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LE RAPPORT SUR LES ENJEUX ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX DE L’INDUSTRIE BANCAIRE
COMITÉ CONSULTATIF DU SECTEUR FINANCIER – RAPPORT 2005 205
Au rang des certitudes, il convient de distinguer celles d’ordre stratégique et celles d’ordre plus
opérationnel
Les certitudes d’ordre stratégique sont au nombre de quatre :
1) La concurrence bancaire va s’intensifier et devra s’exercer en toute transparence
La scène concurrentielle est désormais, pour la plupart des métiers bancaires, mondiale. Il est
ainsi parfaitement envisageable que, comme la scène boursière (sur le devant de laquelle Euronext se
trouve aujourd’hui menacée dans son projet d’européanisation), la scène bancaire européenne soit
également, à l’horizon de dix ans, très profondément recomposée, avec l’émergence d’une petite
dizaine de « leaders » de taille mondiale et la marginalisation des autres banques, devenant
définitivement des banques « locales ». Sur la scène mondiale, de nombreuses industries bancaires se
sont résolument mises en ordre de combat. Toutes les industries bancaires des pays développés (à
l’exception peut-être de l’Allemagne et, à un moindre degré, de l’Italie et du Japon) se sont
restructurées sur le plan national. Par rapport à ces concurrents, l’industrie bancaire française paraît
bien armée, bien qu’elle paraisse en retard sur le plan de la taille par rapport aux « majors » bancaires
américaines et, au plan de la rentabilité, par rapport aux banques américaines, anglaises et espagnoles.
Toute baisse de la rentabilité des banques françaises doit donc, pour l’avenir, être considérée comme
un facteur de fragilité concurrentielle et une menace pour le maintien de centres de décision essentiels
pour notre économie sur le territoire national.
Cette concurrence pose plusieurs questions : celles du cadre juridique d’exercice de la
profession, de son environnement fiscal (au sens large), des spécificités qui peuvent demeurer sur
certains marchés comme celui de la banque de détail avec, par exemple, la traditionnelle gratuité des
chèques ou l’épargne réglementée.
Cette concurrence se jouera en effet, pour les banques françaises, sur le marché mondial, mais
aussi, en particulier, pour les métiers de banque de détail, sur le marché national. Dans ce domaine, il
est impératif que les conditions d’une concurrence effective et loyale soient en permanence respectées.
2) L’industrie bancaire est soumise à une refonte, sans précédent historique, de son cadre réglementaire
Les nouvelles normes comptables (normes IFRS) et prudentielles (Bâle II) dont l’arrivée est
quasi simultanée vont durablement affecter les conditions d’exercice de l’industrie bancaire. Ces
nouvelles normes ont donné lieu à d’intenses négociations, et parfois, (notamment pour les normes
comptables), à d’importantes controverses, ne sont pas, à ce stade, arrêtées de manière définitive. Elles
représentent des investissements colossaux pour les banques et amèneront, sans nul doute, des
évolutions majeures. Les normes IFRS généralisent une approche de marché de l’activité bancaire, y
compris pour le crédit, qui peut paraître difficilement compatible avec la tradition française du crédit à
taux fixe. Le nouveau ratio de solvabilité, quant à lui, renforce le pilotage par les risques et peut
conduire à favoriser les activités peu risquées (par exemple le prêt aux particuliers) par rapport aux
activités plus risquées (le prêt à certaines catégories d’entreprises). D’une manière générale, l’impact
de ces nouvelles réglementations sur le comportement des acteurs financiers, notamment par rapport
au cycle économique, reste à préciser. Ces dispositifs réglementaires ne sont pas, à ce stade, arrêtés de
manière définitive. Tout en conservant l’objectif d’une plus grande sécurité financière, il convient de
profiter des marges de liberté encore disponibles pour éviter que ces réformes pénalisent les banques
en général et les banques d’Europe continentale en particulier.
3) La dimension européenne ne constitue plus un défi pour de nombreux métiers bancaires, de même
que pour de nombreuses réglementations. Elle constitue, dès aujourd’hui, une réalité et, à bien des
égards, une chance pour les banques françaises
L’écrasante majorité des règles de fonctionnement bancaire dépendent ainsi désormais d’un
cadre européen. La convergence des normes et des pratiques des superviseurs est un enjeu quotidien
pour des banques dont l’activité est de plus en plus transfrontalière, même si le marché intérieur
européen a progressé plus vite pour les activités de marché que pour la banque de détail. Cela s’avère