Un phénomène qui caractérise les grandes places financières matures
(développées et émergentes), mais qui est loin d’être l’effet le plus mar-
quant pour le cas tunisien. C’est du côté de l’Investissement direct
étranger (IDE) que le terrorisme pourrait frapper fort en Tunisie. La
multiplication des attentats terroristes accentue l’attentisme des inves-
tisseurs étrangers, déjà plombés dans un comportement de « wait and
see » à cause du manque de visibilité électorale et du retard pris dans
l’adoption du nouveau Code des investissements. Les derniers chiffres
publiés par l’Agence de promotion de l’investissement extérieur (FIPA),
signalent un très net recul du flux des investissements étrangers, enre-
gistré au cours des six premiers mois de 2014 : une chute de 26.2% par
rapport à la même période de 2013.
Ainsi, la baisse des IDE impactera négativement les réserves de changes
selon deux effets : à travers le tarissement des entrées de devises (effet
direct), et via la chute des exportations (effet indirect), alimentant ainsi
les tensions sur le stock de réserves de change et les pressions baissiè-
res sur le dinar. Rappelons qu’une bonne partie des exportations tuni-
siennes sont assurées par des entreprises étrangères installées en Tuni-
sie.
Menace terroriste et moral des agents économiques
La multiplication des actes terroristes ne pourrait que saper le moral
des principaux agents économiques et du coup plomber le climat des
affaires. Le terrorisme transforme souvent le comportement des agents
économiques, opérant des distorsions dans l’allocation des ressources
du pays.
Du côté des investisseurs, avec la montée du terrorisme, l’attentisme
dominent les comportements. D’où la baisse du niveau de l’investisse-
ment domestique et de la croissance économique.
Un comportement semblable frapperait les consommateurs, surtout
pour leurs achats de biens durables et leurs projets immobiliers. La
montée de l’incertitude et le manque de visibilité, suite { la multiplica-
tion des actes terroristes, développent un comportement favorable à
l’épargne de précaution, très pénalisant pour les dépenses de consom-
mation des ménages.
Notons aussi, que plus les menaces terroristes pèseront sur une écono-
mie, plus le « risque pays » augmente et plus les primes d’assurance
flambent. Il en résulte une nette augmentation des prix des produits
importés, qui pourrait d’une part alimenter les poussées inflationnistes
et d’autre part, amener les investisseurs et les consommateurs { retar-
der leurs décisions d’achats de ces produits. Certes, un tel comporte-
ment serait profitable pour la balance commerciale, surtout du côté des
consommateurs (baisse du déficit), mais ses répercussions pourraient
être néfastes si les importations des inputs ou des biens d’équipements
seront touchées.
Le recul de la croissance alimente aussi le terrorisme
Le recul de la croissance est à son tour générateur de poussées terroris-
tes. Nous pouvons distinguer deux canaux de transmission [Figure 2].
2
Août 2014
www.macsa.com.tn
Billet Economique N° 16
D’une part, une croissance fragilisée par la menace terroriste entraîne
la montée du chômage et de la pauvreté. Du coup un marché poten-
tiel s’est élargi pour des nouveaux recrus pour les thèses terroristes.
D’autre part, la faiblesse du taux de croissance se traduit par la chute
des recettes fiscales de l’Etat. L’appauvrissement de l’Etat, qui en résul-
te, serait pénalisant pour l’efficacité de sa stratégie de lutte contre le
terrorisme.
Combattre la nébuleuse terroriste : un travail de longue
haleine
Pour épargner l’économie nationale des retombées d’une menace ter-
roriste, une série de mesures s’imposent.
Un effort de fermeté
A très court terme, l’option sécuritaire est inévitable, surtout pour un
pays comme la Tunisie, où l’économie demeure très dépendante des
recettes touristiques et des investissements étrangers. Le contrôle des
frontières et la modernisation des équipements militaires semblent
être incontournables pour améliorer l’efficacité des politiques anti-
terroristes (une démarche curative). De même, la fermeté s’impose
contre l’apologie du terrorisme sur la place publique (médias, mos-
quées, universités, meeting politiques, …), mais aussi contre la suren-
chère politicienne sur les cadavres des martyrs des actes barbares,
nourrie par une entrée prématurée dans la campagne électorale (une
démarche préventive).
Pour atteindre ces objectifs, un effort budgétaire (réallocation des res-
sources pour rénover le dispositif de sécurité) doit se conjuguer à un
effort réglementaire (plus de fermeté dans les textes pour sanctionner
l’apologie du terrorisme).
Un effort de dosage
Un jeu d’équilibriste conditionne l’efficacité des stratégies de lutte
contre le terrorisme.
L’action gouvernementale est interpelée { trois niveaux :
Comment réussir la mise en œuvre d’un plan anti-terroriste sans
renoncer à la liberté d’expression ?
1
2
Figure 2
Menaces terroristes et croissance économique
Une causalité à double sens
Elargissement du marché
potentiel des thèses
jihadistes
Chômage
pauvreté
Inefficacité des politiques
anti-terroristes
Recettes
Fisacles
Menaces
Terroristes
Croissance
économique
< 0