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Protection du salarié sous CDD à l’issue de son mandat
de conseiller prud’hommes
le 23 avril 2012
SOCIAL | Contrat de travail | IRP et syndicat professionnel | Rupture du contrat de travail
La recodification étant intervenue à droit constant, l’article L. 2421-8 du code du travail, selon
lequel l’arrivée du terme du contrat à durée déterminée n’entraîne sa rupture qu’après
constatation, par l’inspecteur du travail saisi par l’employeur, que le salarié ne fait pas l’objet d’une
mesure discriminatoire, bénéficie aux conseillers prud’hommes pendant la période de six mois
suivant la cessation de leur mandat.
Soc. 13 mars 2012, FS-P+B, n° 10-21.785
La recodification du code du travail a suscité de nombreuses critiques au sein de la doctrine (V. not.
A. Fabre et M. Grévy, Réflexions sur la recodification du droit du travail, RDT 2006. 362 ; A.
Jeammaud et A. Lyon-Caen, Le « nouveau code du travail », une réussite ?, RDT 2007. 356 ; E.
Dockès, La décodification du code du travail, Dr. soc. 2007. 931 ; pour une défense, C. Radé,
Recodifier le code du travail, Dr. soc. 2006. 483 ; C. Radé, Le code du travail nouveau est arrivé, D.
2008. 1214 ). Les inquiétudes portaient notamment sur les incidences que la réécriture de
certaines dispositions et leur déplacement au sein du code pouvaient avoir sur le sens et la
pérennité du droit positif antérieur à la recodification. Elles n’étaient malheureusement pas
totalement infondées.
En effet, l’ancien article L. 514-2, alinéa 3, du code du travail prévoyait de soumettre les conseillers
prud’hommes salariés titulaires d’un contrat à durée déterminée (CDD)aux mêmes garanties et
protections que celles accordées aux délégués syndicaux titulaires de tels contrats. L’article L.
412-18 du même code renvoyait, quant à lui, aux dispositions des articles L. 425-2 et L. 436-2 du
code du travail, relatives à la protection des délégués du personnel et des membres élus du comité
d’entreprise ayant conclu des CDD, pour préciser les garanties et protections dont bénéficiaient les
délégués syndicaux susvisés. Ces dernières dispositions renvoyaient, à leur tour, aux anciens
articles L. 425-1 et L. 436-1 du même code qui imposaient notamment à l’employeur de recueillir
l’autorisation de l’inspecteur du travail pour le licenciement d’anciens délégués du personnel ou
membres du comité d’entreprise pendant les six premiers mois suivant l’expiration de leur mandat.
Il pouvait se déduire de l’ensemble de ces textes que le conseiller prud’hommes dont le mandat
prend fin avant la survenance du terme de son contrat de travail devait bénéficier de la protection
ci-dessus décrite pendant les six mois suivant la fin du mandat. Ainsi, si leCDD arrivait à son terme
durant cette période, la constatation par l’inspecteur du travail que le salarié ne fait pas l’objet
d’une mesure discriminatoire devait être requise (C. trav. anc., art. L. 425-2, al. 2, et L. 436-2, al.
2). Cependant, la recodification a supprimé une partie de ces renvois. À lire l’article L. 2421-8 du
code du travail, seul est concerné par la saisine de l’inspecteur du travail le salarié dont le contrat à
durée déterminée arrive à son terme pendant l’exercice du mandat de conseiller prud’hommes,
écartant ainsi l’hypothèse où ce mandat prend fin avant la survenance du terme.
Par le présent arrêt, la Cour décide de pérenniser l’interprétation auxquelles auraient pu donner
lieu les anciennes dispositions du code du travail. Elle rappelle, d’abord, que la recodification du
code du travail est, sauf dispositions expresses contraires, intervenue à droit constant. Cette
assertion n’est pas nouvelle (Soc. 27 janv. 2010, Bull. civ. V, n° 22 ; D. 2010. AJ 384, obs. L. Perrin
; JCP S 2010, n° 1234, obs. Martinon ; Soc., QPC, 13 févr. 2012, n° 11-21.946, D. 2012. 616 ) et a
permis de justifier le maintien de sa jurisprudence (Soc. 29 avr. 2009, Bull. civ. V, n° 115 ; D. 2009.
AJ 1421, obs. B. Ines ; RDT 2009. 529, note M. Grévy ; JCP S 2009, n° 1392, note J.-Y. Kerbourc’h ;
Dr. soc. 2009. 776, note C. Radé) ou de dégager une solution nouvelle mais latente, compte tenu
des textes et de la jurisprudence en vigueur avant la recodification (Soc. 8 déc. 2009, Bull. civ. V, n°
277 ; R., p. 358 ; Dalloz actualité, 13 janv. 2010, obs. C. Dechristé ; D. 2010. AJ 97 ; RJS 2010.
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111, rapp. Ludet ; JCP S 2010, n° 1079, note Lahalle ; 27 janv. 2010, Bull. civ. V, n° 22 ; D. 2010. AJ
384, obs. L. Perrin ; JCP S 2010, n° 1234, obs. Martinon). Le présent arrêt présente la particularité
de dégager une solution qui pouvait s’extraire de la combinaison de dispositions de l’ancien code
du travail mais dont les traces n’étaient pas perceptibles en jurisprudence (comp. Soc., QPC, 13
févr. 2012, préc.).
La Cour décide, ensuite, que l’article L. 2421-8 du code du travail, selon lequel l’arrivée du terme
duCDD n’entraîne sa rupture qu’après constatation, par l’inspecteur du travail saisi par
l’employeur, que le salarié ne fait pas l’objet d’une mesure discriminatoire, bénéficie aux conseillers
prud’hommes pendant la période de six mois suivant la cessation de leur mandat. La solution paraît
logique. D’une part, la combinaison des anciens articles du code du travail semble y parvenir.
D’autre part, le conseiller prud’hommes ayant cessé ses fonctions depuis moins de six mois
bénéficie d’une protection contre son licenciement (C. trav., art. L. 2411-22) et contre la cessation
de sonCDD lorsque celui-ci est rompu avant son terme en raison d’une faute grave ou lorsqu’il
n’est pas renouvelé alors qu’il comporte une clause de renouvellement (C. trav., art. L. 2412-13).
Or ces deux dernières hypothèses sont au fond assez proche de celle dans laquelle se trouve le
salarié dont le mandat de conseiller prud’hommes cesse avant l’arrivée normale du terme de son
contrat. Toutefois, un doute subsiste sur le raisonnement de la Cour. À bien examiner les
dispositions des anciens articles L. 425-2 et L. 436-2 du code du travail, celles-ci semblaient
clairement faire la distinction entre, d’un côté, la rupture avant terme et le non-renouvellement et,
d’un autre, la simple arrivée du terme. Dans le premier cas, il était fait allusion aux anciens
titulaires de mandat et un renvoi général était opéré à la protection accordée en cas de
licenciement dont celle des anciens titulaires de mandats. Dans le second cas, en revanche, le seul
renvoi aux conditions de saisine de l’inspecteur du travail ne permettait pas d’inclure la protection
des anciens titulaires de mandat. La recodification n’aurait fait que reproduire ce qui était
sous-jacent. Peut-être faudrait-il en déduire que la Cour fait davantage œuvre créatrice qu’elle le
laisse suggérer en se réfugiant derrière le principe de recodification à droit constant. En réalité, la
Cour paraît dégager une solution totalement nouvelle.
par B. Ines
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