FICHE DE LECTURE
L’AUDACE DES ENTREPRENEURS SOCIAUX
concilier efficacité économique et innovation sociale
Virginie SEGHERS et Sylvain ALLEMAND
Collection « Acteurs de la société »
Editions Autrement - janvier 2007
Christèle LAFAYE
09/10/08
Christèle LAFAYE - fiche de lecture L’audace des entrepreneurs sociaux, Seghers et Allemand – 09/10/08 1/9
1 - BIOGRAPHIE DES AUTEURS
Virginie Seghers est consultante, spécialiste du mécénat et de la responsabilité
sociale des entreprises et également experte auprès d’agences de notation extra-financières
sur les questions d’évaluation sociétale. Diplômée d’HEC, chanteuse, elle a dirigé l'Admical
(Association pour le développement du mécénat industriel) de 1995 à 2002 et animé le
CEREC, réseau d’associations de promotion du mécénat culturel européen. En charge du
MBA responsabilité sociale des entreprises à l’ESCP et maître de conférences à l’IEP de
Paris, elle intervient aussi à la chaire d’entrepreneuriat social de l’ESSEC et a fait partie du
comité de lancement de la majeure management alter d’HEC. Elle a participé au lancement
en France d’Ashoka.
Sylvain Allemand est journaliste indépendant, titulaire d’une maîtrise d’histoire et
diplômé de l’Institut d’Etudes Politiques de Paris il est chargé de conférences. Il a reçu le
prix 2008 du livre entrepreneuriat France-Québec pour l’ensemble de son œuvre.
_____________________________
Bibliographie de Virginie Seghers :
- Ce qui motive les entreprises mécènes : Philanthropie, investissement, responsabili
sociale ?, Autrement, 2007
- Guide de l'entrepreneur social, avec l’Agence de Valorisation des Initiatives Socio-
Economiques; la Caisse des Dépôts et Consignations, Les guides de l'AVISE, 2004
Bibliographie de Sylvain Allemand :
- Le Commerce équitable en question, Carnets Info, 2008
- La microfinance n'est plus une utopie !, Autrement, 2007
- Le développement durable, Autrement, 2006
- Les nouveaux utopistes de l'économie : Produire, consommer, fabriquer... différemment,
Autrement, 2005
- S'engager autrement : Lecture d'un colloque de Cerisy, Aube, 2003
- La Mondialisation, avec jean-Claude Ruano-Borbalan, le Cavalier bleu, 2003
2 – PRESENTATION DE L’OUVRAGE
C’est l’un des premiers livres en France explicitement dédié à cerner les contours du concept
d’entrepreneur social, importé des Etats-Unis depuis quelques années. Son objet est de
nous faire percevoir l’identité commune aux entrepreneurs sociaux, en s’en faisant une idée
au travers de témoignages et de portraits d’entrepreneurs sociaux et de grands spécialistes.
Il a reçu le soutien de l’AVISE, de la DIIESES, du Crédit Coopératif, de la Macif et de la Maif.
3 – IDEES CLES
Les entrepreneurs sociaux représentent une force de changement social, ils concilient
l’initiative économique et l’innovation sociale. Ils font preuve de ténacité pour mener à bien
leur « entreprise sociale », pour mettre du lien social les secteurs public et marchand
n’interviennent pas. Ils apparaissent souvent dans un premiers temps comme des « doux
rêveurs, certes, mais avec les pieds sur terre »
1
. Malgré l’importance du secteur de
1
Jean-Michel RICARD, fondateur de Siel bleu, page 62.
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l’économie sociale, ces entrepreneurs manquent encore de notoriété, même si de
nombreuses institutions, fondations, réseaux de chercheurs ou grandes écoles les
soutiennent ou y consacrent de plus en plus d’études ou de formations. Au-delà de la variété
des profils, formations ou structures des entrepreneurs sociaux, ils partagent un état d’esprit
commun et vont au devant des besoins sociaux tout en ayant le souci d’un management
efficace. Ils constituent une passerelle entre le secteur privé et le secteur non lucratif.
4 – RESUME DE L’OUVRAGE
INTRODUCTION
L’expression « entrepreneur social » concilie deux opposés : l’activité économique et une
finalité sociale. Un grand nombre de personnes de par le monde entreprennent autrement et
mettent leur volonté d’innover au service de besoins sociaux non pris en compte par le
marché et l’Etat. Ils s’inscrivent soit dans l’économie sociale (associations, fondations,
coopératives, mutuelles) ou solidaire (insertion), soit dans des sociétés de capitaux. Ce
concept, qui n’est pas encore théorisé, recouvre des réalités variées dont les auteurs se
proposent de dessiner les contours au travers de témoignages différents qui l’illustrent.
Le terme « entrepreneurship » apparaît à la fin des années 80 aux Etats-Unis et est
lancé par la Harvard Business School qui crée en 93 la Social Enterprise Initiative. Il connaît
un essor rapide, soutenu par de grandes fondations telles qu’Ashoka ou la Fondation
Schwab. Apparu dans les cercles patronaux et dans les grandes écoles de gestion outre-
atlantique, il est lié aux non-profit organisations. L’entrepreneur social y est souvent vu
comme un héros capable de changements sociaux importants, sa mission est de changer le
monde.
En Europe, ce concept a une filiation avec l’économie sociale, composée
d’organisations non lucratives qui se différencient des sociétés de capitaux par leur non-
distribution de dividendes aux actionnaires. L’économie sociale correspond à un projet
politique dans le sens elle place l’homme au cœur de l’économie. Elle a un poids et un
rôle économique essentiel et représente en France 11 % du PIB et 12 % de l’emploi.
Pourtant elle traverse une crise identitaire, tiraillée entre valeurs et logique de marché. La
notion d’entrepreneur social ne pourrait-elle contribuer à son renouvellement ?
Une autre influence est constituée par l’économie solidaire, notion apparue dans les
années 90. Parfois intitulé « tiers secteur », ce concept regroupe un secteur dans les
années 70-80 : les entreprises d’insertion par l’activité économique, le commerce équitable...
En réaction face aux dérives du marché et à l’incapacité des pouvoirs publics de trouver des
réponses à l’exclusion, elle implique plus d’engagement du consommateur ou du client. Alors
que l’économie solidaire est marquée par une démarche de réparation, l’économie sociale
s’inscrit plus dans un projet politique, dans le cadre de l’économie marchande. En France, 2
millions de salariés travaillent dans l’économie sociale et solidaire. Elle est reconnue avec un
secrétariat d’Etat de 2000 à 2002, aujourd’hui à la DIIESES (délégation interministérielle à
l’innovation, à l’expérimentation sociales et à l’économie sociale).
Encore inconnue il y a une dizaine d’années, la notion d’entrepreneur social fait aujourd’hui
une percée impressionnante en Europe. En 1991, la législation italienne reconnaît les
coopératives sociales et en 95, la Belgique crée la société à finalité sociale. Ce concept
s’appuie sur des organisations mutualistes ou coopératives. En 96 est crée le réseau de
chercheurs EMES (Emergence des Entreprises Sociales en Europe), qui élabore une
approche commune de l’entreprise sociale. La notion va se concrétiser en 2002 avec la
création de la social enterprise coalition en Grande Bretagne et le lancement par l’ESSEC de
la première chaire d’entrepreneuriat social en France. La Caisse des Dépôts, la Macif et la
Fondation de France contribuent à structurer la notion et soutiennent les porteurs de projets.
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Plus qu’une seule définition fixe et immuable, l’entrepreneur social est un état
d’esprit : concilier l’efficacité économique et l’innovation sociale. A la lecture des
témoignages, le lecteur se forgera sa définition de l’entrepreneur social. Il y a une diversité
de possibles, en témoigne le florilège de définitions donné (ESSEC, OCDE, Ashoka,
Fondation Schwab). L’entrepreneuriat social apporte une réponse innovante à un problème
social majeur.
L’entrepreneur est vu comme un porteur de changement, de progrès économique et
social. C’est avant tout un entrepreneur : il apporte une idée nouvelle, invente des solutions
nouvelles, il combine différentes ressources humaines et implique de nombreux
partenaires et parties prenantes; cela impacte sur son mode d’organisation. Il diversifie ses
sources de financement, renouvelle les partenariats : mécénat, subventions, tandis que les
associations se développent dans des logiques de concurrence.
Les grandes entreprises de l’économie marchande privée s’engagent depuis peu dans des
démarches de responsabilité sociale de l’entreprise (RSE), prenant ainsi en compte l’impact
de leurs activités sur l’environnement et la société. Cette évolution est souvent imposée par
la législation (loi nouvelles régulations économiques de 2001 en France). Entre les
entreprises capitalistes de plus en plus responsables et les entreprises de l’économie sociale
de plus en plus compétitives, il y a une troisième voie et l’entrepreneur social jette des
passerelles entre les deux en conciliant initiative privée et finalité sociale.
Les entrepreneurs sociaux ont un rôle important pour proposer une alternative dans
l’économie de marché. Le contexte est propice à la création de ces entreprises, d’autant
plus qu’un grand nombre de personnes veulent donner plus de sens à leur vie. Même si
leurs profils sont bien différents, ils ont tous en commun d’avoir été marqués par les
exclusions générées par la société et la répartition inéquitable des richesses.
L’entrepreneur social : une force de changement
L’entrepreneur social apporte une solution nouvelle à des problèmes de société qui peut
influer sur les politiques publiques. Il est porteur d’innovations sociales majeures comme le
micro-crédit, le commerce équitable ou le service volontaire civil.
Les entrepreneurs sociaux incarnent modestement une certaine forme de révolution,
pragmatique, propre au contexte local et en mesure d’être dupliquée dans d’autres pays. Ce
sont des personnes de terrain, tel Muhammad Yunus, promoteur du micro-crédit au
Bangladesh, qui a œuvré plus de 30 ans avant d’être prix Nobel de la paix. Ils partent d’un
problème local et y apportent une réponse innovante, qu’ils adaptent et essaiment, même à
l’étranger. Au-delà de leur grande diversité, ils ont un sentiment d’appartenance partagée.
SEQUENCE 1 - PORTRAITS D’ENTREPRENEURS SOCIAUX : UNE PRATIQUE
La parole est donnée aux personnes qui incarnent l’entrepreneuriat social. Le choix du statut
de la structure n’est pas fondamental, ce qui importe c’est leur motivation, leurs parcours et
ses difficultés et l’innovation sociale à laquelle ils contribuent. Plusieurs points communs
ressortent de ces témoignages, voilà ce que partagent ces entrepreneurs sociaux, aux profils
bien différents :
Une formation, un parcours
Tous ces entrepreneurs ont des formations et des parcours variés ; on retrouve souvent des
travailleurs sociaux, des personnes qui on travaillé dans la fonction publique et d’autres
proviennent d'écoles de commerce. Ils ont souvent une double formation, comme Jean-Guy
Henckel, Directeur du réseau des Jardins de Cocagne, travailleur social et sociologue ou un
parcours atypique tel Jean-Marc Borello, Délégué Général du groupe SOS, qui après avoir
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été éducateur spécialisé avait été conseiller de ministre des affaires sociales. Parfois ils
combinent plusieurs métiers, comme Jean-Pierre Clair. Educateur spécialisé de formation, il
a tenu un bar avant d’animer une bibliothèque pour devenir enfin directeur d’AIL 46, une
association qui mets des véhicules à disposition de personnes en recherche d‘emploi.
Un projet un peu fou
Personne ne parie sur les chances du projet de l’entrepreneur social au départ, « vous êtes
fous : vous n’y arriverez jamais ! ». Chacun de ces entrepreneurs sociaux a reçu des
réactions négatives lorsqu’il parlait de son idée au début. Jean-Michel Quéquigner, directeur
de Bretagne Alteliers explique que « Personne ne pariait sur les chances de survie de cette
entreprise 30 ans plus tôt ». Son entreprise adaptée, crée en 1975, emploie en 2007, 710
salariés dont plus de 500 travailleurs handicapés. Jean-Guy Henckel raconte que, lorsqu’il
s’adresse aux collectivités territoriales pour demander des financements et lancer un premier
jardin d’insertion, ces interlocuteurs lui font des yeux effarés.
Une rencontre déterminante
Souvent l’idée est présente depuis quelques temps et c’est une rencontre décisive qui va
déclencher la mise en route de l’entreprise sociale. C’est par exemple la rencontre entre
Rachel Liu et Antoinnette Giorgi, fondatrices d’Idéo qui propose des marques de vêtements
équitables et bio. La première cherchait une styliste pour la suivre dans cette aventure,
tandis que la deuxième voulait s’associer avec un profil commercial. Elles étaient faites pour
se rencontrer. C’est encore une personne de la FNARS qui révèle au fondateur des Jardins
de Cocagne sa fibre d’entrepreneur social.
Un entrepreneur qui fait preuve de patience et de ténacité
Ce sont souvent des hommes ou femmes de conviction. Pour que le projet prenne vie, que
l’entreprise sociale survive à ses difficultés, pour obtenir des financements, pour convaincre
de l’intérêt du projet, l’entrepreneur social doit être tenace car il s’agit d’un parcours du
combattant. Pour Jean-Marc Borello, il faut être obstiné. Pendant un an et demi, Caroline
Simonds, Présidente et fondatrice du Rire Médecin, a essuyé les refus des institutions et des
services hospitaliers, pour intervenir auprès des enfants en milieu hospitalier.
Un gestionnaire, un manager d’hommes
Ces entrepreneurs, qui prennent des risques, ont le souci du management efficace pour la
pérennité de l’entreprise sociale. Ils combinent des ressources humaines et financières
diverses. Ils ont des difficultés à trouver des financements car souvent ils doivent d’abord
faire leurs preuves pour convaincre qu’il est possible de répondre à un besoin non couvert.
Selon Anne-Claire Paque, cofondatrice d’Unis Cité, ils doivent nécessairement mettre des
outils entrepreneuriaux au service d’une cause sociale. Ils recherchent efficacité et
professionnalisme et ne perdent jamais de vue le sens, l’approche sociale.
Des soutiens
Des soutiens financiers, institutionnels, des partenariats, des mécènes sont quasiment
toujours présents en appui à ces porteurs de projets. C’est le cas pour le Rire Médecin qui
reçoit le soutien du Ministère de la culture, de la fondation Florence Gould et de la Fondation
Crédit Lyonnais qui lui a versé 600 000 francs par an pendant 3 ans. De même, une bourse
de la fondation Macif a été versée pour l’engagement d’une personne à temps plein dans le
projet d’Unis Cité.
Le terrain, l’expérimentation et l’innovation sociales
Les entrepreneurs sont novateurs, ainsi l’administration rétorque aux fondateurs de Ciel Bleu
qu’ils arrivent 10 ans trop tôt, alors qu’ils proposent des activités sportives aux personnes
âgées. Proximité, bonne connaissance des besoins sociaux, du contexte local les
caractérisent. Ils peuvent de cette façon répondre à des besoins qu’ils révèlent et qui ne sont
pas pris en compte par le marché ou le secteur public. L’homme reste au cœur de leur projet
.
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