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Questions proposées pour le test de philosophie générale de 1e année (propédeutique).
Semestre d’hiver 2008.
Professeur Raphaël Célis. Assistante Sandrine Burri.
1. Question relative à l’introduction.
Enoncé général : Le thème général du cours de cette année concerne ce que nous avons convenu
de nommer la « révolte », à la fois comme sentiment et comme objet de pensée. Comment
distingueriez vous cette notion de celle de révolution ? Et en quoi la définition de la première est-
elle liée au caractère devenu utopique (ou éprouvé comme tel) de la seconde ? Sur la base de cette
précision, pouvez vous expliquer en quoi la révolte implique de ce fait l’inhibition de l’espoir ? Et
lorsque vous aurez défini le contenu spécifique de l’acte d’espérer, dans sa différence d’avec l’acte
de souhaiter, tentez alors d’expliciter, au niveau de notre relation aux trois instances qui suivent,
de quelle manière l’espoir s’avère aujourd’hui contrarié :
au niveau de notre rapport à l’autorité (transgénérationnelle surtout)
au niveau du projet ou de l’absence de projets collectifs susceptibles de donner sens à nos
activités sociales
au niveau éthique des valeurs par lesquelles il nous est proposé « d’évaluer » la dignité
foncière de la personne humaine (avant tout considérée comme « ressource humaine »).
Pour conclure, choisissez l’un des trois philosophes dont nous avons lu des extraits (Nietzsche,
Marx et Camus) et montrez brièvement en quoi leur pensée peut éclairer vos réponses aux
questions précédentes, soit prises globalement, soit prises plus spécifiquement à l’un des trois
niveaux que nous avons évoqués.
2. Question sur le Zarathoustra de Nietzsche I
Dans les paragraphes §3 et §4 du Prologue du Zarathoustra, Nietzsche fait dire à celui-ci que sa
mission est « d’enseigner le surhomme ». Comment faut-il comprendre cette dernière notion ?
Explicitez l’essentiel de cet enseignement en commentant les passages suivants :
a. « Le surhomme est le sens de la Terre…Je vous conjure, mes frères, à la Terre restez fidèles, et
n’ayez foi en ceux qui d’espérances supraterrestres vous font discours » (p.22)
b. « L’homme est une corde, entre bête et surhomme tendue, - une corde sur un abîme. …Ce qui chez
l’homme est grand, c’est d’être un pont, et de n’être pas un but : ce que chez l’homme, on peut
aimer, c’est qu’il est un passage et un déclin » (p.24). Mettez cet extrait en rapport avec l’épisode
du §6 où Zarathoustra fait la rencontre d’un funambule (pp. 28-29).
c. « J’aime celui dont l’âme se prodigue, qui ne veut gratitude et point ne rend, car toujours il
prodigue et ne se veut garder » (p.25).
Opposez ensuite la figure du surhomme ainsi esquissée à la figure du dernier homme, tel que
Nietzsche le décrit au §5, en vous appuyant sur le passage suivant :
« Malheur ! Arrive le temps où l’homme au-dessus de l’homme ne lancera plus la flèche de son
désir, et le temps où de vibrer désapprendra la corde de son arc…Malheur ! Arrive le temps où de
l’homme ne naîtra plus aucune étoile. Malheur ! Arrive le temps du plus méprisable des hommes,
qui lui-même ne se peut plus mépriser »
« Voyez ! Je vous montre le dernier homme »
« Qu’est-ce que l’amour ? Qu’est-ce que la création ? Qu’est-ce que la nostalgie ? Qu’est-ce
qu’une étoile ? – Ainsi demande le dernier homme, et il cligne de l’œil » (p.26)
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3..Question sur le Zarathoustra de Nietzsche II
Explicitez et commentez brièvement les symboles utilisés par Nietzsche pour décrire Les trois
métamorphoses (le chameau, le lion, l’enfant joueur) que doit accomplir l’homme qui désire se
surmonter lui-même, pour devenir le créateur de valeurs nouvelles, celles dont Zarathoustra se fait
l’annonciateur (pp. 36-37). Quelle est l’épreuve que doit subir pareil créateur, telle que
Zarathoustra en témoigne dans Le Chant de nuit (pp. 136-137) et que condense l’énoncé suivant :
« Entre donner et recevoir il est une faille ; et la plus petite faille est la dernière qui se franchisse ! »
(p. 137) ?
4. Question sur le Zarathoustra de Nietzsche III
Dans le §2 du chapitre intitulé De la vision et de l’énigme (197-200), Zarathoustra affronte
« l’esprit de pesanteur », incarné par un nain juché sur ses épaules, en s’arrêtant devant un portique
dont le nom, inscrit sur le fronton, est « Instant ». Les deux personnages échangent leurs pensées
quant à la signification du temps évoquée par ce portique ainsi dénommé. Leurs interprétations se
croisent et se contredisent à la fois. Pouvez-vous éclaircir le contenu de leur différend, et préciser
en quoi la vision de « l’éternel retour » rapportée par Zarathoustra diffère de la conception
circulaire du temps énoncée par son sarcastique compagnon ? Comment l’énigme tout aussitôt
racontée celle de ce pâtre dans la gorge duquel un serpent s’est glissé donne-t-elle la clef du
comportement adopté par Zarathoustra pour surmonter l’effroi que lui inspire sa propre vision des
choses ? Pour répondre à cette question, faites usage de quelques citations choisies dans le §2 du
chapitre intitulé Le convalescent (dernier tiers de la page 269 à la page 273).
5. Question sur le Zarathoustra de Nietzsche IV
Dans Le deuxième chant de danse (§1 et §2, pp. 277-280) la Vie, représentée par une figure
féminine, qui se donne et se refuse à la fois, objet de séduction et de haine, et condensation de tous
les paradoxes de l’existence, reproche à Zarathoustra de lui préférer sa sagesse, de ne point l’aimer
assez, et de songer à la quitter bientôt. Zarathoustra lui concède à regret qu’elle n’a point tort. Puis,
après qu’ils se soient regardés et aient pleuré l’un sur l’autre, la Vie lui confie un secret, que
personne ne connaît, et que Nietzsche formule dans le §3 en la forme d’une ronde. Pouvez-vous
expliciter les enjeux de ce dialogue et commenter la conclusion de ce chapitre ? À cette fin, faites
usage de quelques citations, destinées à énoncer le sens de cette conclusion (§3), extraites des §3 et
suivants jusqu’au §11, du chapitre portant le titre Le chant du marcheur de nuit (pp. 383-389).
6. Question sur la Critique de l’Economie politique de Karl Marx
En prenant appui sur le 1er chapitre de la Critique de l’économie politique de Karl Marx, expliquez
en quoi consiste la différence entre la valeur d’usage et la valeur d’échange d’une marchandise.
Pourquoi Marx considère-t-il celle-ci comme une modalité abstraite d’évaluation du travail des
individus et de leurs productions ? Et de quelle manière cette abstraction (basée sur la mesure du
temps) détermine-t-elle la forme tout à fait spécifique de socialité issue de l’industrialisation ? De
même, si l’on accepte la thèse que la marchandise ainsi conçue est destinée à l’accroissement de la
plus-value de sa vente, obtenu par sa mise en circulation optimale (le grand marché), et non à
satisfaire les besoins réels des êtres humains, en quoi Marx est-il fondé d’affirmer que la préséance
de la valeur d’échange sur la valeur d’usage est source d’aliénation ? Que faut-il entendre par ce
concept ? Est-il encore d’une utilité quelconque pour comprendre ce dont la grande majorité des
hommes sont victimes aujourd’hui ?
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7. Question sur le Capital de Karl Marx
Le primat de la valeur d’échange est à l’origine de ce que Marx nommera, dans Le Capital, la
forme marchandise. Mais dans cet ouvrage, il étend sa critique à toute organisation du travail dont
les règles et les finalités sont régies par la finance (c’est-à-dire par la valeur abstraite de la
monnaie), et non par les aspirations des producteurs eux-mêmes et de ceux et celles à qui
s’adressent leurs produits. Pour Marx, il s’agit d’une société fétichiste pour laquelle l’étalon de
la mesure appliquée aux biens et aux services acquiert plus de valeur que ceux-ci. Quels sont les
principaux arguments de cette critique ? Comment, par exemple, Marx peut-il soutenir qu’une
chose peut avoir un prix sans posséder de valeur réelle ? Pour étayer votre explication, prenez
appui sur le paragraphe du Capital intitulé « La métamorphose de la marchandise » (pp.642-653)
en retraçant brièvement le cercle vicieux qui fait prévaloir la circulation des biens sur la nature de
ces biens. Pour conclure, faites la déduction qui s’impose en montrant ce qui motive Marx à
étendre le concept d’aliénation aux hommes et aux femmes condamnés à vendre leur force de
travail (ou leurs compétences) sur un tel marché et à se convertir eux-mêmes en marchandises
(main d’œuvre ou ressources humaines).
8. Question sur L’homme révolté d’Albert Camus I
Dans le 1er chapitre de L’homme révolté, Albert Camus nous explique que la révolte dont il traite
résulte d’une prise de conscience de la dignité de la nature humaine universelle, plutôt que d’une
volonté de défendre ses intérêts égoïstes ou ceux de sa propre classe sociale, ou encore de quelque
autre ressentiment. A quelle conception de la révolte nous conduit-il alors, et quelles en sont les
conséquences (dramatiques en un certain sens) pour toute action qui viserait à modifier ou à contrer
les états de souffrance, de servitude et d’humiliation qui sont infligés à l’humanité ?
9. Question sur L’homme révolté d’Albert Camus II
« La révolte métaphysique est le mouvement par lequel un homme se dresse contre sa condition et
la création toute entière » écrit Albert Camus tout au début de la 2ème partie de L’homme révolté. A
quelles dérives cette révolte est-elle exposée, et par quel paradoxe est-elle habitée, selon les
analyses qu’il propose du personnage d’Ivan Karamazov de Dostoïevski ?
Sur les bases de cet argument, montrez en quoi Albert Camus respecte et souscrit à l’exigence
éthique de Nietzsche d’une part, de Marx d’autre part, et sur quels points essentiels (en faisant donc
abstraction de leurs interprétations abusives ou malheureuses), il se distancie de ceux-ci. En
conclusion, faites ressortir l’originalité de la philosophie de la révolte d’Albert Camus en
commentant le principe qu’il énonce à la page 63 : « La révolte est l’affirmation d’une nature
commune à tous les hommes, qui échappe au monde de la puissance ».
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