le syndrome hémolytique et urémique a propos de

Médecine du Maghreb 1997 n°63
RÉSUMÉ
Le syndrome hémolytique et urémique (SHU) affection
fréquente chez l’enfant, ra re chez l’adulte est défi n i e
par l’association d’une insuffisance rénale aiguë, d’une
t h rombopénie et d’une anémie hémolytique avec frag -
m e n t ation des hématies. A ce propos, les auteurs rap -
portent 5 cas de SHU survenu chez 2 enfants et 3 adul-
tes. L’ h i s t o l ogie rénale montre des sions de micro a n -
gi o p a thie thrombotique (MAT) gloméru l a i re chez un
enfant, de MAT à prédominance artérielle chez l’autre
e n fant et 2 adultes et d’une crose corticale chez le
3ème adulte. 4 patients ont reçu en plus du traitement
symptomatique, un traitement corticoïde sous forme de
bolus de méthyl prédnisolone avec récupération d’une
fonction rénale normale chez les 2 enfants, amélioration
de la créatininémie dans 1 cas et sa stabilité dans l’au-
tre.
SUMMARY
Uremic hemolytic syndrome - Report of 5 cases
The uremic hemolytic syndrome, more common in child
than in adult, is defined by association of an acute
k i d n ey fa i l u r e with thro m b o c ytopenia and hemoly t i c
anemia with red cells frag m e n t a tion. In this way, the
a u t h o rs rep o rt 5 cases of uremic hemotyic syndro m e
o c c u r ing in 2 ch i l d ren and 3 adults. The re n a l
h i s t o l o gical study shows a glomerular thro m b o t i c
microangiopathy in one child, a thrombotic microangio-
pathy with arterial prevalence in the other and 2 adults,
and cortical necrosis in the third adult. 4 pat i e n t s
u n d e r went, in addition to the symptomatic therap e u t i -
cal management, a corticoïd treatment as methyl pred-
nisolone bolus with recovery of the renal function in the
2 ch i l d r en, improvement of cre atininemia in one case
and its stadiness in the others.
ciation d’une anémie hémolytique, d’une thrombopénie et
d’une insuffisance rénale aiguë. Ce tableau est décrit pour
la pre m i è re fois par Gasser et coll (1) en 1995, et les
lésions histologiques ont été définies par Habib et coll (2).
Une étiologie infectieuse est retenue devant la survenue de
ce syndrome par épidémie estivale et après épisodes diar-
rhéiques chez des nourrissons. Mais l’existence de formes
atypiques de l’adulte, de cas survenus après prise médica-
menteuse, ou lors de la grossesse ou de maladies malignes
ont démontré que le SHU pouvait correspondre à des étio-
logies différentes. A ce propos, les auteurs rapportent 5 cas
de SHU observés chez 2 enfants et 3 adultes, collis au
s e rvice de phro l ogie de 1984 à 1996 et qui sembl e n t
intéressants du fait de la variabilité du terrain, des circons-
tances de survenue, des variations de l’évolution et enfin de
la discussion du traitement.
Observation n°1
T. O ., jeune patient de 6 ans, sans antécédents pat h o l o -
giques personnels ou familiaux a présenté en mars 1992
une éruption fébrile néra l i s é e, ayant intéresmême le
cuir chevelu, très évocatrice de varicelle. Une semaine plus
t a rd ap p a raissent une diarrhée liquidienne striée de sang,
une impotence fonctionnelle totale avec crises convulsives,
puis survient une anu rie totale. Ce jeune patient est alors
hospitalisé au service de néphrologie le 24 mars 1992 dans
un tableau d’obnu b i l ation avec dy s a rt h r ie d’allure céré-
belleuse, une raideur axiale et une hypotonie des 4 mem-
bres. Il n’y a pas de déficit des fonctions supérieures, ni de
d é ficit des nerfs crâniens, ni de déficit moteur. Le fo n d
d’oeil est normal, l’étude du liquide céphalo-ra ch i d i e n
aussi, et l’électro e n c é p h a l ogramme ne montre pas d’élé-
ments en faveur d’une encéphalopathie. Une complication
n e rveuse de la va ricelle est éliminée. la tension art é ri e l l e
(TA) est à 110/70 mmHg et le reste de l’examen somatique
est normal en dehors d’un purpura pétéchial au niveau des
membres inférieurs. Le bilan biologique montre une fonc-
tion rénale altérée avec une urée sanguine à 64 mmol/l et
LE SYNDROME HÉMOLYTIQUE ET URÉMIQUE
A PROPOS DE 5 CAS
OUZEDDOUN N.*, RHOU H*, BENAMAR L.*, EZAITOUNI F.*, BAYAHIA R.*, AL HAMANY Z.**, BALAFREJ L.*
* Service de Néphrologie-hémodialyse - CHU Ibn Sina - Rabat.
