèce aux abris de protection civile à Genève, en passant par le Val Verzasca au Tessin, où a été réalisée la photo de l’affiche de saison. VIDY PARTAGÉ Pour les enfants et les adolescents, le Théâtre de Vidy propose quatre spectacles : Celui qui tombe, BlancheNeige ou la chute du mur de Berlin, Udo complètement à l’est et L’Après-midi des taupes, ainsi que des ateliers organisés certains après-midi et pendant les vacances. Vidy intensifie ses actions pour que chacun puisse accéder au théâtre et prolonger son expérience de spectateur comme il le souhaite : introductions aux œuvres, rencontres avec les artistes, cours mensuels sur l’histoire des avant-gardes, conférences de Matthieu Jaccard, débats avec des penseurs et chercheurs, notamment de l’UNIL, un site internet enrichi… Pour ouvrir le théâtre à des publics qui ont peu - ou pas - accès à la culture, des ateliers sont mis en place avec des enseignants, des foyers de jeunes en difficulté ou encore, en collaboration avec l’EVAM, avec des réfugiés. Pour encourager la circulation des publics de l’Arc lémanique, Vidy poursuit ses échanges avec les institutions culturelles de Genève et de Lausanne. Une navette gratuite permet régulièrement de rentrer à Genève après un spectacle à Vidy. Comme depuis trois ans, La Bâtie-Festival de Genève propose à ses festivaliers les spectacles d’ouverture de saison de Vidy, et Vidy propose à ses adhérents de découvrir deux spectacles du festival. De même avec la Comédie de Genève et le Théâtre de Carouge : les adhérents de Vidy sont encouragés à découvrir des spectacles d’Hervé Loichemol, de Joël Pommerat et de Jean Bellorini. Le Théâtre de Vidy continue de renforcer ses liens avec les acteurs culturels de Lausanne et sa région – L’Arsenic, Sévelin36, La Grange de Dorigny, le TKM, le Théâtre du Jorat, la Cinémathèque Suisse et de nombreux autres partenaires. En plus de la Carte Adhérent qui permet, pour un tarif inchangé, d’aller au théâtre en bénéficiant de tarifs entre Fr. 6.- et Fr. 18.-, Vidy élargit son offre avec deux nouvelles cartes : la Carte Adhérent Duo pour aller au théâtre à deux et la Carte Découverte permettant de bénéficier des mêmes tarifs pour une demi-saison. LA DEUXIÈME PARTIE DE SAISON 16/17 La deuxième partie de la saison sera annoncée le 28 novembre 2016. Seront présentées notamment les créations de Magali Tosato, Ludovic Lagarde, La Ribot, Claude Régy et un projet d’Antoine Jaccoud. Pour la troisième édition de Programme Commun, du 23 mars au 3 avril 2017, imaginée avec l’Arsenic et d’autres partenaires, Vidy invite Milo Rau, avec une nouvelle création, Boris Nikitin, Romeo Castellucci et Guillaume Béguin. EN ATTENDANT, EN JUIN 2016 Deux évènements viennent s’ajouter au programme de la fin de saison : le 6 juin, la projection en avantpremière du film Thomas Ostermeier, insatiable théâtre sur les répétitions de La Mouette, et les 22 et 23 juin, la création des Syriens Omar Abussada et Mohammad Al Attar : Alors que j’attendais. CONTACTS PRESSE Sarah Turin [email protected] / +41 (0)21 619 45 21 Constance Chaix [email protected] / +41 (0)21 619 45 67 DOCUMENTATION ET IMAGES EN HAUTE RÉSOLUTION À télécharger sur www.vidy.ch (page du spectacle, onglet « en savoir plus ») PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 4 5 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 SOMMAIRE OMAR ABUSAADAP. 6 FRANZ TREICHLER/PETER METTLER/ JEREMY NARBY P.26 NICOLAS STEMANNP. 8 JEAN-FRANÇOIS SIVADIER P. 28 DE GOTTHOLD EPHRAIM LESSING DE MOLIÈRE Alors que j’attendais DE MOHAMMAD AL ATTAR Yoshtoyoshto Nathan le Sage avec Crassier, drame secondaire d’Elfriede Jelinek STEFAN KAEGI/DOMINIC HUBER (RIMINI PROTOKOLL) Dom Juan ADELINE ROSENSTEINP. 30 P. 10 Décris-Ravage PHILIPPE QUESNEP. 32 Nachlass Deux spectacles Pièces sans personnes METTE INGVARTSENP. 12 Deux spectacles 69 positions 7 pleasures La Nuit des taupes (Welcome to Caveland !) L’Après-midi des taupes GUY CASSIERS Rouge décanté P. 34 CHRISTIAN LUTZP. 14 d’après le roman Une exposition de photographies VINCENT MACAIGNEP. 36 no man’s land MATTHIEU JACCARDP. 15 Sous un même toit (I et II) En manque MASSIMO FURLANP. 38 Un cycle de conférences inclusives et optimistes Hospitalités MILO RAUP. 16 Empire KARIM BEL KACEM Mesure pour mesure P.40 DE WILLIAM SHAKESPEARE DIEUDONNÉ NIANGOUNA Nkenguegi P. 18 LA CORDONNERIEP. 42 (MÉTILDE WEYERGANS/SAMUEL HERCULE) LE GDRA Deux spectacles (CHRISTOPHE RULHES/JULIEN CASSIER) P. 20 YOANN BOURGEOIS P. 22 Lenga Celui qui tombe DE JEROEN BROUWERS DARIA DEFLORIAN/ANTONIO TAGLIARINI Il cielo non è un fondale (Le ciel n’est pas une toile de fond) Blanche-Neige ou la chute du mur de Berlin Udo, complètement à l’est ALEXIS FORESTIERP. 44 Modules Dada P. 24 JÉRÔME BELP. 48 Gala PRÉSENTATION DE LE SECONDE PARTIE DE SAISON 16/17 LE 28 NOVEMBRE 2016 À 11H 6 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 OMAR ABUSAADA Alors que j’attendais DE MOHAMMAD AL ATTAR Mise en scène : Omar Abusaada Texte : Mohammad Al Attar Scénographie : Bissane Al Charif Lumière : Hasan Albalkhi Vidéo : Reem Al Ghazzi Musique : Samer Saem Eldahr (Hello Psychaleppo) Avec : Mohammad Alarashi Fatina Laila Nanda Mohammad Amal Omran Mohamad Al Refai Mouiad Roumieh Production : Festival d’Avignon Napoli Teatro Festival AFAC (Arab Fund for Art and Culture) Pôle Arts de la scène La Friche La Belle de Mai, Marseille Theater Spektakel Zürich Onassis Cultural Centre Athens Vooruit Gent La Bâtie-Festival de Genève Les Bancs publics/Les Rencontres à l’échelle, Marseille Festival d’Automne à Paris Avec le soutien de : La Criée, Marseille Le Tarmac, Paris Création le 24 mai 2016 au Kunstenfestivaldesarts, Bruxelles MAG 6 P. 6 LES 2 2 ET 23 JU16IN 20 22 et 23.06 Salle Charles Apothéloz Mercredi 22.06 20h00 Jeudi 23.06 20h00 En arabe, surtitré en français Durée estimée : 1h30 Théâtre Tarif M VIDY+ RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Mer. 22.06 Jeu. 23.06 à l’issue de la représentation Entrée libre, sans réservation 7 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 EXTRAIT D’UN ENTRETIEN AVEC OMAR ABUSAADA, 2016 Pourquoi vivez-vous en Syrie ? Comment vos conditions de travail ont-elles évolué ? Toute ma famille et mes amis vivent là-bas, alors j’ai décidé de ne pas en sortir. Avant 2011, je faisais partie d’un groupe d’artistes indépendants. Il était déjà difficile d’obtenir des lieux pour créer. Aujourd’hui, la guerre a complètement changé nos vies. Il devient difficile de se réunir pour travailler, il n’y a pas d’électricité, les moyens de transport sont quasi inexistants. Et à cause de la nature des textes que je monte, je ne suis plus en sécurité. Une partie des gens avec qui je travaille ne peuvent plus revenir en Syrie où ils risquent à tout moment d’être arrêtés, interrogés et traduits en justice. Pour l’instant, je n’ai pas encore de problème, mais mon dramaturge, Mohammad Al Attar, lui, est en exil. Je peux encore monter des pièces aujourd’hui car je suis soutenu par des producteurs extérieurs, mais aussi grâce au soutien des donateurs de l’AFAC, le Fonds pour la Culture Arabe. Comment est née Alors que j’attendais, votre dernière création ? Cela fait plus de deux ans que je travaille sur ce projet à partir de l’histoire d’un proche tombé dans le coma après avoir été battu. Il en est mort. Depuis ce moment, grâce à un ami médecin avec qui je me suis longuement entretenu sur le sujet, j’ai pu visiter différents hôpitaux syriens où j’ai enregistré des histoires de familles dont les proches sont dans le coma. Des récits qui ont servi à Mohammad Al Attar pour écrire ce texte qui a ensuite évolué au fur et à mesure des répétitions avec les comédiens. Dans cette pièce, j’ai cherché à comprendre la relation qu’une personne plongée dans le coma peut entretenir avec son corps, mais aussi avec son imagination. J’ai voulu montrer comment une famille oriente sa pratique quotidienne pour s’occuper d’une personne dans le coma, tout en vivant au jour le jour dans une ville en guerre qui elle aussi change leurs habitudes. Je me suis également intéressé aux réactions intimes des proches face à cette épreuve car, pour ma part, je trouve encore plus difficile d’être confronté au coma qu’à la mort. On suit des personnages qui vont utiliser des moyens différents pour réveiller le jeune homme : certains parlent beaucoup, donnent des nouvelles de la famille, lui rappellent ce qu’il aimait, évoquent les grands changements de la vie en Syrie. On suit également le cheminement de personnages qui vont décider de partir en Europe ou faire le choix de rester en Syrie. Alors que j’attendais est aussi une manière de réinterroger nos rêves. En 2014, j’ai rencontré une femme dont le fils est dans le coma depuis 2010. Entre temps, deux de ses frères et sœurs ont été tués, une autre est en exil, son père est mort, ses amis sont partis ou à l’armée. Et, tous les jours, elle se demandait ce qu’elle allait bien pouvoir lui raconter de la situation s’il se réveillait. Alors, il y a cette idée assez simple dans la pièce : si en 2011, j’imaginais qu’en 2016 la démocratie était advenue, qu’on avait augmenté le niveau de vie, qu’il y avait plus de liberté dans nos vies... L’exact opposé de ce qui se passe aujourd’hui. S’il y a coma, c’est qu’il y a encore de la vie, de l’espoir. Diriez-vous que la Syrie est également plongée dans le coma ? Oui, le pays n’est ni vivant ni mort, mais la métaphore se situe à différents niveaux. De ce point de vue, ce que j’observe dans Alors que j’attendais, c’est que de jeunes actifs pendant la révolution sont maintenant absents ou subissent une situation sans ne plus pouvoir l’influencer. Cinq ans après le début de la révolution, Alors que j’attendais est l’occasion de faire un point sur la situation en Syrie, mais aussi sur ma pratique théâtrale. Quand la révolution a commencé, j’ai été enthousiasmé, présent dans les rues, actif à travers le théâtre. Mais cinq ans plus tard, mon présent n’a rien à voir avec celui que j’attendais. Je pense qu’il est important de comprendre pourquoi nous en sommes arrivés là alors que nos idéaux n’ont pas changé. Depuis que je travaille, je prône un théâtre politique dont les valeurs n’ont pas réussi à s’incarner alors même que c’était possible. Je suis moins naïf aujourd’hui. J’ai compris que le pouvoir en place n’est pas le seul obstacle à l’émergence d’une société nouvelle. Un des principaux problèmes est un défaut dans la construction initiale de la société syrienne et son système familial, systématiquement orienté vers le père et la religion. J’ai aussi pris conscience que la Syrie est prise dans une toile d’intérêts mondiaux qui diffèrent d’une région à l’autre et qui dépassent les intérêts locaux ou régionaux. Ce qui est un problème. Aujourd’hui je me sens proche d’un ensemble de gens qui pensent qu’aucune justice sociale ne sera possible dans mon pays, si on ne la recherche pas également au niveau mondial. La question du coma traduit aussi cette prise de conscience des changements. Quant à l’espoir, il a toujours été présent dans mes créations. L’espoir c’est la vie, ses développements, ses avancées. PROPOS RECUEILLIS PAR FRANCIS COSSU, TRADUIT DU SYRIEN PAR SIMON DUBOIS Alors que j’attendais © Didier Nadeau Alors que j’attendais EN TOURNÉE 2016 Kunstenfestivaldesarts, Bruxelles 24-28.05 Braunschweig TheaterFormen 17-19.06 Napoli Festival 26-27.06 Festival d’Avignon 8-14.07 Theater Spektakel, Zurich 18-20.08 Theater Basel 31.08-1.09 La Bâtie - Festival de Genève 4-5.09 Gent Vooruit 30.09-1.10 Le Tarmac, Paris 12-15.10 8 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 NICOLAS STEMANN Création à Vidy Nathan le Sage DE GOTTHOLD EPHRAIM LESSING avec Crassier, drame secondaire D’ELFRIEDE JELINEK Mise en scène : Nicolas Stemann Traduction : Mathieu Bertholet Scénographie : Katrin Nottrodt Musique : Waël Koudaih (Rayess Bek) Costumes : Marysol del Castillo Vidéo : Claudia Lehmann Assistanat mise en scène : Nora Bussenius Construction du décor : Ateliers du Théâtre de Vidy Avec : Lorry Hardel Lara Katthabi Mounir Margoum Serge Martin Elios Noël Véronique Nordey Laurent Papot Lamya Regragui Et deux musiciens : Waël Koudaih (Rayess Bek) Yann Pittard Production déléguée : Théâtre de Vidy Coproduction : MC93 - Maison de la Culture de la Seine St-Denis, Bobigny Théâtre National de Strasbourg Théâtre National de Bretagne, Rennes Bonlieu Scène nationale Annecy et La Bâtie-Festival de Genève dans le cadre du Programme INTERREG FranceSuisse 2014-2020 L’Arche est l’agent théâtral d’Elfriede Jelinek 14-24.09 Salle Charles Apothéloz Mercredi Jeudi Vendredi Samedi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi Samedi 14.09 15.09 16.09 17.09 20.09 21.09 22.09 23.09 24.09 20h30 19h00 20h00 17h00 19h00 20h00 19h00 20h00 17h00 <> <> Durée estimée : 2h Théâtre Tarif M VIDY+ INTRODUCTION AU SPECTACLE Ven. 16.09 une heure avant le début de la représentation RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Jeu. 22.09 à l’issue de la représentation Entrée libre, sans réservation Nathan le Sage EN TOURNÉE 2016 Théâtre national de Bretagne, Rennes 9-11.11 2017 MAG 6 P. 8 La Comédie de Reims 15-17.3 Festival de Modène 30-31.3 Bonlieu scène nationale, Annecy 11-12.4 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 Publiée en 1779, Nathan le Sage est la dernière pièce de Lessing. La parabole des anneaux, au centre du drame, est considérée comme l’un des textes-clé de la philosophie des Lumières sur la tolérance. Nicolas Stemann a mis en scène le célèbre chef d’œuvre de Lessing, complété par un « drame secondaire » commandé à Elfriede Jelinek (au Thalia Theater de Hambourg en 2009). Sept ans plus tard, dans une Europe meurtrie par un terrorisme marqué par l’idéologie religieuse et confrontée violemment à la remise en cause de ses modèles d’intégration et de tolérance, il reprend ces deux textes dans une nouvelle production. POUR UNE CRITIQUE DE LA TOLÉRANCE ELFRIEDE JELINEK ET NICOLAS STEMANN LECTEURS DE LESSING ERIC VAUTRIN, DRAMATURGE DU THÉÂTRE DE VIDY, 2015 Le récit de Lessing est une sorte de dissertation à voix haute, plein de mots, de réflexions et d’utopie et quasiment sans action. En quelques courts monologues qui s’insèrent dans le drame de Lessing, Elfriede Jelinek y a fait entrer ce que l’auteur allemand avait mis de côté, ce qu’il avait ignoré au profit de sa réflexion morale, éthique et idéaliste : les états du corps, le désir, la chair. En effet, dans Nathan le Sage, le désir des deux jeunes gens, Recha et le Templier, est littéralement annulé au profit de la stabilité de la famille : ainsi dans l’idéalisme de Lessing, la tolérance et la confraternité nécessitent de faire le sacrifice des désirs individuels. En ce sens, Nathan le Sage peut également être lu comme une tragédie de l’amour rendu impossible au profit de la paix sociale. Nathan, un idéaliste