présentation psychologues - Centre de référence neuromusculaire

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JOURNEE DES PARAMEDICAUX DU CR MRNM RA
Jeudi 13 février 2014
Hôpital de la Croix Rousse Lyon
Pourquoi adresser un patient au
psychologue ?
Cette courte intervention portée à quatre voix par Ariane TIRARD, Ingrid DIAZ, Patricia WILLOCQ et Prune PAYRE, reflète le travail de
l’équipe régionale des psychologues, engagé depuis plus de deux ans au sein du CR MRNM RA.
Ce groupe de travail mobilise des échanges autour de nos pratiques professionnelles et une dynamique de partage de nos
connaissances (colloque, avancée dans la recherche, pistes de réflexion clinique…) afin d’améliorer l’accompagnement des patients et de
leurs proches. Il s’est également investi dans l’articulation avec le réseau extrahospitalier : structures sanitaires et médico-sociales et en
particulier, dans le maillage tripartite : AFM/APIC/CR MRNM RA pour faciliter l’accès à un accompagnement psychologique des personnes
malades et de leurs aidants.
Aujourd’hui, nous sommes ravies de pouvoir mettre en lumière les modalités d’accompagnement psychologique proposées aux
personnes malades au sein du CR MRNM RA et la collaboration quotidienne avec les équipes pluridisciplinaires
Les représentations du psychologue
Ariane TIRARD, psychologue CR MRNM RA
Consultation adulte et enfant, CHU Grenoble
Pourquoi adresser un patient au psychologue ? Il est compliqué « d’adresser » un patient au psychologue, nous dirions plus facilement
que l’on peut proposer de rencontrer un psychologue, que c’est une offre de soin, d’aide dans un moment difficile mais on ne peut pas obliger
la personne à aller voir un psychologue.
Pour réfléchir à pourquoi et comment proposer au patient un psychologue, il nous est apparu nécessaire de revenir sur les différentes
représentations du psychologue, puis de vous parler des multiples demandes que le psychologue reçoit. Nous vous décrirons ensuite la
manière dont le psychologue s’adresse au patient au sein des consultations et enfin nous illustrerons par une vignette clinique ce qu’il peut se
passer dans la rencontre avec le psychologue.
Les représentations autour du psy
Cette image illustre bien pourquoi il est important de bien connaitre les représentations autour du psychologue. Cela peut permettre
d’être plus au clair avec les représentations que l’on a chacun en soi au moment où l’on propose le psychologue et de garder en tête à quoi
cela peut faire écho chez la personne, ce qu’elle peut entendre, comprendre quand un soignant lui propose cette rencontre.
C’est pour les fous !
Cela reste le grand classique et il est difficile de se départir de cette représentation. Est-ce que mon médecin me croit fou ? Qu’est-ce
que je pense moi-même de certaines de mes réactions? Comment je peux douter de moi ? La proposition d’un psychologue peut renvoyer aux
inquiétudes partagées par chacun sur son fonctionnement psychique. Or, dans les situations que nous rencontrons, la maladie génère des
souffrances aigües et la personne peut avoir besoin d’aide pour trouver des ressources pour surmonter ces souffrances sans que cela ne mette
en doute leur fonctionnement psychique.
Une petite remarque : « ce n’est rien c’est dans la tête », il faut faire attention avec cette expression : il y a une souffrance même si elle
est psychique et qui s’exprime au travers du corps et ce n’est pas rien.
Il pleure, il a besoin d’un psy
Nous avons effectivement toutes nos provisions de mouchoirs dans nos bureaux. Pleurer est une réaction légitime dans les situations
auxquelles sont confrontés nos patients. Ceci dit, nous serons pour notre part, beaucoup plus vigilantes aux personnes qui n’expriment pas leur
souffrance, pour qui tout ce qui leur arrive ne semble pas avoir d’effet. C’est généralement le témoin de défenses importantes et donc d’une
souffrance qui ne peut pas s’exprimer.
Il convient également d’être vigilant quand on propose le psy au moment où le patient pleure, c’est pratique, cela peut être un appui
mais cela peut être aussi vécu par la personne comme un abandon, une « non possibilité » pour le soignant qui l’accompagne de recevoir son
vécu.
Le psy peut forcer à parler
Nous n’avons pas les clés pour faire parler une personne qui ne le souhaite pas. Engager un travail avec un psychologue nécessite une
démarche volontaire de la part de la personne, qu’elle ressente le besoin de parler. Nous pouvons être propositionnels, ma collègue vous en
parlera mais nous ne pouvons agir sous contrainte.
