AUGMENTATION RECENTE
DU NOMBRE DE CAS DE SYPHILIS A PARIS
Rapport préliminaire d’investigation au 28 février 2001
Rapport rédigé par le Dr E. Couturier (Institut de Veille Sanitaire) en
collaboration avec les médecins des DAV parisiens suivants : le Dr N. Dupin
(Hôpital Tarnier), le Dr A-C Crémieux (Hôpital Bichat-Claude Bernard), le Dr M.
Janier (Centre Clinique et Biologique des MST, Hôpital Saint-Louis) et le Dr J-P
Mertz (Dispensaire Croix-Rouge, rue de Valois).
1
I. Alerte
Le 23 novembre 2000, le médecin responsable du DAV de l’Hôpital Tarnier (Paris), sur les
conseils du Chargé de Mission de la DASES, a contacté l’Institut de Veille Sanitaire, en
raison d’un nombre très inhabituel de cas de syphilis précoces diagnostiqués en l’espace de
six semaines.
Le 27 novembre 2000, lors d’une rencontre avec le responsable du DAV, il a été décidé de
conduire une enquête épidémiologique descriptive pour confirmer les cas diagnostiqués
depuis janvier 2000 et mettre en place une surveillance prospective.
II. Contexte
En 1998 et 1999, aucun cas de syphilis primo-secondaire n’avait été diagnostiqué dans le
DAV de Tarnier. En raison de la résurgence des cas de syphilis, une feuille standardisée de
recueil de données avait été conçue et utilisée par les médecins du DAV.
Pour connaître la situation dans les autres DAV parisiens, le responsable de Tarnier avait déjà
contacté les responsables des DAV de l’hôpital Saint-Louis et de l’Institut Fournier. L’InVS
s’est chargé des DAV de la Croix-Rouge (rue de Valois) et de l’hôpital Bichat-Claude
Bernard.
III. Méthodes
1. Pour le DAV de Tarnier
Une définition de cas a été proposée et choisie par les cliniciens à partir de celle utilisée par
les CDC (USA) et très proche de celle utilisée par le CDSC (UK). Un cas est un patient avec
un diagnostic de syphilis primaire, secondaire ou latente précoce à partir du 1er janvier 2000
(Annexe 1).
Un questionnaire, « Investigation d’un cas de syphilis », recueillant les données cliniques et
biologiques a été conçu en y intégrant aussi les quelques données comportementales issues de
la feuille standardisée propre au DAV (Annexe 2).
Le recueil des données a été rétrospectif pour les cas du 1er semestre de l’année 2000 et
prospectif ensuite.
2. Pour les quatre autres DAV
La définition de cas et le questionnaire « Investigation d’un cas de syphilis » utilisés pour les
cas de l’année 2000 sont ceux du DAV de Tarnier. De plus, les DAV de la Croix-Rouge et de
Saint-Louis ont revu rétrospectivement leurs cas des années 1998 et 1999.
IV. Résultats
Parmi les cinq DAV, les résultats de l’Institut Fournier ne sont pas encore connus. En 2000,
un seul DAV, Bichat-Claude Bernard, n’a diagnostiqué aucun cas de syphilis répondant à la
définition de cas. Au total, le nombre de cas de syphilis récente est passé de 4 en 1998 à 24 en
2000. La distribution du nombre de cas par année est donné dans le tableau ci-dessous et par
la figure 1.
2
1998 1999 2000 2001
(au 28/02/)
Bichat-Claude
Bernard
Croix-Rouge
Tarnier
Saint-Louis
-
3
0
1
-
2
0
7
0
3
10
12
?
3
6
?
Total 4 9 25
L’analyse suivante décrit les 25 cas diagnostiqués en 2000. La répartition des cas par trimestre
de l’année 2000 est respectivement de 6, 4, 6 et 9.
Parmi les 25 cas de syphilis, 24 sont des hommes et un, une femme. Parmi les 24 cas
masculins, 19 (79.2%) sont homosexuels et 5 hétérosexuels. L’âge moyen est de 38 ans
(médiane : 36 ans ; étendue : 23-80 ans). Le pays ou la région de naissance est la France pour
16 (64%) d’entre eux, l’Europe pour 5, l’Afrique ou les Caraïbes pour les 4 derniers.
