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chrétiennes3. À côté de cette sécularisation est apparue en même 
temps, en partie en raison des migrations mais pas exclusivement, une 
pluralisation religieuse, qui a contribué à affaiblir davantage encore 
le caractère évident de l’horizon de sens catholique. La sécularisation 
de la Belgique a conduit à une société postchrétienne, qui n’est cepen-
dant pas, sans plus, areligieuse ou athée. À peu près un tiers de la 
population belge se décrit lui-même comme n’appartenant à aucune 
dénomination religieuse, sans se considérer comme athée4, et nombre 
de ces personnes déclarent être sensibles au spirituel et au transcen-
dant5. La situation postchrétienne est donc, en même temps, une situa-
tion  postséculière. Dans ces deux catégories, le terme «post» ne 
signifie pas simplement «après» (comme si ces deux réalités et leurs 
effets avaient disparu), mais plutôt que, culturellement parlant, notre 
relation à la foi chrétienne et au processus de sécularisation a changé6.
À les considérer de plus près, ces processus ont abouti à une situa-
tion convictionnelle qui se caractérise, en Belgique, par une étrange 
combinaison. D’une part, par défaut, une sorte de position postchré-
tienne de quasi-neutralité – influencée par la sécularisation – est mise 
en avant dans l’espace public. D’autre part, dans le cadre de ce qu’on 
appelle société multiculturelle, une sorte de pluralisme postséculier de 
convictions philosophiques et religieuses est reconnu. Cette combi-
naison est cependant marquée par une ambiguïté fondamentale. Elle 
se manifeste, par exemple, lorsque les religions ou les convictions 
veulent faire valoir leurs positions aussi dans l’espace public, ou 
3  Cf. L. VOYÉ, K. DOBBELAERE & J. BILLIET, «Une église marginalisée?», dans 
L. VOYÉ, K. DOBBELAERE & K. ABTS (éd.), Autres temps, autres mœurs: travail, 
famille, éthique, religion et politique: la vision des Belges, Tielt, Lannoo, 2012, 
p. 145-172. 
4 Ibid., p. 147. 
5 Ibid., p. 156. 
6  La signification du terme postchrétien est la suivante: bien que les traces de la 
foi chrétienne soient encore abondamment présentes dans notre société et notre cul-
ture, dans la formation de notre identité collective et individuelle, la foi chrétienne 
n’est, en même temps, plus la toile de fond de la donation de sens qui peut être 
acceptée comme évidente. Le terme postséculier, quant à lui, désigne le fait que les 
présupposés de la thèse séculariste ne s’imposent pas davantage: la modernisation de 
la société ne mène pas tout simplement à la disparition de la religion, mais à un mode 
transformé de rapport à la religion – et aux convictions en général –, et à sa pluralisa-
tion. Voir, à ce propos, le premier chapitre de mon ouvrage God onderbreekt 
de geschiedenis: Theologie in een tijd van ommekeer, Kapellen, Pelckmans, 2006, 
p. 21-38 [traduit en anglais sous le titre: God Interrupts History: Theology in a Time 
of Upheaval, New York, Continuum, 2007, 13-29]. 
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