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Synthèse
Geriatr Psychol Neuropsychiatr Vieil 2015 ; 13 (1) : 73-82
Le docteur Jean-Baptiste Vincent
Laborde (1830-1903), neurologue
et neurophysiologiste oublié
Jean-Baptiste Vincent Laborde (1830-1903),
forgotten neurologist and neurophysiologist
Jacques Poirier
Paris, France
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es `
a part :
J. Poirier
Résumé. Jean-Baptiste Vincent Laborde (1830-1903), originaire de Gascogne, fait ses
études médicales à Paris et est nommé externe (1854) puis interne (1858) des hôpitaux
de Paris. En 1864, il soutient sa thèse de doctorat en médecine sur la paralysie dite essen-
tielle de l’enfance. Il travaille ensuite dans le laboratoire de physiologie du professeur Jules
Auguste Béclard (1818-1887), puis il devient chef des travaux physiologiques à la Faculté de
médecine de Paris. En 1890, la chaire d’anthropologie biologique de l’École d’anthropologie
de Paris lui est confiée. Ses principaux travaux portent sur les tractions rythmées de la
langue dans les cas de mort apparente, la lutte contre l’utilisation de la céruse, contre la
tuberculose et surtout contre l’alcoolisme ; il contribue à la connaissance de l’étiologie des
ramollissements cérébraux qu’il attribue à des occlusions vasculaires par de l’athérome et
participe à la découverte des connexions entre les noyaux des nerfs crâniens oculo-moteurs
commun et externe. Par ailleurs, il mène une carrière de journaliste à la tête de la rédac-
tion de La Tribune médicale. Enfin, Laborde est un républicain convaincu, un libre penseur
déterminé, qui dirige un temps la Société d’autopsie mutuelle et se montre attaché aux
obsèques civiles et à l’incinération.
Mots clés : histoire de la médecine, histoire de la neurologie, neurologie, physiologie,
neurophysiologie
Abstract. Jean-Baptiste Vincent Laborde (1830-1903), native of Buzet, in Gascony, under-
took his medical studies in Paris and was nominated “externe” (1854) then “interne” (1858)
of Paris hospitals. His main “patrons” were Alfred Velpeau (1795-1867), Auguste Nélaton
(1807-1873), Jean-Baptiste Bouillaud (1796-1881), Pierre-Olive Rayer (1793-1867), Joseph-
Franc¸ois Malgaigne (1806-1865), Pierre Carl Edouard Potain (1825-1901), Ernest Charles
Lasègue (1816-1883) and Léon Rostan (1790-1866). In 1864 he defended his thesis on the
essential paralysis of childhood. He then worked in the physiology laboratory of Professor
Jules Auguste Beclard (1818-1887), and became “chef des travaux” of physiology at the
Paris faculty of medicine. In 1890, he was nominated to the chair of Biological anthropology
at the Paris school of anthropology. His main works focused on the rhythmic tractions of
the tongue in cases of apparent death, the understanding of the etiology of brain softe-
ning he attributed to vascular occlusions by atheroma and the discovery of connections
between the cranial nuclei of common (III) and external (VI) oculomotor nerves and the
struggle against the use of ceruse, against tuberculosis and especially against alcoholism.
In addition, he made a career in journalism: since 1874 he had been the founder, director and
editor-in-chief of the weekly newspaper The Medical Tribune, whose aim was to “combine
to a fair extent, science and progress with the practice of medicine.” Finally, Laborde was
a convinced Republican, a friend of Léon Gambetta’s (1838-1882). For him, democracy was
the “ideal of civilized nations” and he showed deep hatred for the “Commune of Paris”.
Finally, he was a determined free thinker, who ran the Society for mutual autopsy for a while
and who was attached to civil funerals and cremation.
Key words: history of medicine, history of neurology, neurology, physiology, neurophysio-
logy
doi:10.1684/pnv.2015.0518
Pour citer cet article : Poirier J. Le docteur Jean-Baptiste-Vincent Laborde (1830-1903), neurologue et neurophysiologiste oublié. Geriatr Psychol
Neuropsychiatr Vieil 2015 ; 13(1) : 73-82 doi:10.1684/pnv.2015.0518 73
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J. Poirier
Jean-Baptiste Vincent Laborde [1, 2] est né le 5
décembre 1830 à Buzet (Lot-et-Garonne), devenue
Buzet-sur-Baïse en 1921, dans le quartier de Padouin.
