SIX ESSAIS

publicité
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
Cynthia Walsh
SIX ESSAIS
Résidence Le Parc - Meudon La Forêt
Fernand pouillon 1957 - 1962
Janvier 2011
1
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
PéRENNITé
er
ri
PRéAMBULE
to
ire
s.
SOMMAIRE
MASSIVITé ET MATéRIALITé
le non mesurable
PLEINS ET VIDES
PARCOURS DU PIéTON
REPéTITIONS ET ALTERNANCES
BIBLIOGRAPHIE
3
PRéAMBULE
Ce qui peut sembler intriguant en architecture, c’est l’histoire d’un lieu et des
éléments qui perdurent dans le temps. Certaines architectures résistent et
to
ire
s.
affirment leur présence au fil des siècles. Ce qui fait le charme des grandes
villes telles que Paris, c’est leur rapport à l’histoire et à la vieille pierre qui à
faire donne une longévité aux bâtiments.
er
ri
traversé les époques. Construire dans une certaine continuité des savoirs
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
Un des bâtiment qui m’a le plus interpellée, c’est l’opération de Fernand
Pouillon sur le vieux port de Marseille. Il s’agit de plusieurs bâtiments de
logements qui prennent leur aplomb le long du port. Cette architecture a une
véritable présence de par ses proportions et l’utilisation de la pierre qui la
rend constante et qui nous donne l’impression qu’elle a toujours existé. Un
sentiment de perfection et de quelque chose d’immuable me donne l’envie
d’en comprendre les raisons. La composition des éléments architecturaux
rappelle les éléments premiers constituant l’architecture. Cette dernière évoque de grands piliers qui supportent une architrave, le dernier niveau en retrait
produit une ombre, celle du toit, qui crée l’épaisseur de cette architrave ( voir
croquis p.8). Il y a ici rappel aux savoir faire ancestraux ainsi qu’à l’architecture des temples Grecs.
C’est ce rapport fort à l’histoire et à une architecture qui s’ancre dans le sol
de façon permanente que je recherchais, afin de l’étudier pour mieux l’appréhender et en déceler quelques clefs.
Le rapport direct et brut aux matériaux, à la structure, et à la lumière, est ce
qui m’attire en architecture et particulièrement les oeuvres de Louis Kahn,
pour qui la pensée de la structure crée l’architecture et pour qui le rapport de
la massivité du mur percé par la lumière est constant.
Ainsi, la Résidence Le Parc construite entre1957 et1962 est une oeuvre de
5
Fernand Pouillon qui rassemble tous ces éléments essentiels en architecture.
Elle est en quelque sorte emblématique et clairement représentative d’un retour aux sources de l’architecture et aux racines de l’ordonnancement urbain
selon une histoire propre à l’architecture et à l’urbanisme. La Résidence Le
nence. Ces aspects me semblent énigmatiques.
to
ire
s.
Parc s’inscrit dans l’espace avec pesanteur et à travers le temps avec perma-
er
ri
L’ analyse de la Résidence Le Parc à Meudon La Forêt de Fernand Pouillon
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
est le fil conducteur de diverses réflexions. Les lectures, l’observation sur le
terrain ainsi que la production de croquis et l’analyse de l’oeuvre m’ont permis
de mettre en lumière divers thèmes qui semblent fondamentaux : pérennité,
massivité et matérialité, le non mesurable, pleins et vides, parcours du piéton,
répétitions et alternances. Ainsi, le mémoire est constitué d’une succession
de petits essais qui incarnent chacun un de ces sujets. Il n’ y a pas de suite
chronologique entre les essais, ils sont indépendants les uns des autres.
Ces thèmes permettent d’observer la Résidence Le Parc sous différents angles de vue. La richesse de cette opération permet d’avoir plusieurs types de
lectures. Ainsi, il est possible par exemple de mettre en évidence :
- la pérennité de cette architecture en la mettant en relation avec celle de Stonehenge et du Parthénon.
- la massivité et la matérialité en comparant l’architecture de Fernand Pouillon
et la peinture de Pierre Soulages.
- le « non mesurable» en soulignant les propos d’Eric Lapierre sur «l’inquiétante étrangeté»1.
- le rapport des pleins et des vides en mettant en parallèle la composition
urbaine avec les papiers découpés et collages de Henri Matisse.
- le parcours du piéton à Meudon La forêt en le comparant à celui du piéton à
l’Acropole d’Athènes.
- les répétitions et alternances du vocabulaire architectural en évoquant une
1.LAPIERRE ERIC, Architecture du réel, Architecture contemporaine en France.
6
sculpture de Donald Judd.
Cela tend à démontrer que cette architecture s’inscrit dans un champ universel de réflexions qui traversent différents domaines tels que l’art et l’histoire
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
de l’architecture.
Vieux port de Marseilles, Août 2007
Bâtiments de logements de Fernand Pouillon à droite.
7
8
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
9
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
PéRENNITé
Fernand Pouillon avait une approche de l’architecture très différente de celle
to
ire
s.
de ses contemporains, qui selon lui, attachaient une grande importance à
l’image de l’architecture et aux technologies très développées de l’époque
er
ri
suivant une sorte de mode du moment. Il refusait de lire les magazines d’architecture contemporains. Fernand Pouillon était un lecteur assidu d’Auguste
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
Choisy. Cela confirme son attachement aux valeurs premières de l’architecture. Dans son livre Chefs-d’oeuvre, Livio Vacchini écrit plusieurs textes dont
un sur Stonehenge et un autre sur Le Parthénon. Il semble intéressant de
mettre en parallèle Stonehenge, la première architecture de pierre, avec celle
de la Résidence Le Parc pour en rappeler son caractère premier : «Ne peuton pas dire encore que Fernand Pouillon parvient ainsi à retrouver comme
une dimension «archaïque» de l’architecture, un «archaïsme» dans la définition de formes rigoureuses, épurées, élémentaires, capables de susciter
une franche émotion d’espace. Cet «archaïsme» affirme la pérennité et la
permanence de formes architecturales.»2 De même, la mise en rapport avec
le Parthénon permet de mettre en avant une réinterprétation de certains éléments de l’architecture classique à travers des moyens plus modernes.
La Résidence Le Parc, incarne un caractère élémentaire de l’architecture.
Comme si Fernand Pouillon avait voulu nous rappeler la force que peut produire la simple répétition de colonnes de pierres soutenant un toit comme au
temps de l’architecture grecque ou des temples égyptiens : « A Stonehenge,
il y a cinq mille ans, dès le premier linteau posé, naissait l’architecture, une
forme de la connaissance humaine. La lumière sera sa vraie nature. Face à
Stonehenge, l’instant se fige et l’émotion augmente à mesure que se déga-
1.Illustration page précédente : Stonehenge (Wiltshire), environ 60km à l’est de Bath, Grande Bretagne. 3100-1600 av.
J.-C. Photographie extraite du livre Chefs-d’oeuvre de Livio Vacchini.
2. DUBORD Bernard Félix, Fernand Pouillon, préface de Jacques Lucan.
10
gent, avec force, les trois modalités fondamentales de l’acte de construire :
modifier la croûte terrestre, s’élever et couronner vers le ciel.»3
Il y a dans cette répétition de colonnes de pierres, l’idée du mur aveugle que
l’on perçoit en perspective. En fonction de l’emplacement du piéton, la per-
to
ire
s.
ception des façades évolue et change. Tandis qu’un mur aveugle en pierres
est perceptible de loin, en se rapprochant, les colonnades en pierres sont
lisibles par l’alternance entre verre et pierre, entre pleins et vides. Cela ramène
er
ri
alors à l’histoire même du passage du mur à la colonne : « La colonne est
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
née du mur. Le mur était bon pour l’homme. Par son épaisseur et sa force
il protégeait l’homme de la destruction. Mais bientôt, le désir de voir audehors poussa l’homme à faire un trou dans le mur et le mur en souffrit
beaucoup [...] Plus tard, l’homme ne fit pas que tailler un trou dans le mur,
il fit une ouverture distincte, encadrée de belle pierre, puis il mit un linteau
au dessus de l’ouverture. Et bientôt le mur se sentit très bien.[...] L’ordre du
mur construit amena l’ordre du mur construit avec une ouverture. Puis vint
la colonne, qui était une sorte d’ordre automatique, créant ce qui s’ouvrait et
ce qui ne s’ouvrait pas. Un rythme d’ouvertures fut alors décidé par le mur
lui-même qui n’était plus un mur, mais une série d’ouvertures.» 4
Le passage du mur à des colonnes, se fait ici par la nécessité de percer le
mur pour avoir de la lumière, tout en portant une toiture. Les colonnes sont en
quelque sorte les espaces construits qui encadrent la lumière. A la Résidence
Le Parc, la massivité du mur de colonnes en pierres accentue la relation entre
ce qui est lourd et massif et ce qui est léger et transparent. L’intérieur des immeubles paraît comme quelque chose de fragile, protégé par une enveloppe
massive. Cette transparence alternée de colonnes crée une relation directe
entre l’intérieur des appartements et l’espace commun central, tout en gardant une limite forte, une épaisseur entre l’intérieur et l’extérieur.
Cette épaisseur est l’espace de la structure qui détermine là où sera la lumière
et là où sera l’ombre, à l’intérieur des appartements.
3.VACCHINI Livio, Chefs-d’oeuvre, extrait du chapitre Stonehenge, éditions du linteau, p.13.
4. Louis Kahn, Silence et lumière, p.61
11
A propos de Stonehenge, Livio Vacchini parle de la naissance de l’architecture et des volontés de l’architecte néolithique : « Il ne voulait pas manquer
l’expressivité jamais égalée du monolithe naturel, la variété du rythme, de
la lumière, la beauté de la matière brute, l’ombre portée de pierre à pierre
to
ire
s.
comme celle d’un arbre sur un autre arbre. »5
De la même façon qu’à Stonehenge, à Meudon la Forêt, la composition monumentale exprime l’essence de la construction : le mur est devenu colonne
er
ri
pour faire entrer la lumière à l’intérieur. Les piles de pierres sont espacées
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
de façon régulière, ce qui met en avant le rythme d’ombre et de lumière qui
semble se répéter à l’infini. Ce rytme régulier est souligné parallèlement par
l’espacement régulier entre les arbres du mail piéton.
Puis pour être abrité, le mur de colonnes soutient une toiture semblable à un
linteau : « Ici, le trilithe se montre dans toute son expressivité, avec ses piliers
énormes et ses linteaux puissants. On a peine à croire que cinq mille ans
seulement se sont écoulés depuis que le mur s’est ouvert à la lumière pour
donner naissance à la colonne.»6
Mail de la grande allée, ombres
rythmées des
arbres et des
percements.
L’alignement
des
arbres
rappelle
le
rytme régulier
des
pillastres en pierre.