convaincu et convaincant qui valorise la bonté mutuelle plutôt que l’identification aux dogmes, veut faire bâtir une maison pour déjouer le destin funeste de sa demeure. Et Jelinek fait dire aux protagonistes que celleci aura une cave, un espace réservé et caché, dans laquelle sera entassé ce qui ne répond pas à son idéal de tolérance, soit toutes les formes de désir et de conflit – rappelant, en la détournant, l’affaire Fritzl, cet autrichien qui avait enfermé sa propre fille dans une cave pendant 24 ans, la violant et lui faisant sept enfants. Elle montre ainsi que l’utopie aide l’homme à conduire son destin, mais elle lui ferme les yeux aussi, et elle entretient ainsi sa propre impossibilité en ne prenant pas en compte ce qui fait la nature humaine. Puis Jelinek rapproche la foi et l’argent comme des systèmes de croyance comparables, faisant de l’économie capitaliste le quatrième monothéisme. Crassier se présente alors comme « un voyage exaltant à travers l’histoire du Monde, de l’Antiquité à l’idéalisme allemand en passant par l’Holocauste et l’histoire contemporaine, avec ses temps de guerre et de crise » – un voyage qui vient jauger l’idéal humaniste à l’aune de la finance contemporaine, interrogeant Lessing depuis nos vies d’aujourd’hui, questionnant la pertinence de l’héritage des Lumières. Crassier, du nom de ces montagnes de déchets accumulés par l’exploitation des mines, pointe les contradictions du drame de Lessing en lui opposant ce qu’il laissait de côté – en confrontant l’idéalisme et les belles paroles de Lessing, et avec lui l’Aufklärung, à la violence cruelle de la réalité. Mis côte à côte, entremêlés, le texte de Lessing et celui de Jelinek s’éclairent et se critiquent l’un l’autre, donnant à entendre les paradoxes de notre époque sur la tolérance, l’intégration, l’idéalisme et l’héritage européen des Lumières. Pourtant il ne s’agit ni de moquer l’idée de confraternité, ni de se satisfaire du nihilisme : la précision de la critique de Jelinek et des séquences théâtrales de Stemann appellent plutôt à ne pas fuir les conflits et visent à entretenir la lucidité contre l’humanisme fourre-tout masquant le cynisme et l’inanité des discours moralisants et vides de sens inlassablement répétés. Ensemble, ils cherchent à rapprocher les pensées et les actes, les discours et les politiques, l’analyse du passé avec les choix dans le présent. Loin d’être défait, le texte de Lessing est littéralement donné à entendre dans toute sa force, mais aussi avec ses limites et sa violence intrinsèque. Après les attentats de Paris de janvier et novembre 2015, Stemann réinvestit son projet sur Nathan le Sage dont il avait présenté une première production en allemand au Thalia Theater de Hambourg en 2009 et il le projette dans une Europe définitivement concernée par les questions de tolérance, de religion, d’identité et d’intégration. 9 10 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 STEFAN KAEGI/DOMINIC HUBER Création à Vidy (RIMINI PROTOKOLL) Nachlass Pièces sans personnes Conception : Stefan Kaegi Dominic Huber Vidéo : Bruno Deville Dramaturgie : Katja Hagedorn Assistanat : Magali Tosato Construction du décor : Atelier du Théâtre de Vidy Production : Théâtre de Vidy Coproduction : Rimini Protokoll – Schauspielhaus Zürich Bonlieu Scène nationale Annecy et La BâtieFestival de Genève dans le cadre du programme INTERREG France-Suisse 2014 - 2020 Maillon, Théâtre de Strasbourg - scène européenne Stadsschouwburg Amsterdam Staatsschauspiel Dresden Theater Chur Carolina Performing Arts Avec le soutien de : Fondation Casino Barrière, Montreux rimini-protokoll.de MAG 6 P. 10 14-24.09 Salle René Gonzalez Mercredi Jeudi Vendredi Samedi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi Samedi 14.09 15.09 16.09 17.09 20.09 21.09 22.09 23.09 24.09 17h à 21h 18h à 21h 17h à 21h 15h à 20h30 18h à 21h 17h à 21h 18h à 21h 17h à 21h 15h à 20h30 Spectacle déambulatoire départ toutes les 15 minutes Durée estimée : 1h Installation/Théâtre Tarif S 11 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 NOTE D’INTENTION DE STEFAN KAEGI, 2015 Il semblerait que nous n’ayons jamais aussi intensément réfléchi à l’éphémère et à la mort, au temps et à l’éternité qu’en ce début de XXIe siècle. La société moderne, qui d’après Walter Benjamin, se caractérise par son déni de la mort et par le refoulement du mourant hors de l’espace familial dans l’anonymat de l’hôpital, semble entrer dans une époque qui accorde une importance nouvelle à la mort. On discute d’assistance au suicide, on prend part à des cérémonies funéraires laïques, des séries télévisées telles que Six Feet Under trouvent un large public, et les cendres du défunt sont conservées là où séjournent les vivants : au salon... Nous nous efforçons de normaliser la mort, de la maîtriser, d’avoir raison d’elle. Peu de pays permettent d’observer ce phénomène aussi bien que la Suisse. C’est la raison pour laquelle elle sert de point de départ à Nachlass. En Suisse, la mort est anticipée, mise en scène et analysée avec une précision presque sans pareil. Des instituts de recherche renommés s’emploient à des simulations numériques du cerveau humain. La mise en oeuvre de nouvelles technologies vise à prolonger l’espérance de vie, bientôt non seulement au-delà de 100 mais de 150 ans. En même temps il est possible, grâce à des organismes d’assistance au suicide, de décider soi-même du moment et de la façon de s’en aller. Dans le cadre d’un projet pilote, du LSD est administré à titre expérimental à des malades en phase terminale afin de résorber leurs angoisses. On résilie des assurances, on supprime des accès internet, on rédige des directives anticipées et on communique le mode d’inhumation que l’on souhaite, dans la perspective de sa propre mort. Et l’héritage ? L’impôt sur les successions avoisinant zéro, selons les cantons, une prospérité moins acquise qu’héritée se perpétue. Pourtant, malgré tous nos efforts, le défi de notre finitude ne se laisse jamais complètement désamorcer. Et le scandale de la mort ne peut se résoudre entièrement dans des séries de dispositions et d’expériences médicales. Il subsiste toujours quelques questions qui tôt ou tard nous hantent : que resterat-il de ma personne quand mon « moi » aura disparu ? Qu’est-ce qui sera mis au rebut ? Comment ai-je vécu ma vie ? Comment ceux que j’aime continueront-ils de vivre après mon départ ? Resterai-je vivant dans le souvenir d’autres même après ma mort ? Jusqu’à quel point et combien de temps ce souvenir subsisterat-il ? Les philosophes de l’Antiquité considéraient comme une évidence le fait de se soucier de sa propre finitude. Pour Sénèque, cette préoccupation est indispensable à une mort sereine, tandis que pour Épicure, la peur de l’homme face à la mort serait une erreur de jugement. En effet nous ne pouvons être à l’endroit où se trouve la mort, et cette dernière réduit à néant notre capacité de l’imaginer. 2000 ans plus tard, Bertolt Brecht note : « Que pourrait-il me manquer si je manque à moi-même ? ». Ce n’est probablement pas la mort que les gens craignent mais l’impossibilité pour la raison humaine de l’appréhender qui la rend si angoissante et qui a généré à son propos un tel flot d’images et de récits dans l’histoire de la civilisation. La mort est l’unique expérience humaine qu’on ne peut se faire relater. Nachlass est une tentative de témoigner, non pas de la mort mais du chemin que chaque être devra tôt ou tard emprunter. La non-présence se laisse-t-elle représenter ? Comment évoquer ce qu’il n’y a plus à relater, parce que l’histoire est parvenue à sa fin ? Travail en cours © Stefan Kaegi Nachlass EN TOURNÉE 2016 Temporada Alta, Girona 17-20.11 deSingel, Anvers 1-4.12 2017 le Maillon, Strasbourg 31.5-14.6 12 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 METTE INGVARTSEN Deux spectacles 69 positions 7 pleasures 69 positions 29.09-1.10 69 positions 7 pleasures Conception, chorégraphie et performance : Mette Ingvartsen Lumière : Nadja Räikkä Scénographie : Virginie Mira Son : Peter Lenaerts avec des musiques de Will Guthrie (Breaking Bones) Dramaturgie : Bojana Cvejic Manager: Kerstin Schroth Conception et chorégraphie : Mette Ingvartsen Lumière : Minna Tiikkainen Musique et bande-son : Peter Lenaerts Avec des musiques de Will Guthrie (Breaking Bones & Snake Eyes) Scénographie : Mette Ingvartsen Minna Tikkainen Dramaturgie : Bojana Cvejic Manager: Kerstin Schroth Assistanat chorégraphie : Manon Santkin Production : Mette Ingvartsen/Great Investment Coproduction : apap/Szene, Salzburg Musée de la Danse/Centre Chorégraphique National de Rennes et de Bretagne Kaaïtheater, Bruxelles PACT Zollverein, Essen Les Spectacles vivants - Centre Pompidou, Paris Kunsten-centrum BUDA, Courtrai BIT Teatergarasjen, Bergen Avec le soutien de : Théâtre National de Bretagne, Rennes Festival d’Automne à Paris DOCH - University of dance and circus, Stockholm Autorités flamandes The Danish Arts Council Commission européenne Avec : Sirah Foighel Brutmann (remplacée à Lausanne par Mette Ingvertsen), Johanna Chemnitz, Katja Dreyer, Bruno Freire, Elias Girod, Dolores Hulan, Ligia Lewis, Danny Neyman, Norbert Pape, Pontus Pettersson, Hagar Tenenbaum, Gemma Higginbotham, Ghyslaine Gau (remplacement) metteingvartsen.net Création 2014 au PACT Zollverein, Essen MAG 6 P. 12 Production : Mette Ingvartsen/Great Investment Assistanat production : Manon Haase Coproduction : Festival Steirischer Herbst, Graz Kaaïtheater, Bruxelles HAU Hebbel am Ufer, Berlin Théâtre National de Bretagne, Rennes Festival d’Automne à Paris Les Spectacles vivants - Centre Pompidou, Paris PACT Zollverein, Essen Dansens Hus, Oslo Tanzquartier Wien Kunsten - centrum BUDA, Courtrai BIT Teatergarasjen, Bergen Dansehallerne, Copenhague House on Fire avec le soutien du Programme culturel de l’Union européenne Avec le soutien de : Autorités flamandes Hauptstadtkulturfonds, Berlin The Danish Arts Council APAP - Programme culturel de l’Union européenne metteingvartsen.net Création 2015 au Festival Steirischer Herbest, Graz Salle Charles Apothéloz Jeudi 29.09 Vendredi 30.09 Samedi 1.10 19h00 20h00 17h00 Performance déambulatoire (pas de places assises) Dès 16 ans Durée : 1h45 Performance/Danse Tarif M 7 pleasures 12 et 13.10 Salle Charles Apothéloz Mercredi 12.10 Jeudi 13.10 20h00 19h00 Dès 16 ans Durée : 1h40 Danse Tarif M VIDY+ INTRODUCTION AU SPECTACLE Mer. 12.10 une heure avant le début de la représentation Entrée libre, sans réservation 69 Positions EN TOURNÉE 2016 Stadsschouwburg, Amsterdam 2-3.07 > 13 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 EXTRAIT D’UN ENTRETIEN AVEC METTE INGVARTSEN RÉALISÉ PAR GILLES AMALVI AU FESTIVAL D’AUTOMNE À PARIS, 2015 Dans les années 60, la contestation s’adressait encore à un pouvoir localisé. Pendant cette période, les questions d’inégalité, de représentation du corps, de libération des conventions morales ont trouvé à s’incarner dans l’art, la danse, la performance – par exemple le spectacle Parades and changes de Ann Halprin, qui transforme radicalement la représentation de la nudité sur scène. Dans quelle mesure les stratégies artistique de cette époque sont encore opérantes, et quel type de dialogue avez-vous engagé avec elles ? 69 positions était une pièce construite autour de ce dialogue – un peu comme un travail préparatoire devenu un travail en soi. Dans cette pièce, je parle de Parade and changes, de Meat Joy. J’ai d’ailleurs été en contact avec Carolee Schneemann ; pour elle, ces travaux étaient clairement pensés comme des « contre-attaques » adressées à la brutalité du pouvoir politique, dans le contexte de la guerre du Vietnam... Aujourd’hui, les choses sont beaucoup moins évidentes, moins claires, les moyens d’action plus divers. Les institutions tout autant que les mécanismes de contrôle se sont « dilués », ils sont moins articulés. Le cadre permettant l’action n’a plus de frontières aussi définies. Du coup, la stratégie frontale me paraît moins efficace aujourd’hui que dans les années 60. Dans la troisième partie de 69 positions, j’évoque les pratiques sexuelles contemporaines, en les reliant à la question de l’objet, du « non-humain ». 69 positions et 7 Pleasures essaient de se confronter à la question « où en sommesnous aujourd’hui » ? La question du « bio pouvoir » soulevée par Foucault est plus pertinente que jamais, et ses procédures de plus en plus profondes, de plus en plus fines et ciblées. Une des questions pour moi aujourd’hui est celle de la mobilisation : qu’est-ce qui mobilise les corps, comment les mobiliser ? Comment agir au niveau très simple du désir ? Cela implique d’analyser la difficulté, aujourd’hui, à produire du collectif, des mouvements collectifs, une pensée collective. Peut-être existe-t-il un lien entre le manque de désir au niveau de la mobilisation collective, et l’hyper-stimulation des désirs dans la vie de tous les jours ? 69 Positions est un solo, dans lequel votre corps est directement impliqué dans cette situation. Dans 7 Pleasures, vous êtes davantage en position de chorégraphe, « contrôlant » un groupe d’interprète. Quel type de changements cela implique – à la fois esthétiquement et politiquement ? Je suis la chorégraphe – mais par ailleurs, je participe aussi à la pièce, tout au moins pendant les répétitions. Étant donné les questions de nudité traitées par la pièce, je ne me voyais pas rester en position d‘observatrice extérieure, demandant à l’un ou à l’autre : « est-ce que vous pouvez écarter les cuisses un peu plus ? ». C‘est là que se situe pour moi la question politique impliquée par ce travail. Pour le moment, nous avons beaucoup travaillé sur un principe d’alternance : une moitié est sur scène, et l’autre regarde. Du coup, tout le monde a accès à ce que produisent les images sur scène. Il me paraît très important que chacun soit conscient des effets produits par ces corps nus, et qu’ils réalisent ces effets à partir de la perspective du public. Ce regard sera lui-même présent, inclus dans la représentation. Je voudrais que le regard consiste, qu’à certains moments, le public regarde le regard, assiste à l‘opération de regarder. Qu’il ne regarde pas la danse mais des manières de regarder la danse. La question du regard est extrêmement importante vis à vis de la représentation sexuelle, du coup la réflexion sur la manière dont le regard opère se doit d’être mis en perspective. 