BVP – Cahiers de l'Autodiscipline Publicitaire - Pratique & doctrine
N° 8 – Juin 2006 - page 2
La référence au religieux en publicité constitue un ressort assez
classique pour qui veut suggérer une idée de tradition familière,
rassurante, ou bien injecter une once de sacré, de spirituel, de ce
fameux « supplément d’âme » dont nos sociétés sont si friandes :
les détournements de visuels, de personnages, de scènes, de
symboles à caractère religieux, de musiques sacrées, sont légion en
publicité. Puisant dans des référents largement familiers, y compris
pour les non croyants, ils présentent l’avantage de « faire sens »
immédiatement.
D’un point de vue déontologique – ce que la profession se permet
ou s’interdit de dire ou montrer – la référence au religieux se fait
dans le cadre du principe du « ne pas choquer » qui, en
l’occurrence, impose un respect des croyances religieuses du
public.
Le BVP a, au fil du temps, élaboré une doctrine consensuelle
permettant à la créativité des publicitaires de s’exprimer sans
offenser les croyants. L’époque actuelle, marquée par un net regain
de tension sur les questions religieuses, pose la question du ré-
ajustement de cette grille d’évaluation ;
Une doctrine du respect des croyances
allant au delà de l'absence de dénigrement
Des règles professionnelles allant au delà des obligations
juridiques
Les règles de droit s’appliquant en publicité pour ce qui concerne la
représentation du religieux relèvent tout d’abord de textes
généraux :
- l’article 1 de la Constitution de 1958 proclame que la République française "respecte toutes les croyances".
Le principe de la laïcité consacré par la loi française assure le respect des religions ;
- la Convention Européenne des Droits de l'Homme veille au respect des convictions religieuses et garantit le
droit à la jouissance paisible de la liberté de religion (article 9 de la Convention) en admettant qu'un Etat
puisse sanctionner des expressions gratuitement offensantes pour autrui.
Par ailleurs, deux textes spécifiques aux médias abordent cette question :
- la loi du 29 juillet 1881, relative à la liberté de la presse, dans ses articles 29 alinéa 2 et article 33 alinéa 3s, a
prévu et réprime la définition de l' injure en raison de la religion ;
- le décret de 1992 concernant l’audiovisuel énonce en son article 5 que «la publicité ne doit contenir aucun
élément de nature à choquer les convictions religieuses, philosophiques ou politiques des téléspectateurs".
DEONTOLOGIE
Publicité et religion : zone de turbulences
La référence au religieux en publicité devient plus délicate à manier aujourd'hui
Résumé
Les emprunts publicitaires aux religions font
l'objet d'un encadrement juridique et
déontologique visant à assurer le respect dû aux
croyants. Au fil du temps, une doctrine s'est
dégagée qui a permis de limiter les cas de
messages choquants, tout en permettant à la
publicité de puiser dans ce fond culturel.
Dans une période où les sensibilités en matière de
religion se font plus épidermiques, il convient
d'être plus prudent et, peut être, d'ajuster nos règles
à ce contexte plus tendu ?
+ Recommandation Races, Religion, Ethnies, du
BVP
+ Isabelle SAINT MARTIN "Christ, Pieta, Cène
à l'affiche: écart et transgression dans la
publicité et le cinéma", Revue Ethnologie
Française, 2006, p 65-81
+ Jean-Marie LEGER "La publicité nous fera-t-
elle perdre foi en la justice ?", Légipresse n°221,
mai 2005
+ Jean-Pierre TEYSSIER "Médias et religion :
jusqu'ou le respect ?" Le Figaro 11/02/06
+ La Cène : attention au religieux", CAP N°6
octobre 2005, page 12