5. VACCHINI Livio, Chefs-d’oeuvre, extrait de Stonehenge, éditions du linteau, p.14-15.
6. Ibidem.
12
L’emploi de la pierre induit la compréhension du matériau qui ordonne un certain mode de construction. Dans Stonehenge, Livio Vacchini parle des « modalités fondamentales de l’acte de construire », de la « relation simple entre
forme et construction ». Cela illustre bien le caractère premier de la construc-
to
ire
s.
tion à Meudon la Forêt : l’empilement répétitif des pierres les unes sur les
autres forme des colonnes rectangulaires successives qui créent la structure
et la façade des bâtiments. Ainsi, par rapport à l’emploi d’un matériau et son
er
ri
mode de construction : « La pierre est la mémoire de la pierre, l’homme est la
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
mémoire de l’homme.»7 A la Résidence Le Parc, Fernand Pouillon fera tailler
les pierres massives à la carrière provençale de Fontvieille dans les Bouchesdu-Rhône avant de les faire livrer sur le chantier. A la façon dont on construit
de tout temps en pierre, elles seront empilées les unes au dessus des autres.
La différence avec le passé c’est que les blocs de pierre arrivent déjà taillés
sur le chantier et que les techniques de construction ont évolué. Livio Vacchini
explique qu’il existe un lien entre forme et construction en architecture : « A
Stonehenge, les facteurs déterminants sont le choix du trilithe comme système et la volonté de transporter les grandes pierres à partir de lieux éloignés
; par contre le moyen utilisé pour les transporter et les dresser n’a aucune influence sur la qualité de l’oeuvre.»8 En effet, à Meudon, il est assez surprenant
de voir une opération d’une telle envergure, construite en pierres massives
pour le logement social. Ainsi, le choix de pierres massives assemblées les
unes au dessus des autres pour former de grandes colonnes, qui se répètent
selon un rythme régulier, qui devient pure abstraction, rappelle inévitablement
le Parthénon et son caractère monumental. Quelque chose d’immuable s’en
dégage et donne envie de creuser et de comprendre d’où vient un tel ancrage
dans le sol et une telle présence, d’où vient ce «Fortissimo».9
Dans Stonehenge, Livio Vacchini explique ce que le transport des pierres qui
viennent d’un site lointain, peuvent apporter à l’oeuvre. En effet, les pierres de
Meudon la forêt viennent de Provence : «Imaginons par l’absurde de construi7. Louis Kahn, Silence et lumière
8. VACCHINI Livio, Chefs-d’oeuvre, extrait du chapitre Stonehenge, éditions du Linteau, p.16.
9. VACCHINI Livio, Chefs-d’oeuvre, extrait du chapitre Le Parthénon, éditions du Linteau, p.25
13
re Stonehenge dans une carrière d’où l’on extrait le granit : l’artifice serait
à peine perceptible, il n’y aurait pas de magie, le geste serait circonscrit,
l’aspect pratique prédominerait sur la spiritualité. A l’inverse, imaginons de
construire Stonehenge en plein sahara ; en transportant les pierres sur des
to
ire
s.
milliers de kilomètres, l’artifice atteindrait son apogée et le monument parviendrait à son plus haut degré d’abstraction et de spiritualité.»10
Dans le texte Le Parthénon, Livio vacchini, décrit les colonnes du Parthénon :
er
ri
«Des cannelures faites pour répartir la lumière et l’ombre de façon uniforme
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
sur la colonne toute entière, lui donnant l’apparence d’un monolithe. Une
astuce quand on sait que toutes les colonnes se composent de tambours
assemblés.»11 A Meudon la Forêt, la cannelure a disparu au profit de la coupe
nette de la pierre taillée. La superposition des volumes taillés nettement en
parallélépipèdes crée un volume unique qui se répète sur ses trois faces avec
ses variations de lumières. La répétition crée le monolythe, la colonne devient
alors la cannelure du mur, et répartit la lumière et l’ombre de façon uniforme
sur le mur. De même pour l’architrave : «Vient ensuite l’architrave qui devrait
clore vers le ciel. Elle donne le sens de l’horizontale et du poids, elle est précise dans ses rythmes et ses proportions [...] »12
A Meudon la forêt, la toiture est horizontale, elles repose comme une feuille
sur les colonnes, elle abrite simplement le volume, elle le referme et lui donne
son assise verticale. Elle n’a pas la massivité ni l’épaisseur de l’architrave du
Parthénon, cependant, sa fine épaisseur tend à mettre l’accent sur les colonnes et leur massivité, sur le rapport horizontal direct depuis l’intérieur des
appartement vers les jardins extérieurs. Les colonnes verticales soutiennent
le poids des planchers horizontaux, et c’est un rapport horizontal qui s’inscrit
de l’intérieur vers l’extérieur tandis que les immeubles prennent leur aplomb
monolithique et vertical dans le sol. C’est la verticalité des colonnes et leur
poids propre qui est mis en exergue et non le poids horizontal de l’architrave
soutenue par des colonnes. C’est comme si Fernand Pouillon avait isolé le
10. Ibidem
11. VACCHINI Livio, extrait du chapitre Le Parthénon Chefs-d’oeuvre éditions du Linteau, p.27.
12. Ibidem.
14
thème de la colonne du Parthénon et qu’il avait tenté de lui donner son expression la plus pure et la plus forte. L’emploi de la pierre comme principal
matériau et comme élément fondateur des architectures produit une unité et
to
ire
s.
l’identité de ce nouveau morceau de ville.
Ainsi, la mise en rapport de l’architecture de la Résidence Le Parc avec les
deux textes de Livio Vacchini, soulève le rapport à l’histoire de l’architecture.
er
ri
Selon Louis Kahn : «[...]les images que nous avons devant nous des struc-
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
tures monumentales du passé ne peuvent revivre aujourd’hui avec la même
intensité et la même signification. Leur copie fidèle est impossible. Mais nous
ne pouvons pas négliger les leçons que donnent ces bâtiments car ils ont en
commun ces caractéristiques de grandeur dont les bâtiments de notre futur
doivent, d’une façon ou d’une autre s’inspirer.» 13
Si la Résidence Le Parc éveille chez le promeneur un sentiment de rappel à
ces grand modèles historiques de l’architecture, c’est véritablement qu’elle
s’inscrit elle-même dans une continuité de l’histoire. Une certaine longévité
est dûe à l’utilisation de la pierre comme matériau durable à travers le temps,
par ailleurs un vocabulaire commun à l’architecture ressort de son expression
architecturale.
13. RIVALTA Luca, Louis Kahn, La construction poétique de l’espace, éditions Le moniteur.
15
16
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
17
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
MASSIVITé ET MATéRIALITé
A la Résidence Le Parc, on remarque une approche sur la matérialité des
masses pleines en pierre et des vides vitrés. On discerne les variations de la
to
ire
s.
structure en pierre qui crée des alternances entre des surfaces pleines opaques, un système en relief de poteaux poutres, et des piles verticales qui pa-
er
ri
raîssent en épaisseur. L’architecture fait transparaître une relation simple entre
l’épaisseur et l’opacité de la pierre et la transparence des parties légères. La
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
pesanteur et la massivité de l’ensemble sont mis en exergue.
Ainsi, au delà de la résolution d’un programme et d’un morceau de ville, il est
possible d’analyser l’opération sous différents point abstraits tels que pleins
et vides, ombre et lumière, rythme et alternance. En d’autre termes, il est possible d’observer cette architecture à la façon dont on analyserait un tableau
de Pierre Soulages. Cela montre en quoi ce projet a sa propre logique interne
et son propre vocabulaire. La structure qui crée les façades traite de rapports
essentiels et premiers entre les éléments. C’est ce qui donne cette impression
de simplicité et qui ordonne la complexité.
En effet, la variation des assemblages structurels de l’architecture à Meudon
la Forêt induit différents rapports d’épaisseurs et d’ombres en façade. L’unité
globale est donnée par la matérialité qui est la pierre, cela permet de mettre en
avant les différents types d’assemblages de ce matériau. Lorsque la structure
est une succession de piles de pierres verticales ( photo n°3 p.22 ), la profondeur de la pile est renforcée par l’emplacement du vitrage au nu intérieur.
Une ombre portée est alors sur cette épaisseur de la pile de pierre tandis que
le petit côté est exposé à la lumière. L’ espacement entre chaque pile étant
uniquement celui d’une fenêtre, cela crée une répétition de verticales et une
alternance régulière et rapprochée d’ombres et de lumières. La perception de
18
Peinture 324 x 362 cm, 1985
Huile sur toile,
Paris, Musée d’Art Moderne.
19
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
1
2
20
3
4
to
ire
s.
er
ri
cette architecture évolue en fonction du positionnement du promeneur dans
l’espace. Par ailleurs, certaines peintures de Pierre Soulages présentent une
problématique semblable. Prenons comme exemple Peinture 324x181cm 19
février 2009. La peinture noire crée l’unité globale de l’oeuvre et permet de
to
ire
s.
mettre l’accent sur les différentes variations au sein de la matière physique
même. C’est la répétition d’une structure perceptible de bandes noires hori-
zontales étalées par un couteau qui crée une épaisseur et qui met en valeur
er
ri
les variations de la lumière sur la toile et fait apparaître différents rapports
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
d’ombre et de lumière. Elle varie en fonction de la position du spectateur,
qui évolue autour de la toile pour percevoir les variations du noir et de la lumière. La perception de l’oeuvre est impermanente à l’instar de l’architecture
de Meudon la Forêt.
Lorsque la structure des immeubles est un assemblage de poteaux et de
poutres ( ci-contre photo n°2), cela crée une répétition régulière de verticales
et d’horizontales qui créent une maille solide et épaisse en pierre. Cela crée
comme une succession de caissons profonds dont le fond est transparent et
vitré. La face le plus petite des poteaux et l’épaisseur des nez de dalles sont
d’une épaisseur semblable qui est soulignée par la lumière. L’épaisseur du
caisson est alors dans l’ombre ainsi que le vitrage au nu intérieur qui représente un vide. De même que dans la peinture de Soulages, la répétition d’une
structure identique permet de faire ressortir les différents rapports d’ombre et
de lumière sur la structure.
Lorsque la structure est une alternance de surface pleine opaque en pierre et
de poteaux poutres ( ci-contre photo n°1), cela met en avant les différentes
possibilités d’assemblages du matériau, créant deux épaisseurs de façades
différentes avec un même matériau. Dans la continuité du mur plein, le mur
devient totalement vitré et la structure apparaît en épaisseur au dessus de
cette surface vitrée. Cela souligne un contraste dans la prédominance de surfaces pleines ou de surfaces vides.
21
Pierre Soulages, Peinture 324x181cm 19 février 2009.
22
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
Enfin, lorsque la structure est une alternance entre mur plein et parties vitrées ( p.22 photo n° 4), il s’agit d’une opposition entre ces deux matériaux,
l’un opaque et solide, l’autre transparent et fragile. La répétition marque le
contraste.
to
ire
s.
Pierre Soulages dans le domaine de la peinture, traite particulièrement de la
matière même de la peinture noire et de son rapport à la lumière. C’est par
l’expérimentation de la matière de la peinture et à l’aide de différents outils
er
ri
qu’il révèle à la fois la lumière qui se reflète et l’épaisseur de la matière. Le jeu
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
entre la masse et l’épaisseur de la peinture, la légèreté et le reflet de la lumière,
crée des variations entre le noir de la matière et le blanc de la lumière à travers
un rythme qui met en avant la matérialité et l’épaisseur de la peinture. En architecture, c’est la matérialité et sa propre logique de construction, d’assemblage et de composition en rythme avec la lumière qui fait ressortir la nature
d’un matériau. La structure unifie les hétérogénéités et crée les espaces.