69 Positions © Fernanda Tafner 7 Pleasures © Marc Coudrais 7 pleasures EN TOURNÉE 2016 Stadsschouwburg, Amsterdam 9.07 Theater Spektakel, Zurich 2-4.09 Kaaitheater, Bruxelles 7-8.10 Dansenshus, Stockholm 21.10 Studio, Bergen 28-29.10 14 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 CHRISTIAN LUTZ no man’s land Une exposition de photographies Photographies : Christian Lutz Graphisme : Pablo Lavalley christianlutz.org 10.09-3.12 La Kantina Photographie Entrée libre NOTE D’INTENTION DE CHRISTIAN LUTZ, 2016 Adolescent, dans les années 1980, j’étais fan du groupe de rock genevois Le Beau Lac de Bâle. Dans l’un de leurs titres, les choristes reprenaient un refrain qui n’est jamais sorti de ma mémoire : Le Théâtre de Vidy présente cette exposition en collaboration avec le Festival Images Vevey images.ch Le peigne, la bagnole et la montre à quartz sont les trois mamelles de l’employé modèle, Le peigne, la bagnole et la montre à quartz du Suisse moyen sont les valeurs universelles. Le philosophe Jacques Derrida associait l’hospitalité à une dimension d’imprévu. J’aime cette idée. La notion d’imprévu me renvoie à celle d’inconnu, à quelque chose qui échappe. Qu’est-ce que veut donc dire accueillir l’autre ? Est-ce possible de recevoir quelqu’un chez soi sans en être bousculé, voire modifié ? Un phénomène de repli accompagne paradoxalement notre ère de la globalisation. Comment accueillir les réfugiés dans ce contexte, comment leur laisser de la place, quand notre propre espace de pensée est frappé par la peur et notre quotidien tourné vers la préservation de nos acquis ? Les photographies exposées à Vidy sont issues de travaux menés sur l’île de Kos (GR), le col de Lukmanier (CH), la Valle Verzasca (CH) et dans certains abris de protection civile à Genève. No man’s land © Christian Lutz MAG 6 P. 14 15 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 MATTHIEU JACCARD Sous un même toit (I et II) Un cycle de conférences inclusives et optimistes 24.09 et 26.11 Après Nie wieder Krieg !, première série de conférences imagées présentées au Théâtre de Vidy durant la saison 15/16, l’architecte et historien de l’art Matthieu Jaccard propose un nouveau cycle intitulé Sous un même toit. De rapprochements en glissements thématiques, de coïncidences en comparaisons, il confronte les représentations de l’art et les actualités médiatiques. Plus qu’à un exposé savant, c’est à une réappropriation de notre temps que nous invite Matthieu Jaccard, Virgile bienveillant dans l’usine dantesque de notre mémoire. En 1816, il y a deux cents ans, Lord Byron écrit Le Prisonnier de Chillon lors de son passage en Suisse, ainsi qu’un poème apocalyptique intitulé Darkness. Le poète se fait l’écho de l’année sans été que connaissent alors l’Amérique du Nord et l’Europe suite à l’éruption du mont Tambora, en Indonésie. En couvrant l’ensemble de l’humanité, la voûte céleste rappelle la relativité des frontières, comme de nombreux événements récents ont pu, eux aussi, amener à les réinterroger. Le titre choisi pour ce second cycle de conférences est Sous un même toit, au moment où l’EPFL inaugure son projet Under One Roof. Il s’agit d’une invitation à la recherche d’un récit fédérateur par-delà l’histoire, l’art et l’actualité, dans les entrelacs du temps – comme une autre réponse possible aux crispations identitaires qui se multiplient aujourd’hui. C’est également une forme d’hommage à la vision développée par Max Bill pour l’Expo 64 : invité à bâtir le demi-secteur Eduquer et créer, il imagine une structure pouvant s’agrandir à l’infini pour abriter un dialogue entre les arts et les cultures. Le Théâtre de Vidy témoigne de la forme que prit ce dispositif en grande partie disparu. Garder vivant l’esprit humaniste, ouvert et rassembleur de son auteur est une inspiration à la hauteur des défis de notre temps. La Passerelle Samedi Samedi 24.09 26.11 15h00 15h00 Conférence Entrée libre, sur inscription à [email protected] vidy.ch/sumt Les conférences peuvent être suivies indépendamment les unes des autres. 1 2 5 7 MAG 6 P. 15 6 8 Images d’inspiration : 1. Tambora, Indonésie 2. Olivier Pichat, Portrait du Général Dumas, 4e quart 19e siècle 3. Bataille de Siffin, Manuscrit persan, 1516 4. Uriel Orlow, The Visitor, 2007 5. Bruno Taut, Alpine Architektur, 1919 6. Haus der Religionen, Berne, 2014 7. Hans Holbein, Portrait de Thomas More, 1527 8. Max Bill, Rhythmus im Raum, 1948 3 4 16 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 MILO RAU Empire Conception, texte et mise en scène : Milo Rau Texte et performance : Ramo Ali Akillas Karazissis Rami Khalaf Maia Morgenstern Scénographie et costumes : Anton Lukas Vidéo : Marc Stephan Dramaturgie et recherche : Stefan Bläske Mirjam Knapp Son : Jens Baudisch Production et diffusion : International Institute of Political Murder (IIPM) Mascha Euchner-Martinez Eva-Karen Tittmann Coproduction : Theater Spektakel, Zurich Schaubühne am Lehniner Platz, Berlin Festival Steirischer Herbst, Graz Avec le soutien de : Regierende Bürgermeister, Berlin Senatskanzlei - Kulturelle Angelegenheiten Pro Helvetia - Fondation suisse pour la culture international-institute.de Création le 1er septembre 2016 au Theater Spektakel, Zurich 5-8.10 Salle Charles Apothéloz Mercredi Jeudi Vendredi Samedi 5.10 6.10 7.10 8.10 20h00 19h00 20h00 20h00 En allemand, français, roumain et kurde, surtitrés en allemand et français Durée estimée : 2h Théâtre Tarif M VIDY+ INTRODUCTION AU SPECTACLE Jeu. 6.10 une heure avant le début de la représentation RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Jeu. 6.10 à l’issue de la représentation Entrée libre, sans réservation Empire EN TOURNÉE 2016 Theater Spektakel, Zurich 1-3.09 Streirischer Herbst, Graz 15-16.10 MAG 6 P. 16 > 17 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 NOTE D’INTENTION MURDER, 2016 DE L’INTERNATIONAL INSTITUTE OF POLITICAL C’est avec Empire que Milo Rau et l’International Institute of Political Murder (IIPM) conclueront leur Trilogie remarquée sur l’Europe. Cette fois, ils mettent le cap sur ses frontières méridionales, là où l’Europe dessine aujourd’hui ses contours alors même qu’hier, elle y traçait ses fondations mythologiques et culturelles. La première partie de la Trilogie de Milo Rau sur l’Europe s’est ouverte avec The Civil Wars (jouée pour la première fois au Theater Spektakel, à Zurich, en 2014) : une enquête sur les salafistes qui interrogeait les motivations des jeunes recrues du djihad et qui a remporté le Grand Prix du Jury du Festival triennal allemand « Politik im Freien Theater »1. La production était centrée sur les récits très intimes et personnels de quatre comédiens français et belges. Autant d’histoires de perte du père, d’errance existentielle et idéologique. Avec ses gros plans biographiques, The Dark Ages (second volet joué pour la première fois au Residenztheater de Munich, en 2015) obéit au même schéma narratif : des comédiens venus d’Allemagne, de Bosnie, de Russie et de Serbie reviennent sur ce qu’ils ont vécu, de la fin de la Deuxième Guerre mondiale à aujourd’hui en passant par le Siège de Sarajevo. Leurs visages sont projetés sur grand écran, leurs témoignages se mêlent les uns aux autres, dans une symphonie en cinq actes portée par la musique de Laibach, un groupe slovénien culte. Sur le site Spiegel.de, on pouvait lire : « Sortez voir ça ! Allez écouter les histoires de ces comédiens ! » Empire appliquera cette même formule esthétique éprouvée, livrant ainsi des récits de vie très personnels, tout en étant d’une grande force tragique, à la fois intimes et universellement humains. Après ces performances qui se déroulaient à l’ouest et au sud-est de l’Europe, notre attention se tourne de l’autre côté des frontières européennes : sur ceux et celles qui quittent l’Afrique et le MoyenOrient pour l’Europe, les réfugiés, les immigrants, les migrants. Sur tous ces gens qui débarquent en Grèce, mais aussi ceux qui y sont nés. Et nous soulevons les questions suivantes : Qu’est-ce que la migration ? Qu’est-ce que cela veut dire, avoir un « chez-soi » ? Quel visage aura la Nouvelle Europe ? D’après la légende, l’Europe doit son nom à une princesse phénicienne que Zeus enleva et ramena avec lui en Crête (le littoral libanais d’aujourd’hui). La Méditerranée, autrefois, était le centre. Ce qui nous amène à nous demander : dans quelle mesure l’Europe, depuis des siècles, est-elle définie par sa marge ? Les récits biographiques et les sujets portés par les comédiens des deux premières pièces trouvaient leur écho dans les textes du théâtre classique : la peur bourgeoise de la perte, dans La Cerisaie de Tchekhov, et le déclin des familles et dynasties dans les tragédies meurtrières de Shakespeare. Pour ce troisième et dernier volet, ce seront les grandes œuvres du théâtre grec antique, avec leurs destins tragiques, leurs histoires de migrations et de rapts tout autour de la mer Méditerranée, qui donneront à Empire son ancrage historique et théâtral. 1 La politique dans le théâtre indépendant 18 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 DIEUDONNÉ NIANGOUNA Création à Vidy Nkenguegi Texte et mise en scène : Dieudonné Niangouna Collaboration artistique : Laetitia Ajanohun Scénographie : Papythio Matoudidi Dieudonné Niangouna Création et interprétation musicale : Chikadora Pierre Lambla Armel Malonga Vidéo : Wolfgang Korwin Jérémie Scheidler Costumes : Vélica Panduru Son : Félix Perdreau Avec : Laetitia Ajanohun Marie Charlotte Biais Clara Chabelais Pierre-Jean Etienne Abdon Fortuné Koumbha Kader Lassina Touré Harvey Massamba Mathieu Montanier Criss Niangouna Dieudonné Niangouna Production : Cie Les Bruits de la rue Le Grand Gardon Blanc Coproduction : Théâtre de Vidy MC93 - Maison de la Culture de la Seine St-Denis Künstlerhaus Mousonturm, Francfort Le Grand T, Théâtre de Loire-Atlantique, Nantes (en cours) Le texte de la pièce est publié aux éditions Les Solitaires Intempestifs MAG 6 P. 18 1-5.11 Salle Charles Apothéloz Mardi Mercredi Jeudi Vendredi Samedi 1.11 2.11 3.11 4.11 5.11 19h00 20h00 19h00 20h00 16h00 > Durée estimée : 3h20 Théâtre/Vidéo Tarif M VIDY+ INTRODUCTION AU SPECTACLE Mar. 1.11 une heure avant le début de la représentation RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Jeu. 3.11 à l’issue de la représentation Entrée libre, sans réservation 19 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 NOTE D’INTENTION DE DIEUDONNÉ NIANGOUNA, 2016 C’est l’histoire d’une troupe de théâtre qui répète une version contemporaine du Radeau de la Méduse. C’est l’histoire d’une fille debout à sa fenêtre et qui se voit passer dans la rue. Plus tard, elle découvrira que c’était son rêve qu’elle voyait devant ses yeux. C’est l’histoire d’un enfant qui garde un désert. C’est l’histoire d’un groupe d’étudiants qui organise une surprise-partie « déguisement et réflexion » afin de pouvoir s’échapper du monde réel et tenter par le biais de cette loufoquerie de répondre à tout ce à quoi ils ne peuvent pas répondre d’ordinaire. C’est l’histoire de deux émigrés congolais qui arrivent en France. C’est l’histoire d’un voyageur qui s’est fait piquer son rêve à bord du Hollandais Volant, s’échoue dans un théâtre en France et est nommé comédien par le directeur du théâtre. C’est l’histoire d’un comédien national victime du mal -être humain, héritier du grand désordre mondial et critique public de la république du fleuve et de la forêt, qui doit être exécuté, parce qu’il est arrivé à la fin de son mandat sans succès, pour qu’un autre comédien national soit élu à la tête du pays. Alors avant de s’en aller, il tente tout pour empêcher ce qu’il ne peut plus empêcher, et la seule chose qu’il réussit c’est donner une vraie place à la mauvaise foi. C’est l’histoire d’une chèvre et d’une biquette qui sont forcées de s’accoupler jusqu’à ce que mort s’en suive. Elles crèvent et dès lors commence la révolution et cette dernière se transforme en cannibalisme commun. C’est l’histoire d’un homme qui n’a jamais été aimé par personne jusqu’à ses quarante ans. Alors il décide de se suicider. C’est l’histoire de deux personnages d’une pièce de théâtre qui finissent par sortir de la fiction et se retrouver dans la vie réelle, recueillis par un enfant sans nom qui garde un désert. Et les deux personnages ne sont autres que les deux seuls survivants de la version semi-contemporaine du Radeau de la Méduse répétée par la troupe de théâtre. Et la fille qui se regarde passer devant sa fenêtre est l’une des comédiennes de cette troupe de théâtre. Elle est entre-­autre la petite amie de celui qui n’a jamais été aimé et qui va se suicider. Et ils sont venus tous les deux à cette surprise-­partie « déguisement et réflexion » dans un loft, au vingtdeuxième étage du sixième arrondissement de Paris où celui qui n’a jamais été aimé va se suicider à la fin. Et c’est dans le cadre de cette surprise-­partie « déguisement et réflexion » que sont invités pour la première fois en France les deux émigrés congolais pour participer au débat. Ces deux émigrés congolais sont en contact direct avec une bande de gamins habitant la république du fleuve et de la forêt et qui ont été formés par un poème de Sony Labou Tansi, et ce sont ces gamins de malheur qui ont la charge d’exécuter le comédien national de la république du fleuve et de la forêt avant minuit et de lui piquer son soleil. Mais le metteur en scène et auteur qui a écrit et qui dirige la version contemporaine du Radeau de la Méduse n’est autre que le comédien qui avait débarqué en France à bord du Hollandais Volant et qui cherche par cette pièce le moyen de retrouver son rêve initial volé pendant le voyage par un type appelé le voleur de songes. C’est l’histoire d’un type abandonné seul sur une barque dans la mer. Yeux ouverts le jour, yeux ouverts la nuit, mais jamais il ne crève. C’est ce type-­là qui finit par passer devant la fenêtre de la fille qui rêve et va devenir son amant. Travail en cours © Armel Louzala Nkenguegi EN TOURNÉE 2016 MC93 – Maison de la Culture de la Seine-­Saint-­Denis 9-26.11 Künstlerhaus Mousonturm, Francfort 1 et 2.12 2017 Le Grand T, théâtre de Loire Atlantique 26-28.4 20 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 LE GDRA Création à Vidy (CHRISTOPHE RULHES/JULIEN CASSIER) Lenga Conception, texte et mise en scène : Christophe Rulhes Chorégraphie : Julien Cassier Scénographie : le GdRA Musique : Christophe Rulhes Lizo James Images : le GdRA Edmond Carrère Ludovic Burczykowski Costumes : Céline Sathal Lumière : Adèle Grepinet Son : Pedro Theuriet Avec : Julien Cassier Lizo James Maheriniaina Pierre Ranaivoson Christophe Rulhes Diffusion : AlterMachine/Elisabeth Le Coënt Production : le GdRA Coproduction : Théâtre de Vidy Le Printemps des Comédiens, Montpellier l’Usine - Centre National des Arts de la Rue, Tournefeuille Cirque-Théâtre, Pôle National des Arts du Cirque Haute-Normandie, Elbeuf Les 2 Scènes - Scène Nationale, Besançon Le Théâtre Romain Roland, Villejuif La Brèche, Pôle National des Arts du Cirque de Normandie, Cherbourg-Octeville CIRCa, Pôle National des Arts du Cirque, Auch Le Théâtre Garonne, scène européenne, Toulouse Les Treize Arches, scène conventionnée, Brive Avec le soutien de : Institut Français Convention Institut Français/Ville de