dernière, le taux d’incidence (2,4 p 100 h.an) était
en augmentation par rapport à 2007.
Il est communément admis que le devenir du patient
dépend avant tout du délai diagnostique, et à côté de
l’examen du frottis sanguin, technique de référence et
seule preuve formelle mettant en évidence directement le
parasite, les tests rapides ont trouvés naturellement leur
place. Ces tests ont l’avantage de leur simplicité
d’utilisation et de leur rapidité mais leur interprétation
reste délicate. Si l’on craint surtout le résultat faussement
négatif qui peut être dramatique pour le malade, la
surestimation, bien que moins dangereuse, égare le
diagnostic et n’est pas sans conséquences notamment en
terme de disponibilité opérationnelle, de coût, et de
surveillance épidémiologique.
À propos de deux observations, nous rappelons le
principe de ces tests dont découle les précautions
d’emploi et présentons un aspect méconnu de leur
limite : le résultat faux positif lié à un non respect des
consignes d’utilisation.
Observations.
La compagnie d’infanterie de la 13eDemi Brigade de
Légion Étrangère (13eDBLE), stationnée à Djibouti
rentrait d’une mission de deux mois à Birao en République
Centrafricaine (RCA) à la fin du mois de mai 2007 (saison
chaude et sèche). La prophylaxie anti-palustre choisie
était la doxycycline (100 mg/j). Le lendemain de leur
retour à Djibouti, deux légionnaires consultaient au
service médical d’unité (SMU) de la 13eDBLE pour une
diarrhée fébrile. L’hypothèse diagnostique du paludisme
de retour de zone d’endémie était naturellement évoquée,
et un test de diagnostic rapide (TDR) de type Core™
Malaria Pan/Pv/Pf (Core-Diagnostics, Birmingham,
UK) était réalisé en salle de soins sur une paillasse du
SMU. Les tests étaient positifs pour Plasmodium
falciparum pour les deux patients. Les deux légionnaires
étaient adressés au service des urgences du Groupement
médico-chirurgical Bouffard (GMCB). Un prélèvement
sanguin était réalisé et adressé au laboratoire de biologie
clinique du GMCB accompagné d’une demande
d’hémogramme, numération plaquettaire, et d’une
confirmation du diagnostic d’espèce avec calcul de la
parasitémie. Les militaires étaient hospitalisés dans le
service de médecine du GMCB.
Au laboratoire, les taux de plaquettes étaient normaux
et les deux tests de concentration à l’acridine orange
(QBC®test) négatifs. Les frottis sanguins ne retrouvaient
pas de parasites, l’aspect cytologique étant normal
hormis la présence de quelques lymphocytes activés.
Les deux patients âgés respectivement de 25 et 29 ans,
n’étaient plus fébriles à leur admission dans le
service de médecine, et leur examen clinique était
non contributif. Ils avouaient n’avoir suivi aucune
chimioprophylaxie anti-palustre. Le reste du bilan
biologique était sans particularités en dehors
d’un syndrome inflammatoire (CRP à 83 mg/l et 53 mg/l).
Les contrôles des tests QBC®et de la détection de
l’HRP2 restaient négatifs. Les coprocultures et recherche
de kystes, œufs, parasites (KOP) ne mettaient pas
en évidence d’agent pathogène chez le premier patient,
l’absence de selles ne permettant pas de réaliser de
coprocultures-KOP chez l’autre légionnaire.
Dans les deux cas, l’évolution était favorable, et
autorisait un retour à l’unité après 48 heures
d’observation. Bien que les CRP étaient supérieures
aux valeurs attendues au cours des diarrhées associées
aux virus entériques (moyenne = 34 mg/l), le diagnostic
de sortie retenu était une gastroentérite aiguë
probablement d’origine virale.
Devant cette discordance entre les TDR réalisés au
SMU et les examens réalisés au laboratoire du GMCB,
une enquête était menée. Elle mit en évidence une
initiative de l’infirmier ayant réalisé le test qui entraîna
une mauvaise utilisation du test de diagnostic rapide au
SMU. En effet, le flacon de tampon de lyse et migration
fourni par le constructeur du coffret étant vide, le test avait
été réalisé avec de l’eau pour préparation injectable (PPI)
à la place du réactif dédié.
Discussion.
Rappels : les tests de diagnostic rapide du
paludisme.
Principe des tests de diagnostic rapide.
Tous les TDR reposent sur le même principe et
permettent de mettre en évidence la présence de
Plasmodium. Ils sont caractérisés par leur facilité
d’emploi et d’interprétation, l’absence de traitement
initial de l’échantillon (sang total), et l’obtention d’un
résultat en moins de 30 minutes (1). Ces tests sont basés
sur la détection d’antigènes circulants (protéines ou
enzymes) spécifiques de l’hématozoaire. Ils mettent
en évidence, d’une part, la glycoprotéine HRP-2
(histidine rich protein-2) spécifique de l’espèce
Plasmodium falciparum ; d’autre part, l’isoenzyme LDH
dans sa conformation pan-LDH : commune à toutes les
espèces plasmodiales, ou spécifique de l’espèce
Plasmodium vivax (Pv LDH), ou de l’espèce Plasmodium
falciparum (Pf LDH). Le principe des TDR est
l’immunochromatographie sur membrane. Ils se
présentent sous forme de petit boîtier type « savonnette ».
Le sang total, recueilli la plupart du temps au niveau de la
pulpe du doigt est déposé à l’une des extrémités d’une
membrane de nitrocellulose. Si l’antigène recherché est
présent, il se lie avec des anticorps monoclonaux
spécifiques (Ac anti-HRP-2, Ac anti-pan LDH, Ac anti-
Pf LDH, Ac anti-Pv LDH) d’origine animale et
préalablement déposés sur la membrane. Ces anticorps
sont marqués d’un chromogène, le plus souvent à l’or
colloïdal. L’addition d’un tampon de lyse permet aux
complexes antigènes – anticorps de migrer par capillarité.
Ils sont arrêtés par d’autres anticorps fixés à la membrane,
dirigés contre le même antigène. Il se forme alors un
sandwich: un résultat positif se traduit par l’apparition
d’une bande colorée. L’excès d’anticorps d’origine
animale va continuer à migrer et sera arrêté plus en
aval par un anticorps anti-anticorps animal fixé à la
membrane, une nouvelle ligne colorée valide ainsi le
bon fonctionnement du test et sert de contrôle interne.
138 j. maslin