Le syndrome de Marfan est une maladie génétique
dominante autosomique, généralement en rap-
port avec une mutation du gène de la fibrilline de
type 1. C’est la plus fréquente des maladies
monogéniques responsables d’anévrisme de l’aorte ascen-
dante. La compréhension de sa physiopathologie a beau-
coup évolué ces dernières années, ainsi que sa prise en
charge et son pronostic. Une étude débute, qui évalue le
bénéfice du losartan chez les patients présentant un syn-
drome de Marfan à la suite des avancées obtenues dans le
modèle animal (souris KI).
Sur le plan cardiovasculaire, elle se traduit par une faiblesse
de la paroi aortique qui se dilate progressivement au cours
de la vie et risque de se disséquer : avant que la chirurgie de
remplacement de la racine de l’aorte ne soit réalisée (inter-
vention de Bentall), les patients mourraient à 80 % des
conséquences de la dilatation aortique (dissection ou fuite
aortique avec insuffisance cardiaque), et la moitié des pa-
tients décédaient avant l’âge de 40 ans. Depuis que la prise
en charge médicale et chirurgicale a été optimisée, l’espé-
rance de vie des patients a augmenté de plus de 30 ans. Un
volet fondamental est donc la chirurgie de remplacement de
la racine de l’aorte qu’il va falloir proposer à temps pour
éviter que les complications ne surviennent, mais pas trop
précocement afin d’éviter au patient de prendre un risque
inutile (certains patients présentant un syndrome de Marfan
ne sont jamais opérés et s’en trouvent très bien). On tend
actuellement à préserver les valves natives et ainsi éviter le
traitement anticoagulant au long cours et les complications
des valves mécaniques.
La deuxième complication cardiovasculaire classique de la
maladie est le prolapsus valvulaire mitral qui peut égale-
ment relever d’une intervention chirurgicale.
Le syndrome de Marfan peut également se compliquer sur
le plan ophtalmologique (décollement de rétine, cécité,
glaucome) et orthopédique ou rhumatologique : en dehors
de la scoliose qui peut justifier une intervention chirurgi-
cale, les complications articulaires, notamment douloureu-
ses, viennent maintenant au premier plan du tableau depuis
que l’on voit des patients plus âgés.
Critères diagnostiques
Le syndrome de Marfan est, à ce jour, défini par des critères
essentiellement cliniques (établis à Ghent) publiés en 1996
et qui font toujours référence [1]. Ces critères sont comple-
xes et témoignent de la difficulté diagnostique (figure 1A).
Pour parler de syndrome de Marfan, il faut retrouver une
atteinte de 3 systèmes avec au moins 2 signes majeurs. Cela
illustre la nécessité de la collaboration de multiples spécia-
listes pour porter le diagnostic (tableau I).
L’importance des critères cliniques dans la définition de la
pathologie illustre les limites floues de ce syndrome : des
mutations de la fibrilline, mais également du gène codant
pour le récepteur 2 et peut-être du récepteur de type 1 du
TGF-bêta peuvent donner des tableaux plus ou moins com-
plets. Parfois, aucune mutation n’est retrouvée.
La fréquence des différents signes cliniques est donnée à
titre d’illustration pour les patients qui se sont présentés au
centre de référence et chez lesquels un diagnostic de certi-
tude a été porté. L’atteinte rhumatologique est la plus
fréquente : l’arachnodactylie est présente chez 80 % des
patients (signe du poignet ou signe du pouce), un pectus
chez plus de 50 %, la dolichosténomélie chez 1/3 (rapport
envergure/taille > 1,05). Les autres signes sont plus rares.
Les douleurs rachidiennes sont les complaintes les plus
fréquentes qui justifient en règle un simple traitement phy-
tothérapique et symptomatique. La surveillance est dictée
par les symptômes.
L’atteinte ophtalmologique est dominée par l’ectopie du
cristallin (65 % des patients) et la cornée plate (40 % des
patients). La myopie forte est plus rare. La surveillance doit
être annuelle du fait du risque de déplacement du cristallin
qui peut se compliquer de cécité. On peut proposer alors
une intervention préventive d’ablation du cristallin.
L’atteinte cutanée est présente surtout dans les formes
complètes, et l’atteinte pulmonaire (pneumothorax) est
rare.
La multiplicité des signes cliniques et des systèmes atteints
souligne l’importance, pour porter le diagnostic, de la réu-
nion de l’avis de différents spécialistes. Du fait de la grande
variabilité des signes cliniques, l’évocation du diagnostic
devrait être systématique devant tout anévrisme ou dissec-
tion de l’aorte, et ce, d’autant plus que l’origine athéroma-
teuse est moins probable. On devrait donc faire un bilan à la
recherche d’une atteinte des différents appareils et une
enquête familiale pour rechercher d’autres anévrismes dans
la famille.
Atteinte cardiaque
La gravité du syndrome de Marfan vient du risque de
dissection aortique qui lui est associé. La dissection aorti-
que est, ici, précédée d’une dilatation aortique, si bien que
le diamètre aortique est le meilleur marqueur du risque de
dissection que présente un patient.
Histologie
Sur le plan histologique (figure 1B), la paroi d’un patient
présentant un syndrome de Marfan est identique à la paroi
aortique d’un patient présentant un anévrisme de l’aorte
STV, vol. 20, n° 10, décembre 2008
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