Syphilis*, nombre de cas par année, 1998-2000
Bichat-Claude Bernard**, Croix-Rouge, Saint-Louis, Tarnier
Figure 1
0
5
10
15
20
25
1998 1999 2000
*primaire, secondaire, latente précoce
**seulement pour 2000
Nombre de cas
Année
3
Parmi les 25 patients, 13 (52%) sont infectés par le VIH et tous homosexuels (Figure 2).
Parmi les 13 patients infectés par le VIH, 9 (69.2%) connaissaient leur séropositivité et 3 l’ont
découverte à l’occasion du diagnostic de syphilis. Parmi les 9 patients connaissant leur
séropositivité, la date du 1er test VIH positif est connue pour 5 d’entre eux. Parmi ces 5
patients, 4 connaissaient leur statut VIH depuis 10 ans et plus. En effet, l’année de découverte
de 1’infection à VIH est respectivement, 1986, 1988, 1989 et 1990. Quant au dernier patient,
la séropositivité a été découverte 15 jours avant le diagnostic de syphilis.
Les antécédents de MST, autres que le VIH, ont aussi été recueillis. Parmi les 25 patients, 10
(40%) n’avaient aucun antécédent de MST, 14 (56%) avaient des antécédents de MST et pour
un patient les antécédents étaient inconnus. Parmi les 14 patients avec antécédents de MST,
10 (71.4%) avaient eu une MST unique (infection à papillomavirus pour 4, gonococcie pour
3, syphilis pour 1, hépatite B pour 1, infection à herpès virus pour 1) et 4 patients (28.5%)
avaient des antécédents de plusieurs MST différentes.
Parmi les 25 patients, 15 (60%) avaient une syphilis secondaire, 8 (32%) une syphilis primaire
et 2 (8%) une syphilis latente précoce (Figure 3).
Syphilis*, cas par trimestre, mode de contamination et statut VIH, 2000
DAV Bichat-Claude Bernard, Croix-Rouge, Saint-Louis, Tarnier
Figure 2
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
1234
Homosexuel VIH+
Homosexuel VIH-
Hétérosexuel**
*primaire, secondaire, latente précoce
**5 VIH(-), 1 VIH inconnu
Nombre de
cas
Trimestres
4
V. Discussion
Les données de syphilis, maladie à déclaration obligatoire jusqu’en juin 2000, se confondaient
avec les données collectées par les DAV. Les derniers chiffres publiés1 datent du début des
années 1990 et montrent une diminution de la syphilis précoce entre 1980 et 1990. A partir de
1990, il n’existe aucune donnée nationale mais les rapports d’activité des DAV parisiens ou
d’autres régions montrent que la syphilis primo-secondaire était devenue une maladie très rare
voire exceptionnelle. Dans ce contexte, le diagnostic de plusieurs cas de syphilis était très
inhabituel et a entraîné l’alerte.
L’enquête épidémiologique, proposée au seul DAV de Tarnier, a ensuite été étendue aux
autres DAV parisiens. Elle a permis d’élaborer une définition de cas de la syphilis récente, de
recueillir le nombre de cas diagnostiqués de 1998 à 2000 et d’investiguer les cas
diagnostiqués en 2000. Parmi tous les centres parisiens de dépistage des MST, les 4 DAV
participants ont déclaré 91% des pathologies MST dépistées en 1999 (source DASES).
Entre 1998 et 2000, bien que les nombres de cas de syphilis récente soient faibles, une
augmentation importante a été observée, respectivement de 4 cas à 25. Parmi les 25 cas
diagnostiqués en 2000, trois quart d’entre eux étaient des hommes homosexuels. La moitié
des cas diagnostiqués était infectée par le VIH et parmi les patients séropositifs, 69%
connaissaient leur séropositivité avant le diagnostic de syphilis.
La résurgence de la syphilis à Paris est préoccupante car elle s’inscrit dans un contexte de
recrudescence des gonococcies2-3 depuis 1998, surtout en Ile-de-France et parmi les hommes.
D’autre part, les résultats préliminaires de l’enquête Presse Gay 20004 révèlent qu’entre 1997
et 2000, le nombre de répondants ayant déclaré avoir eu une MST dans l’année a augmenté,
de 13% à 15,8% et que tous les types de MST sont en augmentation. De plus, le taux de MST
Syphilis*, nombre de cas par trimestre et par stade clinique, 2000
DAV Bichat-Claude Bernard, Croix-Rouge, Saint-Louis, Tarnier
Figure 3
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
1234
primaire
secondaire
latente précoce
Trimestres
Nombre de cas
*primaire, secondaire, latente précoce
1 / 9 100%
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