. La place géopolitique et stratégique du tourisme En ce week-end, même s’il est bon de bien profiter pour se détendre, profitons aussi pour mieux comprendre. Pourquoi ne pas discuter de l’impact du terrorisme sur le tourisme mondial ? Une question qui en amène bien d’autres…- Annou get enpe bann fenomenn a letranze ki kapab afekte nou. Tourisme et terrorisme ne semble pas rimer, pourtant, l’accroissement mondial du tourisme, amène dans son sillage les attentats terroristes et les implantations de mafias dans certaines régions touristiques. Ces conséquences géopolitiques ne datent pas d’aujourd’hui. L’accélération des moyens médiatiques comme Internet a donné plus de visibilité à celles-ci. La question se poserait de savoir à qui profite l’augmentation de ce risque géopolitique ? Est-il réel ? Les notions de terrorisme et de tourisme ont vu le jour entre le 18 et 19ème siècle. Puis, les appellations officielles trouveront droit de cité en 1866, en Irlande suite à des violences nationalistes, alors que pour le tourisme, l’auteur Stendhal francisera officiellement le terme « Tourism » en 1838 dans ses « Mémoires d’un touriste » et le Larousse en donnera une ébauche de définition en 1877. Promenade des anglais, Nice, moment de recueillement après l’attentat du 14 juillet 2016 (Photo Europe 1) Atteinte symbolique de l’origine du tourisme Il est à noter que la promenade des Anglais, à Nice, faisait partie du « Grand-Tour », à la fin du 17ème et surtout au 18èmesiècle. Ce voyage initiatique était réservé à la jeune élite aristocratique anglaise, une pratique culturelle qui a esquissé les contours du tourisme. Cette jeune élite pratiquait du lobbying dans les pays européens traversés. Cette fameuse promenade, symbolique touristique, vient, justement, d’être le théâtre d’un attentat marquant, jour de fête nationale, en France en cette année 2016. Encore un lien et une histoire complexes entre le tourisme et le terrorisme. Associer la terreur à un site touristique, affaiblir l’économie d’un pays, redéfinir une géographie du tourisme, en tout état de cause, le terrorisme crée de nombreux dégâts dans cette industrie qui associe le rêve aux vacances et non aux risques d’attentats. De même, la forte médiatisation qui entoure ce phénomène pourrait-elle masquer d’autres changements profonds ? Si oui, lesquels ? Quels en sont les impacts ? Même si l’archipel des Seychelles semble éloigné et « épargné » géographiquement par tous ces phénomènes, il est directement concerné par l’industrie du tourisme, pilier de l’économie locale. Est-ce imaginable que mon « business de take-away » serait pris à partie dans ces enjeux géopolitiques et géostratégiques, peut-être ? Eveiller la curiosité du citoyen durable Aborder l’impact du terrorisme sur le tourisme mondial pourrait faire l’objet d’une thèse. Ce n’est l’objectif de ce papier. Son principal propos est d’éveiller la curiosité de tout citoyen qui veut évoluer, les yeux ouverts, au sein de sa cité, même sous les cocotiers. Ouverts sur son territoire, capables de regarder le monde et de tirer son épingle du « grand jeu » de la réorganisation de la géographie du tourisme et pour aller plus loin, observer le phénomène de redéfinition d’un nouvel ordre mondial. Guerres systémiques avant tout psychologiques De prime abord, ce sujet délicat draine une multitude de questions. Le monde est actuellement le théâtre de guerres multiples et multiformes. Elles ont un visage de guerres militaires, économiques, de religions, de cyber-guerres, psychologiques, bref des guerres systémiques. Sous prétexte de droits de l’homme, d’actes d’apparence simpliste ou au nom de la démocratie, les conflits, les crises et les guerres s’enchaînent et font partie du quotidien de toute une partie de la population mondiale. Celles-ci sont relayées auprès du plus grand nombre en raison du droit à l’information. Le touriste étranger, un ambassadeur surmédiatisé S’est-on posé la question sur le rôle des médias et la surmédiatisation dramatique qui occupe la place sur votre écran au journal de 20 heures, dans votre journal écrit du matin ou sur les ondes de votre radio favorite ? Cela vous donne forcément envie de programmer des vacances de rêves dans ces pays atrophiés et diminués économiquement lors d’attaques terroristes ? « Chéri, tu prendras bien les gilets pare-balles et tu diras aux enfants de mettre de la crème solaire quand on ira sur cette plage magnifique de ce pays lointain ». Cocotiers, palmiers, cocktails…et terrorisme. Le touriste d’aujourd’hui, ambassadeur de son propre pays, retrouve son image pris en otage, dès qu’il foule le sol de cette contrée à découvrir. Il véhicule, à lui-seul, la culture, le mode de vie et de pensée de tout un pays. Le plus grand Walt-Disney n’est pas l’apanage d’un pays en particulier. Il peut être, dans un recoin de la rue du bazar à Victoria à Mahé… Nouvelle géographie du tourisme et innovation Pour autant, faut-il se laisser emporter par ces vagues de terreurs que veulent instiller ceux qui croient avoir le pouvoir dans cette réorganisation de la géographie du tourisme ? Ce jeune chef d’entreprise qui va conclure plusieurs contrats de vente d’armes pour sortir de la précarité ? Cet homme isolé qui se prétend appartenir à un phénomène religieux et qui a sidéré tous nos sens par son attaque terroriste ? Ces nouveaux territoires, définis comme destination à découvrir après l’Egypte, la