CIRAC, octobre 2014
Par la suite, Jean-Marc Daniel, économiste et professeur associé à l'ESCP Europe, a
affirmé qu’il faut cesser de croire que le problème de croissance est un problème d’emploi,
que la zone euro subit une déflation et qu’il faut déprécier la monnaie européenne. Deux
réformes sont nécessaires : il s’agit d’un côté de respecter le Traité sur la stabilité, la
coordination et la gouvernance (TSCG) et de réduire le déficit structurel et, de l’autre, de
mettre en œuvre une politique de formation raisonnée et gérée en concurrence afin
d’améliorer la gestion de la population active. Selon Jean-Marc Daniel, il est souhaitable à la
fois de faire reposer la croissance sur l’usage des nouvelles technologies de l’information et
de la communication (NTIC) – comme c’est le cas aux États-Unis –, d’insérer l’Angleterre
dans le dispositif et de faire de l’Europe le porteur d’un modèle intellectuel où on favorise le
progrès technique, le profit et la concurrence, en vertu du théorème d’Helmut Schmidt : « les
profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain ».
Henrik Uterwedde, directeur adjoint du DFI, a indiqué que la crise a montré les failles du
système de Maastricht. Si l’Allemagne se montre inflexible sur l’application stricte du TSCG
et sur son refus de mutualiser la dette en l’absence d’une intégration plus forte des politiques
fiscales, elle reste souple sur le délai accordé à la consolidation budgétaire. Pour le
gouvernement allemand, les réformes structurelles, la stabilité budgétaire et les
investissements d’avenir doivent permettre de stimuler l’emploi et la croissance. Toutefois, si
le pays a adopté des mesures sociales, il lui faut également accroître les investissements
(notamment dans les infrastructures) en mobilisant des capitaux privés – ce qui vaut aussi
pour l’Europe. Pour conclure, Henrik Uterwedde observe un rapprochement des positions des
gouvernements français et allemand, parfois mal compris par l’opinion publique et de
nombreux responsables politiques. Dès lors, il plaide en faveur d’un débat public sur les
enjeux européens et les politiques nécessaires.
La dernière intervenante de cette table ronde, Natacha Valla, directeur adjoint du Centre
d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII), a précisé que la France
n’a pas avancé, malgré la crise, sur la nécessité d’une Europe politique derrière la monnaie
unique. Par ailleurs, le pays a des difficultés à assumer une position dans la gouvernance
collective et connaît, en comparaison avec l’Allemagne, un rapport différent au respect des
règles, tout en cultivant assez maladroitement l’art de l’ambiguïté vis-à-vis des réformes
structurelles et de la rigueur budgétaire. En ce qui concerne le rôle accordé à la BCE, Natacha
Valla déplore le fait que la politique monétaire soit peu abordée dans le débat public français.
Enfin, pour relancer l’investissement public et privé dans la zone euro, elle propose de
réformer la Banque européenne d’investissement (BEI) et de mettre en réseau les banques
d’investissement nationales.
Au cours de la discussion qui a suivi, Natacha Valla a ajouté qu’il serait utile de mettre en
place un audit supranational des finances publiques par des corps autonomes. Henrik
Uterwedde a souligné la nécessité, pour les responsables politiques, de recrédibiliser l’Europe
aux yeux des citoyens en assumant sur le plan national les décisions prises au niveau
européen. Jean-Marc Daniel a pour sa part spécifié que la création d’un budget commun serait
une erreur car on ne peut pas contraindre les peuples à être solidaires entre eux.
Quel rôle doit jouer la BCE aux yeux des politiques français et allemands
et quelle est sa politique actuelle ?
Sur cette deuxième thématique, Jacques Mistral, membre du Cercle des économistes, a
structuré son propos en sept points :
• la BCE a eu un comportement exemplaire dans la gestion de la crise ;