Ses parents sont peu fortunés. Après de brillantes études
à Casteljaloux, puis au lycée de Cahors, il monte à Paris
et s’inscrit en faculté de médecine. Pour subvenir à ses
besoins, il donne des lec¸ons particulières. Il est nommé
externe des hôpitaux de Paris, quarante-septième sur cent-
quatre-vingt-deux au concours de 1854 [3], dans la même
promotion que Sigismond Jaccoud (1830-1913), Benjamin
Ball (1833-1893) et Etienne Lancereaux (1829-1910), futur
président de l’Académie de médecine. En 1858, il est
rec¸u à l’internat des hôpitaux de Paris, trente-troisième sur
trente-sept nommés, en même temps qu’Adrien Proust
(1834-1903), futur professeur d’hygiène à la faculté de
médecine de Paris, et père de Marcel Proust (1871-1922). À
la fin de sa troisième année d’externat (1857) et de sa qua-
trième année d’internat (1860), Laborde rec¸oit la médaille
de bronze de l’Assistance publique accordée aux internes et
aux externes «qui ont toujours rempli leurs fonctions avec
zèle et exactitude [....], comme témoignage de satisfaction
de la part de l’administration »[3].
En 1864, Laborde soutient sa thèse de doctorat en
médecine [4]. Si l’on se réfère aux dédicaces de sa thèse,
ses maîtres sont Alfred Velpeau (1795-1867), professeur de
clinique chirurgicale, Auguste Nélaton (1807-1873), profes-
seur de clinique chirurgicale, Eugène Cazalis (1808-1882),
ex-médecin de la Salpêtrière, médecin de la Maison de
santé, Jean-Baptiste Bouillaud (1796-1881), professeur de
clinique médicale, Pierre-Olive Rayer (1793-1867), médecin
honoraire de la Charité, médecin de l’Empereur, membre de
l’Institut et de l’Académie impériale de médecine, Joseph-
Franc¸ois Malgaigne (1806-1865), professeur de médecine
opératoire, Sauveur Henri Victor Bouvier (1799-1877), méde-
cin de l’hôpital des Enfants, Pierre Carl Edouard Potain
(1825-1901), médecin de l’hospice des Ménages, profes-
seur agrégé à la Faculté de médecine, Ernest Charles
Lasègue (1816-1883), médecin de l’hôpital Necker, profes-
seur agrégé libre à la Faculté de médecine de Paris (figures
1et2).
Laborde se présente deux fois sans succès à
l’agrégation et rédige donc deux thèses d’agrégation, la pre-
mière sur la physiologie pathologique de l’ictère (1868-69)
et la seconde sur la malignité dans les maladies (1872).
Il accumule prix et récompenses [5, 6] : médaille d’or et
prix Corvisart de la Faculté de médecine de Paris (1857), lau-
réat de la Société médicale des Hôpitaux de Paris (1862-63),
lauréat de la Société anatomique, prix Godard (1864), prix
Monthyon (1865-68), prix Orfila de l’Académie de médecine
(1878-79), prix Bellion et prix de physiologie thérapeutique
de l’Académie des sciences. Il est membre de plusieurs
sociétés savantes et associations [2] : Société anatomique
de Paris, Société de biologie, Société d’anthropologie de
Paris, Société d’assistance pour les aveugles, Ligue anti-
alcoolique (Président), Société de médecine publique et
d’hygiène professionnelle (membre fondateur). Il est élu à
l’Académie de médecine (section d’anatomie et de physio-
logie) le 12 juillet 1887 et sera un académicien assidu et
prolixe.
Laborde se marie en 1887. Son épouse meurt huit
ans plus tard. Il se remarie en 1897 avec une veuve de
cinquante-et-un ans [7] qui avait une fille d’un premier
mariage.
Travaillant dans le laboratoire de Jules Auguste Béclard
(1818-1887), professeur de physiologie à la Faculté de
médecine de Paris, il devient chef de travaux de physiologie
et directeur du laboratoire et des travaux physiologiques à
la Faculté de médecine de Paris;àcetitre, il est chargé
du cours de démonstrations physiologiques. En 1890, la
chaire d’anthropologie biologique de l’École d’anthropologie
de Paris lui est confiée [8]. Il est, par ailleurs, inspecteur des
Maisons de santé privées de la Seine.
Laborde meurt le 5 avril, à son domicile, 1, boulevard
Saint-Germain à Paris. «Les obsèques ont été aussi simples
que possible, comme il convenait, pour un homme d’une
telle envergure morale. »[9]. «Libre-penseur convaincu et
Figure 1. Jean-Baptiste Vincent Laborde (©Bibliothèque de
l’Académie nationale de médecine).