Toulouse L’Aléa des Possibles - Chapitô Métisy, Madagascar Zip Zap Circus, Cape Town La Grainerie, Fabrique des arts du cirque et de l’itinérance, Balma Toulouse-Métropole legdra.fr 1-12.11 Salle René Gonzalez Mardi Mercredi Jeudi Vendredi Samedi Mardi Mercredi Jeudi Vendredi Samedi 1.11 2.11 3.11 4.11 5.11 8.11 9.11 10.11 11.11 12.11 19h30 19h30 19h30 19h30 20h30 19h30 19h30 19h30 21h00 19h00 En français, xhosa, anglais, merina et occitan, surtitrés en français Durée estimée : 1h30 Théâtre/Musique/Danse/ Vidéo/Cirque Tarif M VIDY+ RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Ven. 4.11 à l’issue de la représentation Entrée libre, sans réservation Lenga EN TOURNÉE 2016 MAG 6 P. 20 Cirque-Théâtre, Elbeuf 16-19.11 les 2 Scènes – Scène nationale de Besançon 21-24.11 Théâtre des 13 arches, Brive 28.11-1.12 2017 Théâtre Romain Rolland, Villejuif 21-25.3 21 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 NOTE D’INTENTION PAR CHRISTOPHE RULHES, 2016 A huit ans en 1983, j’ai enregistré mon grand-père dans une langue rare qui me plaisait. Son occitan, il l’appelait « la lenga nostra ». En 2016, à partir de ce document, le GdRA invite au plateau pour Lenga quatre performeurs : un acrobate de rue Merina de Madagascar ; un initié Xhosa d’Afrique du Sud ; un comédien toulousain ; un musicien occitan jouant cabrette et platines. La pièce traite de la diversité et de la disparition des langues. Elle s’appuie sur des temps d’enquête menés dans les familles des performeurs, qui mettent en jeu sur scène leurs arts de faire, au fil des témoignages de leurs grandsmères, filmées en 2015 à Tananarive, à Amparibe et au Cap dans les townships de Khayelitsha. Se dévoilent ainsi des récits de vie, de perte, de transmission et d’invention, des danses, des rites, des contextes politiques et naturels, des musiques et des multilinguismes. Madagascar et l’Afrique du Sud font partie des lieux hyper-divers en langues, faunes et flores qui existent encore sur terre. En plein anthropocène, ces espaces tendent à disparaître. En France, les langues endémiques, dont l’occitan, perdent toujours des locuteurs. A partir d’un théâtre de la personne, avec l’énergie de l’acrobatie ou des gumboots, Lenga livre des fragments de ces lieux, de ces gens, de ces résistances et de ces innovations. Avec en prime, un cours jubilatoire et libre de la langue à clic Xhosa. De par le monde se multiplient les points chauds d’un conflit environnemental qui s’apparente à une guerre des natures. Le chasseur cueilleur qui vit en forêt amazonienne n’est pas responsable du même impact carbone que le directeur d’une entreprise pétrochimique en occident. Il en subit pourtant les mêmes conséquences, voire pire. Pour la première fois dans la géohistoire, les scientifiques vont déclarer comme forces premières pour donner forme à la terre celle qu’engendre les humains. Ils sont devenus le facteur tellurique, géologique, climatique le plus perturbateur de l’écosystème. Cette nouvelle ère qui s’ouvre en incertitudes et bouleversements, les géologues l’appellent « l’anthropocène ». Qui ou quoi, dans l’histoire, est vraiment responsable de l’anthropocène ? Au fil d’une série de portraits glanés dans le monde, ce sont quelques histoires de cette guerre comme autant de batailles désespérées que le GdRA souhaite raconter et mettre en scène. Débute ainsi un nouveau cycle d’écriture théâtrale intitulé « La guerre des natures ». Le premier volet de cette série s’appelle Lenga. Travail en cours © Loran Chourrau/ Le Petit Cow-Boy Travail en cours © Loran Chourrau/ Le Petit Cow-Boy 22 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 YOANN BOURGEOIS Tout public Celui qui tombe Conception, mise en scène et scénographie : Yoann Bourgeois Costumes : Ginette Lumière : Adèle Grépinet Son : Antoine Garry Assistanat : Marie Fonte Avec : Mathieu Bleton Julien Cramillet Marie Fonte Dimitri Jourde, en alternance avec Jean-Baptiste André Elise Legros Vania Vaneau, en alternance avec Francesca Ziviani Production déléguée: Centre chorégraphique national de Grenoble Coproduction : Cie Yoann Bourgeois MC2: Grenoble Biennale de la danse de Lyon Théâtre de la Ville, Paris Maison de la Culture de Bourges L’Hippodrome, Scène Nationale de Douai Le Manège de Reims, Scène Nationale Le Parvis, Scène Nationale de Tarbes Pyrénées Théâtre du Vellein, Villefontaine La Brèche, Pôle National des Arts du Cirque de Basse-Normandie, Cherbourg - Octeville Théâtre National de Bretagne, Rennes Avec le soutien de : ADAMI SPEDIDAM Petzl DGCA Yoann Bourgeois bénéficie du soutien de la Fondation BNP Paribas pour le développement de ses projets. cieyoannbourgeois.fr Création le 20 septembre 2014 au MC2: Grenoble Ce spectacle bénéficie à Vidy du soutien de Retraites Populaires MAG 6 P. 21 9-12.11 Salle Charles Apothéloz Mercredi Jeudi Vendredi Samedi 9.11 10.11 11.11 12.11 19h00 19h00 19h00 17h00 > Dès 7 ans Durée : 1h Cirque/Danse Tarif M VIDY+ RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Jeu. 10.11 à l’issue de la représentation Entrée libre, sans réservation Celui qui tombe EN TOURNÉE 2016 Tanz im August, Berlin 26-27.8 MC2: Grenoble 14-15.10 Théâtre du Passage, Neuchâtel 28-29.10 Espace Malraux – Chambéry 2-4.11 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 23 ENTRETIEN AVEC YOANN BOURGEOIS RÉALISÉ PAR LAURENT GOUMARRE, 2014 Quelle aura été la « piste » de départ pour cette création ? Avec ce projet, je cherche à approfondir une théâtralité singulière en radicalisant un parti pris : une situation naît d’un rapport de forces. La scénographie que j’ai conçue pour ce projet est un sol, un simple plancher mobilisé par différents mécanismes (l’équilibre, la force centrifuge, le ballant…). 6 individus (sorte d’humanité minimale) seront sur ce sol, et tenteront de tenir debout. Ils réagiront aux contraintes physiques, n’initiant jamais le mouvement. C’est dans le corps à corps entre cette masse et telle ou telle contrainte qu’une situation apparaîtra. La multiplicité de principes physiques entraînera une multiplicité de situations. Les situations que j’appelle sont d’un statut tout particulier, disons : polysémiques. Je cherche à situer mon théâtre sur cette crête aiguë où la chose apparaît. Ta vision du cirque passe par la notion de « non-agir » plutôt que par la manipulation. Qu’est-ce que cette distinction te permet de dire ? Mon intention est d’affiner radicalement mon geste en misant sur l’acuité d’un principe essentiellement circassien : l’acteur est vecteur des forces qui passent par lui. Il est traversé, il est agi par des flux qu’il traduit comme il peut. Si ce geste est un geste de cirque, c’est aussi parce qu’il participe d’une représentation particulière de l’homme : de même que nous pensons que l’homme n’est pas au centre de l’univers, il n’y a pas de raison qu’il soit au centre de la scène. Sur ma piste idéale (et peu importe si ce cirque existe vraiment ou pas), l’homme coexiste sur un plan horizontal au côté des animaux, des machines, etc. sans les dominer. En repositionnant ainsi les choses, l’humanité me semble autrement bouleversante. Pourquoi fallait-il depuis tes débuts opérer une « déconstruction circassienne » ? Je veux voir de quoi est faite cette matière que j’affectionne tant pour découvrir ses puissances propres. J’ai l’intuition que celle-ci porte une propension à de nouvelles formes de théâtralité, et est véritablement une source. Mon processus de travail ressemblerait alors à une soustraction : je cherche à débarrasser ma recherche de tout ce qui ne lui est pas nécessaire. Je simplifie mes formes pour une plus grande lisibilité des forces. C’est une manière aussi pour moi d’apporter pierre à l’édifice de l’histoire du cirque. Cette histoire ne devrait-elle pas passer par la construction d’un répertoire comme c’est le cas en danse, au théâtre et même aujourd’hui pour la performance ? En entretenant en parallèle un regard sur la situation du cirque, j’essaye de cerner ce qui me semble des enjeux actuels. Le cirque en effet, se trouve dans une situation très particulière : son histoire est très prise en charge « de l’extérieur ». Paradoxalement, et malgré le bénéfice d’une très large visibilité, il est proportionnellement peu soutenu. La menace possible est une normalisation. C’est la raison pour laquelle je réfléchis aussi au sein des écoles aux conditions de ses apprentissages pour que l’émergence d’un répertoire puisse avoir lieu. Pour cela, il faut se familiariser avec l’écriture, en inventant des manières d’écrire adéquates à cette pratique. Comment travailles-tu ? Nous avons créé notre compagnie pour maintenir un processus de travail permanent. Voilà quatre ans que celle-ci est née. À mes côtés, une petite équipe s’est engagée comme moi en misant à long terme. C’est notre rapport au temps que nous essayons de penser. Cela est rendu possible grâce à une très forte association avec la MC2: Grenoble. Nous privilégions un processus expérimental, empirique. Nous inventons nos méthodes au fur et à mesure que nous avançons, elles ne préexistent pas. Nous aimons commencer par des esquisses. Certaines tiennent debout toutes seules et deviennent des numéros. Après quatre années de création, je vois aussi se dessiner quelque chose comme une constellation de petites formes gravitant autour d’une notion centrale : le point de suspension. J’ai voulu dernièrement donner un nom à cette recherche sans fin : « tentatives d’approches d’un point de suspension ». Je suis très attaché à une dimension de création vécue dans sa plus large amplitude. Ce sont d’abord des aventures de vie extraordinaires. Chaque projet artistique détermine son mode, son régime d’existence. Celui qui tombe © Géraldine Aresteanu 24 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 DARIA DEFLORIAN/ANTONIO TAGLIARINI Création à Vidy Il cielo non è un fondale (Le ciel n’est pas une toile de fond) Texte et mise en scène : Daria Deflorian Antonio Tagliarini Scénographie : Cristian Chironi Lumière : Gianni Staropoli Assistanat mise en scène : Davide Grillo Avec : Francesco Alberici Daria Deflorian Monica Demuru Antonio Tagliarini Accompagnement et diffusion internationale : Francesca Corona Production : A.D – Sardegna Teatro, Cagliari Teatro Metastasio Stabile della Toscana, Prato ERT/Emilia Romagna Teatro Coproduction : Théâtre de Vidy Odéon - Théâtre de l’Europe, Paris Festival d’Automne à Paris Romaeuropa Festival, Rome Sao Luiz - Teatro Municipal de Lisboa, Lisbonne Festival Terres de Paroles, Rouen Avec le soutien de : Teatro di Roma Avec la collaboration de : Laboratori Permanenti, San Sepolcro Carrozzerie Not, Rome Fivizzano 27, Rome defloriantagliarini.com 16-20.11 Salle René Gonzalez Mercredi 16.11 Jeudi 17.11 Vendredi 18.11 Samedi 19.11 Dimanche 20.11 19h30 19h30 19h30 14h00 18h00 16h00 En italien, surtitré en français Durée estimée : 1h10 Théâtre Tarif M VIDY+ INTRODUCTION AU SPECTACLE Jeu. 17.11 une heure avant le début de la représentation RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Ven. 18.11 à l’issue de la représentation Entrée libre, sans réservation Il cielo non è un fondale EN TOURNÉE 2016 Odéon - Théâtre de l’Europe, Paris 9-18.12 MAG 6 P. 22 25 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 NOTE D’INTENTION DE DARIA DEFLORIAN ET ANTONIO TAGLIARINI, 2016 Nous voulons explorer le paysage urbain, la ville en tant que figure, l’habiter. Pour la première fois dans l’histoire, plus de la moitié de la population mondiale vit dans une ville ; il y a cinquante ans ce n’était qu’un tiers, en 2050 ils seront deux tiers. À la fin du siècle que les experts ont appelé « métropolitain », huit personnes sur dix vivront dans une zone urbaine. Nous voulons aussi interroger l’Histoire sur ce que l’on appelle « modernisation », cette attraction fatale pour la vie métropolitaine. Une question écologique, morale, collective, complexe. Or, d’un côté il y a ce personnage de Tchekhov qui, dans le chef-d’œuvre qui est La Cerisaie, récite: « C’est parce que je suis née ici, ici ont vécu mon père et ma mère, mon grand-père, j’aime cette maison, sans la cerisaie je ne comprends plus rien à ma vie, et s’il est vraiment nécessaire de la vendre, alors vendez-moi aussi avec le jardin ». Une seule petite didascalie suffit et voilà que la hache commence à abattre les arbres. De l’autre, en contre-champs, face à l’impuissante nostalgie des héros tchekhoviens, il y a des projets comme celui d’Annie Ernaux qui, dans son livre Regarde les lumières mon amour, tient le journal de ses escapades quotidiennes dans un hypermarché de la banlieue parisienne, devenu pour elle un formidable lieu d’observation et d’affections. Formidable dans sa simplicité, le journal tient son titre d’une phrase que l’écrivaine a entendu dire par une mère à son enfant à propos des lumières du marché de Noël. Le ciel n’est pas une toile de fond, en dépit de la négation évoquée par le titre, veut renforcer le dialogue entre l’espace de la fiction (du fantastique, de l’utopie, de l’écart, de la fuite, du refuge, de la cage) et l’espace extérieur, le réel. Il s’agit d’un dialogue de plus en plus nécessaire. De plus en plus, on suffoque dans l’air confiné du training et de la salle de répétitions où après peu de temps on s’aperçoit que la vie est ailleurs. Il nous faut essayer d’abattre ces parois. Toutes les parois, et pas seulement le quatrième mur qui obsède le théâtre ; notre premier geste est de tous les abattre. C’est la vie collective qui nous révèle. « Quand j’écris, je n’ai pas l’impression de regarder en moi, je regarde dans une mémoire. Dans cette mémoire, je vois des gens, je vois des rues. J’entends des paroles et tout cela est hors de moi. Je ne suis qu’une caméra. J’ai simplement enregistré » dit Annie Ernaux dans un entretien. L’œuvre de cette auteure nous a amenés dans cette enquête, nous donnant la possibilité d’observer, déchiffrer, et reconstruire cette perpétuelle osmose entre dedans et dehors, et les déplacements du sens entre ce que nous sommes et ce qu’il se passe autour de nous. Nous nous sommes alors dit : aucune vision de l’extérieur ! L’extérieur est en nous ! Inspiration © DR 26 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 FRANZ TREICHLER/PETER METTLER/ JEREMY NARBY Création à Vidy Yoshtoyoshto Conférence sonique avec images en mouvement Conception : Franz Treichler Peter Mettler Jeremy Narby Musique : Franz Treichler Vidéo : Peter Mettler Récits : Jeremy Narby Production : Two Gentlemen - Christian Fighera Coproduction : Théâtre de Vidy 18 et 19.11 Salle Charles Apothéloz Vendredi 18.11 Samedi 19.11 20h00 20h00 Durée estimée : 1h Conférence/Musique/Vidéo Tarif M MAG 6 P. 23 27 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 Le cinéaste Peter Mettler, le musicien Franz Treichler et l’anthropologue Jeremy Narby fusionnent leurs arts, s’inspirant mutuellement dans une improvisation alchimique en temps réel, qui mêle musique éléctronique et vidéo expérimentale à des récits de Jeremy Narby sous inspiration amazonienne, puisant dans notre monde saturé de connaissances, de sons et d’images. Combinant technologies hypnotiques et tradition orale, cette fusion à trois puise dans des matériels de tous horizons, qu’elle transforme et recontextualise, aboutissant à une sorte de divination live du monde médiatisé. « Les Yaminahua de l’Amazonie péruvienne affirment que les êtres vivants sont animés par des êtres invisibles à multi-facettes appelés yoshi. Pour communiquer avec ces entités, ils utilisent un langage indirect et métaphorique, « tsai yoshtoyoshto » ou « langage s’enroulant s’enroulant », car, disent-ils, les mots directs s’écraseraient contre les yoshi, tandis que le langage yoshtoyoshto permet de s’en approcher, de leur tourner autour et de les voir clairement. Ici, la métaphore n’est pas une fausse façon de nommer les choses, mais la seule façon possible. Presque rien dans ce langage double et entrelacé n’est appelé par son vrai nom. Les jaguars deviennent des « paniers », les anacondas sont des «hamacs», la nuit devient « tapirs rapides ». Dans chaque cas, la logique métaphorique est expliquée par une connexion obscure, mais réelle. Les jaguars sont des « paniers » parce que certaines fibres utilisées pour fabriquer les paniers ont des motifs qui ressemblent aux taches d’un jaguar. Les anacondas deviennent des « hamacs », parce que parfois, quand ils pendent des arbres, ils ressemblent à des hamacs. Les Yaminahua utilisent les métaphores yoshtoyoshto pour s’adresser aux êtres à multi-facettes yoshi, parce que, disent-ils, « avec des mots normaux, vous vous écrasez contre eux, mais avec le langage double et entrelacé, vous vous en rapprochez, mais pas trop, vous leur tournez autour, et vous les voyez clairement ». Les yoshi sont ambigus, ils ressemblent à quelque chose que vous connaissez, et en même temps, ils sont différents. » RÉCITS DE JEREMY NARBY Travail en cours © Grimthorpe Film 28 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 JEAN-FRANÇOIS SIVADIER Dom Juan DE MOLIÈRE 23.11-3.12 Mise en scène : Jean-François Sivadier Collaboration artistique : Nicolas Bouchaud Véronique Timsit Scénographie : Daniel Jeanneteau Jean-François Sivadier Christian Tirole Lumière : Philippe Berthomé Costumes : Virginie Gervaise Maquillage, perruques : Cécile Kretschmar Son : Eve-Anne Joalland Assistanat mise en scène : Véronique Timsit Maxime Contrepois Salle Charles Apothéloz Mercredi 23.11 Jeudi 24.11 Vendredi 25.11 Samedi 26.11 Dimanche 27.11 Mardi 29.11 Mercredi 30.11 Jeudi 1.12 Vendredi 2.12 Samedi 3.12 20h00 19h00 20h00 17h00 16h00 19h00 20h00 19h00 20h00 17h00 Durée : 2h30 Théâtre Tarif M Avec : Marc Arnaud Nicolas Bouchaud Stephen Butel Vincent Guédon Lucie Valon Marie Vialle VIDY+ Production déléguée : Théâtre National de Bretagne, Rennes Coproduction : Odéon - Théâtre de l’Europe, Paris MC2: Grenoble Châteauvallon - scène nationale Le Grand T - Théâtre de Loire-Atlantique, Nantes Le Printemps des Comédiens, Montpellier à l’issue de la représentation Création le 22 mars 2016 au Théâtre National de Bretagne, Rennes RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Jeu. 24.11 et Jeu. 1.12 Entrée libre, sans réservation Dom Juan EN TOURNÉE 2016 La Rose des Vents, Villeneuve d’Ascq 24-27.5 Odéon-Théâtre de l’Europe, Paris 14.09-4.11 Le Grand T, Nantes 7-17.12 Janvier 2017 Théâtre national de Strasbourg MC2: Grenoble MAG 6 P. 24 > 29 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 NOTE D’INTENTION DE JEAN-FRANÇOIS SIVADIER, 2015 Dom Juan est avant tout l’histoire d’un geste impossible. La poignée de main entre un mortel et une statue de pierre venue de l’au-delà pour l’anéantir. Le mythe commence là. Dans la rencontre fatale entre celui qui s’est fait un devoir de ne croire en rien et de rire de tout, et la seule chose capable de le confondre et de lui passer définitivement l’envie de rire. Face à l’adversaire suprême qu’il semble avoir cherché (ou fui) toute sa vie, il se paie le luxe d’un dernier coup de théâtre : il regarde la statue dans les yeux, saisit la main tendue comme il signerait son œuvre : sans trembler. Dans la joie de savoir que sa disparition brutale laissera le public aussi désorienté que son valet. En voyant disparaître le monstre (qui sera hué ou applaudi), impossible de savoir si l’on se sent soulagé ou orphelin. Délivré ou abandonné. Trahi ou vengé. Aucune morale dans le point final, aucune leçon. Pas de verdict, ni pour lui ni pour les autres : coupable(s) non coupable(s), pas de « ici les bourreaux et ici les victimes ». C’est à cet impossible que Molière choisit de nous confronter. En faisant de nous les jurés d’un procès qui n’a pas lieu. Car à la fin, celui qui a, pendant deux heures, piétiné le sacré sous toutes ses formes est « puni par les flammes de l’enfer », mais sa parole est toujours vivante et, personne n’est dupe, la statue est en carton-pâte. Avec Tartuffe, Molière est allé trop loin. La pièce est interdite. Imaginons que la colère de l’auteur n’a d’égale que son excitation à comprendre qu’il a touché le nerf de la guerre. Dans le costume de Sganarelle, il entre sur la scène du Palais-Royal comme un bonimenteur de foire ; il revient, dès le premier mot, à la charge avec un message sans équivoque : Tartuffe était le signe avant-coureur de celui qui va entrer et qui, lui, n’a besoin d’aucun masque. Tartuffe était un faux dévot, Dom Juan est un athée véritable. Vous en avez eu trop ? Vous en aurez encore plus. Molière métamorphose un sujet d’édification religieuse en une profession de foi matérialiste. Avant même d’être quelqu’un, Dom Juan est un corps offert comme un espace de projection à toutes les interprétations. Impossible de définir, absolument, celui qui a tort en ayant l’air d’avoir raison parce qu’il parle tout comme un livre. Celui dont on ne peut saisir l’identité qu’au regard de ses actions contradictoires et des réponses ambigües aux questions précises qu’on lui pose : « Vous n’avez pas peur de la vengeance divine ? — C’est une affaire entre le Ciel et moi ! ». Dans le sursis que laisse une mort inéluctable et sans cesse différée, rien d’autre à faire que divertir pour se divertir, construire du théâtre et des romans, des obstacles où il est sûr de devoir engager son corps dans la bataille, de mouiller sa chemise. Et, en cherchant dans la drogue du vertige la promesse d’une adrénaline de plus en plus forte, il tente d’épuiser le monde et de s’épuiser luimême pour se sentir vivant. Mais aucun rôle chez Molière qui ne porte en lui son propre clown et qui n’offre au public, l’occasion de rire de lui. La comédie commence toujours dans la rencontre malheureuse de la théorie et de la pratique. Celui qui a projeté de conquérir les autres mondes décide d’abord d’enlever une illustre inconnue avec une petite barque qui fait immédiatement naufrage. Dans ce tour du monde qui ressemble surtout à un tour sur lui-même, l’esquisse, l’instantané et l’improvisation, font de la scène une arène où se succèdent des numéros interchangeables et surtout imprévisibles. La pièce met en scène, dans un chant d’une ambivalence permanente, des clowns qui font froid dans le dos à force de manipuler joyeusement des idées noires. Devant la statue on peut rire comme Dom Juan ou trembler avec Sganarelle. Ou les deux à la fois. Une pièce qui marche sur deux jambes. Le rire et l’effroi. Pas l’un après l’autre mais simultanément. Dom Juan © Brigitte Enguérand 30 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 ADELINE ROSENSTEIN Décris-Ravage Textes et mise en scène : Adeline Rosenstein Scénographie : Yvonne Harder Lumière : Caspar Langhoff Son : Andrea Neumann Regards scientifiques : Henry Laurens Julia Strutz Tania Zittoun Avec : Olindo Bolzan Léa Drouet Isabelle Nouzha Céline Ohrel Adeline Rosenstein Production : Little Big Horn Partenaires : Festival Echtzeitmusik, Berlin Ausland- berlin Festival Premiers-Actes, Husseren-Wesserling Théâtre Océan Nord, Bruxelles Centre de culture ABC, La Chaux-de-Fonds Centre culturel André Malraux-scène nationale, Vandoeuvre-lès-Nancy Théâtre de la Balsamine, Bruxelles Avec le soutien de : Fédération Wallonie-Bruxelles Cocof WBI adelinerosenstein.com Création le 19 avril 2016 au Théâtre de la Balsamine, Bruxelles La pièce d’Adeline Rosenstein est adaptée en bande dessinée par le dessinateur genevois Alex Baladi (Atrabile, automne 2016) MAG 6 P. 25 30.11-3.12 La Passerelle Mercredi Jeudi Vendredi Samedi 30.11 1.12 2.12 3.12 19h30 19h30 19h30 16h30 Durée estimée : 3h30 Théâtre Tarif M 31 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 NOTE D’INTENTION D’ADELINE ROSENSTEIN, 2016 Je viens d’une famille juive qui se divise entre gens d’Europe de l’est nés en Amérique du Sud et gens d’Allemagne nés en Palestine mandataire qui ont quitté Israël ; tous soutenaient de loin et admiraient le projet sioniste, y retournaient en voyage régulièrement, certains étaient même prêts à se porter volontaires pour prendre les armes au côtés d’Israël. C’est-à-dire que j’ai grandi dans les mensonges. Cela m’a donné un regard louche, aux yeux indépendants comme ceux des caméléons, divisé entre mon engagement pour la Palestine depuis l’adolescence et mes liens affectifs très forts à Israël où j’ai vécu, milité et étudié trois ans, à l’époque des accords d’Oslo et contre eux, par la gauche. Le conflit Israël-Palestine me lasse. Et puis soudain, je ne comprends de nouveau plus qu’on s’accomode de tant de violence et j’ai besoin d’en reparler sur scène. Je ne l’avais plus fait depuis 2002 (Anonym bleiben à Ausland-Berlin). L’opération «Plomb durci » en décembre 2008 sur Gaza et les débats plus que houleux avec nombre d’amis artistes autour de moi m’ont persuadée de quitter la lassitude et de reprendre le sujet par ce biais. C’est ainsi que je mène depuis 2009 des entretiens avec des artistes occidentaux d’âges différents ayant vécu quelques mois en Israël ou en Palestine à différentes époques. Le projet Décris-ravage est né de l’envie de confronter ces entretiens à des extraits de pièces de théâtre historiques en arabe traitant des mêmes événements mais dans une perspective arabe. Ces deux sortes de paroles témoignages et citations de théâtre - devaient être introduites et contextualisées par des petits rappels historiques qui ont pris de plus en plus d’importance et bouleversé toute la temporalité du processus théâtral. Face à la description d’un événement historique méconnu, les points d’exclamation n’aident pas à comprendre. Démêler puis refaire le nœud de « ce qui a bien pu se passer pour qu’on en arrive là » exige de la patience. Dans le cas du conflit israélo-palestinien, le nœud est gros de plus de cent ans. Il faut à chaque étape du travail éviter les mots qui provoquent les réactions violentes, rayer les sarcasmes, débusquer les termes qui découragent, qui tendent au lieu de délier. Après vingt ans d’indignation virulente, j’ai trouvé autre chose : une série de six spectacles qui constituent une traversée historique et sémantique de la question de Palestine. Ce n’est pas une vulgarisation, mais le rêve du partage de la complexité. Décris-Ravage © Mario Cafiso Décris-Ravage © Mario Cafiso Décris ravage EN TOURNÉE 2016 Théâtre de Doms, Avignon 7-27.07 32 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 PHILIPPE QUESNE Deux spectacles La Nuit des taupes (Welcome to Caveland !) L’Après-midi des taupes Jeune public dès 8 ans La Nuit des taupes (Welcome to Caveland !) 7-10.12 La Nuit des taupes L’Après-midi des taupes (Welcome to Caveland !) Création mai 2016 Conception, mise en scène et scénographie : Philippe Quesne Collaboration dramaturgique : Lancelot Hamelin Ismael Jude Smaranda Olcese Costumes : Corine Petitpierre Collaboration artistique et technique : Marc Chevillon Elodie Dauguet Thomas Laigle Avec : Yvan Clédat Jean-Charles Dumay Léo Gobin Erwan Ha Kyoon Larcher Sébastien Jacobs Thomas Suire Gaëtan Vourc’h Comme Lewis Carroll a fait tomber Alice aux antipodes, Philippe Quesne emmène les enfants sous la terre… Et quoi de plus fertile pour l’imagination qu’un sous-sol habité de taupes géantes ? Jouée dans le même décor que La Nuit des taupes, cette version promet aux jeunes spectateurs un voyage presque au centre de la terre, sous la forme d’un conte ludique. Salle Charles Apothéloz Mercredi Jeudi Vendredi Samedi 7.12 8.12 9.12 10.12 20h00 19h00 20h00 20h00 Durée estimée : 1h30 Théâtre Tarif M L’Après-midi des taupes 8-10.12 Salle Charles Apothéloz Jeudi 8.12 Vendredi 9.12 Samedi 10.12 14h15 14h15 16h00 Jeune public, dès 8 ans Théâtre Tarif S Production : Nanterre-Amandiers, centre dramatique national Coproduction : Théâtre de Vidy Festival Steirischer Herbst, Graz Kunstenfestivaldesarts, Bruxelles La Filature - Scène nationale, Mulhouse Kunstlerhaus Mousonturm, Francfort Théâtre National de Bordeaux Aquitaine Kaaïtheater, Bruxelles Le Parvis, Scène Nationale de Tarbes Pyrénées NXTSTP avec le soutien du Programme culturel de l’Union européenne Avec le soutien de : Fondation d’entreprise Hermès dans le cadre de son programme « New Settings » VIDY+ Création le 6 mai 2016 au Kaaitheater, Bruxelles Ven. 9.12 RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Jeu. 8.12 à l’issue de la représentation INTRODUCTION AU SPECTACLE une heure avant le début de la représentation Entrée libre, sans réservation Tarifs préférentiels MAG 6 P. 26 pour les familles et séances scolaires > 33 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 EXTRAIT D’UN ENTRETIEN AVEC PHILIPPE QUESNE RÉALISÉ PAR MARION SIÉFERT, 2015 Très souvent, aux prémisses de tes projets, il y a un mythe ou une parabole, qui joue un rôle important dans le processus de création. Qu’est-ce qui t’inspire dans le mythe de la caverne de Platon ? Je pars moins d’un mythe que de certaines intuitions, liées à un lieu. Dans La Mélancolie des Dragons, la neige me permettait de parler du merveilleux ; le marécage de Swamp Club était une belle métaphore d’un lieu en danger, entre deux eaux. La caverne est un lieu de rêverie ouvert au fantastique mais aussi propice à une réflexion sur une part sombre et mystérieuse de l’humain, avec toutes les ambiguïtés que comporte le fait de se réfugier dans un trou. Mais pour revenir à Platon, je crois que ce qui m’intéresse dans le mythe de la caverne, c’est de pouvoir questionner la place de l’artiste : qu’est-ce que le savoir ? Peuton faire confiance aux humains et à leur capacité de voir le monde par euxmêmes ? Sont-ils manipulés ? Et quelle est la visée de cette manipulation ? Une domination ou un éveil de la conscience ? La question de la scénographie dans le mythe de la caverne est passionnante. On pourrait facilement imaginer un dispositif théâtral en