ISSN 0996 -1127
345
Septembre-octobre 2012
Association française
BUCHENWALD - DORA
ET KOMMANDOS
Association déclarée n° 53/688 et
affiliée à la FNAM sous le n° 233
16 rue Demarquay - 75010 PARIS
Tel 01 42 85 44 93 - Fax 01 42 82 97 52
www.buchenwald-dora.fr
Rédacteur en chef :
Dominique Durand
Directeur de la publication :
Floréal Barrier
Commission paritaire : 0216A07729
Imprimerie SIFF 18
ZA Le Chêne Bocquet
57 Bd Henri Navier 95150 Taverny
S O M M A I R E
Pages
Exposition à la 2
Mairie de Paris :
C’étaient des enfants :
déportation et sauvetage
des enfants juifs à Paris
Edito : 3
70 ans déjà ! C’était hier
pour les anciens déportés
Actualités 4 à 9
- 75eanniversaire de la
libération de Buchenwald
- Anne Burdo-Aquenin
Les dessins de Camille 10-11
Delétang
Hommage à Marcel Paul 11
Assemblée générale du
samedi 13 octobre 2012 12
Ed Carter-Edwards et des 13
anciens combattants
canadiens
Dans nos familles 14
Anton Kalina 15
Souscriptions 15
Camille DELETANG “78129”
Ce portrait de Camille Delétang, déporté à Buchenwald, puis au
Kommando “Holzen” a une histoire presque incroyable, que conte
Agnès Triebel, pages 10 et 11 du bulletin
86262_Serment_345_Mise en page 1 13/09/2012 08:42 Page 1
2
Exposition à la Mairie de Paris :
C’étaient des enfants : déportation et sauvetage des enfants juifs à Paris(1)
C’est dès septembre 1940 la lente mais inexorable exclusion des
Juifs de Paris de la vie économique et sociale du pays, par les
ordonnances allemandes et vichystes : fichage (recensement,
tampon « Juif », puis port de l’étoile), restriction de circulation
des familles, dépossession des entreprises, etc. Si l’école reste
accessible aux enfants juifs, un numerus clausus draconien in-
terdit aux adolescents l’accès aux écoles professionnelles ou à
l’université.
Le 16 juillet 1942, dans la rafle du Vel d’hiv, la police parisienne,
sur ordre des Allemands, s’attaque pour la première fois aux
femmes et aux enfants. Des enfants seront arrachés à leurs
mères dans des scènes déchirantes dans les camps du Loiret,
puis déportés seuls avec d’autres adultes. Le dessin représen-
tant ces tout jeunes enfants sales et déguenillés arrivant à
Drancy, face à des gendarmes français qui les regardent sans
un geste met le visiteur mal à l’aise.
Très tôt, dès les premières arrestations d’hommes en 1941, de
nombreux organismes juifs, de caractéristiques diverses, so-
ciales, de bienfaisance, politiques, se mobilisent pour aider des
familles sans ressources et surtout sauver les enfants juifs de
Paris ; agissant à la limite de la légalité, sous la couverture d’un organisme officiel, l’UGIF (Union générale
des Israélites de France), ou dans la clandestinité, participant fréquemment à des actions de résistance,
ils sont relayés par des organismes de toutes obédiences, catholiques, protestants, etc. qui fournissent des
refuges dans toute la France, pour accueillir et cacher les enfants. Par ailleurs, de nombreux Français, et
pas seulement les « Justes », révulsés par le traitement infligé aux enfants, se mobilisent pour aider leurs
compatriotes.
Sur 70.000 enfants juifs en 1940, 11.400 furent déportés, dont plus de 50% habitaient Paris au début
de la guerre, et dont 200 seulement survécurent. Mais 59.000 enfants, en grande partie cachés, y échap-
pèrent. L’exposition leur donne la parole. Pendant plusieurs années après la libération ils n’ont pas parlé.