Figure 1. Jean-Baptiste Vincent Laborde (©Library of the national
Academy of medicine).
74 Geriatr Psychol Neuropsychiatr Vieil, vol. 13, n 1, mars 2015
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Le docteur Laborde, neurologue et neurophysiologiste oublié
ennemi des cérémonies tapageuses, il a exigé des funé-
railles civiles et sans discours ; hygiéniste, il a été incinéré ;
membre de la Société d’autopsie mutuelle, il a réclamé
l’autopsie de son cadavre ; ses dernières volontés ont
été ponctuellement exécutées. »[10-12]. Ses cendres sont
inhumées au cimetière du Père-Lachaise1.
L’œuvre scientifique de Laborde est pléthorique et poly-
morphe, mais, au milieu des multiples travaux réalisés dans
des domaines très divers, quelques grands thèmes se
dégagent : les tractions rythmées de la langue, le ramol-
lissement cérébral, les connexions entre les noyaux du III
et du VI, le combat contre l’alcoolisme.
Les tractions rythmées
de la langue
Lorsque Laborde publie sa méthode des tractions ryth-
mées de la langue pour réveiller le réflexe respiratoire dans
les cas de mort apparente [13], il obtient le meilleur accueil
et son livre paru en 1894 fait l’objet d’une seconde édi-
tion trois ans plus tard [14]. Cette découverte, qualifiée
de très importante par la plupart des journaux médicaux,
assure à son auteur une grande renommée et lui vaut
d’être considéré comme un bienfaiteur de l’humanité :
«Combien d’enfants venus avec les apparences de la mort,
de noyés, d’asphyxiés, etc., lui doivent actuellement la vie ?
Cette découverte indiscutée suffirait à elle seule à inscrire
Laborde à la première page du livre d’or des bienfaiteurs
de l’humanité. »[10]. «Ses intéressantes recherches sur
les tractions rythmées de la langue suffisent à donner une
haute idée des services qu’il a rendus à la science et à
l’humanité. »[1].
Le mode opératoire est le suivant : le sujet est étendu
sur le dos, la tête légèrement tournée sur le côté ; avec
les doigts enveloppés d’un linge ou mieux avec la pince
ad-hoc conc¸ue par Laborde on saisit la langue, sur laquelle
on exerce des tractions vers l’extérieur, puis on la laisse
rentrer dans la bouche et l’on recommence la manœuvre
pendant plusieurs heures s’il le faut.
Sa foi en une science pure et dure conduit Laborde à
passer au-dessus des convenances habituelles pour mener
une expérimentation scientifique sur l’homme, ainsi il se
précipite sur la tête fraîchement guillotinée de suppliciés,
comme par exemple celle de Michel Campi (exécuté en
1884), pour voir si grâce aux tractions rythmées de la langue,
la tête isolée du reste du corps peut revivre (ce qui ne fut
pas le cas !) [15].
139edivision, 3eligne, M, 34.
Figure 2. Buste en marbre de Jean-Baptiste Vincent Laborde, dû au
sculpteur Daniel Bacqué (1874-1947) (©Bibliothèque de l’Académie
nationale de médecine).
Figure 2. Jean-Baptiste Vincent Laborde’s marble bust, by the
sculptor Daniel Bacqué (1874-1947). (©Library of the national Aca-
demy of medicine).
Les tractions rythmées de la langue comme technique
de réanimation respiratoire ne survivront évidemment pas
aux procédés plus efficaces qui ont été découverts par la
suite.
Le ramollissement cérébral
Laborde dédie à son maître Léon Rostan (1790-1866),
l’ouvrage qu’il consacre en 1866 au ramollissement céré-
bral [16] (figure 3). Dans ce travail, il reprend de nombreuses
observations étudiées sur le cerveau à l’état frais et après
durcissement dans une solution d’acide chromique ou de
bichlorate de potasse et mentionne, pour la première fois,
l’usage du microscope. Le microscope est alors utilisé
sur le tissu frais ou fixé, mais sans inclusion ni colora-
tion. Contrairement à la théorie de l’inflammation très en
vogue à l’époque, il décrit le ramollissement spontané
comme un phénomène organique de nature non inflam-
matoire, en rapport avec des modifications artérielles :
incrustation calcaire des grosses artères et surtout ano-
malies des capillaires (état moniliforme, dépôts graisseux)
dues à l’âge et au déclin de l’organisme. Pour Laborde, le
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J. Poirier
Figure 3. Ramollissement. Page de titre du livre de Laborde.
