revue Virologie 2005, 9 : 93-106 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. Les calicivirus humains, une cause majeure de gastro-entérite aiguë E. Kohli F. Bon K. Balay P. Pothier Laboratoire de virologie, CNR des virus entériques, Hôpital du Bocage, 21079 Dijon Cedex <[email protected]> Microbiologie médicale et moléculaire, UFR Médecine et Pharmacie, 21079 Dijon Cedex Résumé. Les calicivirus humains (HuCV) appartiennent aux genres Norovirus et Sapovirus de la famille des Caliciviridae. Ils sont responsables de gastroentérites aiguës. Ces virus à ARN simple brin présentent une grande variabilité génétique rendant leur détection complexe. En effet, 7 génogroupes distincts incluant au moins 34 génotypes humains sont actuellement reconnus à l’intérieur de ces deux genres. Par ailleurs, des souches recombinantes de norovirus ainsi que des variants à l’intérieur d’un même génotype ont été récemment décrits, ajoutant encore à cette diversité. Grâce à l’amélioration des outils diagnostiques, les norovirus sont maintenant reconnus dans les pays industrialisés comme des agents majeurs de gastro-entérite aiguë sporadique et épidémique dans toutes les tranches d’âge, à l’origine d’une morbidité et de dépenses importantes. La prévalence des HuCV dans les pays en voie de développement reste à déterminer. La biologie de ces virus, jusque-là mal connue du fait de l’impossibilité de les cultiver et de l’absence de modèle animal, connaît actuellement d’importants développements dans le domaine des norovirus avec, d’une part la description de facteurs génétiques de sensibilité et, d’autre part, la découverte d’un norovirus murin cultivable et pouvant servir de modèle. Ces progrès pourraient aider au contrôle des infections à HuCV. Mots clés : Caliciviridae, Norovirus, Sapovirus, gastro-entérite aiguë Abstract. Human caliciviruses (HuCVs) are grouped into two genera, Norovirus and Sapovirus within the Caliciviridae family. These single-stranded RNA viruses show a great genetic diversity making their detection difficult. Indeed, 7 genogroups including at least 34 human genotypes are now recognized within these 2 genera. In addition, norovirus recombinant strains as well as variants within a genotype have been shown recently to generate further diversity. Recent advances in molecular diagnostic techniques have allowed to recognize noroviruses as a major cause of sporadic and outbreak gastroenteritis in all age groups, leading to an important morbidity and high costs in industrialized countries. Their prevalence in developing countries remains to be determined. Until now, the biology of these viruses has been difficult to study because of the lack of either cell culture or animal model systems that support their propagation. New insights into the biology of noroviruses were recently provided with the description of genetic host susceptibility factors as well as the discovery of a cultivable murine norovirus which should provide a new model for human noroviruses. These improvements could help to the control of HuCV infections. Key words: Caliciviridae, Norovirus, Sapovirus, acute gastroenteritis Tirés à part : E. Kohli Virologie, Vol. 9, n° 2, mars-avril 2005 93 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. revue Les calicivirus humains (HuCV) appartiennent à la famille des Caliciviridae. Cette famille comprend quatre genres dont deux incluent essentiellement des virus pathogènes pour l’homme, les genres Norovirus (anciennement Norwalk-like virus) et Sapovirus (anciennement Sapporolike virus) et deux, les genres Vesivirus et Lagovirus, infectent les animaux. Si les calicivirus animaux sont à l’origine de syndromes très variés, maladie hémorragique fatale chez le lapin (rabbit hemorrhagic disease virus ou RHDV), syndromes respiratoires chez le chat (feline calicivirus ou FCV) ou encore avortements et lésions vésiculaires chez l’otarie (San Miguel Sea lion virus ou SMSV), les calicivirus humains sont, eux, responsables de gastro-entérites aiguës. Grâce à l’amélioration des outils diagnostiques, des progrès importants ont été réalisés ces dernières années dans la connaissance de l’épidémiologie des HuCV, lesquels sont actuellement reconnus comme des agents étiologiques majeurs de gastro-entérite épidémique