Le psy ne sert à rien, ne dit rien
Le psy ne change pas la situation difficile, c’est vrai; mais il peut aider à la vivre différemment, à exprimer ses ressentis, être moins seuls
avec eux et parfois à faire émerger ce qui peut être confusément lié aux inquiétudes par rapport à la maladie et à faire le tri. J’ai reçu par
exemple une patiente à qui l’on venait de diagnostiquer une myotonie de Steinert et qui depuis, vivait dans l’angoisse de finir grabataire. Elle a
pu petit à petit parler de son angoisse et de son histoire : elle avait vécu adolescente une relation très difficile avec sa mère atteinte d’une
maladie d’alzheimer et qui avait fini grabataire. Cette relation avait fait naître de la honte et de la colère chez cette jeune fille en quête
d’identification. Avoir pu parler de ce vécu lui a permis de différencier ses ressentis et a apaisé son angoisse. Par ailleurs, nous avons toutes
appris à travailler avec la parole et à ne pas laisser le patient dans un silence trop anxiogène. Travailler à l’hôpital nécessite d’apprendre à
étayer la parole, à ne pas rester trop silencieux. On aimerait bien, cela serait peut être plus confortable et facile. Notre patience serait moins
mise à l’épreuve mais malheureusement ou heureusement, nous ne pouvons entendre que ce que le patient veut bien nous dire. Ce que nous
avons appris, c’est à écouter.
Ou au contraire, peut lire dans les
pensées, a la solution à tout !
On aimerait bien, cela serait peut-être plus confortable et facile. Notre patience serait moins mise à l’épreuve mais malheureusement ou
heureusement, nous ne pouvons entendre que ce que le patient veut bien nous dire. Ce que nous avons appris, c’est à écouter, à aider la
personne à accéder à ses ressentis tout en respectant les défenses mises en place pour tenir face à une situation difficile.
Finalement, c’est quelqu’un à qui on
peut parler et qui peut soulager et
aider à faire le tri dans les ressentis
N’hésitez pas à vous
adresser à lui !
Proposer le psychologue à un patient est délicat et peut mettre tout un chacun mal à l’aise. Pouvoir échanger avec le psychologue de votre
service, créer une relation de confiance peut faciliter la démarche, permettre d’être le plus juste possible dans le moment de la proposition et
dans les mots qui peuvent être dits.
Pourquoi adresse-t-on un patient neuromusculaire à un psychologue ?
Ingrid DIAZ, psychologue, CR MRNM RA :
Consultation adulte, CHU Lyon, Hôpital de la Croix Rousse
La survenue d’une maladie neuromusculaire peut-être un choc violent quel que soit le contexte familial. Les émotions et les sentiments se
bousculent et les repères s’effacent.
Les situations de stress sont nombreuses : certaines sont liées à la maladie elle-même (annonce diagnostic, suivi médical, évolution de la
maladie, aménagement de la maison…) d’autres concernent les relations avec les proches, le milieu professionnel, l’école….
Ainsi, la maladie neuromusculaire oblige la personne à repenser son mode de vie et à prendre des décisions parfois difficiles qui peuvent lui
donner l’impression d’être débordé par l’accumulation des difficultés.
Comment la personne malade peut-elle contenir tout ça sans se laisser envahir ?
C’est là que le soutien psychologique prend tout son sens. Le rôle du psychologue n’est plus directement thérapeutique. La place du
psychologue s’inscrit dans une démarche de prise en charge globale du patient et dans un parcours de soin bien défini. Le but est
d’offrir au patient un espace de parole dans un cadre médicalisé où la dimension corporelle prime.
La démarche est intéressante car nous n’attendons pas que le patient soit en demande comme c’est normalement le cas dans le domaine de la
psychologie mais nous proposons le soutien.
Notre rôle est celui d’un interprète des situations et de l’angoisse créée par la maladie et ses conséquences (adaptation aux différentes étapes
que la maladie impose, perte de la marche, chirurgie, trachéotomie, corset…perte de l’emploi…)
A la question pourquoi adresse-t-on à un psychologue ? Je vais pour ma part vous parler de ce qui peut se jouer d’un point de vue
psychologique lors d’une démarche très protocolaire.
En effet, le test présymptomatique s’inscrit dans un cadre légal qui impose différentes consultations au patient et ce dans la durée.
Enjeux psychologiques du test présymptomatique
Ingrid DIAZ, psychologue, CR MRNM RA :
Consultation neurogénétique, CHU Lyon, Hôpital de la Croix Rousse
Apprendre que l’on est atteint d’une maladie génétique n’a rien d’anodin.