coupe, comme une taupinière, et reconstituer la situation de la caverne, avec le feu, les ombres et la position des prisonniers. La grotte évoque un univers en-deçà : on revient aux origines, mais pour anticiper quelque chose et évoquer la fin du monde. C’est vrai. Très souvent dans la littérature et les films de science-fiction, la partie la plus futuriste des inventions est cachée sous terre. D’ailleurs, quand on creuse, on découvre des grottes, des vestiges du passé. Le passé préhistorique cohabite avec des déchets nucléaires. Il y a quelque chose de fascinant et de terrible dans cette boucle humaine. J’aime bien imaginer que les grottes de Lascaux ont été peut-être peintes après une grosse fête. Ce n’est pas forcément le travail d’un peintre paisible. Il y avait peut-être déjà la conscience de la catastrophe et la volonté de laisser trace d’une humanité pour les suivants, de passer le relais à d’autres, avec la conscience que l’on est là de manière temporaire. C’est ce point de départ-là que j’aimerais partager avec le public. Mais il y a ce désir de figurer, plus concrètement que d’habitude, une sorte de parc d’attraction spectaculaire où on recevrait les spectateurs dans la convivialité et une forme d’utopie, en suivant la vie d’une petite communauté de taupes géantes… Ce projet sera-t-il construit autour d’une fable ? Avec Swamp Club, on avait posé les bases d’une sorte de méthodologie, celle de l’artiste-résistant, en essayant de comprendre les liens entre refuge, résidence et résistance. Avec Welcome to Caveland !, je veux explorer une imagerie beaucoup plus fantastique et animale. J’ai donc eu l’idée de suivre la taupe, cette bête qui était une sorte de guide dans Swamp Club. Comme dans mes autres spectacles, je veux immerger les spectateurs dans la fiction, tout en leur montrant que l’on n’est pas dupe de la façon dont les choses se fabriquent et s’inventent. Je rêve d’une partie qui soit une sorte de fable avec toute une colonie de taupes, un bestiaire merveilleux où les personnages masqués côtoieraient des marionnettes et des objets animés, dans un décor de grotte artificiel. Quel va être le langage parlé dans cette grotte ? J’imagine que ses habitants pourraient développer un langage privé, peut-être revenir à des grognements… Je vais retrouver mon équipe fidèle qui accompagne mes projets depuis près de douze ans et de nouveaux interprètes musiciens, mais avec ce projet, on va avoir l’occasion de trouver la place du langage ou de le faire disparaître. On peut enclencher la narration avec une matière très visuelle, on n’a pas toujours besoin des mots. J’imagine très bien une première partie faite uniquement de bruits et de grognements. Dans Swamp Club, je me suis aperçu que, même si la taupe ne disait rien, tous les spectateurs projetaient des choses sur elle et imaginaient un danger imminent. On l’a peut-être tous rêvé ce danger. C’est peut-être simplement un acteur qui a trop chaud dans un costume. Mais comme l’explication n’était pas formulée, les spectateurs se mettaient à formuler des hypothèses. Je crois que, plus que jamais, je veux associer une rêverie à un éveil des consciences. La Nuit des taupes © Martin Argyroglo La nuit des taupes EN TOURNÉE 2016 Festival Alkantara, Lisbonne 7-8.06 Baltoscandal, Rakvere 6.07 Steirischer Herbst, Graz 23-24.09 Novart, Bordeaux 4-8.10 Actoral, Marseille 12-13.10 2017 La Filature, Mulhouse 8-9.03 34 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 GUY CASSIERS Rouge décanté d’après le roman DE JEROEN BROUWERS Adaptation : Guy Cassiers Corien Baart Dirk Roofthooft Mise en scène : Guy Cassiers Dramaturgie : Corien Baart Erwin Jans Décor, vidéo, lumière : Peter Missotten (De Filmfabriek) Costumes : Katelijne Damen Décor sonore : Diederik De Cock Avec : Dirk Roofthooft Production : Toneelhuis, Anvers Ro Theater, Rotterdam Création le 16 octobre 2004 au Ro Theater, Amsterdam 13-15.12 Salle Charles Apothéloz Mardi 13.12 Mercredi 14.12 Jeudi 15.12 19h00 20h00 19h00 Dès 16 ans Durée : 1h40 Théâtre/Cinéma/Vidéo Tarif M VIDY+ INTRODUCTION AU SPECTACLE Mar. 13.12 une heure avant le début de la représentation RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Mer. 14.12 à l’issue de la représentation Entrée libre, sans réservation Rouge décanté EN TOURNÉE 2017 Théâtre de Sartrouville 10.03 Théâtre National de Bordeaux 14-18.03 Stadsschouwburg, Groningen 4.05 MAG 6 P. 28 > 35 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 EXTRAIT D’UN ENTRETIEN AVEC GUY CASSIERS RÉALISÉ PAR JEANFRANÇOIS PEYRIER, 2006 Comment avez-vous choisi Rouge décanté? Je choisis les textes uniquement sur l’émotion que j’ai à la lecture. Pour Rouge décanté, j’ai eu un choc immédiat que je n’arrivais pas à analyser, mais très rapidement, j’ai su que je devais le mettre en scène pour comprendre ce qui m’avait troublé. C’est toujours ainsi que je fonctionne : dans le désir de faire partager au public le moment de trouble que j’ai eu à la première lecture. Rouge décanté est le troisième épisode d’une aventure qui en comprendra quatre. Cette tétralogie a commencé à la lecture du roman Le Garçon boucher, de Patrick McCabe, histoire d’un enfant abandonné dans une situation très difficile. Ce premier spectacle était joué par un comédien, seul en scène, qui dialoguait avec des textes qui défilaient sur un écran. Grâce au regard du comédien et aux animations graphiques des textes, les spectateurs pouvaient imaginer les autres personnages qui n’apparaissaient pas sur scène. Le second spectacle était inspiré du Seigneur des guêpes de Ian Banks, histoire d’un adolescent coupé du monde qui se construit un univers morbide. Avec Rouge décanté, on retrouve un personnage qui ne peut pas vivre une vie « normale » et qui, pour survivre, doit écrire un livre où il se raconte. C’est une œuvre très proche de l’univers proustien puisque le héros est tellement lié au passé qu’il ne peut avoir une relation normale avec le monde réel qui l’entoure. Jeroen Brouwers raconte l’histoire d’un homme qui cherche à oublier le passé sans y parvenir, qui voudrait presque effacer le passé pour enfin trouver un futur. Le roman a été un grand succès public mais il a été très critiqué par des auteurs qui lui reprochaient de ne pas avoir décrit la réalité historique. Jeroen Brouwers a toujours dit que son livre est un roman, qui raconte le regard d’un enfant de cinq ans sur ce qui se passait dans le camp d’internement que les Japonais ont construit pour les résidents hollandais en Indonésie, sur ce qu’il a ressenti pendant ces années et surtout sur ce qui a été détruit irrémédiablement dans son rapport à sa mère puis plus généralement dans son rapport aux femmes, une fois devenu adulte. Pour construire Rouge décanté, avez-vous adapté le roman de Jeroen Brouwers? Dirk Roofthooft et moi-même avons travaillé en étroite collaboration. Nous avons supprimé certains passages car le roman est assez long mais nous n’avons pas changé un seul mot du texte. Nous avons conservé notamment intégralement les premiers chapitres. Par ailleurs, nous avons voulu également aborder tous les thèmes évoqués par l’auteur pour permettre au spectateur de bien entrer dans le style de l’écriture, qui est comme un roman policier à la construction très mathématique. Et comme dans le polar, ce n’est qu’à la fin que l’on peut reconstituer l’histoire : en mettant les morceaux du puzzle les uns à côté des autres.D’ailleurs, à Avignon, la pièce sera présentée pour la première fois en langue française. Qu’est-ce que l’utilisation de la vidéo apporte à votre travail? Pour moi, la vidéo est un moyen parmi d’autres pour raconter une histoire, comme peut l’être la musique ou la lumière. C’est un outil que j’utilise souvent pour filmer en direct sur le plateau le ou les comédiens. Dans Rouge décanté, tout est filmé en direct. Il y a sept caméras mais pas de caméramans : il n’y a donc personne entre le public et l’acteur. C’est l’acteur qui choisit laquelle des sept caméras vers laquelle il se déplace. En ce sens il est dans cet instant comme un réalisateur. Il y a juste un régisseur qui transforme les images reçues. Cela pourrait ressembler à un concert de jazz car il y a une structure de base pré-établie, mais des variations permanentes. Pour moi, le point de départ du théâtre, c’est la présence physique de l’acteur et rien ne doit troubler cette présence sur scène. La vidéo est un moyen utile pour doubler ou tripler l’image de l’acteur. On peut ainsi agrandir ou diminuer la taille du visage, l’acteur devenant alors, aussi petit qu’un enfant, ou on peut choisir seulement un détail : la main, l’oreille… À partir d’un détail, on peut imaginer ce qui se passe à l’extérieur du cadre choisi. Le public a le choix de regarder l’acteur ou les images que l’acteur est en train de créer. Toute la scène devient l’intériorité de cet acteur, on est comme absorbé à l’intérieur de lui. Rouge décanté © Pan Chok 36 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 VINCENT MACAIGNE Création à Vidy En manque Mise en scène : Vincent Macaigne (distribution en cours) Production : Théâtre de Vidy Compagnie Friche 22.66 Coproduction : Tandem Arras/Douai Holland Festival, Amsterdam (en cours) 13-21.12 Salle René Gonzalez Mardi Mercredi Jeudi Vendredi Samedi Lundi Mardi Mercredi 13.12 14.12 15.12 16.12 17.12 19.12 20.12 21.12 19h30 19h30 19h30 19h30 19h30 19h30 19h30 19h30 > Durée estimée : 1h15 Théâtre/Danse/ Performance Tarif M VIDY+ INTRODUCTION AU SPECTACLE Mar. 13.12 une heure avant le début de la représentation RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Jeu. 15.12 à l’issue de la représentation Entrée libre, sans réservation MAG 6 P. 29 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 37 PRÉSENTATION DU SPECTACLE ERIC VAUTRIN, DRAMATURGE DU THÉÂTRE DE VIDY, 2016 En Manque, esquissé il y a quatre ans à la Ménagerie de Verre à l’occasion d’un laboratoire, est une étude théâtrale, visuelle et chorégraphique de Vincent Macaigne pour deux danseuses, un acteur et un enfant. Macaigne s’inspire librement de Manque (Crave), avant-dernier texte de Sarah Kane dans lequel la dramaturge anglaise, délaissant la violence de ces premiers textes, orchestre un quatuor de personnages cherchant un amour pur et radical. Il met en scène une femme aux prises avec la mélancolie, état qu’il prend dans son sens étymologique de « corps mort porté en soi ». Son mari/amant hésite entre l’aider/l’aimer et fuir, et son enfant la sortira finalement de sa torpeur. Comme toujours chez Macaigne, il ne met pas en scène un drame intérieur ou psychologique, pas plus qu’il n’explique sociologiquement un état d’être : c’est la lutte contre le monde, contre la vie, et pour la vitalité et le désir qu’il met en scène. Extrait de Manque de Sarah Kane (L’Arche, 1999) « Ne me dis pas non non tu ne peux pas me dire non c’est un tel soulagement de retrouver l’amour et de dormir dans un lit et d’être serré et touché et embrassé et adoré et ton cœur bondira quand tu entendras ma voix verras mon sourire sentiras mon souffle sur ton cou et ton cœur s’emballera quand je viendrai te voir et dès le premier jour je te mentirai et je t’utiliserai et je te baiserai et je te briserai le cœur puisque tu as brisé le mien, et tu m’aimeras chaque jour davantage et un jour ce sera trop lourd et alors ta vie sera mienne et tu mourras dans la solitude quand j’aurai emporté tout ce qui me plaira avant de partir sans plus rien te devoir c’est toujours là c’est toujours là et tu ne peux pas nier la vie tu la sens merde à cette vie merde à cette vie merde à cette vie merde à cette vie maintenant je t’ai perdue. » Le théâtre de Vincent Macaigne Le théâtre de Macaigne est un théâtre puissant, vif et destructeur. Sa vivacité, sa violence pour ne pas dire sa cruauté tiennent autant de la rage que l’euphorie, de l’amour que du désespoir, de la tendresse que du refus inconditionnel. Il ne cherche pas la solution, il cherche la vitalité. Il ne cherche pas l’absolution ou la conviction, il cherche à rester en vie et à dépasser l’idée par l’action, à transformer l’analyse en action collective. Il ne s’agit pas de plaire ni même de convaincre, mais de mettre en mouvement. C’est un théâtre du réveil, du sursaut, un théâtre qui avance droit, sans peur, sans honte, sans retenue, tout entier accompli dans sa puissance libérée. Comme à son habitude, Vincent Macaigne ne va pas mettre en scène le texte de Sarah Kane. Il sera la matière, la base, le sol sur lequel bâtir son théâtre – et le metteur en scène réécrira le texte original. Il n’y a rien d’étonnant à ce qu’il ait choisi ce texte après le Hamlet shakespearien et L’Idiot de Dostoïevski : il s’agissait déjà de deux personnages aux prises avec des sociétés délétères, abimées par leurs petites ambitions et leurs dysfonctionnements nocifs ; de deux êtres qu’on a bien du mal à juger, qui cherchent la vérité sans renoncer et dont les actions mènent à des destructions – quand Manque (Crave), texte de la dramaturge anglaise dont s’inspire En manque, met en scène quatre figures anonymes qui quêtent un amour pur, plein, sans compromis, un amour fou et rêvé comme dissolution radicale de soi et lien absolu et entier au monde. Car le théâtre répond pour Macaigne à un besoin d’exaltation qui est avant tout le moyen de dépasser ce qui semble s’imposer à chacun – le poids du passé, les conventions sociales éculées, les rêves préfabriqués. Le théâtre doit alors être « plus grand que nature » et se jouer des limites, ce qu’il prend pour une mission de service public : pour se rappeler qu’une autre vie est possible. Il ne dira pas laquelle, renvoyant chacun à ses ambiguïtés. Il ne sera ni prêcheur, ni mentor, ni professeur, il ne fera rien pour rassurer, mais il sera catalyseur d’énergie, destructeur de normes répétées et sans objet, exutoire de passions tristes. Macaigne s’inscrit ainsi dans la suite des artistes et intellectuels que Walter Benjamin avait nommés les destructifs en 1931. Ceux-là, écrivait-il, ne cherchent aucune nouvelle image, aucun nouvel idéal, ne s’attachent à rien, parce qu’ils savent que rien ne dure. Ils s’emparent de tout ce qu’ils trouvent, pleinement conscients de leur situation historique. Mais pour eux et pour ces mêmes raisons, toutes les circulations leur apparaissent toujours possibles, tout événement est l’occasion d’un nouveau chemin. Aussi il leur faut sans cesse détruire ce qui prétend s’absoudre de l’instant présent, mais c’est pour sans cesse permettre un nouveau chemin, qu’il leur faudra provoquer et déblayer en même temps. Vincent Macaigne est de ceux-là. Kane et ses personnages également. Macaigne et Kane sont deux artistes qui cherchent à exposer l’ambiguïté morale de l’existence. Ils se rejoignent dans la nécessité de se déprendre des conventions de leur temps. Comme le caractère destructif de Benjamin – qui