un soir à Babel

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un soir à Babel
Que seraient nos vies sans livres et sans écrits ?
une uchronie théâtrale (création 2011)
de/avec Sophie Boissière, Julien Bucci et Marie Némo
« Imaginez le tableau...
L'homme du dix-
neuvième siècle avec ses chevaux, ses chiens, ses
charrettes : un film au ralenti. Puis, au vingtième siècle,
on passe en
accéléré. Livres raccourcis. Condensés,
Digests. Abrégés. Tout est réduit au gag, à la chute...
Les classiques ramenés à des émissions de radio d'un
quart d'heure, puis
coupés de nouveau pour tenir en
un compte-rendu de deux minutes, avant de finir en un
résumé
de dictionnaire de dix à douze lignes.
J'exagère, bien sûr. Les dictionnaires servaient de
référence. Mais pour bien des gens, Hamlet n'était
qu'un
digest d'une page dans un livre proclamant :
« Enfin tous les classiques à votre portée ; ne soyez plus
en reste avec vos voisins. » De la maternelle à
l'université et retour à la maternelle. Vous avez là le
parcours intellectuel des cinq derniers siècles ou à peu
Accélérez encore le film, Montag. Clic ? Ça y
est ? Allez, on ouvre l'œil! Vite! Ça défile! Ici, là, au
trot, au galop, en haut, en bas, dedans, dehors!
près.
Pourquoi? Comment? Qui? Quoi? Où? Hein? Hé!
Bang!
Paf!
Vlan! Bing! Bong! Boum!
Condensés
de condensés. Condensés de condensés de condensés.
La politique ? Une colonne, deux phrases, un gros titre !
Et tout se volatilise ! La tête finit par vous tourner à un
tel rythme sous le
matraquage
des éditeurs,
diffuseurs, présentateurs, que la force centrifuge fait
s'envoler toute pensée inutile, donc toute perte de temps ! »
Extrait de Fahrenheit 451
de Ray Bradbury
Argument/intentions
Voici Babel, territoire imaginaire dans un temps indéfini
où les livres et le papier ont été interdits. Tout ce qui était
nécessaire à la calligraphie (stylos, pinceaux...) a
également été éradiqué. Une femme avide de pouvoir, la
Padra, a compris tout le profit qu'elle pourrait tirer de la
crise financière frappant Babel en rassemblant son peuple
autour d'un discours ultra-identitaire. Il lui a suffi de se
présenter comme une mère-nation et d'endormir ses
électeurs avec un outil de propagande surpuissant : la
télévision...
Dans ce régime où la liberté individuelle est considérée
comme une menace pour l'intérêt commun, la télévision
est non seulement omniprésente mais obligatoire. Elle
comporte même un système de mouchard qui permet de
surveiller le langage des télé-citoyens. Car la Padra ne s'est
pas contentée de faire brûler les livres, elle a également
imposé une nouvelle langue censée faire gagner du
temps : la shortlangue. Comme le dit la Padra : « Parler
court, c'est parler juste, c'est parler mieux ! ». Tous les
mots de plus de deux syllabes ont donc été prohibés, ils
ont été remplacés par de plus courts ou ont tout
simplement disparu.
Dans ce contexte de privation et de répression, la famille
Maupassant, dont les parents étaient de grands amateurs
de littérature, se débat pour vivre au mieux tout en
essayant de maintenir ses aspirations, ses désirs et ses
convictions. Mais la famille est tiraillée par des
sentiments contraires : colère du père contre les règles
absurdes de la shortlangue, moments de folie libératrice
où les parents se lâchent en s'exprimant en langue
ancienne, peur de la mère d'être dénoncés par le numéro
vert, trouble de la jeune ado qui découvre les vertiges de
l'amour, nostalgie résistante du père qui anime une
émission pirate où il lit des ouvrages interdits...
Le spectacle est rythmé par la diffusion d'une bande son
évoquant un programme télé avec son flash info, son
documentaire animalier, son feuilleton à l'eau de rose...
Sur le plateau, les comédiens composent avec ce
quatrième partenaire dont, comme le public, ils
n'entendent que la voix.
La pièce est conçue comme une succession de dialogues
faisant progresser le récit et de monologues au cours
desquels chaque personnage révèle au public des facettes
cachées de sa personnalité.
Ce soir-là, celui d'Un soir à Babel est peut-être le soir où
tout va basculer... Un événement dramatique, retransmis
en direct à la télé, va précipiter la famille Maupassant
dans une course folle sans retour. Leur vie ne sera plus
jamais comme avant...