La maladie génétique s’inscrit toujours dans une histoire personnelle et familiale qui nous renvoie à nos origines et nous poussent à rechercher
des informations parfois occultées ou déformées.
Un résultat de test génétique n’a pas qu’une signification individuelle. Il a du sens pour celui qui le reçoit et sa famille (ascendants,
descendants, fratrie, compagnon.)
Ainsi lorsqu’une famille est touchée par une maladie génétique, se pose la question du conseil génétique aux autres membres de la famille et
la possibilité de connaître son statut à l’avance.
Le test prédictif ou présymptomatique pose la question de « l’être à risque » Risque d’être malade un jour, risque de transmettre à ses
descendants, risque de devenir comme ses ascendants.
Le test présymptomatique décèle une maladie avant d’en avoir les symptômes
Connaître son statut permet d’éviter d’en être le vecteur, de la léguer à sa descendance et de faire dans certains cas de la prévention.
Partir du présent : en aidant la personne à exprimer ses motivations pour faire le test génétique.
Comment vivre avec la certitude d’être touché un jour par cette maladie incurable ?
Vaut-il mieux savoir ou pas ?
Le protocole est fait par étapes pour permettre au consultant d’avancer par pallier dans sa décision.
La représentation que les personnes ont de la maladie va déterminer la manière de vivre le test et son protocole.
Revenir sur le passé : en aidant la personne à mieux comprendre comment la démarche du test s’inscrit dans son histoire
personnelle et familiale.
Le doute est-il insupportable, envahissant ?
La maladie de l’autre a un effet miroir. Si la personne vit la maladie à travers l’autre : observation des effets de la maladie, guette les premiers
signes (auto observation, série de test pour voir si développe maladie)
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Se projeter dans l’avenir
La personne va devoir réfléchir à l’anticipation du résultat, se mettre en situation de porteur/non porteur et voir si elle a les ressources internes
pour affronter le résultat.
Pour certains, il est important de savoir car la question du doute, du risque empêche des projets de vie ou génère des angoisses.
Besoin d’envisager des projets autres avec la personne et être capable de s’adapter aux besoins : travailler les notions de perte
Pour d’autres, ce ne sera pas le moment de savoir, pas la bonne période, le doute sera finalement plus protecteur et moins paralysant pour
continuer à se projeter. Etre capable en tant que psychologue d’entendre ce discours et d’accompagner la personne dans sa démarche.
Il ne faut pas oublier que le statut de non porteur invite le sujet à réapprendre à vivre autrement. Lorsqu’on a pensé être porteur et que l’on a
mené un travail d’anticipation de ce mauvais résultat, le bouleversement peut-être important : Remise en question de sa vie, de ses choix ?
Comment vivre sans la peur de la maladie.
Quant au statut de porteur : Il fait cohabiter le patient avec la crainte : l’incertitude qu’il avait avant de faire le test entre savoir et pas savoir va
se transformer par une autre incertitude : à quel moment la maladie va apparaître ?
Lorsque les symptômes de la maladie apparaissent, la personne est suivie par le neurologue. Elle pourra être amenée, en fonction de
l’évolutivité à rencontrer le psychologue du CR MRNM, dans le cadre d’une consultation pluridisciplinaire.
La consultation pluridisciplinaire
Patricia WILLOCQ, psychologue CR MRNM RA :
Consultation adulte, CHU LYON, Hôpital neurologique
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Le caractère multi-systémique, évolutif et chronique des MRNM nécessite une coordination interdisciplinaire : médicales,
rééducatives, psychologiques... pour le suivi des personnes malades. La consultation pluridisciplinaire permet ainsi d’offrir une prise en
charge globale du patient en lui proposant de rencontrer, tous les ans, sur la même journée plusieurs professionnels spécialisés.
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Qui adresse le patient en consultation pluridisciplinaire?
-
Elle est proposée par le médecin lorsque le diagnostic est posé et/ou lorsqu’une coordination multidisciplinaire est nécessaire au suivi
-
La secrétaire peut également orienter la demande d’un patient, connu du service
-
Enfin, le Référent Parcours Santé de l’AFM peut médiatiser la demande auprès du service de la consultation et accompagner le patient
le jour de la consultation pluridisciplinaire. Il assiste très rarement à la consultation psychologique.
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La rencontre d’un psychologue s’inscrit dans le parcours de soin et le cadre défini par la consultation pluridisciplinaire : le patient rencontre
de manière systématique le psychologue.
