Complexe ganglionnaire rétinien en OCt et confrontation au champ

200Pratiques en Ophtalmologie • Octobre 2011 • vol. 5 • numéro 47
EN PRATIQUE
A
travers une série
d’exemples nous allons
montrer que l’étude du
complexe ganglionnaire rétinien
(CGR) est utile à tous les stades
de la maladie glaucomateuse. Un
OCT 3D 2000 de Topcon a été uti-
lisé dans sa version logicielle 7.11.
Outre la cartographie en couleurs,
on s’aidera des mesures d’épais-
seur, de la base normative et de
l’étude de l’asymétrie entre la moi-
tié supérieure et inférieure.
Rappelons que le relevé des fibres
optiques papillaires reste la réfé-
rence dans le glaucome, car la to-
talité des fibres du nerf optique est
analysée, alors que l’étude du CGR
ne porte que sur le pôle postérieur.
Inversement, cette gion cen-
trale, si importante fonctionnel-
lement, est mal étudiée par l’OCT
des fibres papillaires car le fais-
* Ophtalmologiste, Saint-Brice sous forêt 95300
michel.zeitoun@wanadoo.fr
ceau maculaire est fin et étalé. Le
champ visuel central est atteint
tardivement, ce qui fait de la ma-
culopathie glaucomateuse une
pathologie longtemps méconnue
et pourtant redoutable. La recon-
naissance de cette maculopathie
est la vocation première de l’OCT
du CGR.
La subdivision du CGR en ses deux
sous-couches, fibres optiques
(NFL) d’une part et corps cellu-
laire + plexiforme interne (GCL
+ IPL) d’autre part, a un certain
intérêt en montrant un triptyque
quasi pathognomonique d’atteinte
débutante.
Les glaucomes asymétriques sont
didactiques et seront notre entrée
en matière : la diérence entre
CGR sain et CGR pathologique est
criante.
On s’attachera également à dé-
tecter un début d’atteinte dans la
zone réputée saine.
La confrontation du CGR avec
l’atteinte du champ visuel (CV),
de préférence le 10-2, est capi-
tale par sa précision inégalée de
deux degrés en deux degrés. En
général l’atteinte des cellules
ganglionnaires précède de long-
temps l’atteinte fonctionnelle ou
confirme une minime perte de
sensibilité.
Dans les cas évolués, la coïnci-
dence est flagrante.
Les fluctuations du champ vi-
suel, loin d’égarer le diagnostic,
vont révéler les zones en souf-
france et les distinguer des faux
négatifs. Dans certains cas le CV
va pouvoir être réfuté. Dans tous
les cas, les zones de faiblesse du
CGR bénéficieront d’une atten-
tion ciblée.
Enfin nous avons ajouté un tu-
toriel pour superposer le CV au
CGR en attendant une automa-
tisation plus poussée que nous
appelons de nos vœux.
xxxxx
xxxxx
xxxxxx
xxxxx
Complexe ganglionnaire
rétinien en OCT et confrontation
au champ visuel
Cas pratiques illustrés
n
La plupart des OCT sont maintenant capables de détecter le complexe ganglionnaire du pôle
postérieur, d’en afficher la cartographie et de la comparer à une base normative.
Le complexe ganglionnaire représente les couches internes de la rétine : fibres optiques (NFL),
corps cellulaires ganglionnaires (GCL) et plexiforme interne (IPL). C’est cette unité anatomique
qui est le siège de l’apoptose glaucomateuse. Du fait de son hyper-réflectivité, elle peut être
isolée de façon fiable par les OCT spectraux.
Dr Michel Zeitoun *
COMPLEXE GANGLIONNAIRE RÉTINIEN EN OCT ET CONFRONTATION AU CHAMP VISUEL
Pratiques en Ophtalmologie • Octobre 2011 • vol. 5 • numéro 47 201
En
figure 1
l’œil droit est normal
sur les fibres optiques, contraire-
ment à l’œil gauche qui est au stade
agonique sur les fibres optiques, et
sur le champ visuel
(Fig. 2)
. Sur les
coupes verticales
(Fig. 3)
, le com-
plexe ganglionnaire glaucoma-
teux, entre les deux lignes rouges,
est fortement aminci et les fibres
optiques ont quasiment disparu.
De fait, le glaucome est également
une rétinopathie qu’il est aisé de
reconnaître sur les coupes verti-
Cas N° 1 : Atteinte unilatérale
Figure 2 - Œil droit : champ visuel normal ;
œil gauche : champ visuel agonique.
