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1. Introduction
La transition énergétique a pour ambition de répondre aux grands enjeux que constituent la raréfaction des
ressources fossiles, le réchauffement climatique, la maîtrise du coût de l’énergie ou encore l’avenir du nucléaire.
Le déploiement d’une politique de transition énergétique doit s’appuyer notamment sur de nouvelles installations
d’infrastructures. Pour la France, le nombre d’installations éoliennes devrait continuer à croître (RTE et al., 2016)
dans les régions dotées d’importants gisements de vent (zones littorales, grandes plaines). Or, en dépit de la
sophistication des procédures et des précautions prises pour accompagner les décisions d’installations (études
d’impact, concertations, enquêtes publiques), plusieurs études ont souligné le développement des contestations
locales autour de ce type d’infrastructures (Enevoldsen et Sovacool, 2016; Jobert et al., 2007; Nadaï et
Labussière, 2009). Ces contestations locales, quand elles ne conduisent pas à l’abandon des projets, engendrent
des coûts directs et indirects importants pour les opérateurs (RGI, 2012).
Les impacts paysagers ont été identifiés comme la principale motivation des populations locales qui refusent
l’implantation d’un parc éolien (Wolsink, 2007). Cependant, l’ampleur grandissante des projets et leur
concentration dans certains territoires sont devenues des facteurs d’intensification des conflits locaux autour des
infrastructures de l’énergie (Ciupuliga et Cuppen, 2013; Cotton et Devine-Wright, 2013; Faburel et al., 2011).
L’analyse et l’évaluation des coûts externes des éoliennes sont une véritable préoccupation de recherche récente
(Gibbons, 2015; Hoen et al., 2014). De nombreux travaux mobilisent la méthode des prix hédoniques et
cherchent à révéler l’étendue des impacts des infrastructures existantes sur le bien-être des populations
résidentes à partir de l’analyse de la variation des valeurs immobilières. Les biens immobiliers peuvent en effet
capitaliser les nuisances environnementales présentes sur un territoire, et leur prix de marché refléter la
perception de ces nuisances et les pertes de bien-être pour les populations résidentes. Plusieurs études se sont
alors attachées à évaluer monétairement l’ampleur des préjudices visuels par la modélisation hédonique des
facteurs explicatifs de l’évolution des prix des biens fonciers ou immobiliers. Les résultats ne sont pas stabilisés :
certains montrent l’absence d’effets (Hoen, 2006; Hoen et al., 2011, 2014; Sims et al., 2008; Vyn et McCullough,
2014) quand d’autres détectent un impact négatif de la proximité des ouvrages (Heintzelman et Tuttle, 2012;
Sunak et Madlener, 2015). Mais il est difficile de tirer un avis définitif, car la qualité des bases de données et les
indicateurs employés pour caractériser et mesurer les nuisances visuelles varient d’une étude à l’autre.
Au-delà des aspects de méthodes, certains auteurs ont cherché à comprendre les mécanismes qui régulent la
dépréciation des prix des biens immobiliers à proximité d’infrastructures sources de nuisances (lignes à haute
tension, mais aussi stations de traitement des déchets, centrales nucléaires, antennes-relais). Pour eux (Dale et
al., 1999; Elliott et Wadley, 2002, 2012), les dévalorisations ne relèvent pas uniquement de l’empreinte visuelle
des infrastructures, mais aussi d’un processus de « stigmatisation » des territoires qui les accueillent, dès
l’annonce du projet. L’anticipation des nuisances peut se traduire par un excès de l’offre de biens (immobiliers ou
fonciers) au regard de la demande, et entraîner de manière mécanique une baisse des prix. Ce phénomène
prend place entre l’annonce du projet et la construction des ouvrages, et s’estompe avec le temps. Ce qui amène
ces auteurs à soutenir l’idée que le phénomène de stigmatisation du territoire serait plus problématique que
l’empreinte paysagère des ouvrages eux-mêmes. Des travaux plus récents cherchent alors à traiter de manière
plus fine ce processus en s’appuyant sur l’approche hédonique par double différence, afin d’isoler l’effet d’un
nouveau projet sur les prix immobiliers (Gibbons, 2015; Hoen et al., 2014; Klaiber et Smith, 2013; Sunak et
Madlener, 2016).
Les nouvelles infrastructures de l’énergie sont essentiellement localisées dans les zones rurales et éloignées des
zones habitées. A l’ère de l’économie résidentielle en France, les activités touristiques sont un facteur de
développement économique important des espaces ruraux. Ces activités sont à l’origine de nombreux emplois
dans le secteur des services et concourent à l’augmentation du niveau de vie et d’éducation (Reeder et Brown,
2005). Le secteur touristique est à l’initiative de nombreux équipements collectifs. Les activités touristiques dans