Ce caractère systématique peut provoquer lors de la première rencontre un mouvement de rejet ou fuite à l’égard du psychologue, lié à un vécu
d’incompréhension, d’injonction, d’obligation… car la personne n’a rien demandé. Même si elles sont plutôt rares, ces réactions légitimes
doivent être entendues et accompagnées. Nous rappelons que le caractère systématique ne revêt pas un caractère obligatoire. Néanmoins,
partant du constat qu’une demande non exprimée, n’exclue pas l’absence de souffrance, la précaution de demander à tous les patients, sans
distinction, de voir un psychologue, peut être rassurante grâce cette forme d’anonymat. En priorité, le caractère systématique atteste d’une
préoccupation et une attention bienveillante de l’équipe soignante, aux répercussions psychologiques de la maladie, pour le patient et son
entourage.
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Le rôle du psychologue n’est, là aussi, pas directement psychothérapeutique mais propositionnel. Le psychologue va au-devant du
patient en informant et expliquant sa présence et le soutien possible. Il s’agit bien de permettre au patient de vivre cette rencontre comme
une invitation qui se situe dans le champ de l’information (sur la place du psychologue, sur la connaissance de personnes ressources au
sein du réseau…) et de la communication (faire connaissance et échanger à partir des préoccupations actuelles…)

Faire connaissance : La
confiance se tisse dans le regard et la poignée de main, dans le temps pris à se présenter. Voir le
psychologue, de visu, dédramatise les enjeux de la rencontre. Il s’agit pour le patient de laisser venir le psychologue lui parler et d’être à
son écoute, pour s’autoriser ensuite, à s’engager dans un dialogue. L’enjeu pour le psychologue est de créer un lien, se mettre à
disposition, informer et expliquer sa présence.

Les contenus des échanges sont variés et singuliers. Ils reflètent l’implication de la personne, sa personnalité, la confiance accordée
au psychologue, et s’inscrivent dans un temps spécifique en lien avec le contexte de vie…Le psychologue offre une écoute spécifique
 au patient :
-
confronté à la dépendance, à la perte, à la difficulté de se projeter
-
amené à réfléchir à son projet professionnel
-
soucieux d’une hospitalisation impliquant une opération, des examens..: avec à la peur de la séparation avec ses proches, d’avoir
mal et à la peur de l’atteinte de l’intégrité physique.
-
attentif à transmettre ses capacités à faire face à la maladie, à faire part de trucs et astuces permettant de réaliser ses projets…
 et ouvertes aux proches,
-
inquiets, constatant un changement, une rupture dans l’humeur et le comportement de la personne (dépressivité, perte d’intérêt,
désinvestissement, irritabilité, agressivité…)
-
investis dans la prise en charge, demandant ou n’osant pas s’autoriser à demander, des relais pour souffler
-
témoignant d’un nouvel équilibre lié au passage d’une étape (ex : acceptation d’une tierce personne à domicile, partage de loisirs…)

La consultation psychologique proposée au patient et à ses proches, met en jeu trois axes de travail :
 elle s’inscrit dans une démarche de prévention : informations des relais extérieurs : Référent Parcours de Santé de l’AFM, réseau de
psychologues : APIC, établissements médicaux sociaux, CMP…, repérages des ressources et des fragilités, faciliter le contact avec un
psychologue…
 elle permet d’ouvrir un espace de régulation pour dire ses incompréhensions, déposer ses ressentis vis-à-vis de la prise en charge… La
prise de conscience du décalage entre ce qu’a compris le patient par rapport à l’énoncé du médecin ou d’un autre professionnel peut alors
émerger…
 elle offre un lieu privilégié d’articulation et un espace de réappropriation de ce qui a été dit, entendu… d’expérimenter l’expression libre
Le but est d’amorcer un processus d’intégration et d’accompagner la personne en ouvrant le champ des possibles, lors de décisions
médicales, lors de questionnements sur le projet professionnel, social, familial...

En tant que psychologue, la consultation pluridisciplinaire est un creuset clinique varié de rencontres avec les personnes malades et
leurs proches, enrichissant au quotidien notre compréhension des ressources adaptatives mobilisées pour faire face à la maladie.
De plus, à l’issue des consultations pluridisciplinaires, le psychologue participe au travail de collaboration avec les différents professionnels
réunis, le temps d’une synthèse. Le psychologue est alors soucieux d’être au plus près, la réalité subjective du patient, en fonction de son
histoire, de sa personnalité, son environnement afin de proposer des modalités de prise en charge adaptées.