et sporadique dans toutes les tranches d’âge. Du fait de l’absence de système de culture in vitro et de modèle animal de laboratoire, la biologie de ces virus est encore mal connue. Toutefois, d’importants développements sont en cours dans le domaine de la biologie des norovirus. Ces développements font suite à la découverte de l’importance des oligosaccharides de la famille des antigènes tissulaires de groupe sanguin comme facteurs génétiques de sensibilité à l’infection (cet aspect a fait l’objet d’une revue récente par N. RuvoënClouet dans Virologie [1]). Par ailleurs, la description d’un norovirus murin cultivable et pouvant servir de modèle animal [2] ouvre également d’intéressantes perspectives. Historique Le virus Norwalk, prototype des norovirus, a été identifié pour la première fois en 1972 par immunomicroscopie électronique par Kapikian et al. après passage chez des volontaires d’un filtrat de selles provenant d’un patient infecté lors d’une épidémie survenue dans une école à Norwalk (Ohio) en 1968 [3]. Ce virus, non enveloppé, d’un diamètre de 27 nm, est le premier virus de gastro-entérite identifié. À la fin des années 1970, Madeley et Cosgrove puis Flewett et Davies et enfin Chiba et al. rapportèrent la présence, dans des selles d’enfants et de nourrissons, de calicivirus « typiques » similaires aux calicivirus animaux caractérisés auparavant. Un tel virus, détecté dans une institution pour enfants à Sapporo et antigéniquement distinct du virus Norwalk, a par la suite été désigné Sapporo/82/Japan [4]. Une classification en deux groupes fondée sur la morphologie en microscopie électronique a alors été proposée, incluant d’une part les calicivirus classiques représentés par le virus Sapporo et d’autre part les SRSV (small round structured viruses) représentés par le virus Norwalk. Les calicivirus classiques possèdent à leur surface des dépressions en forme de coupe ou calice (d’où leur nom) alors que les SRSV ont des dépressions moins prononcées leur donnant une surface moins typique (figure 1). La description du génome du virus Norwalk par Jiang et al. en 1990 [5] a représenté une étape importante dans la connaissance de ces virus non cultivables et a ouvert la voie à leur diagnostic moléculaire. Elle a permis de reconnaître que le virus Norwalk était le représentant d’un groupe très varié de virus pouvant être divisés en deux sous-groupes phylogénétiques majeurs, les génogroupes I (GI, virus Norwalk) et II (GII, virus Hawaii, Snow Mountain agent). Par ailleurs, le clonage du virus Sapporo/82/Japan a permis de reconnaître deux genres différents parmi les HuCV, les genres Norovirus et Sapovirus, et, ainsi, de valider la classification en deux groupes fondée sur la morphologie 50nm 50nm Figure 1. Virus Norwalk (Norovirus, à gauche) et Sapporo (Sapovirus, à droite) observés en microscopie électronique (www.virology.net/Big_Virology/BVRNAcalici.html, échelle = 50 nm). 94 Virologie, Vol. 9, n° 2, mars-avril 2005 revue Calicivirus canins Vesivirus Parkville Sapporo SMSV - VESV London Calicivirus félins Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. Sapovirus RHDV EBHSV Lordsdale Norovirus Toronto α1 Lagovirus Hawaii Melksham Norwalk Desert Shield Southampton Figure 2. Analyse phylogénétique de la capside de quelques souches représentatives des calicivirus (d’après www.iah.bbsrc.ac.uk/virus/Caliciviridae/trees/Capsid_tree.htm). SMSV: San Miguel sea lion virus; VESV: vesicular exanthema of swine virus; RHDV: rabbit hemorrhagic disease virus; EBHSV: European brown hare syndrome virus. (figure 2). Depuis, de nombreuses souches ont été décrites à l’intérieur de ces deux genres, parmi lesquelles des souches détectées chez les animaux. Organisation génomique Le génome des HuCV est constitué d’un ARN simple brin positif polyadénylé comprenant environ 7 500 bases (figure 3) [4]. Un motif GU présent à l’extrémité 5’ est aussi retrouvé à l’intérieur du génome de tous les calicivirus et correspond probablement au début d’un ARN subgénomique. Un tel ARN a en effet été observé dans les cellules infectées par le FCV et le RHDV. Le génome des HuCV présente deux types d’organisation selon que les gènes des protéines non structurales (parmi lesquelles l’hélicase, la protéase et la polymérase) et de la protéine majeure de la capside (VP1) sont dans un ou deux cadres ouverts de lecture ou ORF (cas des sapovirus et des norovirus respectivement). Dans les deux types d’organisation, un petit Virologie, Vol. 9, n° 2, mars-avril 2005 ORF (ORF2 ou ORF3) code une protéine structurale mineure basique désignée VP2. Il est à noter que, pour la plupart des souches de sapovirus décrites, un troisième ORF de fonction inconnue, chevauchant la région 5’ du gène de la capside, a été identifié. L’extrémité 5’ est liée à une protéine VPg qui pourrait jouer un rôle dans l’induction de la synthèse protéique. Structure La capside du virus Norwalk (norovirus, génogroupe I) est composée d’une protéine majeure de 58 kDa, VP1 et de quelques copies d’une seconde protéine basique, VP2. La structure atomique de particules recombinantes ou VLP (virus-like particles) du virus Norwalk constituées de la protéine VP1 exprimée dans le système baculovirus a été élucidée par Prasad et al. en cryomicroscopie électronique et par cristallographie aux rayons X à 3,4 Å [6]. La capside ainsi obtenue est constituée de 90 dimères de la protéine 95 revue ORF 1 Norovirus 6950 7588 3' VP2 5' VPg Hel VPg Pro Pol 6950 5358 Sapovirus ORF ? ORF 1 ORF 2 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. 5' 6855 Hel VPg Pro Pol VP1 3' VP2 6852 VPg poly A 7349 5' Hel : hélicase Pro : protéase Pol : ARN polymérase poly A 7654 VP1 5374 VPg ORF 3 ORF 2 3' VP1 VP2 poly A ARN subgénomique Figure 3. Organisation du génome des calicivirus humains. Positions sur le virus Norwalk (Genbank accession n° M87661) pour les norovirus et Manchester (Genbank accession n° X86560) pour les sapovirus. VP1 et présente une symétrie icosaédrique (T = 3) (figure 4). La protéine VP1 s’organise en un domaine interne relativement conservé (shell) comprenant un bras N-terminal (N) ainsi que le domaine S (domaine intermédiaire) et un domaine exposé à la surface de la capside, le domaine P (protruding). Ce dernier comporte deux sousdomaines, P1 et P2. Le domaine P2 représente le domaine le plus variable de la capside des norovirus et son exposition à la surface est compatible avec son rôle dans l’interaction avec des récepteurs présents à la surface des cellules épithéliales intestinales [7, 8]. L’organisation en modules S-P1-P2 retrouvée pour d’autres calicivirus permettrait à la protéine majeure de capside ses propriétés d’assemblage, d’interaction avec les récepteurs et d’immunogénicité, malgré une grande variabilité [9]. La protéine VP2, faiblement représentée dans la capside virale, augmenterait la stabilité de VP1 et ainsi la protégerait de la dégradation, notamment par les protéases. Variabilité génétique et antigénique, classification Les norovirus présentent une grande diversité génétique (tableau 1). Les souches sont classées en génogroupes, 96 chaque génogroupe étant lui-même subdivisé en génotypes sur la base de la séquence en acides aminés de la protéine de capside VP1. La dernière classification proposée par Green et al. en 2001 [4] est en cours de réactualisation. Actuellement, les norovirus peuvent être classés en 5 génogroupes dont 3 comprennent des souches humaines, les génogroupes I, II et IV. Zheng et al. (département des gastro-entérites virales, CDC, Atlanta, USA) ont proposé, à la seconde conférence internationale sur les calicivirus, 26 génotypes humains à l’intérieur de ces 3 génogroupes (GI 1 à 8, GII 1 à 17 et GIV 1) [10]. Toutefois, cette classification n’est pas officialisée et d’autres génotypes ont été décrits. Des calicivirus animaux sont également classés dans le genre Norovirus, parmi lesquels des souches bovines (génogroupe III, virus Jena et Newbury-agent 2), porcines (génogroupe II) et une souche murine (génogroupe V). Par ailleurs, des phénomènes de recombinaison entre souches présentant une polymérase et une capside dérivées de souches parents différentes, générant ainsi de nouveaux virus, ont été décrits [11, 12]. L’une de ces souches recombinantes, le variant GGIIb, est particulièrement remarquable. Il a été isolé pour la première fois au cours d’une épidémie d’origine hydrique dans le sud de la France en août 2000 [13]. Ce virus possédant une polymérase (ORF1) ne permettant pas de le relier à une souche de référence donnée et une capside (ORF2) appartenant au génotype Virologie, Vol. 9, n° 2, mars-avril 2005 revue Dimère Monomère B Domaine P2 C C A Domaine P1 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. C Domaine S N N-terminal N N C N (10-49) S (50-225) Domaine interne (shell) P1 (226-278) P2 (279-405) P1 (406-520) Domaine P (protruding) Figure 4. La protéine de capside VP1 du virus Norwalk : structure d ’une pseudo-particule virale (VLP). A) reconstruction en cryomicroscopie électronique, représentation de surface (haut) et en coupe (bas). B) structure du monomère et du dimère par cristallographie aux rayons X à 3,4 Å. C) structure primaire de VP1 (position des acides aminés). Adapté de Hutson et al. [43] avec autorisation. Hawaii (figure 5) représente en fait un groupe de virus ayant diffusé de façon explosive en France mais aussi dans de nombreux pays européens au cours de l’hiver 20002001. Sa diffusion a pu être observée en temps réel grâce à un réseau de surveillance européen mis en place en 2000, Foodborne viruses in Europe [14]. Ces virus présentent une homologie importante au niveau du gène de la polymérase, lequel peut être associé à 3 gènes de capside différents (génotypes Hawaii, Mexico et Snow Mountain) [15]. Le site de recombinaison se situerait au niveau d’une région hautement conservée à la jonction ORF1-ORF2 [11, 12] au niveau de laquelle l’ARN polymérase pourrait passer d’un génome parent à l’autre au cours de la réplication virale en cas de co-infection. Nous avons identifié trois autres souches recombinantes, suggérant que ce phénomène n’est pas rare [16]. Cependant, ces souches ont présenté une diffusion apparemment limitée, à la différence des souches GGIIb. Il est à noter que, si la recombinaison génère de nouveaux virus, toutes les souches recombinantes décrites à ce jour présentent des capsides correspondant à des génoVirologie, Vol. 9, n° 2, mars-avril 2005 types déjà décrits. Ainsi, le mécanisme conférant à certaines souches un avantage sélectif reste à élucider. Enfin, en 2002, a été rapportée l’émergence dans différents pays européens d’un « nouveau variant » à l’intérieur du génotype Bristol-Lordsdale (GII-4), à l’origine d’une augmentation importante des épidémies à norovirus au cours du printemps et de l’été [17]. Il est probable que le même phénomène s’est reproduit en 2004 avec une nouvelle souche. Des travaux récents ont montré que ces souches nouvelles présentaient des mutations majeures dans la protéine VP1, notamment au niveau de la région P2 [18]. Ces mutations pourraient être à l’origine d’un échappement à la réponse immunitaire, expliquant ainsi la circulation continue de ce génotype dans la population, et aussi d’une modification des propriétés de liaison de ces virus à leurs récepteurs cellulaires. Au total, ces phénomènes de recombinaison générant de nouveaux virus ainsi que l’émergence de nouveaux variants à l’intérieur d’un génotype donné contribuent à la variabi97 revue Tableau 1. Classification provisoire des calicivirus humains : adaptée de Green et al. pour les norovirus [4]. Les nouveaux génotypes proposés par Zheng et al. [10] sont représentés par un numéro en italique. Les génotypes présentent au moins 20 % de différence en acides aminés entre eux ; selon Farkas et al. pour les sapovirus [19] Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. Genre Norovirus Génogroupe I II Genre Sapovirus IV I II IV V Génotype 1 Norwalk 2 Southampton 3 Desert Shield 4 Chiba 5 Musgrove 6 Hesse 7 Winchester 8 1 Hawaii 2 Melksham (Snow Mountain) 3 Toronto (Mexico) 4 Bristol (Lordsdale) 5 Hillingdon 6 Seacroft 7 Leeds 8 Amsterdam 9 10 11 12 13 14 15 16 17 1 Alphatron 1 Sapporo/82 2 Parkville/94 3 Stockholm/97 1 London/92 2 Mexico 340/90 3 Cruise ship/00 1 Houston7-1181/90 1 Argentina39 lité génétique des souches de norovirus et au dynamisme de leur circulation. Il semble que les sapovirus soient finalement plus diversifiés sur le plan génétique que ce l’on pensait jusque-là. En effet, Farkas et al. [19] ont récemment proposé une classification en 5 génogroupes, 4 infectant l’homme (génogroupes I, II, IV et V) et comprenant 8 génotypes, et l’un infectant le porc (génogroupe III). La diversité antigénique des norovirus est mal connue du fait de l’absence de système de neutralisation in vitro. Ainsi, bien que différents types antigéniques aient été décrits en immunomicroscopie électronique et que des études récentes utilisant des pseudo-particules virales recombinantes aient apporté des informations sur les réactions croisées observées avec des anticorps polyclonaux ou monoclonaux, il n’y a pas à ce jour de définition claire des types antigéniques [4]. Il en est de même des sapovirus. 98 La nomenclature proposée pour ces virus est la suivante : espèce infectée/genre/nom du virus/désignation de la souche/année d’isolement/pays d’isolement. Ainsi, le virus Norwalk est désigné Hu/Nor/NV/8fIIa/1968/US. Propriétés physicochimiques Des études réalisées chez des volontaires aux États-Unis ont montré que le virus Norwalk était résistant aux pH acides (3 h à pH 2,7 à température ambiante) et à la chaleur (30 min à 60 °C). Il reste infectieux après 30 minutes en présence de chlore à la concentration de 0,5-1 mg par litre (chlore libre), concentration trouvée dans l’eau de distribution. À des concentrations supérieures (> 2 mg/L), il est inactivé. Il est plus résistant au chlore que le rotavirus A et le poliovirus de type 1 [4]. L’effet d’autres désinfectants n’a pas été étudié du fait du manque de système de culture. Des virus animaux cultivables ont été récemment proposés comme modèles pour appréhender l’inactivation des calicivirus humains. Pathogenèse et pathologie Transmission La transmission du virus se fait de personne à personne selon le mode féco-oral, soit de façon directe, soit par l’intermédiaire de surfaces contaminées. Les aérosols formés lors des vomissements contribuent à sa propagation et peuvent souiller les surfaces (sols, tapis, téléphones, poignées de porte...). Pour anecdote, nous pouvons citer la transmission d’un norovirus au cours d’un match de football d’une équipe présentant des vomissements intensifs à l’autre équipe dont les joueurs déclarèrent la maladie le lendemain. Les voies alimentaires et hydriques sont également un mode important de transmission à l’origine d’épidémies. Elles peuvent être suivies d’une propagation de la maladie de personne à personne par transmission secondaire. Les coquillages sont souvent incriminés, en particulier les huîtres [20]. De nombreux aliments contaminés ont également été mis en cause : salades, sandwichs, fruits et légumes frais ou congelés, pâtisseries [20, 21]. La contamination de ces aliments peut être d’origine hydrique ou due à leur manipulation par du personnel infecté. Ce mode de transmission, faisant intervenir une personne infectée, symptomatique ou non, ayant manipulé un aliment, serait en fait responsable d’environ la moitié des épidémies d’origine alimentaire. Plusieurs facteurs contribuent à l’impact considérable des infections à norovirus, en particulier lors d’épidémies : − une dose infectieuse faible peut entraîner la maladie (10 unités PCR seraient suffisantes dans le cas du virus Virologie, Vol. 9, n° 2, mars-avril 2005 Identité nucléotidique (%) Hawaii Bristol Mexico ORF1 10 60 56 10 55 60 55 10 54 60 54 10 53 60 53 10 52 60 52 10 51 60 51 10 50 60 50 10 49 60 49 10 48 60 48 10 47 60 47 10 ORF2 46 100 98 96 94 92 90 88 86 84 82 80 78 76 74 72 70 68 66 64 62 60 58 56 54 52 50 46 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. revue Position (bp) (par rapport à la souche Hawaii) Figure 5. Fenêtre d’identité nucléotidique obtenue grâce au logiciel SimPlot et correspondant à l’analyse comparée des souches Hawaii (Genbank accession n° U07611), Bristol (Genbank accession n° X76716) et Mexico (Genbank accession n° U22498), versus la souche Gourdon78/2000/FR [13] prise comme référence (ligne 100%). Pour chacune des courbes, chaque point correspond au pourcentage d’identité entre la souche considérée et la souche Gourdon78 sur les 200 paires de bases précédentes. Norwalk). Cette dose minimum pourrait toutefois différer selon les souches ; en effet, 10 unités ne suffisent pas dans le cas du virus Snow Mountain [22] ; − l’excrétion de quantités importantes de virus ; − la présence de porteurs asymptomatiques et la possibilité de transmettre l’infection par un patient durant les phases pré- et post-symptomatiques, l’excrétion pouvant durer plus de 3 semaines [23] ; − une grande stabilité de ces virus dans l’environnement. Des norovirus animaux, bovins et porcins, ont été décrits. À ce jour, il n’y a pas d’évidence que les virus bovins (génogroupe III) représentent un problème de santé publique [24]. Les virus porcins sont plus proches génétiquement des virus humains (génogroupe II) et, s’ils n’ont pas été retrouvés chez l’homme, la question d’une transmission zoonotique reste posée. Des sapovirus porcins, proches génétiquement des virus humains, ont également été décrits mais à ce jour n’ont jamais été détectés chez l’homme. Sensibilité et résistance à l’infection Les études d’infections réalisées chez des volontaires dans les années 1970 avec le virus Norwalk avaient montré qu’une partie des sujets était sensible à l’infection tandis qu’une autre était résistante, cela de façon répétée, suggérant l’existence d’un facteur génétique, peut-être un récepteur pouvant affecter la sensibilité à l’infection à norovirus. Récemment, grâce à la découverte du rôle de l’oligosaccharide H de type 2 comme ligand du RHDV à la surface des cellules épithéliales intestinales, il a été montré que les norovirus utilisent également des glycanes de la famille des Virologie, Vol. 9, n° 2, mars-avril 2005 antigènes tissulaires de groupe sanguin comme récepteurs sur les cellules épithéliales intestinales [1]. Si ces oligosaccharides jouent le rôle de récepteurs pour les norovirus, cela n’exclut pas la possibilité d’un corécepteur. En effet, les cellules Caco2 exprimant ces récepteurs lient les particules virales mais ne permettent pas la réplication. Enfin, rien n’est connu actuellement des facteurs de sensibilité à l’infection à sapovirus. Physiopathologie Le site de réplication primaire présumé est le tractus intestinal supérieur ; des lésions histopathologiques avec raccourcissement des villosités, une malabsorption transitoire des graisses, du D-xylose et du lactose ainsi qu’une diminution des enzymes de la bordure en brosse ont été décrites. Histoire naturelle de l’infection Les gastro-entérites à calicivirus sont en général de gravité modérée, bien que potentiellement invalidantes durant la phase aiguë. Des études réalisées chez des volontaires et lors d’épidémies ont montré : – une période d’incubation courte, de 15 à 50 h avec une moyenne de 24 h chez des volontaires et de 4 à 77 h au cours d’épidémies (24-48 h dans 20/22 épidémies) ; – la présence de symptômes aigus incluant des vomissements chez plus de 50 % des cas (d’où le nom donné à l’infection winter vomiting disease) et/ou une diarrhée, des crampes abdominales et des nausées, de la fièvre et des céphalées ; 99 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. revue – une durée moyenne des signes de 12 à 60 h. Lors d’une épidémie, ces signes cliniques associés à un fort taux d’attaque et à la négativité des examens bactériologiques constituent les critères de Kaplan, critères considérés comme hautement indicatifs d’épidémie à calicivirus [25]. Une étude prospective réalisée, non plus chez des volontaires mais dans la communauté aux Pays-Bas, chez des patients de tout âge infectés avec différents génotypes a apporté des éléments nouveaux sur l’histoire naturelle de l’infection à HuCV [23]. La durée médiane des signes cliniques a été trouvée plus longue, 5 et 6 jours respectivement pour les norovirus et les sapovirus. La maladie est caractérisée par une diarrhée associée à des vomissements, des nausées et de la fièvre le premier jour. Il est à noter que les vomissements sont moins fréquents chez les enfants de moins de 1 an comparé aux enfants de plus de 1 an. Des douleurs et des crampes abdominales sont aussi des signes associés. La maladie est similaire pour les norovirus et les sapovirus ; toutefois, les nausées et vomissements sont plus fréquents chez les patients infectés par un norovirus tandis que la fièvre serait moins fréquente. Enfin, l’excrétion virale a été retrouvée positive chez 26 % des patients 21 jours après le début des signes cliniques pour les norovirus et chez 14 % des patients 15 jours après pour les sapovirus (détection par RT-PCR). Une durée d’excrétion longue n’est pas associée à un critère de sévérité particulier de la maladie. Il est à noter que l’excrétion postsymptomatique a été évoquée comme étant à l’origine d’épidémies alimentaires à norovirus [26]. Sévérité