Turquie, le Maroc, Bombay, Le Sri-Lanka, New-York, Londres, Bamako, La Côte d’Ivoire, la Belgique, Paris, Nice…, sont, par surprise, la Slovaquie, la Serbie, la Roumanie, la Bulgarie, la Croatie, La Colombie, les Iles Canarie, Les Baléares, la Thaïlande, Cuba, l’Indonésie, Le Portugal… Que ce soient pour continuer leurs activités économiques sur ces nouveaux territoires ou participer à la création d’entreprises, certaines organisations ne reculent devant rien. Un tourisme « expérientielle » avec l’apparition de nouveaux risques, de nouveaux métiers, de nouvelles formes d’organisation…un chemin, presque, vers l’innovation. Ce sujet pousse chacun de nous à réfléchir, de là où je suis, que puis-je faire pour contribuer au bon fonctionnement de ma communauté, pour faire avancer mon pays ? Ceci, afin de participer à la création d’une vision innovante du demain, ensemble, pour un meilleur tourisme mondial. Puis-je être un citoyen durable ? Suis-je capable de trier les informations, de les traiter, de les vérifier et de me construire ma propre vision ? Le docteur HUYGUE nous guide sur une piste au travers de ces écrits. Stop au terrorisme, pour cela, le comprendre… « La lutte contre le terrorisme et les dangers qu'il implique ‒ que ce soit pour le tourisme ou les citoyens en général ‒ commence donc par la compréhension de son discours, de ses motivations et de sa grille d'interprétation de la réalité », a indiqué François-Bernard HUYGHE, Docteur d’Etat en Sciences Politiques et chercheur en sciences de l’information et de la communication, en France. Il a écrit, entre autres : Désinformation, Les armes du faux, Les experts ou l'art de se tromper, Gagner les cyberconflits au-delà du technique, Think tanks, Terrorismes Violence et propagande, Maîtres du faire croire, Comprendre le pouvoir stratégique des médias, Quatrième guerre mondiale, Faire mourir et faire croire et Ecran / Ennemi, Terrorismes et guerres de l'information. En comprendre l’enjeu économique est tout aussi important. Puissances mondiales touchées ou stratégie ciblée ? « Une attaque terroriste coûte plus de 0,5% de croissance à un pays » ,titre Guillaume Errard , journaliste-économiste, sur le site Web du Figaro en octobre 2015. Il souligne qu’il s’agit de l'une des conclusions principales d'une étude de l'agence de notation financière américaine Moody's. Il y énumère les statistiques suivantes : entre 2011 et 2013, le nombre d'attaques terroristes a plus que doublé, passant de 5 000 à 11 823, selon une étude par l'agence de notation financière américaine Moody's . Soit 2,4 attaques pour un million de personnes en 2013 contre 0,7, en 2011. En moyenne, l'impact immédiat d'une attaque terroriste sur la croissance d'un pays est compris entre 0,5% et 0,8%, selon Moody's. Pour obtenir cette estimation, l'agence de notation s'est appuyée sur une base de données ( Global Terrorism Database) de 156 pays couvrant la période 1994-2013 et tenue par l'Université du Maryland (nord-est des États-Unis). « Les répercussions économiques peuvent s'étendre sur cinq années avant de s'atténuer », expliquent les auteurs de l'étude. Il précise que cette fourchette est toutefois à relativiser. Plus de 60% des attaques sont concentrées autour de quatre pays : l'Irak (24% des attaques), le Pakistan (19%), l'Afghanistan (12%) et l'Inde (5,8%). En l'absence de ces attaques, le PIB de l'Irak aurait ainsi été 8,2% supérieur à celui que l'État a enregistré en 2013 et celui du Pakistan, 5,1% plus élevé. L'impact est encore plus conséquent en matière d'investissement puisque les manques à gagner atteignent 9,3% pour le Pakistan et 15,1% pour l'Irak. Pour la seule année 2013, le PIB des dix pays les plus touchés par les attaques terroristes aurait été supérieur d'au minimum 1,1% et d'au maximum 1,7%». « Les répercussions sur la croissance sont quasi-nulles pour l'Allemagne, négligeables pour la France et les États-Unis et estimées à 0,3% pour le Royaume-Uni », selon Merxe Tudela Carreres, analyste chez Moody's. Extrait de l’article …«Il faut avoir en tête par ailleurs que ce sont des estimations, précise au Figaro Merxe Tudela Carreres, l'un des auteurs de l'étude. Chaque acte terroriste, de par ses spécificités (le lieu, le jour, le type d'attaque etc.) aura certainement un impact différent de celui moyen (-8,2% pour l'Irak, -5,1% pour le Pakistan, ndlr). Notre but n'était pas d'obtenir des estimations précises des impacts de quelques actes terroristes mais plutôt des répercussions moyennes au terrorisme. Prenons l'exemple de l'attentat de Londres en 2005. Le manque à gagner économique pourrait être estimé à 0,5% du PIB britannique. Mais ce chiffre est basé uniquement sur l'impact moyen sur le PIB d'un acte terroriste semblable à l'attentat de Londres. Cela ne peut pas être considéré comme l'estimation précise d'un événement donné». Quant aux principales puissances économiques mondiales, l'impact est beaucoup moins important du fait que ces pays subissent chaque année bien moins d'attaques terroristes que l'Irak ou le Pakistan. « Les répercussions sur la croissance sont quasi-nulles pour l'Allemagne, négligeables pour la France et les États-Unis - et ce malgré l'attentat de Boston (en 2013, ndlr) car il n'a pas causé tant de dommages que cela en matière d'infrastructures - et sont estimées à 0,3% pour le Royaume-Uni», explique, Merxe Tudela Carreres, l'un des auteurs de l'étude ». Fin de l’extrait.