En conclusion,
La consultation pluridisciplinaire invite le patient à tisser, annuellement, un lien spécifique et singulier avec le psychologue. Ce lien ainsi
créé, se transforme souvent au fil des années, en un véritable temps thérapeutique pour créer une continuité temporelle : une articulation
passé/présent/avenir afin de (ré)inscrire chacun dans une histoire à vivre. La consultation pluridisciplinaire est alors vécue comme « un temps
pour soi », « un temps pour faire le bilan ». Enfin, elle permet une meilleure acceptation du suivi psychologique dans une période de
vulnérabilité et facilite surtout la formulation de demande directe du patient au psychologue, sans le recours d’un tiers.
Voici maintenant une vignette clinique illustrant la prise en compte d’une demande adressée au psychologue et ce qui peut se passer dans la
rencontre et le chemin emprunté au fil du temps…
Juliette, âgée de 8 ans, ne veut pas mettre ses bottes de nuit...
Prune Payre, psychologue au CR MRNM RA :
Consultation adulte et enfant, CHU de St Etienne
La rencontre avec un psychologue peut se faire à l’initiative du patient, mais généralement c’est sur indication de l’équipe ou du médecin
que l’accompagnement psychologique démarre. C’est souvent le médecin qui propose un entretien avec le psychologue, lui qui en énonce les
raisons. Ce n’est pas une simple formalité, ce n’est pas une prescription, c’est une offre qui ouvre souvent à une interprétation. Le patient peut
alors en effet se demander pour quelles raisons le médecin souhaite qu’il parle à un psychologue ? Est ce que je vais si mal ? Suis-je fou ? Se
débarrasse t-il de moi ? Qu’est ce que je vais lui dire ?
Cette indication médicale, si elle n’est pas obligatoire, peut être une condition de poids quand le médecin trouve les mots, les explications, les
faits qui indiquent au malade les raisons pour lesquelles il pense que la parole, les mots peuvent être un soutien, un appui pour le patient.
Les raisons pour lesquelles l’équipe adresse un patient à un psychologue peuvent être diverses. Je vais illustrer cela à travers la
situation de Juliette âgée de 8ans. Juliette est atteinte d’une myopathie à centrale corps. Le médecin me demande de rencontrer Juliette car
elle ne met pas les bottes de nuit qui lui sont pourtant prescrites un jour sur deux. Juliette dit donc non à la prescription médicale. Nous allons
prendre le temps d’en parler et je vais essayer de me dégager du discours médical.
La mère de Juliette m’explique que chaque soir surgissent des conflits. Juliette m’expliquera les raisons de son refus et elle me dira que
ses bottes de nuit lui tiennent trop chauds. Les raisons pour lesquelles Juliette doit porter ses bottes de nuit ont été expliqué par le neuropédiatre et Juliette semble en avoir saisit le sens.
Je demande à Juliette si cela lui conviendrait de définir trois jours fixes par semaine afin d’éviter que le conflit émerge chaque soir. Juliette
prendra le temps de réfléchir et sera d’accord avec cette proposition. Cette offre lui a alors permis d’être à une place de sujet. Si elle refusait
elle se contraignait elle-même à ne pas se soigner.
Ensuite nous continuerons à nous rencontrer et nous échangerons avec Juliette et sa maman au delà de son handicap. Et cette ouverture de
la parole permet d’ouvrir sur la problématique mère-enfant. Et il s’agira de parler du corps de Juliette au delà de son handicap.
A travers cet exemple on perçoit que la demande initiale est très vite dépassée mais que cela fait ressurgir d’autres enjeux tels que le
conflit entre Juliette et sa mère.
Néanmoins il me semble important de percevoir que les attelles font rentrer Juliette dans le principe de réalité de la maladie. Et se pose peutêtre la question de l’appropriation de cet appareillage vécu comme contraignant.
Juliette questionnera le choix de vivre chez son père à ce moment là.
La consultation laisse un espace pour parler de la maladie mais Juliette ne s’en saisit pas de cette façon là et il me semble que c’est un choix à
honorer car cela peut apparaître comme un mécanisme de défense à respecter.
La consultation permet également à la mère de Juliette d’exprimer ses angoisses. Il me semble important de laisser un espace aux parents qui
ont besoin d’être entendus et soutenus à l’abri du regard de leur enfant.
Les médecins souhaitaient donc que Juliette sorte de ce blocage.
Leur discours reprit par les parents peut pousser à des injonctions chez certains enfants ce qui peut entraîner un conflit, une opposition, une
autre parole à la fois en lien et séparé du discours médical peut permettre de créer un autre espace de relation moins centrée sur le savoir
médical. Il me paraît important de compléter le discours médical pour s’en écarter.
Les entretiens psychologiques se déroulent dans un temps séparé mais proche du trajet médical.
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