DUERMG Paris Est Créteil. RSCE PAT CANC 2015_2016
Université Paris Est Créteil
Département de Médecine Générale
MODULE SITUATIONS COMPLEXES T2
RSCE 2015: Le patient cancéreux
Je vois ce jour en visite à domicile Mr B., 82 ans, dans le cadre de son suivi. Ce patient, qui
habite avec son épouse dans une petite maison, m’avait contacté pour renouveler son traitement
habituel, au décours d’une hospitalisation pour une rétention aiguë d’urine dans un contexte
d’hypertrophie prostatique. Il présente comme principaux antécédents une hypertension artérielle,
une dyslipidémie, une cardiopathie ischémique ayant nécessité la pose d’un stent ainsi qu’une
arthrose lombaire étagée. Son traitement habituel est : amlodipine 5, kardégic 75, ramipril 5,
simvastatine 20, bisoprolol 1.25, alfuzosine 5.
« Comment allez-vous Monsieur B. ? »
Il me répond, souriant, comme à son habitude :
« Tout va très bien Docteur. J’avais une question à vous poser : ça fait longtemps que je n’ai pas fait
le test pour les selles, pour le cancer du côlon….vous pourrez me le prescrire ? »
Je réponds par l’affirmative au patient et l’examine. Son examen clinique ne révèle aucune
particularité.
« Très bien, votre examen est normal. Je vous apporterai les documents nécessaires pour le test de
dépistage du cancer du côlon la fois prochaine. Je vais faire l’ordonnance de vos médicaments. Mais
il faut aussi que nous discutions de votre dernière hospitalisation : l’urologue vous a expliqué ce qui
s’était passé, pour éviter que cela ne récidive, il faudrait envisager une intervention pour retirer une
partie de votre prostate »
« Oui Docteur, je sais il m’en a parlé…mais ce n’est pas une grosse opération ? »
« A priori, il peut faire cela sous anesthésie locale en passant par les voies naturelles. »
« Très bien Docteur, pouvez-vous me faire un courrier s’il vous plait ? Par ailleurs j’aimerais avoir le
test pour le cancer de la prostate. J’ai un de mes copains qui est mort de ça l’an dernier, et j’avoue
que ça me fiche la frousse !!»
Je rédige le courrier à l’intention de l’urologue. Son épouse m’apprend qu’il a été hospitalisé et qu’il
va se faire opérer.
Deux semaines après l’opération, je reçois le compte rendu de l’urologue qui m’indique avoir réalisé
pour Monsieur B. une résection trans-urétrale de prostate. Aucun examen extemporané n’a été
réalisé mais l’urologue indique que la pièce d’exérèse a été envoyée à l’examen anatomo-
pathologique.
J’avais demandé à Monsieur B. de me recontacter après sa sortie d’hospitalisation : c’est alors que je
reçois son appel
« Allo ? »
« Bonjour Docteur, c’est Monsieur B. J’ai été opéré, tout s’est bien passé mais l’urologue m’a dit qu’il
avait envoyé la prostate au laboratoire. Avez-vous eu les résultats ? »
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« Je n’ai rien reçu Monsieur B. Mais je vais me renseigner »
J’appelle la clinique dans laquelle a été réalisée l’intervention pour joindre l’urologue :
malheureusement celui-ci est en vacances (nous sommes au mois d’août) et ne rentrera que dans 3
semaines. Je parviens à récupérer le compte rendu d’anatomopathologie, qui est formelle : présence
de foyers d’adénocarcinome prostatique Gleason 9
Dans l’attente du retour de l’urologue, je décide d’annoncer le diagnostic au patient : je l’appelle
pour lui proposer que je passe le voir en visite dans la journée
« il y a quelque chose de grave Docteur ? »
« Je ne peux pas vous dire cela au téléphone Monsieur B., mais je vous propose que nous en
discutions lors de cette visite ».
J’étais très embêté car je ne voulais pas laisser Monsieur B. dans l’attente mais en même temps je ne
me voyais pas lui annoncer son cancer par téléphone.
J’arrive dans l’après-midi chez le patient
« Alors Docteur, c’est un cancer que j’ai ? »
« en effet Monsieur, les résultats des biopsies que j’ai reçus aujourd’hui le montrent. Néanmoins, je
vais vous proposer de réaliser des examens pour que nous puissions décider ensemble du meilleur
traitement à vous proposer »
Je réfléchis au bilan d’extension à réaliser pour gagner du temps avant que le patient ne revoie
l’urologue.
Quelques semaines plus tard, je revois Monsieur B. Le bilan d’extension avait montré une atteinte
ganglionnaire de son cancer de prostate sans métastases. L’urologue lui avait prescrit, avec son
accord, une hormonothérapie.
Il m’a contacté car il présente des douleurs rachidiennes insomniantes depuis plusieurs semaines,
mal soulagées par le paracétamol alors qu’auparavant ce traitement l’avait toujours soulagé pour ses
douleurs lombaires.
Le bilan que je fais réaliser rapidement montre la présence de 2 métastases osseuses en L2 et L3. Je
me mets rapidement en contact avec l’urologue et nous convenons de proposer à Monsieur B. une
prise en charge palliative pour son cancer. J’en discute donc avec lui et son épouse, puisqu’il a
souhaité qu’elle soit à ses côtés lors de cette consultation que j’ai réalisée à son domicile.
« D’accord Docteur. Je ne veux pas qu’on s’acharne sur moi, je suis fatigué. Je ne souhaite qu’une
seule chose : rester chez moi ! »
Son épouse intervient « Docteur, j’ai peur de ne pas pouvoir m’occuper toute seule de mon mari, s’il
est trop fatigué….vous comprenez je suis fatiguée moi aussi, et nos enfants habitent en Province…..je
ne peux pas solliciter nos voisins tout le temps…..et j’ai peur de ne pas tenir le coup ! »
« Aucun problème, Madame B. Je vais réaliser un certain nombre de démarches en ce sens, et
reviendrai prochainement vers vous pour vous proposer des solutions »
« Merci Docteur ! ».
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