Ainsi, des espaces très complexes peuvent être composés par des moyens
simples issus de rapports élémentaires entre les éléments qui constituent
l’architecture. Cela demande alors un effort de simplification concentré sur la
volonté de mettre en valeur la matérialité du projet et l’essence de la matière.
Patrick Devanthery et Inès Lamunière semblent être des architectes contem-
porains pour qui la matérialité du projet est essentielle : « Face à l’identité
encore floue d’un édifice à construire, l’imagination peut pénétrer d’emblée
dans la sphère de la fabrication en accordant au matériau une place privilégiée. Elle peut viser, par-delà la définition formelle de l’objet, ses qualités
poétiques structurantes.»1 Ainsi, comme pour Fernand Pouillon, le choix des
matériaux peut déterminer l’essence du projet. De plus, une grande attention
est accordée à la texture, à la plasticité et aux variations de la matière. Le gymnase de Chamblandes est constitué de deux façades qui opposent deux matérialités : l’opacité de la pierre et la transparence du verre. L’architecte décrit la
1. Devanthery Patrick et Lamunière Inès, PATHFINDERS, texte de janvier 2005 de Joseph Abraham, La machine
d’invention, édition Birkaüser, p.14.
23
façade légère du gymnase de Chamblandes à Pully : « Sa façade, au souffle
régulier, est fondée sur la justesse des mesures et des matières : béton gris
des membrures horizontales, aluminium mat des huisseries, résine translucide des ouvrants légèrement bombés. Cette résine, qui ressemble à de la
to
ire
s.
pâte de verre, s’insère dans le discours ondoyant de la paroi légère [...]»2 On
sent bien ici la volonté de créer une cohérence interne entre le rythme régulier
de la façade et un traitement fin de l’expressivité de la légèreté des menuise-
er
ri
ries et des parties légères. La volonté première semble être de communiquer
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
l’expressivité de chaque façade ( massivité ou légèreté ), par le choix des
matériaux, l’emplacement précis et le rôle de chacun dans cette architecture
en cohésion avec le contexte. Le gymnase de Pully est très contextuel dans
1
2
4
3
Les images1,2,4, sont extraites du site internet gymnasedechamblandes.ch. L’ images 3 est extraite de
l’ouvrage PATFINDERS, Devanthery Patrick et Lamunière Inès, édition Birkaüser.
2. Ibidem.
24
son intervention, car d’un coté il exprime la massivité de la pierre qui reprend
l’esprit des bâtiments qui le jouxtent et de l’autre il tente de reprendre la transparence du lac qui se reflète dans la façade légère. Soulignons que la façade
proportions régulières qui tiennent l’ensemble.
to
ire
s.
légère paraît massive et fortement ancrée dans le sol, par un rythme et des
A la Résidence le Parc, Fernand Pouillon agit sur un terrain vierge de toute
urbanisme. Ainsi il recrée un vocabulaire urbain propre au site. A Pully, il
er
ri
existe un contexte dans lequel le bâtiment s’insère. Malgré la multiplicité des
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
matériaux employés et deux façades qui s’opposent dans leur expression,
l’unité est créée par le rythme de la façade. A Meudon, c’est la pierre qui
unifie l’ensemble et qui crée la logique interne d’assemblages, à Pully c’est le
rythme et les proportions qui ramènent à un tout : « Tous les matériaux, toutes
les échelles et toutes les valeurs, y coexistent sans pour autant s’annuler : le
lourd, le léger, l’ouvert, le fermé, le fluide, le solide, le filant, l’enraciné... La
construction participe de cette unité des contraires [...] Cette répartition des
tâches constructives produit un déplacement des valeurs au sein du continent
rationaliste. Le projet s’affirme à travers ses fonctions prescriptives, comme
une machine à produire de la cohérence et des significations. Il impose une
vision plus libre de l’architecture, moins codée, moins articulée.»3
Comme une architecture qui serait caméléon, elle s’imprègne du contexte et
c’est le rythme, la répétition, et les proportions qui créent un ordre dans lequel
s’inscrivent toutes le hétérogénéités. Ainsi, la structure change en fonction du
matériau employé. Cette architecture tente de transmettre une matérialité et
une massivité en écho avec le contexte. Cependant, il est possible de regarder
le bâtiment et de l’observer dans son unité et sa cohérence interne de logique
de pleins et de vides, de rythmes et d’alternances. C’est cette lecture qui
permet de dire qu’une architecture à sa propre logique.
3. Ibidem
25
A travers ces aspirations à une architecture sensible où la matérialité est très
présente, que ce soit Louis Kahn, Livio Vacchini ou Patrick Devanthery et Ines Lamunière, j’observe que le rationalisme constructif est le dénominateur commun
une certaine souplesse.
to
ire
s.
de leurs architectures. Même si Patrick Devanthery et inès Lamunière y apportent
Ainsi, l’opération de Fernand Pouillon à la Résidence Le Parc soulève et met en
avant l’expression du matériau, le rapport élémentaire des éléments entre eux et
er
ri
l’unité du projet. A Meudon-La-Forêt, c’est l’ordonnancement de la pierre qui crée
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
le nouveau site. La pierre est l’élément constitutif de l’architecture de Meudon La
Forêt. C’est la réflexion sur les différentes façons d’assembler la pierre qui crée
plusieurs types de façades et de structures. Les différentes alternances de compositions structurelles constituent un vocabulaire qui se répète à travers l’opération. Ces répétitions créent une unité et l’identité du site. A l’instar de l’unité architecturale créée par le Baron Haussman à Paris, à Meudon la Forêt, l’oeil s’habitue
visuellement à un type d’immeubles qu’il retrouve plusieurs fois dans le paysage
architectural. C’est ce qui offre des repères et le sentiment de quelque chose
qui perdure dans le temps car les bâtiments sont en écho les uns aux autres. Ils
forment une unité de vocabulaire architectural tout en produisant des situations
urbaines singulières et variées, comme dans une ville. Cette double lecture entre
la création d’un programme et d’un site est intéressante ainsi que parallèlement la
création d’un langage abstrait propre à une architecture. En quelque sorte au delà
d’une insertion dans un site donné et d’une réponse à un programme, l’architecture apporte une cohérence interne au projet par ses proportions, la matérialité et
la structuration de la massivité qui constituent une œuvre en soi, unique, portant
sa propre poésie.
26
27
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
28
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
29
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
le non mesurable
Le non mesurable est en quelque sorte la présence et l’expressivité qui peut
émaner de certain projets, et les impressions suscitées telles les dimensions
l’architecture ne peut pas forcer.
to
ire
s.
poétique ou émotive, celles que l’être humain ne peut pas contrôler et que
er
ri
Dans le livre Architecture du réel, de Eric Lapierre, l’un des textes porte sur
«l’inquiétante étrangeté», il cite notamment Nicolas Michelin : « Un bâtiment
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
peut répondre à l’ensemble des critères qui viennent d’être évoqués ( programme, site, lumière, confort, durable), avec une mesure parfaite des vecteurs interactifs qui les relient... et pourtant être ressenti comme ennuyeux.
Non pas qu’il soit « raté» mais, en le parcourant, on ne ressent rien - ou
plutôt on éprouve comme un manque, une absence de magie. C’est ici qu’intervient un dernier critère, le poétique, le symbolique. ce n’est pas quantifiable et tient essentiellement à la volonté, à l’inspiration et au talent de
l’architecte.[...]1 Eric Lapierre rappelle par ailleurs la théorie de Le Corbusier
sur «l’espace indicible» du couvent de la Tourette. Bien que cet état de fait
soit en quelque sorte inexplicable, il est intéressant d’essayer de comprendre
quelques éléments qui peuvent participer à l’émotion et au sentiment que peut
procurer une architecture. Eric Lapierre précise :« L’architecture à toujours à
voir avec le préexistant, plus ou moins explicitement, dans chacune de ses
manifestations. De même que le phénomène d’inquiétante étrangeté psychologique est lié à la question du double, l’inquiétante étrangeté qui distingue
l’oeuvre architecturale d’une simple construction, fonctionne sur un réseau
de correspondances et d’évocations.»2
En effet, l’architecture possède sa propre histoire, ce qui induit qu’une architecture est reconnaissable si elle est en continuité avec ce qui à déjà été fait.
Ainsi, des éléments sont en écho avec le passé ou avec certains éléments
1.LAPIERRE ERIC, Architecture du réel, Architecture contemporaine en France.
2. Ibidem
30
propres au sens commun de l’architecture ou de l’art. C’est ce qui crée le
dépassement de l’oeuvre elle-même dans son appréhension, pour la re situer
dans une continuité historique globale.
to
ire
s.
Certaines architectures, au delà du programme et de la situation, transmettent
une dimension architecturale sensible du domaine de l’émotion. A ce sujet,
Louis Kahn dit : « je travaille à développer l’élément jusqu’à ce qu’il devienne
er
ri
une entité poétique ayant sa beauté propre indépendamment de sa situation
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
dans la composition.[...] un bon bâtiment doit, à mon avis, commencer par
le non mesurable, passer par des moyens mesurables au moment du projet et, à la fin, être non mesurable.»3 Dans ce cas, le non mesurable vient
d’un sentiment premier que l’on veut donner à une architecture en cours de
conception. La première idée peut venir d’une intuition ou d’un sentiment qu’il
s’agit de réaliser ensuite par une logique de construction. Toute la difficulté est
de ne pas perdre ou même atténuer cette première idée lors de l’élaboration
et de la réalisation du projet : « La limite extrême de la rigueur est de penser à une seule chose, continuellement, avec détermination, parfois même
jusqu’au point de l’obsession.»4 Cette première intuition qui peut donner un fil
conducteur dépend de la connaissance de l’individu, celle-ci se condense à
un moment précis en fonction de la situation et des différentes données d’un
projet. Ainsi, même la première intuition ramène à certaines données déjà
existantes, c’est la subjectivité et la ré interprétation de chacun qui la rend unique. A Meudon-La-Forêt, la volonté de Fernand Pouillon est de créer un projet
monumental, où la référence au passé serait représentée par deux pastiches
de maisons de vieux villages, par la construction des murs aveugles dans
de grandes perspectives, qui rappelleraient des architectures ancestrales, et
par la composition urbaine, qui renverrait aux plus grandes compositions de
l’histoire de France : « Les bassins de Versailles, les allées de son parc me
servirent de modèle, l’échelle était définie. Comme pour Climat de France,
3. Louis Kahn, Silence et lumière p.121
4. 4. MASIERO Roberto, Livio Vacchini works and projects, p. 55.
31
je dressai un projet monumental, cyclopéen, pour loger les moins fortunés.