Pourtant, pendant toute l’occupation, ils sont restés menacés. A Paris et dans toutes les régions de
France, les enfants parisiens, cachés ou non, avaient trouvé refuge, la « traque aux Juifs » fut menée
jusqu’aux derniers jours de l’occupation par la Gestapo et ses complices français. Par ailleurs, le fait
d’être protégé physiquement n’excluait évidemment ni la tristesse ni l’angoisse : séparation brutale
d’avec les parents, confinant parfois à un sentiment d’abandon, changement d’identité, difficultés de co-
habitation, etc. Angoisse exprimée après la libération par l’accueil d’une mère par un enfant caché, qui
ne la reconnaît plus : « Bonjour, Madame ».
L’exposition montre un certain nombre de dessins, et surtout de lettres émouvantes, écrites à leurs fa-
milles, pendant ou après l’occupation ; ces lettres sont généralement écrites dans un français parfait ; et
pourtant ces écrits émanaient souvent d’enfants d’immigrés récents. N’en déplaise aux suppôts du racisme
et de l’exclusion, l’école de la République avait bien rempli sa mission d’instruction.
Bertrand Herz
(1) Hôtel de ville de Paris, du 26 juin au 27 octobre 2012 seulement ; il reste peu de jours pour la visiter.
86262_Serment_345_Mise en page 1 13/09/2012 08:42 Page 2
Nous venons de célébrer le 70eanniversaire de la rafle du vel'd'hiv' au cours de laquelle 13.152
juifs étrangers réfugiés en France furent arrêtés les 16 et 17 juillet 1942 par la police française.
Enfermés, dans des conditions effroyables pendant quatre jours, 1.129
hommes, 2.916 femmes et 4.115 enfants ont été entassés sur les gradins
de ce vieux stade voué à la course cycliste avant d'être emmenés dans les
camps de Beaune la Rolande et de Pithiviers dans le département du Loi-
ret.
Enlevés à leurs parents les quelque 3.000 enfants en bas âge furent bru-
talement déportés au camp d'Auschwitz.
J'ai vécu un des "grands voyages" de la déportation. Celui de Toulouse à
Buchenwald du 30 juillet au 5 août 1944.
Nous étions de 60 à 80 adultes par wagon, entassés autour de la grande
bassine de nos excréments. Il faisait une chaleur étouffante. Nous nous sommes organisés
pour vivre, pour respirer, pour dormir, pour nous "reposer " à tour de rôle . Pour lécher les bar-
belés de la lucarne et apaiser notre soif lorsque notre train a rencontré la pluie. Ce fut quand
même le cauchemar de ma vie. J'ai vu des camarades délirer, certains sont devenus fous.
Alors je pense aux enfants qui ont vécu ça, seuls dans la nuit de leur wagon, parce qu'il fai-
sait nuit même le jour dans les wagons à bestiaux des trains de la mort.
Il y a 70 ans également que le convoi du 6 juillet 1942 partait de Compiègne, un convoi ex-
ceptionnel enregistré à Auschwitz à partir du numéro “45157” qui deviendra le convoi des
“45000”. Dans les camps, nous, les déportés, nous désignions entre nous par la série de nos
numéros matricule .
La singularité de ce convoi était sa composition. Il était formé à 89 % de communistes fran-
çais ce qui restera unique parmi les déportations de France.
À leur arrivée au camp principal, le 8 juillet 1942, les otages sont immatriculés et dotés de leur
tenue rayée. Ils reçoivent un triangle vert qui sera changé quelques jours après par le triangle
rouge des politiques. Un certain nombre d'entre eux portaient l'étoile juive, communistes et
juifs à la fois comme nos camarades de “l'Affiche rouge”.
Ils sont photographiés de face avec leur numéro matricule et une plaque portant la mention
BV F criminels professionnels français.
Le taux de mortalité de ce convoi sera particulièrement élevé. Sur les 1170 camarades qui
pénètrent dans le camp d'Auschwitz le 8 juillet 1942 seuls 119 étaient encore en vie au mo-
ment de la libération du camp, soit 11 % de l'effectif initial. Il s'agit du taux de mortalité le
plus élevé des convois d'otages et de répression.
Ainsi dès 1942, après le coup de feu de Fabien le 21 août 1941 contre l'officier hitlérien du
métro Barbès, on constate une imbrication entre la " politique des otages" et les débuts de la
“solution finale” de la question Juive en France.
Mais l'homme, au sens humain du terme ne pouvait pas être vaincu par le monstre nazi, 70
ans après c'est lui qui continue de témoigner pour ne plus revoir ça .
