des récepteurs spécifiques comme les Toll like receptors
(TLR) induisent l’expression de FT au niveau des cellules
endothéliales et des cellules de l’inflammation comme les
monocytes, aboutissant à une génération très importante
de thrombine. L’activation ou l’apoptose cellulaire (mono-
cytes, plaquettes, cellules endothéliales) associée à la
réponse inflammatoire est responsable de la formation de
microparticules riches en FT et en phospholipides chargés
négativement comme les phosphatidylsérines indispensa-
bles à la formation des complexes enzymatiques de la
cascade de la coagulation. Les acteurs de la coagulation
ont un rôle pro-inflammatoire via les protease activating
receptors (PAR) : les facteurs de la coagulation activés
activent les PAR de différents types cellulaires (cellules
endothéliales, monocytes…). Ces récepteurs une fois acti-
vés ont un effet pro-inflammatoire et procoagulant direct
et indirect via l’expression de cytokines : ils sont respon-
sables d’une expression accrue de molécules d’adhésion
(ICAM-1, VCAM-1, E-sélectine) à la surface des cellules
endothéliales, favorisant leur interaction avec les cellules
de l’inflammation (cellules mononucléées, polynucléaires,
plaquettes) et leur activation. Ils peuvent induire la forma-
tion de microparticules riches en FT et en phosphatidylsé-
rines à partir de différents types cellulaires dont les pla-
quettes, les monocytes et les cellules endothéliales. Enfin,
l’activation des PAR est associée à la production de cyto-
kines pro-inflammatoires, comme TNFα, IL-1 et IL-6.
Ces cytokines entretiennent la réponse inflammatoire et
l’activation de la coagulation par l’expression de molécu-
les d’adhésion, l’activation des cellules endothéliales et la
formation de microparticules. Les cytokines pro-
inflammatoires et les facteurs de la coagulation ont donc
une action synergique locale sur la réponse inflammatoire.
Dans le paludisme, la séquestration des hématies parasi-
tées au niveau des capillaires est associée à une activation
des cellules endothéliales : l’expression membranaire par
ces hématies de molécules, les Plasmodium falciparum
erythrocyte membrane proteins (PfEMP), permet l’adhé-
sion à l’endothélium et l’activation des cellules endothé-
liales [13]. Les hématies parasitées sont capables d’activer
aussi les plaquettes grâce à la sécrétion de différentes
substances pro-agrégantes comme l’adénosine diphos-
phate (ADP) [9]. L’activation des cellules endothéliales
et des plaquettes constitue une étape indispensable pour
l’hémostase primaire, ainsi que pour l’initiation de la coa-
gulation grâce à l’expression par les cellules endothéliales
activées de FT. L’hémolyse des hématies parasitées per-
met l’extériorisation en grande quantité de phosphatidyl-
sérines [4], phospholipides intervenant dans l’amplifica-
tion de la cascade de la coagulation [13]. Le résultat est
une génération très importante de thrombine et la forma-
tion de fibrine dans la microcirculation. Comme dans le
sepsis, les facteurs de la coagulation activés activent les
PAR des cellules endothéliales et des monocytes, ce qui
aboutit à une amplification des réponses inflammatoire et
procoagulante via un cycle d’entretien entre les deux
réponses. D’autres intervenants (complexes immuns,
voie contact, complément, polynucléaires) et certaines
substances contenues dans les hématies parasitées (hémo-
zoïne, glycosylphosphatidylinositol, hème oxydé) sont
capables d’activer aussi la réponse inflammatoire et
d’entretenir le cycle inflammation-coagulation.
Les désordres de l’hémostase semblent spécifiques à
P. falciparum [8], alors que la réponse inflammatoire
décrite plus haut est retrouvée aussi bien dans le palu-
disme à P. falciparum qu’àP. vivax. Par exemple, la
thrombopénie est observée dans les deux formes, mais
elle est de nature immunologique dans l’infection à
P. vivax alors qu’elle est secondaire à une consommation
dans l’infection à P. falciparum. La différence majeure est
l’expression du FT, retrouvée uniquement dans l’infection
àP. falciparum [8]. Cette expression de FT, déjà mise en
évidence dans le sepsis bactérien et responsable de
l’entretien du cycle inflammation-coagulation, contribue-
rait à l’interaction entre endothélium et éléments sanguins
circulants (polynucléaires neutrophiles, monocytes, pla-
quettes), entraînant des lésions endothéliales, une aug-
mentation de la perméabilité vasculaire, une vésiculation
et une apoptose cellulaire. Ce cycle a sans doute un rôle
non négligeable dans la défaillance multiviscérale obser-
vée dans les formes graves de paludisme. Il est très ampli-
fié au niveau du cerveau, dû à l’absence de thrombomo-
duline, inhibiteur de la thrombine, et pourrait expliquer les
formes graves cérébrales observées dans le neuropalu-
disme où il a été mis en évidence une accumulation de
monocytes et de plaquettes, la présence de microparticules
et une apoptose des cellules endothéliales au niveau des
vaisseaux cérébraux [8].
La gangrène
La gangrène associée à un paludisme sévère à P. falcipa-
rum a surtout été décrite en zone endémique (13 cas endé-
miques et 5 touristes) et reste un événement peu fréquent
[4-6]. Elle peut être observée précocement (10 des cas
décrits dont notre patient) ou se développer quelques
jours après la prise en charge et le début du traitement
(à J3 pour les 8 autres cas décrits), comme d’autres com-
plications associées au paludisme sévère [12]. La survenue
d’une gangrène au cours d’un paludisme est multifacto-
rielle [4, 5] et la CIVD est un de ces facteurs : dans la
majorité des cas de gangrène décrits [4-6], il est retrouvé
une CIVD associée (au moins 14 cas sur 18). La CIVD
chez les cas décrits ne semble pas être majoritairement
secondaire à une infection bactérienne [3, 4, 11], considérée
comme la principale cause de CIVD dans le paludisme [2].
Gangre
`ne, CIVD et paludisme
Ann Biol Clin, vol. 67, n
o
5, septembre-octobre 2009 571
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