** Service d’Anatomie pathologique - CHU Ibn Sina - Rabat.
Le syndrome hémolytique et urémique (SHU) est une
m i c ro a n gi o p athie thrombotique cara c t é r isée par l’asso-
Médecine du Maghreb 1997 n°63
une créatininémie à 893,8 µmol/l. Après reprise de la diu-
rèse, les urines sont hématiques et la protéinurie des 24 H
est de 0,4 à 1 g. La protidémie est à 67 g/l. La NFS montre
une anémie hypochrome microcytaire et une thrombopénie
: le taux d’Hb est à 5,7 g/dl, le VGM à 70 µ3 et la CCMH à
25, le taux de plaquettes est à 24.000/mm3.
La biopsie rénale, effectuée loin de toute anomalie de la
crase sanguine à J + 6 montre 14 glomérules présentant un
aspect bours o u fdes parois des cap i l l a i r es gloméru l a i re s
avec aux colorations argentiques, un aspect feuilleté et
irrégulier des membranes basales. Des thrombi-fibrinoïdes
o b t u rent la lumière des cap i l l a i res dans plusieurs glomé-
rules. Le tissu interstitiel est infiltré par un œdème et les
vaisseaux sont normaux.
Il s’agit donc d’une microangiopathie thrombotique (MAT)
glomérulaire.
En plus du traitement symptomatique de l’insuffi s a n c e
rénale aiguë par hémodialyse, un traitement anticoagulant
et un traitement par corticoïdes sous fo rme de bolus de
m é t hyl prednisolone est instauré à raison de 20 mg/kg/j
pendant 3 jours par mois, re l apar un traitement oral
(3 cures en tout). L’ é volution clinique et biologique est
favo rable : rep r ise d’une diurèse normale après 5 jours
d’anurie et récupération d’une fonction rénale normale 15
jours après la 1ère série de bolus de méthyl prednisolone.
Au dernier bilan du mois de septembre 1993, soit après un
recul de 17 mois, la fonction rénale est toujours normale, la
protéinurie des 24 H est négative. Il n’y a pas d’anémie, ni
de thrombopénie.
Observation n°2
Mlle A.A. est une patiente de 7 ans, 2ème d’une fratrie de
4, sans antécédents pat h o l ogiques ni personnels ni fa m i -
liaux.
En février 1992, elle présente des signes fo n c t i o n n e l s
d ’ H TA à savoir phalées, bro u i l l a rds devant les yeux ;
puis ap p a raissent une bouffi s s u re du visage, des oemes
des membres inféri e u rs et des douleurs abdominales sans
troubles du transit. Le 22 Avril 1992, elle est hospitalisée
dans un tableau d’encéphalopathie hy p e rt e n s i ve ave c
c o nvulsions. Le bilan biologique met en évidence une
fonction rénale altérée avec une ue sanguine à 69,7
mmol/l et une créatininémie à 477,9 µmol/l. La protidémie
est à 68 g/l et la protéinurie des 24 H est de 0,75 g pour une
diurèse de 400 à 600 cc par jour. Au compte d’Addis existe
une hématurie microscopique à 8100 H/min. La NFS met
en évidence une anémie hypochrome microcytaire avec la
présence de quelques sch i zo cytes : l’Hb est à 8,5 g/dl, le
VGM à 84µ3 et la CCMH à 28. Le taux de plaquettes est à
103.000/mm3. Sur le plan immu n o l ogi q u e, la re ch e rch e
d’anticorps antinucléaires est négative, de même que le test
au Latex et la réaction de Waaler Rose.
L’histologie rénale montre 10 glomérules, dont 2 en pain à
c a ch e t e r, présentant tous une pro l i f é ration endocap i l l a i re.
Les membranes basales présentent un aspect feuilleté et
i rrégulier aux colorations argentiques. Plusieurs lumière s
des capillaires glomérulaires sont obstruées par des throm-
bi fibrinoïdes. Les artérioles ont un énorme épaississement
sous endothélial «oedémateux» et quelques artérioles péri-
t u bu l a i res ont des lumières obstruées par des thro m b i
fi b rinoïdes. Les lésions tubu l o - i n t e rstitielles sont diff u s e s
avec des travées de fi b ro s e , des plages d’infi l t r at i o n
inflammatoire, et quelques tubes atrophiques ou dilatés. Il
s’agit donc, d’une MAT glomérulaire et artérielle.
La patiente a néficié de 2 séries de bolus de méthy l
p rednisolone à un mois d’intervalle re l ayées par une cor-
t i c o t h é rapie ora l e, associée à un traitement anticoag u l a n t ,
en plus du traitement antihypertenseur.
L’évolution est marquée par une normalisation de la fonc-
tion rénale 6 mois après le début du traitement et la protéi-
nurie des 24H est à l’état de traces. La patiente est par la
suite perdue de vue depuis Novembre 1992.
Observation n°3
Mme F.N. est une patiente de 38 ans, originaire et habitant
en Mauri t a n i e, et ayant comme antécédent personnel un
paludisme en 1981 correctement traité. Cette patiente est
9ème ge s t e, me pare, les grossesses sont bien suiv i e s ,
avec découverte lors de la 1ère grossesse d’une HTA dite
«essentielle». Les accouchements se sont bien déroulés.
Au 7ème mois de sa dernière grossesse, elle présente des
douleurs abdominales et des métrorragies minimes. Le 28
f é v rier 1993, elle subit une césarienne pour hémat o m e
re t ro p l a c e n t a i re. Les suites opérat o i res sont marquées par
un syndrome hémarrogique et CIVD. L’ é t at de choc est
jugulé par de multiples transfusions sanguines mais décou-
ve rte d’une insuffisance rénale avec anu rie ne pondant
pas au traitement diurétique. La patiente est transférée en
néphrologie le 5 Mars 1993.
L’examen somatique trouve une TA à 160/90 mmHg sous
inhibiteur calcique, un souffle systolique fonctionnel le
long du bord ga u che du sternum et au niveau du foye r
OUZEDDOUN N., RHOU H, BENAMAR L, EZAITOUNI F.,
BAYAHIA R., AL HAMANY Z., BALAFREJ L.
22
Médecine du Maghreb 1997 n°63
mitral.
Le bilan biologique montre une créatininémie à 1239
µmol/l et une urée sanguine à 9,96 mmol/l.
La biopsie rénale, après contrôle de la crase sanguine,
montre 30 glomérules. Ils sont le siège d’une prolifération
endocapillaire diffuse et généralisée, d’une fibrose mésan-
gi a l e, et d’un aspect épaissi et feuilleté de la membra n e
basale glomérulaire. La lumière des capillaires est obstruée
par de volumineux thrombi fibrinoïdes. Les artérioles pré-
sentent également de volumineux dépôts sous endothéliaux
fi b rinoïdes et hyalins obturant les lumières. Les lésions
t u bu l o - i n t e rstitielles sont importantes : oedème inters t i t i e l
diffus, atrophie tubulaire, aspect pseudo-thyroïdien de cer-
tains tubes dont les lumières sont encombrées de cylindres
hyalins et hématiques.
Le diagnostic de MAT glomérulaire et artérielle est retenu.
Le traitement symptomatique de l’insuffisance rénale et de
l’HTA a permis de récupérer une diurèse normale mais la
fonction rénale reste toujours altérée avec créat i n i n é m i e
stable à 415,9 µmol/l et une HTA bien équilibrée sous inhi-
biteur calcique. La patiente est retransférée en Mauritanie
avec un traitement symptomatique de l’insuffisance rénale
et de l’HTA.