Gaston VIENS,
69295 à Buchenwald
70 ans déjà ! C'était hier pour les anciens déportés
3
86262_Serment_345_Mise en page 1 13/09/2012 08:42 Page 3
4
actualites
Encore une fois cette manifestation du souvenir a ren-
contré une large audience puisqu’environ 150 per-
sonnes avaient répondu à l’appel du Comité, dont la
préfète de Seine-et-Marne et de nombreux élus.
On soulignera que cette année revêtait un caractère
particulier dans la mesure c’était la première fois que
ce rassemblement se tenait devant le “Wagon Mémo-
rial”, inauguré le 27 juin dernier.
Merci donc à tous nos amis du Comité du Mémorial et
en particulier à ses deux responsables, Guy Pierronnet
et Jean-Pierre Camelot.
Jean-Claude Gourdin,
Vice-président du Comité du Mémorial
« RÉSISTER C’EST EXISTER »
Fidèle à ses camarades morts à Buchenwald et les
Kommandos extérieurs, 67 ans après la Libération du
camp par la résistance intérieure, Emile TORNER a
conduit une délégation réduite, du 2 au 6 Août, à
Buchenwald et Langenstein. Sur les lieux se sont
perpétrés les crimes nazis, transmettre encore et
toujours la mémoire de la Déportation, face aux
diverses tentatives de réécriture de l’histoire, et tenter
de faire comprendre la réalité concentrationnaire. Enfin,
passer le flambeau de la lutte anti-fasciste aux jeunes
générations. C'est le combat obstiné d'Emile.
L’occasion aussi pour revoir les amis allemands,
Gesine, Joachim et Franka (qui s’est souvenue avec
Alain Odoul du «Train de l’Amitié» JC-FDJ en 1987),
ainsi que la famille d’accueil d’Emile au village de
Langenstein.
Marie, Alain et Joran
Emile Torner, devant l’entrée du tunnel de Langenstein, en-
touré de Marie, Joran et à droite Gesine Daifi, interprête au
Mémorial de Langenstein
Alfred NAKACHE
L'ouverture des Jeux Olympiques de Londres et le
démarrage des épreuves de natation sont l'occasion de
rappeler l'incroyable trajectoire du nageur Alfred
Nakache.
le 18 novembre 1915 à Constantine, en Algérie,
Alfred Nakache connaît une carrière sportive
exceptionnelle. Champion d’Afrique du Nord, il
participe aux Jeux Olympiques de Berlin en 1936.
Champion de France à plusieurs reprises, la presse fait
d’Alfred Nakache une figure emblématique du monde
sportif.
En 1941, à Marseille, c’est la consécration : le nageur
devient recordman du monde.
Victime de la législation antisémite, Alfred Nakache est
arrêté en décembre 1943 à Toulouse et déporté à
Auschwitz. Sa femme et sa fille y sont assassinées.
L’expérience concentrationnaire ne mettra pas un
terme à sa carrière. De retour à Toulouse après avoir
connu la marche de la mort et son transfert au camp de
Buchenwald le 26 janvier 1945 ( KLB 122641), il aligne
inlassablement les séances d’entraînement. Il redevient
champion de France et bat un nouveau record du
monde. Compétiteur dans l’âme, il participe aux Jeux
Olympiques de Londres en 1948.
NANTEUIL-SAÂCY
Comme chaque année, nos amis du Comité du Mé-
morial du dernier Convoi de Seine-et-Marne ont orga-
nisé la cérémonie du souvenir du passage du dernier
train, parti de la région parisienne (Quai aux bestiaux
de la gare de Pantin) pour l’Allemagne.
C’était le 15 août 1944 à Pantin et le 16 août 1944 à
Nanteuil et Saâcy.
1.654 Hommes, 546 Femmes sont transférés des pri-
sons de la région parisienne vers les camps de Bu-
chenwald et de Ravensbrück. Parmi eux, 168 aviateurs
alliés abattus sur le sol de France.