La composition prévoyait deux centres commerciaux installés dans de vieilles
maisons, comme si l’on avait voulu conserver le témoignage du passé au milieu
de ces hauts et longs immeubles hors de l’échelle humaine. D’immenses piles
to
ire
s.
de pierre constituaient les façades ; ainsi qu’un paravent, ces structures dissimulaient les baies dans des perspectives infinies évoquant des murs aveugles
de temples ou de forteresses. Je voulu que le plus grand des bassins urbains
er
ri
occupât le centre de la composition. La superficie de celui des tuileries et du
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
Luxembourg fut dépassée. »3 Fernand Pouillon fait alors appel à différentes références de l’histoire de l’architecture, de l’urbanisme et du paysage qu’il ré
interprète à travers une nouvelle composition. Ainsi, l’oeil reconnaît certaines dimensions empruntées à une perfection déjà éprouvée, ainsi qu’ une symbolique
issue de l’histoire architecturale. Ce rappel à des formes connues procure chez le
spectateur une certaine émotion, un sentiment de perfection lié aux proportions,
à l’échelle monumentale et à l’expression architecturale forte. On retrouve alors
ce sentiment «d’inquiétante étrangeté» car tous les éléments qui constituent la
composition et l’architecture renvoient tour à tour à d’autres compositions et
à d’autres constructions emblématiques. Ce qui est alors remarquable c’est la
cohérence et l’unité d’un projet qui fait référence à de multiples projets.
Patrick De vanthery et Ines Lamunière expliquent leur démarche et leur rapport
au sensible dans le livre PATHFINDERS : « Nos projets poursuivent l’idée de
rendre sensible, à travers une pensée rationnelle, les formes poétiques qui peuvent émerger d’une observation du réel comme source de plaisir, de réel et
d’émotion. Une démarche qui considère la géométrie comme la science qui
permet de rendre compréhensible et de décrire l’espace tout en l’inscrivant, par
la matérialité que lui confère l’architecture, dans un réel qui n’aurait rien perdu
de ses odeurs, de sa rugosité, de ses bruits.»2
La démarche est ici d’observer le réel afin d’en extraire des éléments, et de les
retravailler avec des moyens mesurables afin de leur donner une forme archi3. POUILLON FERNAND, Mémoires d’un architecte, Paris, Editions du Seuil, 1968, p 362-363.
2. DAVANTHERY Patrick et LAMUNIèRE Inés, PATHFINDERS, edition BirKaüser, La machine d’invention de Joseph Abram..
3. Ibidem.
32
tecturale qui s’inscrive naturellement dans son contexte sans le dénaturer de
son expression première. La dimension poétique et la sensibilité du projet est
empruntée directement au site. En parlant de l’hôpital d’Ycerdon et de leur
volonté de projet ils disent «l’ensemble veut émouvoir, rendre un peu fragile
to
ire
s.
et en même temps, fort, solide et gai».3 On ressent alors dans ces quelques
citations l’importance de la dimension émotive et sensible de l’ensemble.
er
ri
A Meudon La Forêt, la dimension poétique du projet se manifeste dans la pe-
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
santeur et la massivité de la pierre soulignée par la lumière et l’échelle monumentale. De plus le rapport d’échelle entre l’architecture et le piéton rappelle
à certains endroits la monumentalité des temples grecs, la construction en
piles de pierre rappelle les premiers modes de construction ainsi que les jeux
d’ombre et de lumière des colonnes grecques. Le sentiment de perfection des
proportions vient par ailleurs d’une analogie avec les grandes références se
rapportant à l’histoire.
La poétique de ce projet réside à la fois dans la ré interprétation de formes du
passé, mais aussi dans la perception que le piéton a des bâtiments. Celle-ci
évolue selon l’angle de vue du piéton à travers la multiplicité des perspectives
et des points de vue qui renvoient à certains symboles du passé. Par ailleurs
c’est un univers complet qui est recréé avec sa propre nature qui tente de
reproduire l’ambiance, la spatialité et le caractère de certains paysages. Ainsi
différentes connotations participent à la dimension poétique qui transcende
la matérialité de l’architecture. Elles renvoient à l’imaginaire et à l’inconscient
collectif implicitement non mesurable.
33
34
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
35
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
PLEINS ET VIDES
Ce qui distingue la Résidence Le Parc des grands ensembles de l’époque de
sa construction est que la composition urbaine est indissociable de la compo-
to
ire
s.
sition des espaces communs. Le dessin des pleins découle de la conception
des vides. Pour illustrer la relation des pleins et des vides à la Résidence Le
er
ri
Parc, Vénus de Henri Matisse présente le même type de relation entre le plein
des papiers de couleur bleue et le vide blanc de la toile. De même, l’homo-
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
généité de la couleur bleue permet de mettre l’accent sur l’hétérogénéité de
surfaces singulières délimitées mais pas closes qui induisent le dessin du
buste de vénus. Il y a alors un rapport constant entre le corps de vénus qui
apparaît si l’oeil fixe les surfaces bleues, et la totalité du corps si l’oeil fixe
les surfaces blanches de la toile qui renvoient à un espace plus grand, en
dehors de la toile. A la Résidence Le Parc, la rigueur et la répétition de mêmes
systèmes constructifs et de mêmes procédés d’assemblages des bâtiments
entre eux, permet une diversité de pièces extérieures. L’unité est donnée par
l’architecture et la diversité par les pièces paysagées. C’est la régularité de
l’architecture qui permet l’irrégularité et la richesse de composition des espaces extérieurs. De plus, chaque pièce paysagée est délimitée par des pleins
qui ne referment jamais les pièces ouvertes. Celles-ci sont alors en constante
liaison avec un espace plus grand, elles sont reliées par le vide, à l’échelle
globale du projet.
Ainsi, pour comprendre la relation des pleins et des vides il est nécessaire
d’étudier la composition urbaine à travers l’équilibre des masses, les proportions, ainsi que les références géométriques employées par Fernand Pouillon
pour concevoir ces lieux. Cela permet de mieux appréhender et comprendre
en quoi chaque élément de la composition a un rôle important dans l’unité et
la perfection qui règnent dans cette oeuvre.
36
to
ire
s.
er
ri
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
Vénus, exprime bien ici l’idée que le plein et le vide sont indissociables dans la composition, l’un participe
à la construction de l’autre. De plus, l’homogénéité de la couleur permet de mettre en avant la sinuosité
des lignes.
De la même façon l’unité architecturale des bâtiments à la résidence Le Parc, met en valeur la diversité des
espaces paysagers.
Vénus de Henri Matisse, 1952, papiers découpés et collés sur toile, 101,2 x 76,5.
37
L’ordonnancement des pleins et des vides dépend d’une composition urbaine
basée sur l’importance de grandes pièces ouvertes qui structurent la composition. Les bâtiments déterminent le volume de ces pièces. La composition du
bâti et celle des espaces ouverts est indissociable, c’est leur rapport intrinsè-
to
ire
s.
que qui forme un tout. De même que dans Vénus, de Henri Matisse, les vides
permettent aux pleins d’exister et inversement. C’est le dessin des vides qui
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
détermine l’emplacement des pleins.
masses bâties.
masses vides.
scénographies.
n
Le dessin du vide détermine l’emplacement des bâtiments et la géométrie des bâtiments dessine celle des
pièces ouvertes. L’espace du sol est fuyant d’une pièce à l’autre, comme le blanc de la toile de Matisse.
38
Toutes les pièces paysagées sont connectées les unes aux autres par un espace fuyant semblable au blanc de la toile de Vénus de Henri Matisse.
De grands axes urbains structurent l’opération. Ils sont identifiables tels que la
grande allée plantée suivant l’axe nord - sud, une grande pièce urbaine encer-
to
ire
s.
clée de bâtiments au nord, et un second axe de vides est - ouest, comprenant
le grand bassin. Ces grandes pièces ouvertes sont en réalité une séquence
ments et le traitement des espaces plantés et minéraux.
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
N
er
ri
de différentes scénographies juxtaposées, créées par la disposition des bâti-
Deux axes structurent l’opération. Tels un cardo et un décumanus. L’axe Nord-sud est
légèrement orienté de façon à
ce que les logements aient une
orientation Est-Ouest.
grand axe nord-sud.
grand axe est-ouest.
39
Comme le dit Jaques Lucan dans son livre Fernand Pouillon architecte, la
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
rigueur des architectures est incarnée par trois types de bâtiments.
Le premier type est représenté par des bâtiments hauts et rectangulaires dont
les façades sont l’expression pure de la structure : les piliers de pierres forment de grands murs aveugles dont la perception évolue selon l’angle de vue
et la position du piéton.
Le second type correspond à des bâtiments de quatre étages qui ont une
structure de murs porteurs alternée par une structure de poteaux poutres qui
cadrent les fenêtres.
40
to
ire
s.
er
ri
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
Le troisième type est un immeuble semblable au deuxième type, qui se replie
sur lui-même afin de former un U.
Ces trois types d’architectures s’assemblent de différentes façons et créent
des relations diverses pour les espaces extérieurs, allant de l’échelle du voisinage des trois immeubles qui entourent un jardin carré, à l’échelle d’une
grande place urbaine avec un bassin au centre de la composition. Parfois le
premier type est autonome et crée une grande barre face à un grand espace
ouvert ou bien une variante présente plusieurs barres parallèles créant des
petits jardins ouverts. D’autres fois, le premier type vient se greffer au second
type, ce qui crée soit une, soit une succession de barres verticales dont le
pignon est accolé à un long immeuble de quatre étages et crée des jardins fermés sur trois faces d’un coté et un grand espace ouvert de l’autre. Une autre
fois, les deux types se font face de façon autonome et délimitent un autre type
de jardin ouvert. Ainsi, les trois différents modèles architecturaux permettent
par leurs différents assemblages, de composer toute la diversité des pièces
extérieures. Chaque «grande pièce végétale» est composée d’un immeuble de
41
quatre étages et perpendiculairement, de plusieurs pignons d’immeubles de
10 étages. Cette disposition permet aussi d’annoncer que «la pièce végétale»
n’est pas autonome, que ce n’est pas une fin en soi, mais qu’elle est inscrite
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
dans un projet à plus grande échelle, soit dans une suite de «pièces».
Les bâtiments sont disposés de façon orthogonnale
les uns par rapport aux autres, dans les angles, la
façade des bâtiments de 4 étages se retourne.
Pair ailleurs, le rapport de proportions entre la largeur des espaces paysagés
et la hauteur des bâtiments est au moins équivalente afin d’avoir suffisamment de recul pour pouvoir percevoir les bâtiments et pour leur conférer une
assise proportionelle à leur emprise.
Du coté de la route nationale, le bâtiment suit et exprime la linéarité de cette
voie par un bâtiment long de 100 mètres.
La hauteur de 10 étages est justifiée par la largeur de la voie publique entre la RN118 et l’immeuble. Ce
recul permet d’être à l’abri du bruit tout en affirmant un axe de direction majeur. Les parkings parsemés
d’arbres sont placés entre la grande barre et la nationale.
Cela participe au sentiment d’une architecture ayant toujours existé, car celleci est en écho avec les caractéristiques de son contexte et le grand espace
ouvert qui lui fait face.
42
to
ire
s.
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
La hauteur des immeubles est plus petite que la largeur de l’espace vert. La grande dimension de l’espace
paysagé central légitime la hauteur des immeubles. A gauche, les immeubles disposés en barrettes perpendiculaires à l’immeuble de 4 étages, redonnent à l’espace central un équilibre spatial tout en le laissant
non symétrique et aéré.
La géométrie des bâtiments dessine celle des pièces ouvertes. Les bâtiments
linéaires qui bordent le grand axe principal nord - sud, soulignent la perspective et les limites de la pièce par leur typologie de parallélépipèdes continus.
Le sentiment que cette pièce paysagée existe en soi est lié au fait que tous
les éléments contribuent à la création de celle-ci. Par ailleurs la sensation
que cet espace fait partie d’un tout est liée à la présence, en arrière plan,
des pignons des immeubles accolés perpendiculairement à ceux du premier
plan. Ce dispositif permet d’annoncer la continuité de la composition et la
présence d’autre pièces ouvertes dont on devine la géométrie par le rythme
et la profondeur des immeubles. Si les immeubles le long de ce grand axe
avaient tous été de la même hauteur que le plus haut, cela aurait enlevé à la
complexité de cet espace qui s’ouvre visuellement sur la suite de la composition afin que toutes les pièces soient liées entre elles et que chacune d’elles
fasse partie d’un tout. Le rapport entre la linéarité d’un immeuble à droite et
celle à gauche associée aux pignons perpendiculaires, crée un équilibre. Il y
a une équivalence des masses à droite et à gauche, cet équilibre permet de
donner à la fois les limites de la pièce ouverte par la linéarité des bâtiments
et en même temps d’ouvrir cette pièce vers d’autres horizons par la hauteur
différente des bâtiments.
43
Un immeuble linéaire continu donne une pièce paysagée linéaire et un immeuble linéaire qui se replie sur lui-même dessine un lieu plus intime et plus en
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
retrait des grandes circulations.
Ce coeur d’îlot a une mise en scène intimiste, comparée à la grande
ouverture du bassin. Comme dans
un jardin, un chemin en stabilisé
dirige la déambulation du piéton.
Les deux immeubles perpendiculaires en hauteur redonnent
l’échelle du projet. La végétation
participe à la création d’un lieu
intime.
Le bâtiment de 15 étages redonne
l’échelle de la pièce urbaine voisine qui est celle du grand bassin
urbain.
Ce lieu plus intime est alors tempéré par un immeuble de 15 étages qui redonne l’échelle de la pièce urbaine et relie deux dimensions : un espace intime
en intérieur d’îlot et un espace public soit une grande pièce urbaine.
44
to
ire
s.
er
ri
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
Le grand bassin crée
un lieu digne d’un grand
parc, au coeur de l’opération.
De grands points de fuite
se dégagent dans le paysage. Les piétons s’approprient l’espace.
Ainsi, à propos de la pièce urbaine centrale comprenant le grand bassin, les
bâtiments qui délimitent l’espace central sont disposés afin de créer un équilibre entre les masses. Tout en délimitant cette place centrale, les bâtiments
laissent de nombreux points de fuite qui permettent de créer des perspectives
vers les autres pièces ouvertes. Tous les espaces extérieurs sont connectés visuellement. Les bâtiments rythment et cadrent la promenade du piéton.
Comme dans une partition de musique, les différents types de bâtiments sont
assemblés et mis en relation de façon harmonieuse. L’équilibre entre les masses pleines induit toujours de nouvelles relations entre le bâti et les pièces
ouvertes.
Ainsi, la disposition des bâtiments de part et d’autre des grandes pièces extérieures n’est pas symétrique, c’est l’équilibre des masses bâties qui donne
la pesanteur à l’ensemble.
45
Jacques Lucan parle «d’équilibre et de pondération» : « Les lois de pondération regardent, en l’abscence de symétrie, la manifestation, l’expression de la
stabilité: « [...] ces lois de pondération, précise Violet-le-Duc, comme les lois
de proportion, ne sont que l’expression apparente des lois de la statique.»1
to
ire
s.
Puis il dit que Blanc dans La Grammaire des arts du dessin, met la pondéra-
tion en rapport avec le corps humain : «la symétrie rigoureuse d’une figure
er
ri
humaine n’existe pas puisque cette symétrie est rompue au moindre mouvement, ce qui ne veut pas dire que la figure perde pour autant son aplomb.»2
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
Ainsi, Fernand Pouillon s’inscrit dans cette continuité historique de pensée.
Dans le chapitre 19, Composition et parcours, Auguste Choisy et le pittoresque grec, Jacques Lucan cite Auguste Choisy et décrit sa conception du
parcours qui s’opère d’après le point de vue du spectateur, d’après un point de
vue perspectif, c’est en travaillant ainsi qu’il conçoit le paysage architectural.
Il insiste sur la question des «vues d’angle». Il énonce alors sa théorie du
pittoresque grec : «Chaque motif d’architecture pris à part est symétrique,
mais chaque groupe est traité comme un paysage où les masses seules
se pondèrent.[...] La symétrie règne dans chacune des parties, l’ensemble
est soumis aux seules lois d’équilibre dont le mot de pondération contient à
la fois l’expression physique et l’image.»3 Ces propos illustrent bien ce que
réalise Fernand Pouillon à Meudon la Forêt à travers de grandes perspectives
dont la structure est une organisation équilibrée des différentes masses. De
plus, Fernand Pouillon accorde un traitement particulier au bâtiment d’angle
qui se retourne pour marquer la continuité du parcours.
1. LUCAN Jacques, Composition, non-composition Architecture et théories, du XIXe-XXe siècle, chapitre 17, Composition et pittoresque.
2. Ibidem.
3. Ibidem chapitre 19.
46
Ainsi, il est intéressant de comprendre comment, partant du no man’s land,
Fernand Pouillon va créer un morceau de ville et amorcer une continuité de
l’histoire architecturale. Il se réfère à des compositions déjà existantes, afin
que notre œil ait un sentiment familier, comme si ces espaces avaient toujours
to
ire
s.
existé. Il se réfère aux grandes compositions de l’histoire de France :
« Les bassins de Versailles, les allées de son parc me servirent de modèle,
l’échelle était définie. Comme pour Climat de France, je dressai un projet
er
ri
monumental, cyclopéen, pour loger les moins fortunés. La composition pré-
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
voyait deux centres commerciaux installés dans de vieilles maisons, comme
si l’on avait voulu conserver le témoignage du passé au milieu de ces hauts
et longs immeubles hors de l’échelle humaine. D’immenses piles de pierre
constituaient les façades ; ainsi qu’un paravent, ces structures dissimulaient
les baies dans des perspectives infinies évoquant des murs aveugles de
temples ou de forteresses. Je voulu que le plus grand des bassins urbains
occupât le centre de la composition. La superficie de celui des tuileries et du
Luxembourg fut dépassée. ».4
Il est alors possible d’établir des comparaisons d’ordre de grandeurs entre
certaines grandes compositions historiques et la Résidence Le Parc. Ainsi, la
grande allée qui reprend l’axe nord-sud principal de la résidence Le Parc (40
m de large sur 385 m de long) est semblable dans ses dimensions à celle du
château de Versailles, qui mène au grand bassin (35 m de large sur 375 m
de long).
Meudon la Forêt, grande allée centrale.
4. POUILLON FERNAND, Mémoires d’un architecte, Paris, Editions du Seuil, 1968, p 362-363.
47
De la même façon, la place du bassin au centre de la résidence Le Parc est
comparable dans ses dimensions (80 m X 150 m) à la place du petit bassin
du jardin des tuileries 80 m de diamètre ( voir page précédente) et à la place
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
centrale du jardin du Luxembourg (80 m x 75 m).
bassin au centre de la résidence Le Parc
Jardin des tuileries, grande allée et dimensions des places et bassins.
bassin au centre du parc du luxembourg.
48
De plus, la largeur du bassin de la résidence Le Parc équivaut à la longueur
du grand bassin des tuileries (voir page précédente) .
Fernand Pouillon tente alors en fonction du programme de réadapter les dimensions propres aux grands jardins historiques afin d’implanter les bâti-
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
ces espaces fuyants.
to
ire
s.
ments dans un véritable parc urbain. Les bâtiments créent la délimitation de
Petite place, dont l’aménagement rappelle celui de la
place des vosges.
Place des vosges.
49
Il est possible de créer des correspondances entre l’architecture monumentale de Meudon la Forêt et le texte de Livio Vacchini concernant le Parthénon
: «[...] des édifices paraissant énormes, ordonnés non pas par la symétrie
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
mais par le poids, jouent un «fortissimo».»5
Comparée à la diversité des espaces extérieurs, l’architecture a un langage répétitif et elle a un caractère unitaire. La répétition d’un même système
constructif donne une certaine grandeur aux bâtiments, et c’est l’espace
ouvert qui lui permet de s’asseoir et qui lui donne un ancrage au sol.
Ainsi, la composition de l’espace urbain se réfère dans ses dimensions à
de grands modèles historiques, c’est ce qui lui donne cette habileté dans
le rapport des proportions, des pleins et des vides. La composition urbaine
est partie intégrante de l’oeuvre et c’est ce qui la compose. La résidence Le
Parc est un grand ensemble qui s’inscrit dans un grand parc urbain aux multiples visages. Selon Jacques Lucan : «Fernand Pouillon cherchera toujours
à concevoir une continuité dans l’articulation des différents espaces publics
là où les «grands ensembles» inscrivaient sur le terrain la discontinuité des
édifices en se souciant rarement de la qualité des espaces.»6
5. VACCHINI Livio, Chefs-d’oeuvre éditions du linteau, p.25.
6. Lucan Jacques, préface de Fernand Pouillon, de DUBORD Bernard Félix, éditions Electa Moniteur.
50
51
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
Ainsi, l’étude de la composition urbaine permet de mieux comprendre l’origine
de ce sentiment de perfection des proportions et de grandeur des espaces.
C’est parce que nous connaissons les grands modèles du paysage tels que
le parc de Versailles, celui des tuileries, le bassin du Luxembourg ou encore
perfection.
to
ire
s.
la place des Vosges que notre oeil reconnaît les proportions d’une certaine
L’équilibre entre la densité bâtie et la proportion des espaces verts rend ce
er
ri
lieu unique. Aujourd’hui, l’espace urbain est de plus en plus dense et conges-
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
tionné, le fait d’avoir une vue lointaine et d’apercevoir l’horizon est un luxe
sans égal. La résidence Le Parc est un exemple de grand ensemble où les
espaces verts au coeur de l’opération sont ouverts au public, sans clôture.
Aujourd’hui, serait-il possible de construire une telle opération sans frontières
entre l’espace public et l’espace privé ? La possibilité d’espaces communautaires publics au sein de l’opération, montre qu’il s’agit véritablement d’un
morceau de ville poreux qui s’intègre à son contexte et non pas une opération
imperméable qui se referme sur elle-même.