n’est pas destructeur –, comme Sarah Kane dont l’œuvre brève et intense s’est sans cesse renouvelée, Macaigne ne cherche à décrire aucune nouvelle image, à déterminer aucun nouvel horizon. Il « teste le monde sur sa vocation à être détruit », « met en ruine l’existant » « là où d’autres se heurtent à des murs », mais ce n’est pas pour détruire, mais pour ouvrir de nouveaux chemins et entretenir la possibilité de les parcourir. En cela, sa rage, qui est autant un appétit qu’une « violence sublimée », est une puissante réponse à l’attentisme moribond qui caractérise l’Europe contemporaine. Il répond à sa façon à ce que Philippe Ivernel a décrit comme « la double crise de la tradition et de la modernité qui laisse le sujet, désemparé, dans une traversée du désert, mâchant néanmoins quelque nourriture encore. D’où peut surgir une énergie se libérant tout à coup, disruptive justement. Munch : Le Cri. Monet : Impression, 38 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 MASSIMO FURLAN Création à Vidy Hospitalités Conception : Massimo Furlan Kristof Hiriart Dramaturgie : Claire de Ribaupierre Costumes : Severine Besson Avec : Des habitants du village de La Bastide-Clairence (distribution en cours) Diffusion : Jérôme Pique Production : Numero23Prod. Coproduction : Théâtre de Vidy Compagnie LagunArte Mairie de La Bastide-Clairence Conseil départemental 64 Conseil régional Aquitaine Limousin Poitou Charentes Avec le soutien de : Ville de Lausanne Etat de Vaud Pro Helvetia - Fondation suisse pour la culture Loterie Romande massimofurlan.com 11-15.01 Salle Charles Apothéloz Mercredi 11.01 Jeudi 12.01 Vendredi 13.01 Samedi 14.01 Dimanche 15.01 20h00 19h00 20h00 17h00 16h00 Théâtre/Musique Tarif M VIDY+ RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Jeu. 12.01 à l’issue de la représentation INTRODUCTION AU SPECTACLE Ven. 13.01 une heure avant le début de la représentation Entrée libre, sans réservation MAG 6 P. 30 > 39 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 NOTE D’INTENTION DE LA COMPAGNIE NUMÉRO23PROD., 2016 Ce projet interroge les principes de fabrication du récit: comment une histoire s’écrit-elle? L’histoire que Massimo Furlan a alors décidé d’engager part de l’idée suivante: les habitants semblent heureux de vivre dans ce village, ils y sont attachés et ne souhaitent pas le quitter. Leur seule crainte concernant l’avenir est l’augmentation des prix de l’immobilier liée à la plus-value touristique du site, qui a pour conséquence de pousser les jeunes à partir, faute de logements à des prix raisonnables. Quelle action envisager dans ce cas? Un peu de façon provocatrice, Massimo se met à réfléchir à la question de l’hospitalité et des migrants. En effet, ce village touristique et authentique ne compte aucun étranger. L’accueil de différentes communautés défavorisées et dans le besoin, permettrait de maintenir les prix de l’immobilier à leur niveau actuel, voire de les baisser… Avec l’aide de Kristof Hiriart, et dans le plus grand secret d’abord, Furlan propose à l’ancien maire du village, Leopold Darritchon, professeur d’économie, personnalité d’une grande ouverture, aimé et respecté de tous, de s’emparer du dossier et de réfléchir avec lui à cette question de l’hospitalité. Celui-ci accepte, et décide de composer, avec Massimo et Kristof une équipe d’« acteurs » sociaux qui deviendront des acteurs responsables de l’histoire et de la pièce à jouer. Il s’agit alors d’introduire un élément de fiction dans l’espace du réel – la proposition de l’ouverture du centre d’accueil pour migrants dans le village – et de laisser cette idée engendrer des actions et réactions au sein de la population, par l’intermédiaire du débat dans l’espace social. Dans cette première étape du projet, il n’y a pas de spectateurs, tout le monde est acteur : tous les citoyens, par leur avis, leurs conversations, leurs gestes, participent à l’histoire et la construisent, à leur insu. La scène, c’est le village. Au départ, l’idée est donc de faire vivre une fiction. Mais le temps passant, l’histoire rattrape la fiction et la dépasse: la migration devient, à la fin de l’été 2015, une question politique et sociale urgente dans l’Europe entière. La guerre en Syrie, les conditions politiques et économiques en Afrique et au Procheorient, génèrent un flux migratoire continu et de plus en plus important. Les dirigeants européens se positionnent alors avec plus ou moins d’audace, de générosité ou de raideur dans le débat. Des villages, des villes et des régions décident de s’engager à accueillir les différentes communautés en exil. Léopold Darritchon – estimant que l’idée de l’hospitalité que lui propose Massimo Furlan comme projet artistique est très forte, ancrée au cœur du vivant, et se doit d’être prise au vol et au sérieux – décide alors d’en faire une proposition concrète, à partager ouvertement avec le village, autour des questions: comment recevoir des migrants, prendre soin de l’étranger, l’accueillir, et penser une structure hospitalière. Avec le maire actuel, et avec les différents acteurs principaux du projet, ils ont invité différents spécialistes de la migration, travailleurs sociaux, écrivains, sociologues, pour échanger avec le public autour d’expériences concrètes menées dans des centres de migration à Bayonne et à Calais entre autres. A cette occasion, plusieurs familles du village se sont déclarées motivées par le projet, prêtes à mettre à disposition des lieux d’accueil, chambres, appartements, maisons, pour plusieurs familles de migrants. Depuis fin octobre 2015, le collectif se réunit une fois par semaine pour débattre des questions liées à l’activation de ce projet autour de l’hospitalité. Travail en cours © Massimo Furlan 40 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 KARIM BEL KACEM Création à Vidy Mesure pour mesure DE WILLIAM SHAKESPEARE Pièce de chambre no3 Mise en scène : Karim Bel Kacem Dramaturgie : Olivia Barron Collaboration artistique : Maud Blandel Scénographie et costumes : Hélène Jourdan Lumière : Léa Maris Son : Orane Duclos Construction du décor : Ateliers du Théâtre de Vidy Avec : Flore Babled Jean-Charles Dumay Thibaut Evrard Baptiste Gilliéron David Houri (en cours) Production : Think Tank Theatre Le Thaumatrope Coproduction : Théâtre de Vidy Théâtre du Grütli, Genève Théâtre du Passage, Neuchâtel (en cours) Avec le soutien de : Jeune théâtre national, Paris Fondation culturelle de la BCN, Neuchâtel PRAIRIE. Le modèle de coproduction du Pour-cent culturel Migros en faveur de compagnies de théâtre et de danse innovantes suisses (en cours) thinktanktheatre.ch MAG 6 P. 32 18-26.01 Salle René Gonzalez Mercredi 18.01 Jeudi 19.01 Vendredi 20.01 Samedi 21.01 Dimanche 22.01 Mardi 24.01 Mercredi 25.01 Jeudi 26.01 20h00 19h00 20h00 19h00 16h00 20h00 19h00 20h00 Durée estimée : 2h Théâtre Tarif M VIDY+ RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Jeu. 19.01 à l’issue de la représentation Entrée libre, sans réservation 41 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 NOTE D’INTENTION DE LA COMPAGNIE THINK TANK THEATRE, 2016 De la pièce au dispositif/du dispositif à la pièce Si Mesure pour mesure, troisième et dernier volet du projet « Pièces de chambre », reprend le vocabulaire propre à nos deux premières pièces (huis clos radical, écoute au casque, vitres sans tain), c’est pour davantage le transgresser. La pièce ne jouera pas seulement dans le dispositif, elle se jouera de celui-ci. Assez vite, Shakespeare a pris en compte l’activité constante du public du Globe pendant les représentations de ses pièces. Il en a même fait l’un des moteurs de son écriture : les évènements sont souvent racontés plusieurs fois, par plusieurs personnages afin que les gens qui se seraient absentés un instant puissent suivre malgré tout. Nous allons nous saisir de cette particularité et en faire un élément fort de notre proposition : notre dispositif sera séparé en deux espaces distincts (l’espace du pouvoir/l’espace de l’exécution) ; toutes les scènes - se déroulant dans le bureau d’Angelo et dans la cellule dans laquelle est enfermé Claudio - se joueront en même temps. Les spectateurs, répartis en deux points opposés de la structure, n’assistent pas au même spectacle. Les uns jouissent d’une vue plongeante sur le cabinet ministériel, sur la grande arène politique, pendant que les autres ont un accès direct sur la salle d’exécution. Seule une grande baie vitrée sépare les deux espaces. Champ-contrechamp : exécutif - exécuté/exécuté - exécutif Les uns assisteront donc d’abord au spectacle de l’exécution réelle de Claudio, dans ce procès pour l’exemple, avec en arrière fond la fiction politique (à travers la vitre). Les autres, à celui de l’exécution symbolique d’un Angelo surmédiatisé avec en point de mire ce tableau qui ornera le mur du fond (à la manière de l’écran géant de la situation room), celui des dernières heures de Claudio. Le public de l’un des spectacles dans le spectacle, servira de figurant à l’autre public. Et très vite se saura lui même personnage de la fiction des gens du public opposé. Comme chez Kafka, les lieux que l’on croyait éloignés se révèlent accolés, brouillant toute frontière entre espace privé et public. Ici, le lieu du pouvoir décisionnel, de l’intelligence politique, jouxte un lieu archaïque et punitif, la salle d’exécution. Un jeu de correspondances, de liens va se tisser peu à peu. La transparence crée un jeu de dupes, une théâtralité forcée. Si les politiques, le duc comme Angelo, observent Claudio sans être vus, ils savent le public témoin de leurs agissements. Chacun se sait observé, chacun veut contrôler son image dans les moindres détails. Sur-exposition et point de bascule de l’humain Obscène, tel pourrait être l’autre versant de ce dispositif, tant les corps, la sexualité, sont exhibés par la transparence des vitres. Dans Mesure pour mesure, le désir, réprimé, ressurgit dans toute sa crudité. Que ce soit chez le duc dont le visage vérolé trahit la syphilis, miroir d’une société malade, ou le langage teinté d’érotisme d’Isabella qui attise le désir d’Angelo. Ici, la vierge se transforme en prostituée, la pornographie surgit, envers du puritanisme. Angelo lui-même, d’ordinaire tellement cadré par ses principes, se révèle très vite dépassé par la passion, prêt à commettre un viol. « L’acte sexuel permet à Shakespeare d’explorer une variété de transgressions, comme les abus de pouvoir, la tromperie et l’exploitation » rappelle Frédérique Fouassier. L’un des aspects les plus déroutant du théâtre shakespearien, c’est que finalement les personnages sont mis face à ce qu’ils tentaient justement d’éviter. Inexorablement, le refoulé remonte à la surface, dans un crescendo d’excès et de violence. Inspirations scénographiques © DR 42 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 LA CORDONNERIE Pour enfants et adolescents (MÉTILDE WEYERGANS/SAMUEL HERCULE) Deux spectacles Blanche-Neige ou la chute du mur de Berlin Udo, complètement à l’est Blanche-Neige ou la chute du mur de Berlin Adaptation, scénario, réalisation et mise en scène : Métilde Weyergans Samuel Hercule SPECTACLE Musique : Timothée Jolly Lumière : Johannes Charvolin Son : Adrian Bourget Assistanat mise en scène : Pauline Hercule Avec : Samuel Hercule (voix, bruitages) Timothée Jolly (piano, claviers) Florie Perroud (batterie, percussions) Métilde Weyergans (voix, bruitages) Udo, complètement à l’est Texte et mise en scène : Métilde Weyergans Samuel Hercule Musique : Mathieu Ogier Costumes : Salomé Plas Lumière : Bertrand Saillet Véronique Marsy Avec : Quentin Ogier Mathieu Ogier Et la participation de : Valentine Cadic Métilde Weyergans Production : La Cordonnerie FILM Chef opérateur : Aurélien Marra Décors : Marine Gatellier Costumes : Rémy Le Dudal Montage : Gwenaël Giard Barberin Assistanat réalisation : Damien Noguer Avec : Neil Adam, Alix Bénézech, Valentine Cadic, Vannina Furnion, Samuel Hercule, Timothée Jolly, Quentin Ogier, Florie Perroud, Jean-Luc Porraz, Métilde Weyergans Production : La Cordonnerie Coproduction : Théâtre de la Ville, Paris – Le Manège de Reims - Scène nationale – Nouveau théâtre de Montreuil - Centre Coproduction : Théâtre de la Ville, Paris Blanche-Neige ou la chute du mur de Berlin 18-21.01 Salle Charles Apothéloz Mercredi Jeudi Vendredi Samedi 18.01 19.01 20.01 21.01 18h00 10h00 s 14h15 14h15 s 19h00 17h00 Dès 8 ans Durée : 1h15 Théâtre/Cinéma/Musique Tarif M VIDY+ RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Ven. 20.01 à l’issue de la représentation Entrée libre, sans réservation Création dans le cadre du programme des Inattendus, initié par le Théâtre de la Ville-Paris, la SACD et le Festival Petits et Grands Création novembre 2015 au Théâtre de la Ville, Paris lacordonnerie.com Udo, complètement à l’est 8-11.02 La Passerelle Mercredi 8.02 Jeudi 9.02 Vendredi 10.02 Samedi 11.02 18h00 10h00 s 14h15 s 14h15 s 19h00 15h00 17h00 dramatique national – Théâtre de Villefranche-sur-Saône – Maison des Arts - Scène nationale de Créteil et du Val de Marne – Le Granit - Scène nationale, Belfort – Théâtre de St-Quentin- enYvelines - Scène nationale Avec le soutien de : Région Rhône- Alpes – SPEDIDAM Création décembre 2015 au Théâtre de SaintQuentin en Yvelines - Scène nationale Dès 7 ans Durée : 50 min Théâtre/Musique Tarif S Tarifs préférentiels MAG 6 P. 34 pour les familles et séances scolaires 43 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 Blanche-Neige ou la chute du mur de Berlin NOTE D’INTENTION DE LA CORDONNERIE, 2016 Dans notre réécriture de Blanche-Neige, nous mélangeons l’histoire intime de nos deux héroïnes à la Grande Histoire, mondiale, universelle. Nous suivons le quotidien parfois ludique et souvent conflictuel d’Elisabeth, hôtesse de l’air, la quarantaine, « éducatrice » malgré elle, isolée face à Blanche, une adolescente gothique, mutique, écorchée. Entre elles, c’est en quelque sorte « la coexistence pacifique ». A 15 ans, Blanche regarde la vie, la politique, sa belle-mère en faisant des bulles énormes avec son chewing-gum, son walkman sur les oreilles et son tee-shirt des Cure sur le dos. Le genre de situation qui nous rappellera des souvenirs, que l’on soit parent ou enfant… Notre spectacle joue sans cesse avec la double lecture que l’on peut avoir d’un événement ou d’une attitude suivant son âge, sa culture, son expérience de la vie. Ici, c’est la plus belle du Royaume qui nous raconte avec humour sa version des faits. Non, Blanche n’est pas la gentille fille naïve dont on nous parle. Non, Elisabeth n’est pas la méchante narcissique que tout le monde croit connaître… Une nouvelle fois, nous prenons à l’envers cette histoire connue de tous, nous lui tordons le cou. Notre Blanche-Neige est un conte des temps modernes oscillant entre profondeur et légèreté dans lequel chaque élément de la fiction devient réalité : les sept nains sont volés dans les jardins des quartiers résidentiels, la pomme empoisonnée provient d’un cageot de Pommes d’Amour envoyé à la jeune Blanche par son père, le miroir magique est tout simplement celui de la salle de bain. Parallèlement à l’histoire de Blanche et Elisabeth, nous suivons les derniers mois agités autour du mur de Berlin et de sa chute en novembre 1989, comme un écho à leur relation parfois douloureuse. La chute du mur de Berlin est l’un des derniers évènements historiques « heureux » que nous ayons vécu. Le sera-t-il pour nos deux héroïnes? Blanche-Neige © Sébastien Dumas Blanche-Neige © Sébastien Dumas Udo © Sébastien Jaudon Udo, complètement à l’est PRÉSENTATION PAR LA CORDONNERIE, 2016 Udo © Sébastien Jaudon « Blanche Neige, vous connaissez l’histoire ? Oui, tout le monde connaît cette histoire... Vous savez, la reine un peu perchée qui parle à son miroir pour vérifier qu’elle est toujours la plus belle du royaume... Mais je peux vous le dire, moi : ça ne s’est pas du tout passé comme ça. Pas du tout. Dans ce livre, on parle d’un roi. Une seule fois, à la première page, après plus rien et ça, ça ne dépend pas du tout des versions. C’est toujours pareil. Tout le monde s’en fout complètement du père de Blanche Neige. Et le père de « Blanche Neige », le roi, c’est moi. Udo, je m’appelle Udo, mais dans l’histoire, on dit juste « le roi ». Mais il est où, ce « roi » pendant tout ce temps où sa petite fille est en danger ? C’est bizarre, non ? Et il fait quoi ? Il s’est sans doute passé quelque chose dans sa vie pour qu’il soit si transparent... Comme un fantôme. Peut être qu’il faudrait lui poser la question, au « roi »... Vous voulez que je vous raconte mon histoire? » Udo © Samuel Hercule 44 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 ALEXIS FORESTIER Création à Vidy Modules Dada Mise en scène : Alexis Forestier Son : Jean-François Thomelin Alexis Auffray Vidéo et lumière : Perrine Cado Avec : Jean-François Favreau Barnabé Perrotey (distribution en cours) Production : compagnie les endimanchés Coproduction : Théâtre de Vidy Théâtre Dijon Bourgogne -Centre dramatique national Avec le soutien de : La Fonderie, Le Mans La Quincaillerie, Les Laumes La compagnie les endimanchés est conventionnée par le ministère de la Culture/DRAC Bourgogne lesendimanches.fr 26.01-3.02 La Passerelle Jeudi 26.01 Vendredi 27.01 Samedi 28.01 Dimanche 29.01 Mercredi 1.02 Jeudi 2.02 Vendredi 3.02 19h30 19h30 20h00 15h00 19h30 19h30 19h30 Théâtre/Musique Tarif M VIDY+ RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Ven. 27.01 à l’issue de la représentation Entrée libre, sans réservation MAG 6 P. 36 45 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 NOTE D’INTENTION DE LA COMPAGNIE LES ENDIMANCHÉS, 2016 Carnage guerre destruction invention/Dada. Le langage le sens et les signes volent en éclats/Dada. Les bouleversements formels et les stratèges délétères / Dada. La mort du politique et le réveil des arrière-plans/Dada. Le pessimisme radical et l’insolence dévastatrice/Dada. Muscles du cœur Cabaret Voltaire et des douleurs/Dada. Révolution d’Octobre/Dada. Lénine/Dada. Spartakus/ Dada. Lipstick/Dada/traces. 100 ans de dadaïsme pour en arriver à l’abjection généralisée, à la crétinisation des masses numérisées, à la victoire de la finance planétaire associée à la mort de l’internationalisme dévastateur d’alors ; au sentiment qu’un peuple est finalement détruit. 100 ans de dadaïsme pour en arriver à la récupération manifeste et décomplexée des logiques commémoratives, au cynisme effrayant de la marchandisation de l’art et à la bonne conscience étale de l’héritage des avant-gardes. Ressaisir l’essence de Dada ne peut se faire sans une mise au point sur les prémices et les turbulences originelles du mouvement en tant qu’ils annonçaient les catastrophes à venir tout autant qu’ils tentaient de les déjouer. Sous cet angle, nous sommes amenés à scruter la toile de fond politique de l’effeuillement dadaïste, à viser les points de connexion et de divergence avec la pensée, les révolutions et les bouleversements en cours ; contradictions avec lesquelles la multiplicité du mouvement n’a cessé de batailler tout au long de sa brève et interminable histoire. Les questions qui ne cessèrent d’agiter, jusqu’à leur dissolution, les constellations dadaïstes et les échos qui les prolongent, nous reviennent aujourd’hui par les soubassements et les détours de l’Histoire, les relations plus ou moins conscientes, niées ou déterminées que le mouvement entretint ave celle-ci et non par les effets neutralisants d’une prétendue table rase… Nous envisageons la construction autres dans une dimension à la historico-politique en interrogeant les prolongements esthétiques, la l’étrangeté irréductible de Dada. de modules indépendants les uns des fois archéologique et de déchiffrement également les glissements sémantiques, récupération désastreuse de même que Les modules prendront appui sur différents corpus de textes, images, idées, films, objets et archives sonores. Le principe du montage, de même que la juxtaposition ou confrontation des modules reposent sur une vaste et utopique hypothèse d’exploration. Celle-ci consiste, outre une plongée dans l’histoire et la protohistoire de Dada, à aller à la rencontre des ramifications multiples et contradictoires du mouvement, depuis l’arrière-fond de sa puissance subversive jusqu’à ce qui nous apparaît comme étant sa propre négation - par ses représentants même -, à l’endroit des commémorations en cours et à venir… Dada est devenu une fête, un « patrimoine », un prétexte supplémentaire à des spéculations économiques et culturelles. Par où pouvons-nous encore espérer en apercevoir les survivances vivaces ou les soubresauts menacés (plus que menaçants) sans participer aussitôt à son enfouissement définitif…? Les modules seront travaillés par ces questionnements sur le long terme et ils prendront des orientations, formes ou trajectoires fort diverses, qui pourront aller jusqu’à s’affranchir totalement du territoire assigné - DADA EST PLUS QUE DADA – ; rejoindre des prolongements inactuels et ricocher jusqu’à nous de la manière la plus convulsive. 46 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 WEEK-END DADA 9 R IE V N A J LES 2 8 & 2 L’UNIL, le Théâtre La Grange de Dorigny et le Théâtre de Vidy composent ensemble un week-end Dada à Lausanne ! Passez de la Grange à Vidy pour deux spectacles, une table ronde et un Cabaret Dada... Samedi 28 janvier À LA GRANGE DE DORIGNY 14h30 TABLE RONDE « Dada, son héritage et son actualité » : interventions d’universitaires et d’artistes 17h SPECTACLE Dada ou le décrassage des idées reçues À VIDY 20h SPECTACLE Modules Dada 22h CABARET DADA Performances et concerts Dimanche 29 janvier À VIDY © INTERFOTO/Alamy 15h SPECTACLE Modules Dada Dada ou le décrassage des idées reçues Spectacle à géométrie variable à partir de textes de Hugo Ball, Emmy Hennings, Tristan Tzara, Francis Picabia, Guillaume Apollinaire… et autres élucubrations dadaïstes sonores et visuelles, un voyage exploratoire dans le mouvement Dada, manifeste de liberté artistique et d’opinion dans un monde en guerre, et qui reste encore aujourd’hui un antidote puissant contre les nationalismes. Une proposition du Théâtre La Grange de Dorigny du 26 au 29 janvier (jeu. 26.09 à 19h et ven. 27.09 à 20h30) À LA GRANGE DE DORIGNY 18h SPECTACLE Dada ou le décrassage des idées reçues Mise en scène et scénographie : Geneviève Pasquier Collaboration artistique : Nicolas Rossier Musique : Mathias Demoulin Lumière : Eloi Gianini Eléments scénographiques et accessoires : Wyna Giller Avec : Valérie Liengme Jonas Marmy Mathias Demoulin Production : Centre dramatique fribourgeois – Théâtre des Osses Création décembre 2016 Durée estimée : 1h30 Plein tarif : 20.– (ADH : 15.–) Tarif réduit : 15.– Tarif étudiant : 10.– Infos et réservations : grangededorigny.ch dès le 15 juillet PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 47 48 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 JÉRÔME BEL Gala Conception : Jérôme Bel Assistanat : Maxime Kurvers Assistanat au remontage : Maxime Kurvers Frédéric Seguette Costumes : Les danseurs De et par : 20 danseurs amateurs et professionnels Direction exécutive et conseil artistique : Rebecca Lee Production : R.B. Jérôme Bel, Paris Production version lausannoise : Théâtre de Vidy Coproduction : Dance Umbrella, Londres Theater- Works/72-13, Singapour Kunstenfestivaldesarts, Bruxelles Tanzquartier Wien Nanterre-Amandiers, centre dramatique national Festival d’Automne à Paris Theater Chur – AK Theater Liechtenstein, Schaan TanzPlan Ost, St.-Gall Fondazione La Biennale di Venezia Théâtre de la Ville, Paris HAU Hebbel am Ufer, Berlin BIT Teatergarasjen, Bergen La Commune - Centre dramatique national d’Aubervilliers Tanzhaus nrw, Düsseldorf House on Fire dans le cadre du Programme culturel de l’Union européenne Avec le soutien de : CND - Centre National de la Danse, Pantin la Ménagerie de verre, Paris dans le cadre du Studiolab jeromebel.fr Création le 8 mai 2015 à Nanterre-Amandiers, centre dramatique national MAG 6 P. 38 31.01-3.02 Salle Charles Apothéloz Mardi Mercredi Jeudi Vendredi 31.01 1.02 2.02 3.02 19h00 20h00 19h00 20h00 Dès 9 ans Durée estimée : 1h30 Théâtre/Danse Tarif M VIDY+ RENCONTRE AVEC LES ARTISTES Mer. 1.02 à l’issue de la représentation Entrée libre, sans réservation Gala EN TOURNÉE 2016 Festival de Marseille 5-6.07 TanzPlan Ost-Lokremise, Saint-Gall 23-26.08 Wiesbaden Biennale 31.08-1.09 TanzPlan Ost - TanzRaum Herisau 2-3.09 Kunsthalle Ziegelhütte, Appenzell 9.09 TanzPlan Ost - Tanzhaus Zurich 16-17.09 Dortmund Favoriten 25.09 TanzPlan Ost - Phönix Theater Steckborn 1.10 Kampnagel Hambourg 6-8.10 Dance Umbrella, Londres 11.10 et 18-19.10 BIT Teatergarasjen, Bergen 25-26.10 TanzPlan Ost - TAK Theater Liechtenstein 4-5.11 Maison de la Danse, Lyon 15-17.11 TanzPlan Ost - Tanzzeit Festival Winterthur, Theater am Gleis 18-19.11 TanzPlan Ost - Theater Chur 25-26.11 Arena Del Sole/ERT, Bologne 6-7.12 49 PREMIÈRE PARTIE DE SAISON 2016-2017 EXTRAIT D’UN ENTRETIEN AVEC JÉRÔME BEL RÉALISÉ PAR PHILIPPE NOISETTE POUR LES INROCKS, 2015 Tu as participé à des ateliers danse et voix en compagnie de Jeanne Balibar. Cela a déclenché beaucoup de choses chez toi. A partir de quand et pourquoi Gala est-il devenu une nécessité ? Gala est le résultat d’un travail mené à l’initiative de Jeanne qui m’avait proposé d’animer des ateliers avec elle à Clichy-sous-Bois et à Montfermeil, en SeineSaint-Denis. Nous avons travaillé avec des groupes d’amateurs, composés d’individus très divers. La difficulté pour moi était de trouver, malgré leurs différences, un dispositif où tous pourraient danser ensemble sans se départir de leurs singularités. Miraculeusement, j’ai avancé une formule simple permettant à chacun et à chacune de danser leurs propres danses tous ensemble. C’est à ce moment-là que j’ai envisagé de produire un spectacle à partir de ce travail expérimental. Gala s’est imposé comme titre dans le sens où le spectacle est une sorte de célébration de l’acte de danser ou, plutôt, de sa tentative. Comme dans ces galas de fin d’année, premiers spectacles de danse auxquels j’ai assisté enfant, et que je fréquente à nouveau du fait de ma paternité. Outre les danseurs amateurs, tu as choisi des professionnels. As-tu donné des directions différentes aux uns et aux autres – si direction il y a ? Les professionnels se sont ajoutés après. En effet, en parlant avec les différents responsables culturels susceptibles de produire ce spectacle dans leurs théâtres ou leurs festivals, beaucoup ont immédiatement qualifié le projet de « social », ce qui m’a fortement contrarié. Ce n’est pas parce que je travaillais avec des amateurs de Seine-Saint-Denis que notre projet n’était pas artistique. Pour moi, il relevait de l’art et pas de l’action culturelle ou sociale. Je m’intéressais à ces personnes en tant que danseurs. Tout le travail a consisté à trouver leurs propres danses, danses que certains ne trouvaient pas dignes d’être montrées, ce sur quoi je n’étais évidemment pas d’accord. Bref, afin de contrer cette assignation « sociale », j’ai décidé d’inclure dans le groupe d’amateurs quelques professionnels, danseurs et acteurs. De plus, comme l’enjeu de la pièce était de faire danser ensemble les individus les plus divers possible, je trouvais pertinent qu’il y ait aussi dans ce groupe des danseurs professionnels. Le projet devenait dès lors plus ambitieux puisque la diversité devenait encore plus grande. En fait, je me suis aperçu qu’aucune exclusion ne pouvait être tolérée dans ce projet. Je devais maintenir l’égalité entre toutes et tous. Je dirige les danseurs le moins possible ; les professionnels, hélas, ont un peu plus de mal, aliénés qu’ils sont par leurs apprentissages et leurs habitudes. J’essaie cependant de les faire s’émanciper de leurs automatismes. Tu dis que Gala est ta pièce la plus dansée. Dans quel sens ? C’est la première fois dans mon travail que les danseurs dansent du début à la fin du spectacle. Cela me ravit ! T’es-tu interdit quelque chose dans cette création – par rapport à la virtuosité par exemple ? Je ne m’interdis jamais rien dans le travail. Plutôt mourir ! Comme je l’ai déjà dit, j’ai adjoint la présence de danseurs dont certains sont très virtuoses. La virtuosité est acceptée, et je dirais même qu’elle prend une dimension nouvelle. La virtuosité devient aussi signifiante dans ce spectacle que la maladresse. Tu dis que la danse sert à dire quelque chose du monde. Quoi ? Et à qui ? Il me semble que la danse d’un individu révèle beaucoup de lui-même, surtout si ce danseur ou cette danseuse n’ont pas été formatés par l’enseignement de la danse qui est une vraie calamité. La danse, activité peu répandue à notre époque, permet une expérience où la fragilité est encore possible, où on perd le contrôle, où on ne maîtrise pas tout. C’est grâce à cet état incertain que des choses indicibles, refoulées, inavouées, informulables peuvent apparaître et finalement être exprimées et, dans le cas d’un spectacle, partagées. De plus, la danse révèle la culture de l’individu dansant, sa culture originelle ou construite, ses choix culturels, ce à quoi elle, ou il, s’identifie, ce à quoi dans le régime des représentations dansées elle, ou il, se reconnaît, ou mieux se découvre, ou encore mieux s’invente. Je crois que ce qui fait sens pour moi dans ce travail, c’est l’imaginaire de la danse plus que son exécution, que chaque danse est un rapport au monde, à l’histoire, à la culture, à soi-même et aux autres. A travers les modèles dansés inscrits dans la culture, chaque idiosyncrasie est l’apparition inespérée d’une nouvelle danse, d’un rapport à soi et au monde inouï. Gala © Véronique Ellena