Figure 3. Title page of Laborde’s book on brain softening.
ramollissement cérébral correspond donc à une nécrose (ou
nécrobiose) dont les lésions vasculaires primitives sont la
cause. La figure de la planche illustrant son livre montre
un «vaisseau capillaire de la couche optique dans un
foyer couleur hortensia et rouge-carmin. Ce vaisseau, très-
irrégulier dans son calibre et dilaté en ampoule par places,
présente sur ses parois une accumulation considérable
de matière adipo-athéromateuse ; sa lumière paraît être
presque complètement obstruée dans une grande éten-
due ; les branches secondaires elles-mêmes sont envahies
par le dépôt morbide. »[16] (figure 4).
Ce travail de Laborde représente un bon exemple de ce
que pouvait être la neurologie dans les hôpitaux de Paris
avant que ne s’épanouisse l’école de Jean-Martin Charcot
(1825-1893) [17].
Les connexions entre les noyaux
du III et du VI
La découverte du substratum anatomique des paraly-
sies de la latéralité du regard, c’est-à-dire les connexions
entre les noyaux des nerfs crâniens III (moteur ocu-
laire commun) et VI (moteur oculaire externe) est le fait
de la collaboration entre trois médecins : Mathias Duval
(1844-1907), Gaston Graux (1848-1925) et Jean-Baptiste
Vincent Laborde.
L’affaire est d’une telle importance en neurologie, en
neuroanatomie et en neurophysiologie qu’elle mérite d’être
contée.
Le point de départ est le travail d’Adolphe Gubler
(1821-1879), médecin de l’hôpital Beaujon, agrégé de la
faculté, qui publie en novembre 1856 un article [18] dans
lequel il décrit l’hémiplégie alterne – «variété singulière
d’hémiplégie dans laquelle la face étant paralysée d’un
côté, les membres le sont du côté opposé »– qu’il consi-
dère comme témoignant d’une lésion de la protubérance et
qu’il pense être une preuve de la décussation des racines
des nerfs faciaux2. À l’appui de cette assertion, Gubler
cite les travaux d’Alfred Vulpian (1826-1887) et Jean-Marie
Philipeaux (1809-1892) publiés en 1853 [19]. Signalons au
passage qu’Auguste Millard (1830-1915), alors interne, futur
médecin des hôpitaux, avait revendiqué la priorité de cette
découverte [20]. Quoi qu’il en soit de la querelle de priorité,
Gubler et Millard (que la postérité a associé en désignant
cette pathologie par le terme de syndrome de Millard-
Gubler) découvrent l’existence d’hémiplégies alternes et les
rapportent à des lésions de la protubérance, mais ni l’un ni
l’autre ne mentionnent de trouble de l’oculo-motricité.
C’est Achille Louis Foville fils (1831-1887), souvent
appelé Achille Louis Defoville pour être distingué de son
père Achille-Louis Foville (1799-1878), qui publie en 1858
la première observation d’un patient ayant une hémiplégie
alterne avec paralysie de la latéralité du regard [21]. Il émet
l’hypothèse d’une lésion protubérantielle et d’une décussa-
tion des racines du nerf facial au niveau de la protubérance ;
il interprète – sans preuve anatomique – la paralysie de la
latéralité, en émettant l’hypothèse qu’il existe des conne-
xions entre le noyau du III d’un côté et celui du VI) de l’autre :
«La nature aurait employé, pour diriger en même temps les
deux yeux dans une même direction, un moyen analogue
à celui que l’homme a su trouver lorsque, ayant à conduire
deux chevaux attelés ensemble, il sait réunir dans chacune
de ses mains les rênes qui, par un seul mouvement, les
entraînent tous les deux à la fois vers la droite ou vers la
gauche. C’est de même, que chaque côté de la protubé-
rance annulaire, donnant naissance à des fibres nerveuses
qui les unes vont animer le muscle droit externe (abducteur)
du même côté, et les autres font contracter le muscle droit
interne (adducteur) de l’autre côté, présiderait aux mouve-
ments, antagonistes en apparence, qui assurent la vision à
droite ou à gauche. »
2Cette expression désigne les fibres du faisceau pyramidal qui innervent
les noyaux du facial.
