RÉFLEXIONS
4
Pourquoi faut-il réinventer
l’université d’entreprise ?
Mille formes, mille ambitions, mille positionnements... L’université
d’entreprise n’est pas une réalité simple. Le fleurissement récent
du label ne doit pas cacher les tensions importantes qui la
traversent, les contradictions fréquentes qu’elle doit résoudre et
la fragilité de son positionnement.
Pierre Baudry, IDRH
L’université d’entreprise,
une institution aux mille
missions…
L’université d’entreprise est plu-
rielle d’abord par son héritage. Il
est complexe, maillé, hybride. La
genèse est américaine et provient
du John F. Welch Leadership Cen-
ter de Crotonville. Première uni-
versité d’entreprise inventée en
1956 par John Welch, elle était
alors un outil d’invention straté-
gique, de mobilisation managé-
riale autour des grands enjeux de
General Electric. L’apprentissage
et le développement de compé-
tences étaient alors des effets
induits du projet.
Ce mythe des origines, souvent
invoqué par les patrons d’univer-
sité à l’heure actuelle, se mêle à
l’utopie française de l’éducation
permanente. Celle qui réunit dans
les années 1960, patrons, Eglise,
syndicalistes autour d’un mo-
dèle républicain de formation de
l’homme. Quelles que soient ses
origines sociales, géographiques
ou professionnelles, un homme
doit avoir accès à l’apprentissage
tout au long de sa vie. Il doit pou-
voir se réinventer.
Enfin, nos universités d’entre-
prise laissent percevoir la trace du
modèle de l’enseignement supé-
rieur à la française : mélange de
creuset social et d’outil au service
d’une logique de l’honneur qui
sépare ostensiblement les bons
des moins bons.
De tout cela, l’université d’en-
treprise à la française porte les
traces. Cet héritage complexe
rend sa forme difficile à cerner,
en fait un objet à perpétuelle-
ment façonner au gré des forces
du temps. L’université est ainsi
exposée aux mille questions que
se posent les organisations sur
leurs hommes.
Partager la stratégie : comment
impliquer les managers dirigeants
dans un processus de conception
stratégique plus court, plus chan-
geant, moins prophétique ? Faut-
il les associer ou les aligner ?
Développer la cohésion du
groupe : comment conserver
la cohésion d’un corps social
large, aux frontières meubles,
en recomposition permanente ?
Comment créer des cultures
nouvelles au service du vivre
ensemble ?
Mobiliser les managers : com-
ment mobiliser des troupes
moins fidèles, plus suspicieuses,
plus fatiguées ?
Accompagner les parcours :
comment soutenir la promesse
employeur de mobilité verticale ?
Comment fabriquer des patrons ?
Développer les compétences :
comment, au milieu de toutes
ces injonctions, continuer à déve-
lopper des compétences, pour
rendre les collaborateurs plus
agiles, plus performants, plus
employables ?
… à la recherche perpétu-
elle d’ancrages
Pour répondre aux multiples ap-
pels des organisations qu’elles
servent, les universités n’ont de
cesse de chercher des ancrages.
L’ancrage RH : positionne l’uni-
versité au service des politiques
de mobilité.
On retrouve cette typologie d’uni-
versité au sein d’entreprises sou-
cieuses de donner de la lisibilité
aux parcours, affichant une pro-
messe d’ascension prononcée au
sein de leur contrat employeur.
Cet ancrage offre une source
d’activité stable à l’université qui
adresse son offre à l’ensemble
des managers et trace un chemin
« L’université est exposée aux milles questions
que se posent les organisations sur les hommes »