Observation n°4
Mme B.K. 82 ans, connue hypertendue depuis 3 ans, pré-
sente 3 semaines avant son hospitalisation un épisode de
d i a rr h é e, de re c t o rragi e, et d’oedèmes des membres infé-
rieurs. La patiente est hospitalisée au service de néphrolo-
gie le 29 septembre 1995. L’examen somatique trouve une
TA à 180/80mmHg, des taches purpuriques au niveau des
membres inférieurs qui sont oedematiés.
La rectosigmoïdoscopie montre une muqueuse rectale nor-
male jusqu’à 40 cm, parsemée de quelques taches purpuri-
ques rouges clairs de 5 mm de diamètre.
Le bilan biologique montre à l’admission une insuffisance
rénale qui s’est rapidement aggravée avec une créat i n i -
némie à 1460 µmol/l. La protidémie est à 67 g/l avec albu-
minémie à 28 g/l et des ga m m ag l o bulines à 15 g/l. La
protéinurie des 24 H est de 1,7 g/l, la protéinurie de Bence
Jones et l’immunoelectrophorèse du protéines urinaires est
normale éliminant ainsi une dysglobulinémie.
A la NFS, l’Hb est à 10 g/dl, le VGM à 86 µ3 et la CCMH
à 36. Le taux de plaquettes est à 148.000/mm3.
L’ é ch o graphie rénale montre 2 reins de taille norm a l e,
é ch ogènes et la biopsie nale montre 8 glomérules dont
3 sont en pain à cach e t e r. Les autres ont un mesangi u m
abondant avec 5 à 7 poly nu cl é a i res neutrophiles par anse
capillaire, avec des thrombi au niveau de 2 glomérules. A
la réticuline la membrane basale glomérulaire a un aspect
feuilleté. Le tissu interstitiel est scléreux, est modérément
p a rsemé de ly m p h o cytes et plasmocytes. Au niveau des
tubes, existent des cy l i n d res hématiques avec des tubes
ectass et at rophiques. Les art é rioles péri t u bu l a i r es ont
une parois épaissie avec quelques ra res micro - t h rombi. Il
s ’ a git donc d’une MAT gloméru l a i re et art é ri e l l e . La
patiente est alors traitée par bolus de méthyl prednisolone à
la posologie de 20 mg/kg/j pendant 03 jours à 1 mois
d’intervalle, relayé par une corticothérapie orale. Après la
2ème série de bolus de thyl prednisolone la fo n c t i o n
rénale s’est nettement améliorée, avec créatininémie à
256,6 µmol/l.
En Janvier 1996, soit 4 mois plus tard, la patiente est réad-
mise pour douleurs retro sternales à irradiation ascendante,
avec dyspnée paroxystique nocturne. L’examen somatique
est normal en dehors d’un rythme cardique rapide. La TA
est à 120/60 mmHg sous inhibiteur de l’enzyme de conver-
sion. L’électrocardiogramme montre une tachycardie sinu-
sale et quelques tro u b les de rep o l a ri s ation. Les enzymes
c a r diaques sont normales. La ra d i ographie pulmonaire
m o n t re une card i o m é ga l i e, et des signes pare n chy m at e u x
gauches avec attraction du médiastin. Malheureusement, la
patiente est décédée le 31/1/96.
Observation n°5
Mr. O.A., âgé de 40 ans, mauritanien d’origine présente en
Août 1995 un syndrome néphrotique et une insuffi s a n c e
rénale diagnostiquées en Mauri t a n i e . Sur ces simples
données, un traitement par corticoïdes est démarrée sous
fo rme de bolus de thyl prednisolone à la dose de 20
mg/kg/j pendant 3 jours, re l a par une cort i c o t h é rap i e
o rale à la dose de 1 mg/kg/j puis à dose dégre s s ive. La
durée du traitement étant de 3 mois et demi. La non amé-
l i o ration biologique de ce patient a motivé son tra n s fe rt
dans notre fo rm ation le 23-1-96. L’ examen somatique est
n o rmal. La TA est à 130/100mmHg. Les examens biolo-
giques confirment le syndrome néphrotique avec une alté-
ration de la fonction rénale : l’urée sanguine est à 22,2
mmol/l, la créatininémie à 345 µmol/l, la protidémie à
48,9 g/l et l’albuminémie à 16 g/l.
A la NFS, existe une anémie microcytaire normochrome :
Hb est à 9,3 g/dl, le VGM à 73 µ3 et la CCMH à 36. La
LE SYNDROME HÉMOLYTIQUE… 23
Médecine du Maghreb 1997 n°63
24 OUZEDDOUN N., RHOU H, BENAMAR L, EZAITOUNI F.,
BAYAHIA R., AL HAMANY Z., BALAFREJ L.
recherche de schizocytes est négative et le taux de plaquet-
tes est à 328.000/mm3. Aucune étiologie immu n o l ogi q u e,
infectieuse ou autres n’est retrouvée à l’origine de ce syn-
d rome néphro t i q u e. L’ é ch ographie rénale et l’éch o d o p p l e r
des vaisseaux rénaux sont normaux. La biopsie rénale
m o n t re des sions de nécrose corticale en travées épar-
gnant quelques glomérules au nombre de 7 : la membrane
basale de ces glomérules a un aspect feuilleté et les anses
capillaires sont le siège de quelques thrombi.
L’ a n a lyse des vaisseaux met en évidence quelques thro m -
boses art é ri o l a i res. Un examen attentif montre, au nive a u
des tubes, la présence de poly nu cl é a i res et de quelques
amas fibrino leucocytaires et des macrophages chargés en
hémosidérine.
D evant cet aspect, les étiologies éventuelles de cro s e
corticale sont recherchées :
- la drepanocytose : l’électrophorèse de l’Hb est normale,
- l’endocardite subaigue : les antécédents personnels du
patient et son examen clinique ne permettent pas de retenir
ce diagnostic,
- une angéite nécrosante : il n’y a pas de signes formels en
sa faveur et la recherche des ANCA est négative.
Le diagnostic retenu est donc celui de SHU suggéré par les
lésions gloméru l a i res, avec nécrose cort i c a l e, compliquée
d ’ i n s u ffisance nale et d’une HTA bien équilibrée sous
inhibiteur calcique et inhibiteur de l’enzyme de conversion.
DISCUSSION
Le SHU défini par la surve nue brutale d’une insuffi s a n c e
rénale aiguë assoce à une anémie hémolytique micro -
a n gi o p athique avec frag m e n t ation des hématies et à une
t h ro m b o p é n i e, présente des fo rmes cliniques nombre u s e s
essentiellement en fonction de l’âge du patient et des cir-
constances de surve nu e. Ainsi chez l’enfant sont décrites
2 formes :
- une forme typique, survenant chez les enfants de moins
de 2 ans dans 71% des cas et au-delà de 2 ans dans 29%
des cas (3), entre mai et octobre, avec une phase prodro-
mique faite de diarrhée dans 83% des cas, et, de fièvre
dans 56% des cas. Après un délai allant jusqu’à 15 jours,
s’installe la triade cara c t é ristique du SHU. L’ H TA est
o b s e re dans 47% des cas. Une atteinte ex t r a-rénale
digestive et/ou neurosensorielle est rencontrée dans 20%
des cas. Cette dernière peut être source de complications
graves à type de coma, convulsions, signes neuro l o -
giques de fo c a l i s a tion, ou de quelles neuro l ogiques
dans 2 à 10% des cas à type de cécité corticale, d’épilep-
sie ou de retard intellectuel,
- Une fo rme atypique qui ne survient que dans 9% des
cas, quel que soit l’âge mais plus vo l o n t i e rs chez le
grand enfant. La diarrhée pro d romique est ra re, et le
début est insidieux avec une hémolyse pouvant précéder
l ’ atteinte rénale. Une HTA incontrôlables est souvent
associée à ces signes. Elle serait secondaire aux lésions
artérielles rénales.
Chez ladulte, le tableau clinique est hétérog è n e, souve n t
sous fo rme d’une HTA sévère vo i re maligne, avec re t e n -
tissement oculaire et cérébral. La grande prédominance
féminine est liée à la fréquence des cas secondaires à la pri-
se de contraceptifs oraux et de cas survenant au cours ou au
décours de la grossesse. Il peut survenir au cours du 2ème
ou 3ème trimestre de la grossesse.
Les signes biologiques confirment l’insuffisance rénale, et
lorsque l’anurie n’est pas totale, une protéinurie importante,
assocou non à une hémat u rie microscopique est notée
(4). L’étude de la crase sanguine ne montre que ra re m e n t
des signes de coagulopathie de consommation et la throm-
b o cytopénie semble être secondaire à une destru c t i o n
rapide des plaquettes plutôt qu’à une production insuffi -
sante.
Sur le plan histologi q u e, 3 types de lésions peuvent être
observés :
- La nécrose corticale étendue, non diffuse, associée à des
lésions d’endart é r ite obstru c t ive affectant les art è r es
i n t e rl o bu l a i res mais épargnant les art è r es arquées et
i n t e rl o b a i res. Elle est rencontrée dans 30% des SHU
typiques et 14% des SHU atypiques (3).
- La MAT glomérulaire, caractérisée par un gonflement et
un détachement des cellules endothéliales, se traduisant
par un espace clair sous endothélial donnant un aspect
en double contour aux parois des capillaires glomérulai-
res. Les cellules mésangiales peuvent être hy p e rt ro -
phiées et la matrice mésangiale peut présenter un aspect
fi b ri l l a i re. Son interposition le long des parois cap i l -
l a i res, participe à l’obstruction de la lumière des cap i l -
l a i res. Mais lorsque cette dern i è re est perm é abl e, elle
contient parfois des hématies, des plaquettes ou des
thrombi de fibrine. La juxtaposition des glomérules por-
teurs de ce type de lésions et de glomérules normaux ou
peu altérés est caractéristique. La MAT glomérulaire est
rencontrée dans 57% des SHU typiques et 28% des for-
mes atypiques (3).
Médecine du Maghreb 1997 n°63
LE SYNDROME HÉMOLYTIQUE… 25
- La MAT à prédominance art é rielle est la fo rme la plus
fréquemment rencontrée chez l’adulte. Elle est éga l e -
ment rencontrée dans 57% des SHU atypiques de l’en-
fant. A un stade précoce, les art è res de moyen calibre,
surtout les artères interlobulaires, présentent une prolifé-
ration intimale, une thrombose fibrineuse et surtout une
n é c rose de la média. A un stade tard i f, il existe une
endartérite fibreuse avec un aspect lamellaire en «bulbe
d’oignon» des artérioles. Le 2ème type de lésion concer-
ne les glomérules qui présentent un aspect plissé des
m e m b r anes basales, associé à un dédoublement des
parois. Il n’y a pas de feutrage fibrillaire du mésanguin.
cet aspect glomérulaire serait le résultat d’un processus
ischémique.
Les lésions tubulo-interstitielles n’ont rien de spécifique et
dépendent de la sévérité et de la durée de la maladie.
En immu n o fl u o re s c e n c e, le rum antifi b rine se fi xe sur
certains glomérules, dans le mésangium et sur la parois des
c ap i l l a i r es gloméru l a i res. Il peut aussi se fi x er sur des
thrombi contenus dans la lumière des capillaires et dans les
artérioles.