De g à dr. : Guy Pierronnet, l’adjoint au Maire de Saâcy,
Gérard Koytykh, la Préfète de Seine-et-Marne, Mme Nicole
Klein et Jean-Pierre Camelot
86262_Serment_345_Mise en page 1 13/09/2012 08:42 Page 4
ACTUALITES
5
Le 15 juillet 2012, était commémoré sur le site même le
75eanniversaire de la création du camp de concentration
de Buchenwald (près de Weimar en Allemagne).
A cette occasion, le préfet Victor Convert, directeur gé-
néral de la Fondation de la Résistance, à l'invitation de
Floréal Barrier, président du Conseil des anciens détenus
de Buchenwald près la Fondation des Mémoriaux de
Buchenwald et Mittelbau-Dora, accompagné de Mme
Agnès Triebel, vice-présidente de l'Association française
Buchenwald Dora et Kommandos et en présence du Dr
Rikola-Gunnar Lüttgenau, directeur du Mémorial de Bu-
chenwald, a déposé, au nom de la Fondation de la Ré-
sistance, une gerbe à la mémoire de Pierre Sudreau, son
ancien président, à l'emplacement même de la porte
d'entrée du Block 45 où il fut interné du 14 mai 1944 au
11 avril 1945.
Quatre allocutions furent prononcées. Floréal Barrier
rappelait d'abord le patriote résistant et déporté. Puis
Victor Convert retraçait la longue carrière administrative,
politique et industrielle de Pierre Sudreau. Rikola-Gunnar
Lüttgenau commentait ensuite le mot célèbre que Pierre
Sudreau avait prononcé lors d'un discours qu'il
prononça lors du 50eanniversaire de la création de
Buchenwald : « C'est à Buchenwald que je suis devenu
Européen ».
Un représentant de l'association des anciens détenus
politiques allemands à Buchenwald apportait enfin son
témoignage.
Une promenade instructive
Ce fut d'abord, sur les lieux du camp, que nos amis
Lüttgenau et Stein se transformèrent en guides, expli-
quant l'origine de la construction.
Quelques jours avant ce 15 juillet 1937, après de mul-
tiples débats, deux baraquements furent construits par
les SS, comme logement et cuisine. Puis arrivèrent les
détenus et, sous les coups, les hurlements des SS, fut
construit ''Buchenwald''.
75 années après, l'après-midi fut consacré à la visite de
Weimar, de ces lieux sévirent les polices hitlériennes,
où se développèrent les empreintes du parti nazi.
Ainsi Weimar, ville de haute culture, berceau fut ten-
tée la mise en place d'une République, au lendemain
de la Première Guerre mondiale, devint l'un des foyers
des plus dangereux du nazisme, sous la houlette du
Gauleiter Sauckel, ministre de Hitler. Sauckel, instiga-
teur avec la complicité du gouvernement de Pétain, de
la réquisition des jeunes, de France, de vingt ans, début
1943, devant aller en Allemagne servir de main-d'oeu-
vre, en remplacement des ouvriers allemands éparpil-
lés sur tous les fronts de la Seconde Guerre mondiale.
Afin que puissent fonctionner à plein régime les entre-
prises de matériel de guerre.
Condamné par le Tribunal international de Nuremberg,
Sauckel fut pendu.
Cette promenade, en ces lieux, rappela l'histoire, invita
à la réflexion vers l'avenir.
Le 75eanniversaire de la libération de Buchenwald
Panneau indicateur des horaires des lignes de bus de
la sociéte de transport de Weimar ''20 MAI 1942'' !
Ainsi, de 9h. à 23h., de Weimar à Buchenwald, puis
de 10h. à 23h., de Buchenwald à Weimar, circulait des
bus. Sans doute transportant les SS et leurs familles,
les civils, ''Meister'' encadrant et rabrouant les déte-
nus dans les usines (Les bus n'entraient pas dans le
camp, mais personne, à Weimar, n'aurait eu connais-
sance de ce camp de concentration ?).
Devant le block 45, recueillement en souvenir de Pierre
Sudreau “53273”, le Préfet Convert et Floréal Barrier, entourés
de Agnès Triebel, Rikola Lüttgenau, directeur du Mémorial,
Franka Günther et Peter Hochmut.
86262_Serment_345_Mise en page 1 13/09/2012 08:42 Page 5
1 / 16 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !