Rentabilités d’actifs et fluctuations économiques : une perspective d’équilibre général dynamique et stochastique Kevin E. Beaubrun-Diant(*) Julien Matheron(**) Cette revue de la littérature présente les principaux outils et résultats de la recherche se situant à l’intersection de la finance et de la macroéconomie. L’ambition de cette littérature est de fournir une analyse conjointe du cycle économique et des fluctuations des prix d’actifs financiers. Ce programme de recherche est relativement récent ; jusqu’alors, finance et macroéconomie se côtoyaient sans vraiment se croiser. En finance, la théorie de l’évaluation des actifs tente d’expliquer le prix d’un droit à un paiement incertain. Dans cette approche, le modélisateur ignore sciemment les déterminants de la production et de la consommation. Ces dernières sont prises comme données et l’on cherche à en déduire des implications relatives aux prix des actifs financiers. Parallèlement à ces travaux, se développe en macroéconomie un programme de recherche initié par Kydland et Prescott (1982). Il a pour objectif de fournir une explication théorique aux fluctuations économiques réelles. Ces analyses reposent sur la construction et la simulation de modèles dynamiques et stochastiques d’équilibre général (DSGE). Dans ce programme de recherche, l’accent est mis sur les fluctuations de l’emploi, de la production, de la consommation et de l’investissement. En revanche, les implications en termes de prix d’actifs sont reléguées au second plan. Cette vision dichotomique est très certainement regrettable. Ces considérations ont été ignorées par les théoriciens des fluctuations conjoncturelles jusqu’au milieu des années 90, où s’est développée une littérature, proposant d’intégrer les prix d’actifs à l’analyse du cycle économique. Les progrès considérables réalisés sur les explications des comportements cycliques des principales variables macroéconomiques justifient l’élargissement aux faits stylisés des prix d’actifs. L’évaluation d’actifs en équilibre général avec production dynamique constitue une véritable avancée : l’endogénéisation de la consommation et de la formation des dividendes autorise une modélisation plus réaliste de l’environnement économique que le cadre d’économie de dotations. Ceci vaut, en particulier, pour la modélisation du secteur productif et du processus d’accumulation de capital physique. (*) S.D.Fi - EconomiX, Université Paris Dauphine (**) Service de Recherche en économie et finance, DGEI– DIR, Banque de France. Courriel : [email protected]. Nous remercions J.P Laffargue ainsi qu’un rapporteur pour leurs remarques et suggestions. Les vues exprimées dans cet article sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement celles de la Banque de France. Économie et Prévision n°183-184 2008/2-3 35 Cet article adopte cette perspective et propose une analyse critique des mécanismes de modélisation à prendre en considération dans un modèle DSGE, afin que celui-ci soit compatible avec les faits stylisés des rentabilités des actifs financiers sans pour autant sacrifier aux faits du cycle économique. Les premières tentatives d’intégration ont fait émerger une forme d’arbitrage entre l’explication des faits du cycle et l’explication des faits des prix d’actifs. L’objectif de cet article est de formuler, dans un cadre théorique unifié, ces différentes propositions de modélisation afin d’en évaluer les performances relatives à l’aune des faits du cycle et des rentabilités d’actifs. 36