La fin du spectacle est volontairement ouverte à plusieurs
interprétations afin de multiplier les issues et les points de
vue.
Ce spectacle a été conçu pour provoquer des questions
fortes, essentielles... Dans un contexte de dictature,
pourriez-vous envisager une collaboration avec le pouvoir
en place si cela pouvait améliorer un quotidien difficile ?
Seriez-vous prêt à vous engager dans une forme de
résistance ? Que seriez-vous prêt à faire ou à ne pas faire ?
Le débat est ouvert...
Julien Bucci
Extrait de la pièce
Barthélémy (le père) entre soudainement dans le salon. Il surprend Elisabeth (la mère) et Lili (la fille)
en train de regarder un feuilleton à l'eau de rose. Pour la première fois de sa vie, alors que c'est
interdit, Barthélémy décide de raconter à Lili une grande histoire : son histoire...
« BARTHÉLÉMY : En ce temps-là, les hommes vivaient heureux et ne manquaient de rien.
Chaque automne, les pommiers se couvraient de fruits juteux et charnus, chaque hiver, les
greniers étaient remplis de blé, chaque printemps, les prairies se couvraient de fleurs et
l'été, c'était les congés payés. Tout aurait pu aller pour le mieux dans le meilleur des
mondes si l'appât du gain, tel un ver dans le fruit, n'était venu troubler cette quiétude. Il
n'y avait jamais assez de blé, jamais assez de pommes, jamais assez de fleurs dans les
prairies, les hommes se mirent à en vouloir toujours plus. Ils achetèrent de nouvelles
machines pour labourer de plus grands terrains, des engrais chimiques pour obtenir de
plus gros fruits, plus ils en avaient, plus ils en voulaient. Alors, ils s'endettèrent.
LILI : S'endettèrent ?
ELISABETH : Ils claquaient du bling qu'ils n'avaient pas.
BARTHÉLÉMY : Ils étaient fauchés comme les blés ! Pas un radis ! Plus de bling du tout ! Un
seul être avait compris ce qui allait se passer et tout le profit qu'il pourrait en tirer... Cet
être malveillant, cupide...
ELISABETH : Oui, au regard vitreux, au nez crochu, aux ongles acérés... Une sorcière...
BARTHÉLÉMY : Pendant la famine, cette sorcière s'était enrichie. Elle avait stocké dans ses
greniers des monceaux de pommes et de blé...
LILI : Elle avait tout pécho ?
BARTHÉLÉMY : Tout pécho ! Et comme les hommes manquaient de tout, elle n'eut qu'à
tendre la main pour qu'ils viennent manger dedans. Mais tout ce qu'elle leur donnait était
empoisonné. Ainsi, les hommes mangèrent à nouveau à leur faim mais en échange de tout
ce qu'elle leur donnait, la sorcière les obligeait à taffer, et le peu de bling que les hommes
gagnaient, ils le claquaient pour acheter de quoi manger. Et bientôt, le poison fit son effet.
Les hommes se mirent à s'exprimer dans une langue étrange, faite de mots réduits, de plus
en plus courts. Ils avaient perdu l'usage de leur propre langue.
LILI : La shortlangue !
ELISABETH : Et les mots maudits furent bannis...
LILI : La sorcière voulait pas que les gens pensent par eux-mêmes !
BARTHÉLÉMY : T'as tout compris ma Lili !
ELISABETH : C'est bien les histoires, hein, ma puce ? »
Extrait d'Un soir à Babel
de S.Boissière, J.Bucci et M.Némo
Les personnages
1/3 - le père
Barthélémy
Barthélémy est un ancien professeur de lettres. Il est désormais traducteur en shortlangue
et s'occupe de traduire des ouvrages en langues anciennes que l'état souhaite compacter et
numériser. Nostalgique, il tente de résister à l'envahissement de la short-angue au
quotidien. Il ne comprend pas l'embrigadement de sa fille et regrette de ne ne pas lui avoir
raconté d'histoire quand elle était petite.
SON SECRET
Il sauve des livres en les cachant chez lui / il anime une émission de radio pirate
EXTRAIT DU TEXTE
«Tu vois à quoi ça mène de collaborer avec la Scup ! J'ai honte de
mon pays ! Dans quel monde on vit ?! Jamais je n'aurais pensé
qu'on en arriverait à de telles extrémités ! Qu'on n'ait même plus
le droit de s'exprimer, de penser, de rêver comme on veut ! Qu'on
n'ait même plus le droit de lire ou d'écrire à sa guise ! Jamais je
n'ai voulu de ce monde-là, jamais !»