L’ é volution est va ri a ble chez l’enfant : les fo r mes ave c
n é c rose partielle ou les fo r mes gloméru l a i res, fo rmes les
plus fréquemment observées chez le nourrisson ou le jeune
e n fant, ont un pronostic meilleur à long term e . L’ H TA ,
quand elle ex i s t e, est le plus souvent réve rs i ble et le pro -
nostic re l at ivement favo rabl e . anmoins, les lésions de
M AT ne sont pas réve rs i bles, elle laissent des cicat ri c e s
plus ou moins étendues dans le parenchyme rénale lorsque
plus de 50% des glomérules sont touchés au but de la
m a l a d i e. Des séquelles plus ou moins res à type de
p ro t é i nu ri e, d’HTA et/ou de diminution de la fi l t rat i o n
g l o m é ru l a i re, ont été noes lors des fo rmes typiques par
p l u s i e u rs auteurs après un recul de 10 ans env i ron. Ainsi,
Gagnadoux (5) en 1987 rapporte 43% des séquelles après
un recule de 10 à 24 ans, Dejong (6) et Va n dy ck (7) en
1988 rap p o rtent re s p e c t ivement 23 et 30% après un re c u l
de 10 ans, Siegler (8) en 1991 note des séquelles dans 39%
des cas après un recul de 7 à 18 ans, et Fitzpatrick (9) en
1991, en rapporte 59% pour un recul de 5 à 21 ans.
Chez l’adulte, le pronostic est le plus souvent sévère et
l’évolution à long terme se fait fréquemment vers l’instal-
lation d’une insuffisance rénale terminale.
Les observations rap p o rtées dans notre étude répondent
bien aux cri t è res biologiques et surtout histologiques du
SHU. En effet, le cas décrit dans l’observation 1 est celui
d’une fo rme typique de SHU de l’enfant avec un anu ri e
ayant duré 05 jours et dont l’histologie rénale montre une
M AT gloru l a i re. L’ é volution du patient est favo r abl e
sans séquelles rénales, ni HTA durant les 17 mois d’évolu-
tion. L’observation 2, décrit par contre une forme atypique
de SHU de l’enfant, avec une diurèse conservée et à l’histo-
logie rénale des lésions de MAT glomérulaire et artérielle
associées à des lésions tubulo-interstitielles diffuses. Après
une évolution de 6 mois, la fonction rénale est restée nor-
male, la protéinurie est négative mais l’HTA persiste.
Une due danu rie excédant 15 jours malgré plusieurs
séances d’hémodialyse associées à des lésions de MAT glo-
m é ru l a i re et art é r ielle et de lésions tubu l o - i n t e rs t i t i e l l e s
rénales, expliquent la persistance de l’insuffisance rénale
dans les cas décrits dans les observations 3 et 4.
M a l gl’absence de sch i zo cytes et de thrombopénie pour
le cas crit dans l’observation 5, et qui pourrait s’ex p l i -
quer par un effet néfique du traitement cort i c o ï d e, le
diagnostic de SHU est retenu en présence de lésions histo-
l ogiques rénales évo c at rices. Le patient présente actuelle-
ment une insuffisance rénale ch r onique avec une HTA
contrôlée par une bithérapie.
Concernant la physiopathologie du SHU, la lésion initiale
semble être au niveau de la cellule endothéliale, déclenchée
par des endotoxines bactériennes, diff é rents toxiques, la
grossesse ou l’HTA. La mise à nu des structures sous endo-
théliales ri ches en collag è n e , provoque la fo rm a tion de
microthrombi fibrino-plaquetaires.
Upshaw (10) et Remuzzi (11) ont suggéré que les malades
atteints de SHU et de purpura thrombotique thrombocyto-
pénique, manquaient d’un facteur qui stimulerait la produc-
tion de pro s t a cy c lines (PGI2) par la parois va s c u l a i r e.
L’absence de ce facteur favoriserait la formation de thrombi
de plaquettes dans la micro c i rc u l ation et jouerait un rôle
dans la pat h ogénie de lHTA, pour cela lex s a n g u i n o -
t ransfusion, la plasmaphérèse et surtout la perfusion de
plasma frais congelé semblent efficaces dans les fo rm e s
sévères.
Les essais thérapeutiques prospectifs randomis ave c
contrôles histologiques n’ont pas démontré d’effet signifi-
catif de l’héparine ni des fibrinolytiques. Il en est de même
pour les agents anti-agrégants plaquettaires (13). En ce qui
c o n c e rne les corticoïdes, plusieurs auteurs ont rap p o rt é s
dans quelques cas des résultats favo rables, mais ceci n’a
pas été confi rpar d’autres (13, 14, 15). Les éch a n ge s
plasmatiques, utilisés pour la première fois en 1977, sem-
blent donner de meilleurs résultats (14).
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