tentative de rendre compte de cette partie de la réalité clinique sous
différentes dénominations.
Aussi la pathologie borderline constitue une entité clinique dans les
classifications en vigueur. Les manifestations caractéristiques selon le
DSM IV sont le plus souvent une grande instabilité comportementale et
émotionnelle, des projections d’affects violents sur l’entourage
(l’accusant ainsi d’une agressivité qui n’est autre que celle du patient),
des passages à l’acte violents et souvent auto-agressifs, des conduites à
risque génératrices d’émotions fortes, des tendances à l’addiction, des
rapports difficiles à l’autre, mélangeant dépendance, rejet, idéalisation,
besoin d’identification, associés à des moments d’insatisfaction et
d’angoisse. Il s’agirait de rendre compte de manifestations patho-
logiques dans lesquelles existeraient des mécanismes dits dissociatifs se
distinguant pourtant de la pathologie schizophrénique, et des troubles de
l’humeur assez proches de ceux rencontrés dans certaines névroses.
C’est à partir de la seconde moitié du XXe siècle que le concept de
borderline1 s’impose pour rendre compte de formes cliniques atypiques
à l’évolution très instable. Le travail thérapeutique est à l’origine de cet
intérêt et de nombreuses tentatives de conceptualisation, pour lesquelles
le positionnement comme trouble évolutif intermédiaire — ni
névrotique, ni psychotique ou entre les deux perdure.
La variation des élaborations conceptuelles paraît venir du fait que
certains auteurs introduisent le concept d’états intermédiaires entre
structures névrotiques et psychotiques, alors que d’autres posent plutôt
une forme de hiérarchisation par l’emploi du terme de prépsychose qui
suggère de fait l’existence d’un mécanisme évolutif. Par ailleurs,
l’opposition névrose-psychose ne vient-elle pas du cadre conceptuel
qu’est la psychanalyse et notamment de l’opposition faite par Freud en
1927 ? « Cette notion de borderline ou état-limite témoigne de la diffi-
culté d’une séparation nette entre les domaines névrotiques et
psychotiques », écrit ainsi Ey (1974, p. 433). Si certaines théorisations
divergent, ceci provient aussi de la population étudiée. Selon qu’il s’agit
d’enfants ou d’adultes, la pathologie borderline paraît en effet plus ou
moins labile, et favorise certaines positions plutôt que d’autres. Le point
commun est que les manifestations symptomatiques sont très proches
entre la forme de l’enfant et celle de l’adulte.
Peut-on envisager la pathologie borderline comme une entité
clinique autonome ? Le sujet sera abordé sous deux angles. Le premier
présentera des travaux d’auteurs ayant cherché à appréhender les
manifestations pathologiques dans un cadre de compréhension noso-
graphique. Le second tentera de saisir les mécanismes opérant chez des
patients, que nous avons suivis au sein d’un établissement médico-
social.
1 Pené, 2002, p. 284-290.