Figure 4 - Œil droit : discrète asymétrie
arciforme inférieure ; œil gauche : sévère
atteinte du CGR sans asymétrie.
Figure 3 - Œil droit : bonne épaisseur du complexe ganglionnaire ; œil gauche : sévère
atteinte des fibres optiques et des corps cellulaires ganglionnaires.
Figure 1 - Œil droit : fibres optiques dans la norme, œil gauche : sévère atteinte globale.
utile de suivre l’évolution de cette
discrète atteinte arciforme, ce qui
nous permettra d’aner la pres-
sion cible. Notons que si l’atteinte
est homogène, comme dans l’œil
gauche, l’asymétrie supérieure-
inférieure. n’apporte aucun ren-
seignement.
cales, du moins dans les formes
évoluées ou localisées.
En
figure 4
, il est intéressant de re-
chercher une atteinte butante
sur l’œil supposé indemne sur la
foi du relevé des fibres optiques
papillaires et du champ visuel.
Ici, cest l’asymétrie moit infé-
rieure versus supérieure qui va
nous aider, à la fois sur les chires
d’épaisseur moyenne des hémi-
tines, mais également sur la
cartographie d’asymétrie. Il sera
EN PRATIQUE
202Pratiques en Ophtalmologie • Octobre 2011 • vol. 5 • numéro 47
Cas N° 3 : Atteinte arciforme
En
figure 7
,la discrète atteinte
arciforme temporale supérieure
n’atteint pas le seuil de signifi-
cativité sur les fibres optiques et
risque d’être ignorée. Elle est bien
plus visible sur la cartographie du
CGR elle signe l’entrée dans la
maladie glaucomateuse.
Figure 7 - L’atteinte arciforme temporale supérieure est bien mieux visible sur le CGR
que sur les fibres optiques papillaires.
En
figure 8
, létude de lasymétrie du
CGR montre une belle atteinte
arciforme en NFL+GCL+IPL (Co-
lonne de droite)
La subdivision du complexe gan-
glionnaire en deux sous couches
est intéressante. Il existe une at-
teinte des cellules ganglionnaires
au niveau du bourrelet supérieur
(GLC+ IPL, colonne du milieu), re-
lae par un déficit correspondant
au niveau des fibres optiques (NFL,
colonne de gauche). C’est le “trip-
tyque glaucomateux caracris-
tique.
Ce triptyque est logique dans la
mesure le complexe ganglion-
naire nest pas une structure ho-
mogène. Au niveau du bourrelet il
est surtout composé de cellules
ganglionnaires. Par contre, en
Cas N° 2 : Hémi-atteinte
En
figure 5
, le faisceau de fibres
optiques temporal inférieur a to-
talement disparu donnant une at-
teinte significative sur la base nor-
mative péri-papillaire et RNFL.
En
figure 6
, la forte atteinte du CGR
de l’mi-rétine inférieure saute
aux yeux (flèche rouge). Il faut sys-
matiquement rifier que l’amin-
cissement porte bien sur le com-
Figure 6 - Atteinte importante du CGR inférieur : le scotome est absolu lorsque les fibres
optiques ganglionnaires ont totalement disparu (coupe verticale, flèche rouge)
Figure 5 - Fort déficit du contingent
temporal inférieur
plexe ganglionnaire uniquement.
La moindre atteinte de la couche
bipolaire orienterait vers une autre
pathologie, une thrombose artério-
laire par exemple.
La base normative indique en rouge
latine inférieure, ce qui atteste
d’une significativi à plus de 99 %.
COMPLEXE GANGLIONNAIRE RÉTINIEN EN OCT ET CONFRONTATION AU CHAMP VISUEL
Pratiques en Ophtalmologie • Octobre 2011 • vol. 5 • numéro 47 203
Figure 9 - Asymétrie non pathologique des gros troncs de fibres ;
le GCL + IPL est normal : pas de triptyque.
Figure 8 - Triptyque glaucomateux : l’atteinte NFL est relayée
par l’atteinte GCL + IPL pour constituer l’atteinte arciforme du
CGR en NFL + GCL + IPL.
Confrontation structure-fonction
Figure 10 - Superposition de la cartogra-
phie du CGR (après inversion) au CV 10-2
en déviation : patient normal.
