
réductionssalariales et d’amoindrissement delacouvertureétatique
sociale. Plus près de nous, la faculté des multinationales de déplacer
leurs unités de production à l’échelle mondiale, avec comme seule
considération les intérêts financiers des actionnaires, a réactivé de
vieilles craintes, parfois disproportionnées au regard de la réalité, et
engendré des mouvements de contestation voire de résistance dans
les sociétés civiles.
Lesinquiétudessoulevéesdanslechampsocialsouslescoupsde
la libéralisation ramènent souvent avec elles l’idée d’une régulation
plusstrictede l’économie parledroit.L’insertion d’une clause sociale
dans les accords de commerce internationaux en vue de sauvegarder
certains acquis sociaux sous peine de sanctions économiques est,
dans ces moments, accueillie plus favorablement. Les dernières
décennies,caractériséesparlamondialisationdeséchangeséconomi-
ques,nefontpasexceptionàlarègle.Ellesontfaitrenaîtrelesdébats
sur l’opportunité d’une clause sociale dans une économie globale et
moinsterritoriale.Mais cette affirmation pose problème.Ellesemble
présenter la mondialisation ou la libéralisation des échanges écono-
miquessouslesignedelanouveautéenl’enserrantdanslesdernières
décennies. Or dès ses origines2, le capitalisme a une vocation mon-
dialeetn’estenaucunefaçoncontenuàl’intérieurdesfrontièrespoli-
tiques étatiques européennes. Si le phénomène contemporain de
mondialisation comporte des modalités bien à lui, la mondialisation
économiqueen souscrivant àl’espritdu capitalisme n’est pasunphé-
nomène purement contemporain. Elle doit plutôt être configurée en
trois séquences qui se déploient successivement sans évacuer les
caractéristiques des prédécesseurs: l’économie internationale, l’éco-
nomie multinationale et l’économie globale3.
L’économie internationale décrit la séquence temporelle où les
échanges de biens et de services entre les États sont prédominants.
Les territoires nationaux en sont l’épicentre et la compétitivité se
mesure à l’échelle de la capacité productive de chaque pays et de son
6XVeCONFÉRENCE DES JURISTES DE L'ÉTAT
2. Origines par ailleurs fort contestées, comme souvent l’histoire de l’origine des
concepts d’importance peut l’être. Voir entre autres à ce sujet Jean BAECHLER,
Lecapitalisme.Tome1:Lesorigines,coll.folio/Histoire,Paris,Gallimard,1995.
3. Cette configuration de la mondialisation est proposée et reprise de Charles-
Albert MICHALET, Le capitalisme mondial, Quadrige, Paris, Presses universi-
taires de France, 1998. Pour la confrontation de ces trois temps de la mondiali-
sation aux normes du droit du travail, lire Marie-Ange MOREAU et Gilles
TRUDEAU, «Les normes du droit du travail confrontées à l’évolution de l’éco-
nomie: de nouveaux enjeux pour l’espace régional», (2000) 4 Journal de Droit
international 915.