...interprété par Julien Bucci
Depuis son bac A3 Théâtre et son D.E.U.S.T. Théâtre à la faculté
d'Aix-en-Provence, Julien Bucci conçoit et interprète de nombreux
spectacles associant chant, lecture et musique dans un rapport de
proximité avec le public. ll se forme à la lecture à voix haute avec
Daniel Mesguich, au conte avec Gigi Bigot et Didier Kowarsky...
En 1995, il crée la cie Kartoffeln à Marseille. Il rejoint le Nord en
2007 et y crée la Cie Home Théâtre.
SA BIO EN SHORTLANGUE
Julien Bucci est acteur et boss de la troupe Home Show. Il a
drivé pendant 15 ans une troupe de Mars qui créait des shows
joués all over (il aime jouer dans des lieux pas courants). Il kiffe
les romans et les contes ! Ca fait 4 ans qu'il drive la troupe Home
Show à Lille. Il monte à donf des shows sur les mots avec des
acteurs et des zicos. Il kiffe les mots !
Les personnages
2/3 - la mère
Elisabeth
Elisabeth alias Lisbeth est une ancienne bibliothécaire, elle est devenue employée et
s'occupe aujourd'hui de faire de la saisie informatique. Elle est un peu dépassée par les
événements, essaye de comprendre la nouvelle langue mais fait prendre de gros risques à la
famille par ses erreurs de langage et sa difficulté à s'adapter à ce nouveau monde. Elle est
considérée par l'état comme un personnage à décontaminer.
SON SECRET
Elle a caché la dernière lettre que lui a adressé son mari avant que le papier ne soit interdit.
EXTRAIT DU TEXTE
« Avant, les livres, les mots, c'était tout pour nous. Tu sais, Pépé
Maboul, comme tu dis, quand j'étais petite, il me lisait une histoire
tous les soirs. Et j'adorais ça. Quand la Padra est arrivée, quand les
livres ont été interdits, j'ai vu mon père partir en Centre de Détox
parce qu'il continuait à raconter des histoires. Ton père aurait rêvé
de t'en raconter mais on a décidé de ne pas le faire, pour te
préserver. »
...interprétée par Sophie Boissière
Comédienne, metteur en scène, elle collabore avec différentes
compagnies de théâtre, de mime et de danse de la région. Elle
crée en 2002 la Compagnie l’Instant Suspendu. En parallèle
de son activité d’interprète à la scène, à l’écran ou sur les
ondes, elle se forme au mime, à la commedia dell’arte,
l’escrime ancienne, l’improvisation, la danse contemporaine,
et le chant. Dans ses temps libres elle aime se consacrer au
tango argentin, au dessin, à la musique et à la cuisine.
SA BIO EN SHORTLANGUE
Après des jobs dans les RH, Sophie bosse pour la scène. Elle joue,
écrit et met en scène des troupes de Paris et du coin. En 2002,
elle crée sa troupe. Elle taffe aussi bien à la télé qu'au ciné, fait
du voice over et de la pub radio. Elle s'est formée au mime, au
jeu masqué, à la baston à l’épée, l’impro, la danse et le chant.
Les personnages
3/3 - la fille
Lili
Lili a grandi avec la shortlangue, elle est complètement endoctrinée depuis la naissance.
Elle ne connaît que très peu de mots de l'ancienne langue et n'a pas appris l'écriture
manuscrite. Elle n'a de cesse de reprendre ses parents dans leurs erreurs de langage.
SON SECRET
Elle fréquente un jeune homme qui lui a fait découvrir la peinture...
EXTRAIT DU TEXTE
« J'ai pas les mots. Y a des tas de trucs que j'ai envie de dire mais
j'ai pas les mots. Je sais qu'avant, il y avait des mots pour tout, mais
là, y a plus. Ca me rend sad. Je kiffe trop Kad, mais je peux rien lui
dire d'autre que « j'te kiffe ». Mais c'est pas les mots. C'est plus que
ça en vrai. Le mot « kiffe » y dit pas tout ce que je sens. P'pa et
M'man, y z-en ont plein des mots, mais des mots maudits qui sont
pas permis. Moi, à la school, on me les a pas appris.»