52
54
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
55
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
PARCOURS DU PIéTON
La résidence Le Parc présente une échelle monumentale peu commune pour
une opération de logement. Il semble intéressant dans un premier temps, de
to
ire
s.
mettre en parallèle le parcours du piéton décrit dans le texte Le Parthénon, de
Livio Vacchini et celui du piéton à la Résidence Le Parc. Il s’agit pour les deux
er
ri
cas d’une composition urbaine à échelle monumentale au coeur de laquelle le
piéton évolue. De plus, il s’agit en quelque sorte de deux conceptions différen-
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
tes de l’ordonnancement urbain. Dans un second temps, une observation à
échelle humaine du parcours du piéton à Meudon La Forêt, permet de montrer
le passage progressif depuis l’ avenue du Général Leclerc, jusqu’au au coeur
de l’opération.
Dans un premier temps, comparons le parcours du piéton dans une échelle
monumentale telle que l’Acropole avec celui de la résidence Le parc. Dans
le texte Le Parthénon, l’auteur Livio Vachini énonce le cheminement du piéton
qui procède à un véritable rituel pour entrer sur le site du Parthénon : « L’ Acropole. On y arrive par l’escalier monumental qui traverse les Propylées. Un
portique vers l’extérieur, un autre vers l’intérieur et entre les deux un espace
couvert qu’elles ont en commun. Un Janus bifrons.»2
Il faut franchir un seuil pour entrer sur le site, comme une grande porte. A la
résidence Le Parc, il n’y a pas de mise en scène de l’entrée sur le site, le
programme de logements s’insère directement dans son contexte, la seule
séparation entre le contexte et le site est un voile d’arbres et un parking. De
surcroît il n’y a pas une entrée, mais plusieurs afin de rendre fluide l’accès
aux logements. Cependant, le site est aussi en situation de plateau à l’échelle
du bassin Parisien et à Meudon, ainsi dans le parcours d’approche vers le
site, le piéton ou l’automobiliste a progressivement une vue en surplomb sur
2. VACCHINI Livio, Chefs-d’oeuvre, éditions du linteau, p.25.
3. Ibidem.
4. Ibidem.
56
L’Acropole, Athènes, 448-438 av. J-C.
57
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
les alentours. Si on suit le parcours du piéton selon Livio Vacchini : « L’axe
suivant lequel s’organise l’accès ne se réfère à aucun des édifices répartis
dans l’espace, qui se montrent comme des personnages immobiles sur une
scène métaphysique..»3
to
ire
s.
Ici, Livio Vacchini parle du fait que l’organisation de l’espace est au plus
neutre afin que tous les édifices aient la même valeur par rapport au sol,
un axe principal aurait donné une direction et aurait souligné l’importance
er
ri
de l’un par rapport aux autres. C’est l’architecture dans tout son entier qui
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
différencie la valeur des édifices et non pas le tracé au sol. Le monument
doit pouvoir être apprécié de la même manière de tous les cotés sans établir
de hiérarchie, c’est l’horizon qui prime sur la hiérarchie des tracés : « Parmi
eux, le Parthénon apparaît dans toute sa gloire. Il se montre un peu de biais,
comme il convient à un édifice public non orienté où aucun axe ne doit jouir
d’un quelconque privilège.»4
Selon Le Corbusier, « L’axe est peut-être la première manifestation humaine ;
il est le moyen de tout acte humain. L’enfant qui titube tend à l’axe, l’homme
qui lutte dans la tempête de la vie se trace un axe. L’axe est le metteur en
ordre de l’architecture. Faire de l’ordre, c’est commencer une oeuvre. [...]
Donc l’architecte assigne des buts à ses axes. Ces buts, c’est le mur ( le
plein, sensation sensorielle) ou la lumière, l’espace (sensation sensorielle).
[...] Dans la réalité, les axes ne se perçoivent pas à vol d’oiseau comme le
montre le plan sur la planche à dessin, mais sur le sol, l’homme étant debout
et regardant devant lui.»5 A la résidence Le Parc, c’est différent de l’Acropole,
il y a de grands axes qui déterminent l’orientation. Les bâtiments créent les
limites et construisent cet axe tout en conservant un équilibre des masses,
ainsi, aucun bâtiment ne prend le pas sur l’autre. Comme dit Le Corbusier :
«faire de l’ordre c’est commencer une oeuvre»6. C’est l’ensemble qui est
monumental, et pas un élément qui se différencie des autres. Tandis qu’à
L’acropole, les monuments créent l’ordre, à Meudon les axes ordonnent le
5. LE CORBUSIER, Vers une architecture, p.151
6. Ibidem
7. Ibidem
58
monumental. Concernant l’Acropole d’Athènes, Le Corbusier dit : «Il ne faut
pas mettre les choses de l’architecture toutes sur des axes, car elles seraient
comme autant de personnes qui parlent à la fois.»7
Ainsi, à Meudon la Forêt, le fait que l’architecture ait un caractère répétitif uni-
to
ire
s.
taire, permet d’accentuer «le discours» de chaque pièce urbaine. A l’Acropo-
le, le plein des bâtiment ordonne l’espace urbain, tandis qu’à la résidence Le
Parc, c’est le vide des pièces ouvertes et des axes qui ordonne l’ensemble.
er
ri
Daprès le texte Le Parthénon, le piéton avance dans la véritable scénographie
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
urbaine de l’Acropole d’Athènes: «Le tout est isolé du monde réel ».
A Meudon, la résidence Le Parc se différencie des autres opérations alentours
par son unité qui provient d’un langage architectural commun à l’ensemble de
l’opération. De plus, le caractère monumental donné au grand ensemble de
logements lui donne un caractère particulier, différent des grands ensembles
de l’époque.Tandis qu’à l’Acropole d’Athènes, le piéton arrive sur une grande
place qui ne définit aucune direction principale et que le Parthénon règne sur
la place, à Meudon la forêt, le piéton avance d’une grande pièce extérieure à
l’autre tandis que les bâtiments restent neutres pour mettre en valeur la diversité et la hiérarchie des différents espaces.
Ce qui réunit ces deux types de propositions, c’est ce «fortissimo», le carac-
tère monumental, mis en scène différemment en fonction du programme et du
contexte dans son sens large.
Dans un second temps, focalisons
l’analyse à propos de Meudon la Forêt. Observons, à l’échelle du piéton,
la transition progressive depuis l’ave-
nue du Général Leclerc vers le coeur
de l’opération.
Avenue du Général Leclerc à Meudon la Forêt.
59
Depuis l’avenue du général Leclerc, la résidence impose son aplomb de façon perpendiculaire. Elle s’intègre au tissu urbain extérieur à l’opération qui
s’est adapté aux volumes de la résidence. L’ensemble ne paraît pas comme
un univers clos, mais comme une partie importante de la ville. L’avenue du
to
ire
s.
Général Leclerc est la rue principale où sont localisés la plupart des commer-
ces. La place de la mairie qui est aussi la place du marché s’étend au nord,
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
ainsi, l’oeuvre de Fernand Pouillon et la place du marché s’imbriquent.
La résidence Le Parc depuis la place de la mairie, sur l’Avenue du Maréchal Leclerc.
La résidence est uniquement clôturée par une rangée d’arbres (image de droite), qui produit un filtre visuel qui reste transparent visuellement sur l’intérieur
de la résidence. Une transition est établie par le parking qui dessine un seuil
60
d’entrée au site. Les voitures forment une sorte de frontière physique entre la
rue et l’intérieur de l’opération. On comprend alors par le recul vis à vis de la
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
rue qu’il s’agit d’un quartier résidentiel.
Transition entre la rue à gauche et la résidence Le Parc à droite. Les arbres créent un filtre visuel et les
voitures une barrière physique qui reste perméable.
61
Les grandes perspectives ouvertes sur le coeur d’îlot, montrent que l’accès
est public. Il n’y a aucune grille, le coeur de l’opération reste accessible librement par les piétons. Il s’agit d’un lieu semi-public car ce n’est pas un parc
urbain mais une résidence. Directement après l’espace de transition entre la
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
résidence et la rue, une perspective s’ouvre sur le coeur de l’opération.
Perspective sur le coeur de l’opération. Allée piétonne et coeur d’îlot qui relie le parking et l’avenue du
Maréchal Leclerc au bassin central de l’opération. Les arbres participent à créer un espace intime, mais
non opaque.
Les voitures traversent l’îlot ( image de droite), cependant les espaces certis
de bâtiments sont réservés aux piétons. Le week-end, les habitants du quartier viennent avec leurs enfants pour se dépenser et se divertir. Depuis l’avenue du Maréchal Leclerc, une rue perpendiculaire, à double sens traverse la
résidence du sud à l’ouest. A chaque fois que cette rue entre dans l’opération,
une perspective débouche sur le pastiche de vieilles maisons, comme si elles
62
étaient restées à travers le temps, ce sont les commerces : « La composition prévoyait deux centres commerciaux installés dans de vieilles maisons,
comme si l’on avait voulu conserver le témoignage du passé au milieu de
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
ces hauts et longs immeubles hors de l’échelle humaine.»1
La résidence Le Parc depuis l’Avenue du Marechal Leclerc, perspective sur le coeur de l’opération, au
troisième plan de la perspective: des maisons abritent les commerces.
1. POUILLON Fernand, Mémoires d’un architecte, Paris, Editions du Seuil, 1968, p 362-363.
63
A la résidence Le Parc, le piéton a toujours une vue lointaine, et lorsque les
grands axes qui structurent la composition s’interconnectent, le piéton a une
vue sur la profondeur et la largeur du site. La grande dimension des espaces
ouverts est atténuée par les différentes séquences de bâtis. De grandes pers-
to
ire
s.
pectives s’offrent au promeneur. Le traitement de la végétation permet une
grande diversité de pièces extérieures. Parfois, les perspectives sont ouvertes
et profondes, d’autres fois la végétation crée une séparation entre le coeur
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
autre.
er
ri
d’îlot et le reste de l’opération. Aucune pièce extérieure n’est semblable à une
Articulation entre le grand axe nord-sud et l’axe est-ouest qui mène au bassin central. Le promeneur à une
vue sur la longueur et la profondeur du site.
64
La végétation contraste avec la massivité et l’aplomb des bâtiments et apporte un caractère aléatoire tout en étant très dessinée. Les bâtiments et la
végétation sont complémentaires dans la construction des pièces extérieures.
Les arbres atténuent le rapport brutal entre le sol et les bâtiments. Tandis que
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
unifient l’intérieur de chaque pièce ouverte.
to
ire
s.
les bâtiments sont de différentes hauteurs, les arbres et le traitement du sol
Petite pièce ouverte donnant sur la grande place du bassin central. La végétation crée un enclos tout en
offrant des transparences sur le paysage avoisinant. La topographie crée une séparation physique entre la
grande place et le coeur d’îlot.
65
L’ordonnancement urbain de la Résidence Le Parc s’organise sur la base de
deux grands axes structurants et une multiplicité de petites pièces paysagées reliées les unes aux autres. Tandis qu’à L’Acropole d’Athènes, les divers
bâtiments règnent sur le sol comme différents personnages sur une scène,
to
ire
s.
autour desquels aucun axe ne donne de hiérarchie, à Meudon la Forêt, c’est la
présence des vides qui crée une hiérarchie et qui ordonne l’emplacement des
er
ri
bâtiments. A l’échelle du piéton, depuis la ville jusqu’au coeur de l’opération,
la transition est douce et progressive. Il n’y a pas de frontière brutale entre
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
la ville et le grand ensemble, mais uniquement des barrières visuelles crées
par des voiles d’arbres et un recul physique dû aux places de parking. A deux
extrémités, la route entre dans l’opération et en bout de perspective, deux
pastiches de vieilles maisons abritent des petits commerces de proximité.
Cela donne une porosité supplémentaire qui incite les riverains à entrer pour
faire leurs achats. Ainsi, le caractère monumental de la Résidence Le Parc est
compatible avec l’échelle de la promenade piétonne, puisqu’elle est au centre
de la conception de l’espace urbain. Les pièces ouvertes sont véritablement
contenues par les bâtiments et le piéton est toujours dans un espace défini
qui reste ouvert sur la ville et sur le reste de l’opération. Comme le terme de
la «résidence Le Parc» l’indique, il s’agit d’un véritable parc urbain commun
aux habitants et ouvert à tous.
66
68
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
69
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
REPETITION ET ALTERNANCE
Donald Judd est un artiste qui utilise parfois la répétition d’un seul élément
dans son travail. Cette répétition permet de mettre en valeur l’élément même
to
ire
s.
et de faire ressortir le rapport simple entre les éléments et l’unité de l’oeuvre.
La notion de répétition apparaît dans la construction de la résidence Le parc.
er
ri
La juxtaposition d’un même bloc de pierres pour former une pile et la répéti-
tion «infinie» de celles-ci permet de mettre en valeur la matérialité de la pile
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
de pierres, les rapports de pleins et de vides ainsi que l’unité de l’oeuvre.
Aucun élément ne doit pouvoir perturber cette lecture simple entre les pleins
et les vides, entre les piles de pierres et leurs espacements. De même lorsqu’il
s’agit d’un mur plein percé ou de structures poteaux poutres, la répétition de
ces systèmes constructifs ou leur alternance régulière permet de mettre en
évidence la formation du mur et son percement depuis un mur plein, à sa
transformation en colonnes jusqu’à sa structure en poteaux-poutres. C’est
en quelque sorte une variation sur le thème de la répétition des éléments
structurant le mur. De plus, la structure parfois monumentale des bâtiments
ré interprète des éléments classiques de l’architecture et révèle une réflexion
sur la matière entre masse et transparence à l’échelle globale des bâtiments.
Dans la formation de ces volumes monumentaux, se pose alors la question
de l’unité et de la répétition. La reproduction de l’élément permet de passer
de la plus petite échelle à la plus grande. La structure est fondatrice de cette
architecture, et la matière de la pierre est apparente dans son état le plus
brut. La question du traitement des menuiseries du vitrage, sans nuire à ces
rapports de plein et de vides, est alors importante. Se pose alors en écho à
l’élément répétitif de la pierre, l’élément répétitif du vitrage. C’est la répétition
d’un même élément de vitrage qui permet de lire le percement comme une
unité et comme un vide entre les éléments de matière.
70
to
ire
s.
er
ri
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
Donald Judd Sans titre 1963
1165 X 1600
Le rapport identique et répétitif entre les modules de masses pleines et les vides permet de mettre en
valeur la différence de perception en fonction du point de vue du visiteur.
71
Par ailleurs, la fenêtre est le seul élément qui marque la dimension de l’individu. La répétition du module de vitrage appuie l’idée que l’individu est perçu
dans la communauté et à l’échelle urbaine.
J’analyserai alors les différentes variations sur le thème de la répétition à trade la pierre :
to
ire
s.
vers quatre parties qui reprennent les quatre différents modes d’assemblages
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
piles de pierres verticales.
er
ri
1. Immeubles de dix étages dont la structure porteuse est la répétition de
2. Immeubles dont la façade est constituée d’une structure poteaux- pou-
tres.
3. Immeubles de 4 étages composés d’une structure qui alterne entre un mur
porteur et une structure poteaux-poutres.
4. Immeubles de quatre étages dont la structure est une alternance entre
un mur de pierre et des pans vitrés.
Puis je soulignerai les constantes et les variations entre les différents types
de percements.
Précisons que ces quatre points s’appuient sur quelques données générales.
La structure de l’ensemble renvoie à la taille des espaces urbains et à l’échelle
de la communauté. D’une profondeur de 11mètres pour les grands immeubles et de 9 mètres pour les plus bas, les appartements sont essentiellement
traversants. Le rapport du plan entre l’orientation des chambres et des séjours
dépend de la forme urbaine et des différents espaces extérieurs.
Les circulations sont au centre du bâti afin de laisser aux pièces de vie le
maximum de façades. Le rythme de la structure équivaut à la largeur des
chambres. Cette largeur est déterminée d’après le module de la pièce.
72
to
ire
s.
er
ri
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
largeur d’une chambre
salles de bains
cuisines
séjours
Ici, l’appartement central qui est
mono-orienté a un séjour dont
les limites ne respectent pas la
travée structutrelle. Cela montre que ce système permet une
flexibilité intérieure. La disposition intérieure peut varier car les
façades sont porteuses.
La cuisine est souvent comprise dans une travée, ainsi que la salle de bains
dans son prolongement. La largeur des séjours est équivalente à deux fois la
largeur d’une chambre. Le rythme resserré de la structure apparente marque
dans son rythme, la dimension standard d’une pièce et dans sa verticalité,
l’ossature unitaire du bâtiment. L’échelle de l’individu est contenue dans une
structure globale de plus grande échelle. Il n’y a pas de singularité visible de
l’extérieur mais une uniformité. C’est une fois arrivés chez eux, que les habitants entrent dans leurs univers personnels. Une structure secondaire de po-
teaux à l’intérieur du plan montre une possibilité de modularité des espaces.
Les percements et menuiseries sont toujours dans la continuité d’un traitement qui met en valeur la structure première du bâtiment. Ainsi, quatre grandes variations sur la répétition sont identifiables.
73
1. Immeubles de dix étages dont la structure porteuse est la répétition de
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
piles de pierres verticales.
Le percement se fait alors sur toute la verticalité, afin d’accentuer le rapport
du plein et du vide, l’alternance de la massivité et de la transparence. Aucun
élément secondaire ne doit perturber la lecture de la structure première du
bâtiment. Le nez de dalle est en retrait sur le nu intérieur de la pile de pierre.
Le vitrage s’aligne alors au même nu afin que celui-ci disparaisse en fonction
du point de vue du piéton, pour qu’il n’aperçoive que le rythme de pleins et de
vide des «colonnes».
Ainsi, la dimension d’une fenêtre qui équivaut à celle d’un module de pièce,
disparaît dans la dimension d’une travée verticale qui elle-même s’efface derrière la répétition de la structure et l’abstraction globale à laquelle elle renvoie.
Le garde corps est l’élément qui assoit et marque les proportions d’une fenêtre. C’est le seul élément qui détermine un usage domestique. Les menuise-
ries et le garde corps sont traités dans la verticalité, il n’y a aucune coupure
horizontale à part la limite du garde corps et les nez de planchers. Le rapport
entre l’intérieur des logements et l’extérieur est direct. La profondeur de la
structure, permet d’intérioriser et de privatiser le logement, qui est transparant
vers l’extérieur. L’espace entre la profondeur de la structure et le vitrage est
un lieu intersticiel qui crée un recul et une transition par rapport à l’extérieur.
Depuis son logement, l’habitant est directement en rapport avec le grand es-
74
pace vert. Le regard peut aller loin et le corps est directement pris entre deux
dimensions : celle humaine de l’appartement et celle urbaine du grand espace
paysagé. Le seul élément singulier qui distingue les logements les uns des
autres de l’extérieur, est la couleur des rideaux que les habitants mettent à
to
ire
s.
l’intérieur des logements. Ce détail montre l’uniformité de l’architecture et la
particularité du choix des habitants. L’architecture est un cadre uniforme que
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
les habitants viennent personnaliser.
75
2. Immeubles dont la façade est constituée d’une structure
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
Poteaux- poutres.
La façade monumentale de 100m de long qui longe la nationale est différente
des autres dans son traitement. Les nez de dalles apparaissent et constituent
un maillage avec les piliers verticaux et délimitent ainsi des caissons. Ce dispositif saillant permet à la fenêtre d’être en retrait par rapport à un cadre qui
donne le sentiment de protection vis à vis de l’extérieur et du bruit de la route
nationale. Cette façade sud-ouest est aussi protégée du soleil grâce à la position intérieure du vitrage par rapport à la fenêtre. L’aspect du bâtiment creusé
de caissons donne l’impression d’un mur texturé et habité. Les fenêtres font
toute la hauteur du percement. Elles expriment le vide entre les éléments de
structure. Derrière cette structure très rigide, chaque fenêtre a sa singularité,
par la couleur des rideaux, le type de stores utilisés. Les stores d’origine
étaient tous en tissu orange. Il en reste encore quelque uns, cependant les habitants ont parfois remplacé ces stores par des volets roulants automatiques
ou des volets dépliants en bois. La fenêtre reste ici l’élément de répétition qui
mène à l’abstraction de la façade. Celle-ci a l’apparence d’un mur protecteur
par rapport à l’extérieur. De biais, selon le point de vue du piéton, la façade
exprime la matérialité du mur entre pleins et vides. Il y a au pied de ce bâtiment un trottoir et les places de parkings. Puis une route et un mur anti-bruit
76
avant la route nationale. Il y a alors un large retrait et un grand espace vide
qui est tenu ici par cette façade monumentale et imposante. Soulignons ici
un contraste entre la dureté et la tristesse de ce contexte qui correspond à
l’univers des voitures, des infrastructures et des déplacements. En revanche
to
ire
s.
l’autre façade qui donne sur l’intérieur de l’opération face à un grand espace
vert avec des arbres, appartient à un univers calme où la nature apaise. A
l’intérieur des appartements ce contraste doit être fort. Il serait intéressant de
er
ri
voir comment les appartements sont organisés à l’intérieur. Ici, la dimension
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
de la fenêtre représente la dimension modulaire de la pièce et c’est la répétition de cet élément qui crée la façade. Ici le sentiment d’individu est noyé dans
la répétition, c’est la globalité qui prime.
77
to
ire
s.
er
ri
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
Lorsque cette structure est à une autre échelle, pour des bâtiments de quatre
étages, et que ce bâtiment donne sur un espace paysagé à échelle humaine,
le rapport est tout à fait différent. Ici, la dimension de la pièce et le module
de la fenêtre rappellent l’échelle humaine qui est mise en valeur par un jardin
intimiste. Cette structure uniforme, répétitive et rectiligne permet de mettre en
valeur la sinuosité du jardin intérieur.
Cette structure dans une situation urbaine opposée à la précédente crée le
rapport inverse. Dans une petite pièce paysagée, la répétition de la structure
d’un immeuble de peu d’étages évoque des proportions humaines et met en
valeur ces dimensions et l’espace qui est au centre. Tandis que dans un grand
espace, la répétition de la structure au sein d’un immeuble de dix étages met
en valeur la répétition et l’idée de communauté plutôt que celle de l’individu.
