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borsa_lebas.doc - 10/07/2007 2/8
L'Histoire d'Amina (celle qui est confiante et fidèle).
Du Mahgreb à la séropositivité : un combat pour exister
Lorsque nous rencontrons Amina, c'est une jeune femme de 33 ans, mariée, mère de 2 enfants de 5 ans
et 3 ans. Amina est diabétique depuis 12 ans, traitée par insuline à la pompe. Elle est hospitalisée,
enceinte de 7 semaines au CHU pour équilibrer son diabète.
Au cours du bilan, est proposé un dépistage VIH dans le cadre de la grossesse qui s'avèrera positif.
L'annonce de cette séropositivité est faite par le médecin prescripteur qui nous l'adresse rapidement.
Amina fait une fausse-couche spontanée quelques jours avant notre première rencontre. Deux tests de
dépistage VIH effectués au début d'une grossesse puis à la naissance de son 2
ème
enfant étaient négatif
en 2003.
C'est dans ce contexte difficile que nous allons la prendre en charge.
L'histoire qu'elle nous raconte est particulièrement douloureuse.
Amina a été mariée de force a l’âge de 16 ans à un homme déjà âgé, violent et tyrannique. Elle a du
interrompre ses études. Elle arrive en France 2 ans plus tard et finira par obtenir le divorce. Elle reprendra
alors des études d'assistante de direction.
A 26 ans, Amina est mariée pour la seconde fois à un homme d'une cinquantaine d'année qui lui est
présenté par sa famille. Il est le père de ses 2 enfants.
Elle ne travaille pas depuis septembre 2006 à cause de son diabète.
L'annonce de la séropositivité, au moment d'une grossesse spontanément interrompue a déclenché chez
cette jeune femme un véritable état de choc puis d'angoisse : comment ? pourquoi ? qui ? mes enfants
sont-ils indemnes ?
L'entretien avec le médecin nous apprendra qu’il n’y a pas d’autre facteurs de risques qu’une
contamination hétérosexuelle car pas de transfusion, pas d’usages de drogues, pas d’accident et pas de
relations extra conjugales.
Amina a pu rapidement être rassurée pour ses enfants, confiés à un pédiatre du CHU.
Au fil des bilans, des consultations très rapprochées, comme nous en avons l'habitude au début de la prise
en charge, Amina va passer par des phases d'émotions très violentes. Elle évoque l'injustice, la réaction
du mari, l'accusant initialement de l'avoir trompé, puis la culpabilisant (en raison de son comportement et
de sa maladie diabétique, il était allé "voir ailleurs" il y a 3ans…).
Elle incite son mari à se faire dépister, tout cela dans une grande tristesse la menant à la dépression.
Amina a du être prise en charge par une psychologue et bénéficier d'un traitement antidépresseur.
Les résultats des bilans montraient d'emblée une charge virale élevée et une chute de l'immunité. Il a fallu
instaurer de façon précoce un traitement anti rétroviral et assurer une surveillance très rapprochée d’Amina
tant au niveau biologique que psychologique.
Pleine de ressources, elle s'organise en canalisant son angoisse sur l'action: la prise de son traitement,
une présence intense auprès de ses enfants et la réflexion autour du mari.
Elle prend conscience que son mari ne lui avait jamais avoué une séropositivité qu'il connaissait depuis 15
ans, invisible pour elle puisqu'il ne prenait aucun traitement. Ressurgissent alors les images de mensonge,
de trahison, de mépris vécues au cours de ses années de mariage. A qui pourrait-elle faire confiance ?
Elle entame rapidement une procédure de divorce et dépense une énergie importante dans une exigence
de reconnaissance juridique de son état de victime.
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