...interprétée par Marie Némo
En 1996, après un bac et des études de théâtre, elle co-fonde à
Marseille la Cie Kartoffeln avec Julien Bucci. Elle collabore
régulièrement avec celui-ci dans le cadre de projets en tant que
lectrice et comédienne. Après de joyeuses pérégrinations et autant
de petits boulots, elle créé Maman fait son coming out, comédie
autobiographique en solo (plus de 200 représentations à Paris, en
Suisse, au Festival d'Avignon 2005, un peu partout en France). En
2006, elle intègre la troupe Comédiens et Cie en tant que
comédienne et parolière. Elle écrit de multiples textes et chansons.
SA BIO EN SHORTLANGUE
Marie Némo est acteur et auteur (elle aime gratter des stories et
des songs). Elle joue et écrit des pièces pour la troupe Home
Show. Elle taffe aussi dans une troupe de Paris qui fait des shows
en jeu masqué. Son one woman show « Maman fait son coming
out » a fait un carton dans toute la France !
Presse
« Inspiré de Ray Bradbury et de son célèbre Fahrenheit 451, cité
dans le programme du spectacle, le point de départ d'Un soir à
Babel s'impose dès les premières scènes, où l'on assiste à la
diffusion d'une émission de radio pirate à la gloire de la littérature
et de la poésie. Et si, dans un futur pas si lointain, les livres avaient
disparu et que les mots, le savoir et la mémoire qu'ils impliquent
étaient interdits ? La Cie Home Théâtre a choisi de rendre cette
question accessible, notamment aux adolescents, en l'incarnant de
manière concrète durant la soirée d'une famille, résidente de Babel.
Dans cette dictature froide et décérébrée gérée par une invisible
Big Brother au féminin, la Padra, règnent des règles absurdes. Les
mots de plus de deux syllabes sont proscrits au profit d'une
novlangue inspirée du langage texto, il est défendu de posséder ou
de se servir de livres ou de papier (même de papier peint !). À la
suite d'une crise mondiale (tiens, tiens !), l'expression individuelle
a été étouffée au profit de la peur de l'autre, de la soumission et de
la dénonciation. Nos personnages, Barthélémy et Elisabeth, ont
des prénoms trop longs et sont nostalgiques du monde ancien.
Incapables de se séparer de leurs lettres et livres préférés, ils tentent
de résister au lavage de cerveau généralisé tout en protégeant leur
fille, Lili, qui semble s'intégrer à la perfection à cet univers
répressif. Mais les apparences sont trompeuses et lors d'une soirée,
tout va basculer... Avec une simplicité et un sens du détail affûté
dans la mise en scène, la compagnie parvient à soulever quelques
questions phares rassemblant les générations : la liberté
d'expression, l'éducation à la résistance justifiée et l'idée de ce que
l'on veut transmettre à ses enfants. Si le fond est didactique, la
forme ne se départit jamais d'un humour qui doit beaucoup au
sens du rythme des comédiens, Sophie Boissière, Julien Bucci et
Marie Némo, qui ont écrit collectivement cette pièce en complicité
avec des habitants de Maubeuge. »
Nord Eclair (Sarah Elghazi)
le 08/02/2012
Infos pratiques et techniques
Direction artistique, création sonore : Julien Bucci
Ecriture : Sophie Boissière, Julien Bucci et Marie Némo
Jeu : Sophie Boissière, Julien Bucci et Marie Némo
Voix off (télé) : Rose Bucci, Ann Gisel Glass. Nicolas Madrecki, Hartmut Reichel, Luc Samaille.
Durée : 50 minutes environ, suivi d'une discussion
Public : spectacle tout public à partir de 9 ans
Technique : Spectacle autonome techniquement, jouable en tout lieu fermé occultable.
Représentation scolaire : ce spectacle est adapté au public adolescent, possibilité de présenter le
spectacle pour 4 classes à partir de la cinquième. Un dossier pédagogique est disponible.
Documents : Le texte intégral du spectacle peut vous être adressé sur simple demande. Vous
trouverez également sur la page web du spectacle des photos, des extraits audio, le dossier
téléchargeable... > http://www.babel.fr.nf
Disponibilité du spectacle : à partir de fin septembre 2011, en France et en Belgique
Tarifs : nous contacter.
Cie Home Théâtre
12 bis rue Philippe Lebon - 59260 Hellemmes
Tél ► 03 20 31 13 38
Site ► www.hometheatre.fr
Mail ► [email protected]
Direction ► Julien Bucci
Tél ► 06 67 92 52 17
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