76 Geriatr Psychol Neuropsychiatr Vieil, vol. 13, n 1, mars 2015
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Le docteur Laborde, neurologue et neurophysiologiste oublié
Félix Féréol [22] (1825-1891), médecin des hôpitaux, est
le premier à donner en 1873, à partir de son interpréta-
tion de la littérature neuro-anatomique, la démonstration
anatomo-clinique des connexions entre les noyaux du III
et du VI, seulement soupc¸onnées par Defoville [23]. La
démonstration définitive de ces connexions revient aux tra-
vaux anatomiques et expérimentaux de son interne Gaston
Graux, de Mathias Duval et de Laborde, effectués chez le
chat puis le singe et publiés de 1877 à 1880 [24], et qui
ont fait l’objet de la thèse de Graux [25, 26]. Ces auteurs
démontrent l’existence physiologique et anatomique des
connexions entre les noyaux du III et du VI (et aussi du
IV, nerf pathétique) qui empruntent le trajet des bande-
lettes longitudinales postérieures (figure 5). Par la suite, de
nombreuses confirmations cliniques ou anatomo-cliniques
ont été rapportées. On sait aujourd’hui – comme Duval et
Laborde l’avaient déjà montré – que la bandelette longi-
tudinale postérieure (ultérieurement dénommée fasciculus
longitudinalis medialis ou faisceau longitudinal médian) est
un faisceau de fibres d’association ascendantes et descen-
dantes, homo et contro-latérales, unissant les noyaux des
nerfs crâniens entre eux (et donc notamment le noyau du VI
au noyau du III controlatéral) et aux noyaux des autres nerfs
crâniens et s’étendant de la partie supérieure du mésencé-
phale à la moelle épinière.
Le combat contre l’alcoolisme
AlafinduXIX
esiècle, l’alcoolisme ravage la France
[27] et le combat contre ce fléau devient une préoccupa-
tion lancinante. Laborde est un des plus actifs apôtre de la
lutte anti-alcoolique [28] : «il se lanc¸a avec une ardeur toute
juvénile dans la lutte entreprise contre ce fléau national »[1],
«pour l’amour de ses semblables, pour l’amour du bien, il
y mit son âme entière. »[29].
Pour Laborde, partisan – comme la plupart des méde-
cins de l’époque – du rôle majeur de l’hérédité, l’alcoolique
«porte en lui-même, en son organisation morale, une dis-
position qui l’excite, et l’entraîne irrésistiblement à boire ;
cette disposition morbide est antérieure à celle que crée,
à son tour, l’habitude alcoolique ; de telle sorte que l’une
succède en réalité à l’autre, et que leurs effets s’ajoutent
ensuite et se compliquent. »[30].
L’article 13 de la loi du 29 décembre 1900 [31] stipule
que «le Gouvernement interdira par décret la fabrication,
Ia circulation et Ia vente de toute essence reconnue dange-
reuse et déclarée telle par l’Académie de médecine. »En
conséquence, Pierrre Waldeck-Rousseau (1846-1904), pré-
sident du Conseil, ministre de l’Intérieur et des cultes, écrit
au Secrétaire perpétuel de l’Académie pour demander un
Figure 4. Ramollissement. Planche, figure V (JBV Laborde, 1866).
Légende détaillée dans le texte.
Figure 4. Softening of the brain attributed to arterial occlusion due
to atheroma. Figure V (JBV Laborde, 1866).
Figure 5. Coupe transversale de la protubérance du singe papion.
a : quatrième ventricule, PC : pédoncule cérébelleux supérieur, BP :
bandelette longitudinale postérieure, x : entrecroisement des fibres
de la BP. «On voit, du bord interne de chaque bandelette longitu-
dinale, se détacher de minces fascicules nerveux, qui se dirigent
en dedans et un peu en haut (en x), s’entre-croisent sur la ligne
médiane, et viennent constituer, du côté réciproquement opposé
à leur point de départ, un ou deux petits cordons à coupe ronde ou
ovale. »(Duval et Laborde. J Anat Physiol 1880, Planche I, Fig. 2).
Figure 5. Transversal section of the pons of monkey papio. a :
fourth ventricle, PC : pedunculus cerebellaris superior, BP : medial
longitudinal bundle, x : interlacing of the BP fibers. «Coming off
from the inner edge of each longitudinal bundle, thin nerve fas-
cicles, directed inwards and slightly up (x) cross each other in the
midline are shown, and go up to the controlateral side, forming one
or two small round or oval cords. »(Duval et Laborde, J Anat Physiol
1880, Planche I, Fig. 2).
rapport à l’Académie. Laborde, rapporteur de la Commis-
sion chargée du travail préparatoire, soumet le rapport [32] à
l’Académie de médecine dans la séance du 27 janvier 1903.
Les discussions s’étalent sur plusieurs séances jusqu’au 10
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