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C'est là tout le sens de la stratégie de Lisbonne, dont on oublie trop souvent de citer
la formule dans son intégralité car s'il s'agit bien de faire de l'Union européenne
"l'économie la plus dynamique et la plus compétitive d'ici deux mille dix (2010)",
cette économie doit être "capable d'une croissance économique durable" qui
s'accompagne "d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une
plus grande cohésion sociale".
Ce modèle que j’appelle social-démocratie est, d'ailleurs, le modèle qui prévaut en
Europe depuis l'après-guerre dans la plupart des Etats membres de l'Union
européenne. La social-démocratie, à mon avis, c'est la troisième voie au sens
historique du terme, c'est-à-dire un système intermédiaire entre l'Etat libéral, celui
du laisser-faire économique, et l'Etat socialiste, tel qu’il fut pratiqué dans les pays de
l’ancien bloc soviétique.
Un tel système suppose un Etat social développé, un cadre de réglementation de
l'activité économique et une grande efficacité de la dépense publique. Si le coût de
ce système est assez lourd pour le budget des autorités publiques, il faut rappeler
que le coût de la marginalisation sociale d'un nombre croissant d'individus, peut
également s'avérer très élevé pour la société, notamment en termes de sécurité,
comme c'est le cas dans d’autres modèles.
2. Le rôle des services dans l'économie et le social
Les services jouent effectivement un rôle crucial dans le cadre du marché intérieur.
En effet, ils représentent quelque soixante à septante pour cent (60 à 70%) de
l'activité économique de l'Union européenne et un pourcentage similaire en termes
d'emploi dans les vingt-cinq Etats membres. Ces chiffres soulignent l'importance
économique et sociale des services dans l'Union européenne. En effet, l'objectif de
la stratégie de Lisbonne est d'atteindre un niveau d'emploi de septante pour cent
(70%) d'ici deux mille dix (2010), afin de préserver notre système de protection
sociale. Or, la demande croissante de main d'œuvre dans le secteur des services
compense à peine la baisse de demande de main d'œuvre dans les secteurs
primaire et secondaire (agriculture et industrie), du fait de l'accroissement de la
productivité au sein de l'Union européenne et de la concurrence d'Etats tiers.
Je crois que nous sommes tous d'accord pour dire qu'il faut lever les barrières
administratives, à l'instar de ce qui a été fait en matière de libre circulation des
marchandises après l'achèvement du marché intérieur. Déjà, en mil neuf cent
nonante-deux (1992), le rapport Cecchini concluait que le potentiel considérable de
croissance du secteur des services était "freiné artificiellement par des
réglementations et des pratiques qui empêch(ai)ent de manière significative la libre
circulation des services et ainsi le jeu de la concurrence entre les entreprises de
services."
En revanche, le contexte linguistique et culturel suppose nécessairement une
adaptation du prestataire de services à l'environnement économique et culturel dans
lequel il souhaite s'implanter.
Ce que le rapport de la Commission de juillet deux mil deux (2002) sur l'état du
marché intérieur des services souligne c'est la disparité des régimes nationaux en
matière de rémunération, de fiscalité et de protection sociale ou la complexité des
réglementations en matière de sécurité sociale. Or, je constate que ce sont toutes
des matières où il existe une compétence communautaire. Cela signifie que plutôt
que de plaider en faveur d'une déréglementation, ce constat suppose une plus
grande harmonisation fiscale et sociale. En d'autres termes, il convient d'élever le
niveau de protection, par exemple, en matière de sécurité et santé sur le lieu de
travail et en réglementant le temps de travail.