Document 1 : Le silence de dieu à Auschwitz n’est pas forcément synonyme de mort de dieu, mais
obligation de repenser dieu. C’est ce qu’exprime le texte suivant de Hans Jonas.
Pour le juif, qui voit dans l'immanence le lieu de la création, de la justice et de la
rédemption divine, Dieu est éminemment le seigneur de l'Histoire, et c'est là qu'Auschwitz
met en question, y compris pour le croyant, tout le concept traditionnel de Dieu. À
l'expérience juive de l'Histoire, Auschwitz ajoute en effet un inédit, dont ne sauraient venir
à bout les vieilles catégories théologiques. Mais quand on ne veut pas se séparer du
concept de Dieu – comme le philosophe lui-même en a le droit – on est obligé, pour ne
pas l'abandonner, de le repenser à neuf et de chercher une réponse, neuve elle aussi, à
la vieille question de Job. Dès lors, on devra certainement donner congé au "seigneur de
l'Histoire". Donc : quel Dieu a pu laisser faire cela ? Hans Jonas (1903-1993)
Le Concept de Dieu après Auschwitz, 1999
Document 2 : Le tremblement de terre qui détruisit Lisbonne le 1er novembre 1755 eut un profond
retentissement en Europe, comme en témoigne l'article "Lisbonne" de l'Encyclopédie de Diderot et
d'Alembert.
1755 - Tremblement de terre de Lisbonne
Lisbonne.
(La ville de Lisbonne a été détruite par «d’affreux tremblements de terre, dont le récit fait
frissonner les nations même, qui sont le plus à l’abri de leurs ravages».)
Le matin du premier novembre 1755, à neuf heures quarante-cinq minutes, a été
l’époque de ce tragique phénomène, qui inspire des raisonnements aux esprits curieux,
et des larmes aux âmes sensibles. Je laisse aux physiciens leurs conjectures, et aux
historiens du pays, le droit qui leur appartient de peindre tant de désastres. Quoeque ipsa
miserrima vidi, & quorum pars magna sui, écrivait une dame étrangère, le 4 novembre,
dans une lettre datée du milieu des champs, qu’elle avait choisi pour refuge à cinq milles
de l’endroit où était Lisbonne trois jours auparavant
Le petit nombre de maisons de cette grande ville, qui échappèrent aux diverses
secousses des tremblements de terre de l’année 1755 et 1756, ont été dévorées par les
flammes, ou pillées par les brigands. Le centre de Lisbonne en particulier, a été ravagé
d’une manière inexprimable. Tous les principaux magasins ont été culbutés ou réduits en
cendres ; le feu y a consumé en marchandises, dont une grande partie appartenait aux
Anglais, pour plus de quarante millions de creuzades. Le dommage des églises, palais et
maisons, a monté au-delà de cent cinquante millions de la même monnaie, et l’on
estimait le nombre des personnes qui ont péri sous les ruines de cette capitale, ou dans
son incendie, entre 15 à 20.000 âmes.
Toutes les puissances ont témoigné par des lettres à S.M.T.F. la douleur qu’elles
ressentaient de ce triste événement ; le roi d’Angleterre plus intimement lié d’amitié, et
par les intérêts de son commerce, y envoya, pour le soulagement des malheureux, des
vaisseaux chargés d’or et de provisions, qui arrivèrent dans le Tage au commencement
de janvier 1756, et ses bienfaits furent remis au roi de Portugal. Ils consistaient en trente
mille livres sterling en or, vingt mille livres sterling en pièces de huit, six mille barils de
viande salée, quatre mille barils de beurre, mille sacs de biscuit, douze cent barils de riz,
dix mille quintaux de farine, dix mille quintaux de blé, outre une quantité considérable de
chapeaux, de bas et de souliers. De si puissants secours, distribués avec autant
d’économie que d’équité, sauvèrent la vie des habitants de Lisbonne, réparèrent leurs
forces épuisées, et leur inspirèrent le courage de relever leurs murailles, leurs maisons et
leurs églises.
Association ALDÉRAN © - Conférence 1600-223 : “Les quatre morts de Dieu” - 03/11/2007 - page 5