Ainsi, une même expression architecturale peut renvoyer à des sentiments
très différents en fonction des proportions de hauteur et de largeur, des bâtiments et des espaces extérieurs.
78
3. Immeubles de 4 étages composés d’une structure qui alterne entre un mur
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
porteur et une structure poteaux-poutres.
Le système poteaux poutres est utilisé lorsque la façade arrière est obstruée
par le pignon des bâtiments perpendiculaires. Ainsi, ces appartements sont
mono-orientés. La structure poteaux-poutres crée un cadre à la fenêtre qui est
positionnée sur le nu intérieur du poteau. Le cadre de la structure autour de
la fenêtre permet un espace intersticiel entre l’extérieur et l’intérieur, un recul,
qui donne un sentiment de protection et d’intériorité entre l’espace privé de
l’appartement et l’espace communautaire de la «pièce ouverte». Ici, le vitrage
est divisé en deux parties qui permettent d’ouvrir la fenêtre en partie haute et
d’avoir le bas de celle-ci en guise de garde corps. Le recul est alors volontaire,
il n’y a pas de garde corps qui permette d’habiter physiquement le recul créé
par l’épaisseur de la structure. Il ne s’agit pas de pouvoir ouvrir la fenêtre sur
toute la hauteur comme c’est le cas dans d’autre situations. De plus, cette
avancée de la structure poteaux poutres sur la façade permet de protéger les
ouvertures du soleil du sud grâce à l’ombre portée que cela produit. Ce petit
retrait permet aussi un nouvel usage qui est celui de mettre des pots de fleurs
le long de la fenêtre.
Le reste du bâtiment est porté par des murs dont les percements verticaux
descendent jusqu’à la dalle du plancher. Il s’agit des chambres qui donnent
79
sur le plus grand espace tandis que les séjours donnent sur le jardin de coeur
d’îlot de l’autre coté. Lorsque le percement se trouve dans un mur porteur, la
fenêtre est plus petite afin qu’on lise la masse pleine avant le percement. Ici, le
percement dans le mur crée une ouverture plus introvertie et donne un senti-
to
ire
s.
ment d’intériorité par la présence du mur. Cependant le percement s’ouvre au
maximum dans la verticalité et descend jusqu’au nez de dalle ce qui produit
tout de même un rapport direct entre intérieur et extérieur. Dans la compo-
er
ri
sition du mur, une rangée de pierres est de couleur plus claire au niveau de
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
la dalle de plancher afin de rendre lisible la construction. Ainsi, les séjours
sont tournés vers une vie intérieure communautaire aux trois immeubles qui
partagent cet espace paysager et les chambres sont tournées du coté où les
vis à vis sont les plus éloignés. La logique de façade des pleins et des vides
est alors liée de façon intrinsèque à l’ordonnancement urbain, elle varie en
fonction des volumes qui s’assemblent. De même l’organisation interne des
appartements résulte de l’ordonnancement urbain et non pas de l’orientation
du soleil puisque tous les bâtiments sont déjà orientés nord-sud ou est-ouest.
Ainsi, les chambres sont au sud-ouest et les séjours au nord-est. L’ important
étant que les parties communes de l’appartement soient en rapport direct
avec les parties communes de l’entrée et du petit jardin. Les pièces les plus
intimes sont en rapport avec la situation urbaine qui permet le plus d’intimité
sans vis à vis.
La structure porte un dernier étage en retrait dont le balcon avance jusqu’au
nu des poteaux saillants et crée un débord en façade qui laisse une ombre
portée continue. Cette ombre souligne la linéarité et la continuité du dernier
étage. Ce dernier étage en retrait forme un balcon continu et divisé entre chaque appartement. Cette situation de balcon crée un surplomb sur la «pièce
ouverte». Une structure de petits poteaux suit un module de vitrage répété
sur toute la longueur dont les dimensions sont celles des vitrages verticaux
des étages précédents. Ces poteaux portent la toiture. Une alternance entre
80
les parties pleines et les parties vitrées détermine les ouvertures. La localisation des percements est semblable à celle des appartements du dessous,
seulement la lecture de ce dernier étage est singulière et uniforme entre les
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
pleins et les vides.
81
4. Immeubles de quatre étages dont la structure est une alternance entre
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
to
ire
s.
un mur de pierre et des pans vitrés.
Ce schémas structurel montre à nouveau l’idée de la colonne qui porte une
architrave, seulement ici, la colonne est encore un pan de mur. C’est une
déclinaison du premier système constructif de piles de pierres qui portent un
toit à une autre échelle.
Les parties vitrées correspondent au séjour et les parties pleines aux cuisi-
nes. Lorsque cette façade donne sur le petit jardin d’entrée aux immeubles, à
droite et à gauche, au dessus des entrées, une loggia permet de marquer cette
entrée et de créer un rapport direct extérieur en relation avec le coeur d’îlot.
Les plans des appartements sont symétriquement inversés afin de donner
plus de surface murale pour exprimer le plein, car la massivité du mur doit
primer sur le vide.
Cette massivité porte le dernier étage qui est semblable à la typologie précédente. Les parties vitrées entre les pans de murs font transparaître qu’il s’agit
de deux appartements, uniquement par la juxtaposition des menuiseries au
centre. Le percement est perçu comme uniforme. Les menuiseries sont sur le
nu intérieur du mur et le balcon est au nu du nez de plancher. Le garde corps
permet d’ouvrir les portes fenêtres sur toute la hauteur et ainsi d’être dans
un rapport de proximité avec l’espace extérieur. Cette possibilité produit un
82
espace intermédiaire entre l’intérieur privé des appartements et le jardin public
intime et communautaire. L’alternance entre pleins et vides est plus espacée
que lorsqu’il s’agit d’une alternance entre des piles de pierres verticales, mais
elle est toujours aussi régulière. Dans d’autre situations que dans les petis
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
er
ri
sur toute la longueur.
to
ire
s.
coeurs d’îlots, face à de plus grands espaces ouverts, la structure se répète
83
Ainsi, au sein de ces variations, différents éléments restent constants :
- la conception du vitrage comme un vide au sein de la structure ou comme
un percement du mur.
- Les bâtiments de dix étages ont un système de colonnes de pierres porteu-
to
ire
s.
ses ou de poteaux poutres.
- Les bâtiments de quatre étages utilisent deux systèmes constructifs prinstructure de petit poteaux qui portent la toiture.
er
ri
cipaux et un secondaire : le mur porteur, la structure poteaux poutres et une
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
- Le rapport au sol du percement de la fenêtre : le percement descend toujours jusqu’au nez de plancher.
- La position intérieure du vitrage par rapport à la structure du mur ou du
poteau.
- Pour toute l’opération, il semblerait qu’il n’y ait que deux dimensions de
vitrages :
- un module vertical sur toute la hauteur utilisé pour tous les per-
cements de dalle à dalle, dont il existe deux modèles : un ouvrant sur toute
la hauteur lorsqu’il y a un garde corps et un second seulement à partir d’un
mètre au dessus du sol lorsqu’il n’y a pas de garde corps ;
- et un module de fenêtre à deux ouvrants pour les percements
dans le mur.
Dans les angles, les bâtiments de 4 étages
se retournent en exprimant la matérialité du
mur plein en continuité avec l’expression
globale de la façade. Ce rapport entre un
bâtiment plus bas et un plus haut, dont la
structure est différente, résume bien la simplicité et en même temps la complexité de
cette opération.
84
Il y a alors trois systèmes constructifs principaux. La structure du mur et celle
du poteaux-poutres sont mixés pour créer un type de façade qui combine les
deux. Le percement descend toujours jusqu’au nez de plancher : cette ouverture permet un à l’espace intérieur d’être directement en rapport et ouvert sur
to
ire
s.
les espaces verts. De plus, hormis lorsqu’il y a un percement dans un mur,
aucun élément, à part la structure et les menuiseries de vitrages, ne marque
la limite entre l’intérieur et l’extérieur. C’est l’épaisseur de cette structure qui
er
ri
délimite un espace de transition entre les deux milieux et le vitrage crée la sé-
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
paration. De surcroît, on peut identifier deux proportions de bâtiments, ceux
de dix étages et ceux de quatre étages qui créent un rapport d’échelle différent. Les grand bâtiments ont une structure répétitive qui renvoie à l’infini et
à l’abstraction tandis que les bâtiments moins hauts séquencent les façades
dans l’horizontalité entre des pleins et des vides. Les structures des bâtiments
plus bas, qui alternent, redonnent une dimension plus humaine et des proportions à l’échelle du piéton. Ainsi, cette alternance entre des bâtiments hauts
et des plus bas permet de donner en permanence une double sensation entre
universalité, immensité et intimité à l’échelle humaine. Ce rapport se ressent
dans la structure même des grands immeubles qui est la répétition d’unités
plus petites.
Il est alors intéressant de remarquer qu’il y a plusieurs niveaux de lecture :
un niveau abstrait concernant le traitement de la répétition de systèmes, et
un autre très pragmatique à l’échelle de la fenêtre et de la perception de l’être
humain. Cette double lecture montre deux univers complémentaires en architecture. Soulignons ainsi que l’architecte a réussi à concilier une conception à
l’échelle urbaine avec le pragmatisme à l’échelle humaine.
85
86
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
87
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
to
ire
s.
er
ri
BIBLIOGRAPHIE
seilles, éditions Imbernon, avril 2001.
to
ire
s.
BONILLO Jean-Lucien, Fernand Pouillon, architecte méditerranéen, Mar-
teur.
er
ri
DUBOR Bernard Félix, Fernand Pouillon, Milan-Paris, éditions Electa Moni-
Ec
D ol
oc e
um d'a
en rch
t s ite
ou ct
m ure
is
au de
dr la v
oi ill
td e
'a &
ut de
eu s
r t
DAVANTHERY Patrick et LAMUNIèRE Inés, PATHFINDERS, édition Birkaüser,
La machine d’invention de Joseph Abram, 2005.
KAHN Louis, Silence et lumière, 4ème édition, Paris, éditions du Linteau, avril
2006.
LECORBUSIER, Vers une architecture, Paris, 1923.
LUCAN Jacques et SEYLER Odile, Fernand Pouillon architecte : Pantin,
Montrouge, Boulogne-Billancourt, Meudon-la-Forêt, Paris, Pavillon de
l’Arsenal, édition Picard, avril 2003.
LUCAN Jacques, Composition, non-composition Architecture et théories,
XIXe-XXe siècles, édition Presses polytechniques et universitaires romandes,
Lausanne, 2009.
MASIERO Roberto, Livio Vacchini works and projects.
POUILLON Fernand, Mémoires d’un architecte, Paris, éditions du Seuil,
1968.
RIVALTA Luca, Louis Kahn La construction poétique de l’espace, éditions Le
moniteur, Septembre 2003.
LAPIERRE Eric, Architecture du réel architecture contemporaine en france,
Paris, édition du moniteur, 2003.
VACCHINI Livio, Chefs-d’oeuvre, éditions du linteau, 75p.
89
Téléchargement