En
figure 10
nous avons super-
posé une cartographie normale
du CGR, après inversion et mise
à l’échelle, avec son champ visuel
10-2 selon la règle 6 mm = 20°, soit
le champ couvert par ce relevé. On
notera la richesse du bourrelet -
ri-fovéolaire, responsable de la vi-
sion centrale car relayant les cônes
centraux. On estime que cinq à six
couches de cellules ganglionnaires
y sont superposées. Plus en pé-
riphérie le CGR s’amincit et ne
compte plus quune seule couche
de cellules.
La
figure 11
montre la superposition
du champ visuel au CGR du patient
2 des
figures 5
et
6
: la coïncidence
du déficit est remarquable, en de-
hors du passage d’un gros vaisseau
en bordure supérieure.
se rapprochant de la papille, les
fibres optiques prédominent, d’
la décomposition caractéristique
de l’atteinte arciforme.
Par contre, chez un autre patient,
une asymétrie des bres optiques
(NFL) sans atteinte correspon-
dante des cellules ganglionnaires
en GCL + IPL ne traduit quune va-
riante anatomique de disposition
des faisceaux papillaires
(Fig. 9)
.
En conséquence, toute étude
d’asymétrie doit être confrontée
pour authentification à la subdi-
vision GCL + IPL, que cette asy-
métrie soit découverte sur le com-
plexe ganglionnaire ou découverte
sur lépaisseur rétinienne globale.
Dans les formes évoluées, la subdi-
vision s’are licate car la flec-
tivi OCT des deux sous-couches
se rejoint, mais l’identification du
CGR global reste toujours plus ro-
buste. Le CGR global est pour nous
la férence, d’autant que les deux
sous-couches sont atteintes simul-
tament la plupart du temps.
Figure 11 - Superposition du patient des
figures 5 et 6 : bonne corlation structure-
fonction en dehors du relief d’un gros
vaisseau.
EN PRATIQUE
204Pratiques en Ophtalmologie • Octobre 2011 • vol. 5 • numéro 47
Figure 14 - Corrélation avec le CV 10-2 : discrète atteinte fonctionnelle à droite et forte
atteinte à gauche sur des déficits arciformes anatomiquement semblables.
Cas N° 4 : Atteinte anatomique semblable
et atteinte fonctionnelle différente
Le cas suivant
(Fig. 12)
, va nous ai-
der à comprendre la place respec-
tive de l’OCT du CGR et la place du
champ visuel.
Sur l’œil droit et sur l’œil gauche il
existe une forte atteinte arciforme
inférieure du CGR semblant de
même profondeur anatomique.
Le CV 24-2
(Fig. 13)
est très asymé-
trique. A droite, hormis une petite
atteinte à -5 dB juxta-fovéolaire, il
est tout à fait normal. Par contre à
gauche la coïncidence avec la forte
atteinte anatomique est probante.
Sur le CV 10-2
(Fig. 14),
il existe à
droite une petite atteinte supé-
rieure, de l’ordre de -3 à -4 dB qui
prend toute sa valeur par cette
confrontation structure-fonction.
A gauche, la superposition est bien
cohérente avec des pertes de 33
dB mais notez en plus une nette
atteinte du faisceau papillo-macu-
laire, péjorative pour lavenir de la
vision centrale, que le CV ne nous
laisse pas deviner.
Ainsi donc, si les limites de l’at-
teinte glaucomateuse sont mieux
tectées par l’OCT du CGR, la
profondeur de l’atteinte est mieux
étudiée par le champ visuel. Ces
deux examens s’éclairent mutuel-
lement et leur confrontation va
devenir un standard. Une petite
réduction de sensibilité lumineuse
correspond à une forte perte de
cellules ganglionnaires. Un champ
visuel normal peut coexister avec
une sérieuse atteinte anatomique,
la reconnaissance du glaucome
pré-péritrique va être facilitée.
Létude de l’épaisseur locale du CGR
(Fig. 15)
va illustrer la cinétique de-
gradation structure-fonction chez
ce patient. Les zones saines du CGR,
en dehors du bourrelet, ont 100 mi-
crons dépaisseur (cars verts).
Figure 12 - Forte atteinte arciforme bilatérale temporale inférieure.
Figure 13 - Corrélation avec le CV 24-2 : à droite l’atteinte de la structure précède l’at-
teinte fonctionnelle, à gauche : bonne corrélation structure-fonction.
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