Chez l’enfant, les scores de sévérité se sont montrés inférieurs à ceux des infections à rotavirus [23, 27]. Paradoxalement, malgré une sévérité inférieure à celle des infections à rotavirus, Matson et al. ont rapporté récemment un coût supérieur pour les infections à calicivirus du fait d’une moins bonne reconnaissance [28]. Lors d’épidémies à norovirus en Angleterre entre 1992 et 2000, Lopman et al. ont rapporté une incidence de 33 hospitalisations et de 7,5 décès pour 10 000 cas observés [29]. Ces décès ont été observés au cours d’épidémies chez des malades fragilisés et des personnes âgées dans des services hospitaliers ou des maisons de retraite. Par ailleurs, a été rapportée récemment une épidémie à norovirus avec des cas sévères chez des militaires britanniques en Afghanistan, 3 soldats ayant présenté des signes cliniques inhabituels, raideur de la nuque, confusion, photophobie et coagulation intravasculaire disséminée pour l’un d’entre eux [30]. Enfin, des formes de diarrhée chronique à norovirus ont été observées chez des immunodéprimés, en particulier des transplantés [31]. 100 Diagnostic et typage Le diagnostic des infections à calicivirus humains lors d’épidémies, en particulier pour les norovirus, a longtemps reposé non pas sur des critères biologiques mais sur les caractéristiques cliniques et épidémiologiques de la maladie, les critères de Kaplan décrits plus hauts. Le diagnostic biologique des HuCV est essentiellement direct. Ces virus sont non cultivables malgré de nombreuses tentatives. La microscopie électronique historiquement utilisée pour la détection des calicivirus humains reste une méthode de référence ; néanmoins, elle est peu sensible et nécessite un personnel expérimenté. Des techniques immunoenzymatiques sont maintenant disponibles dans le commerce. Toutefois leur faible sensibilité [32] ne permet pas de rendre un résultat fiable en cas de négativité et, de plus, elles ne concernent que les norovirus. L’amplification génique par RT-PCR est l’outil de choix. La caractéristique majeure du génome est sa grande diversité ; néanmoins, certains motifs protéiques (GLPSG et YGDD) sont conservés au niveau de l’ARN polymérase. C’est pourquoi le gène codant cette protéine est la cible la plus utilisée pour le diagnostic par RT-PCR (figure 6). Cependant, pour couvrir l’ensemble des souches, il est nécessaire d’avoir recours à plusieurs couples d’amorces [26, 33] qu’il faut sans cesse réactualiser. Nous avons récemment participé à l’évaluation d’un test pour la détection des calicivirus humains dans les selles par RT-PCR suivie d’une hybridation en microplaques [34]. Ce test détecte à la fois les norovirus et les sapovirus avec une sensibilité et une spécificité satisfaisantes et il présente en outre l’avantage de proposer un contrôle d’inhibition. Enfin, la PCR en temps réel offre une alternative intéressante envisagée pour les norovirus, la région cible utilisée dans ce cas étant une région conservée située à la jonction ORF1-ORF2 [35, 36]. La recherche dans l’eau et les aliments suspectés à l’origine d’épidémies se fait par RT-PCR et, si les méthodes ont beaucoup progressé, cette recherche reste difficile du fait d’une moindre concentration et de la présence fréquente d’inhibiteurs de PCR [20]. Les techniques en temps réel, du fait de leur sensibilité, semblent intéressantes sur ce type de prélèvement. Plusieurs approches sont utilisées pour le typage des souches [21] : hybridation, hybridation multiple spécifique des génotypes (reverse line blot ou RLB), étude de la mobilité des hétéroduplex (HMA) et séquençage des fragments amplifiés qui représente la méthode la plus informative. Toutefois, si le séquençage de la région amplifiée dans la polymérase est largement utilisé et est suffisant pour typer une souche lors d’épidémie et éventuellement la comparer à une souche trouvée dans un aliment ou dans l’eau, le génotypage, doit par contre être réalisé sur le gène de la Virologie, Vol. 9, n° 2, mars-avril 2005 revue VP1 génotypage 5374 RNA pol VP1 6950 VP2 AAA....A 5358 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. GLPSG YGDD Diagnostic typage rapide Figure 6. Diagnostic et typage moléculaires des HuCV: régions cibles du génome. La région codant l’ARN polymérase virale est utilisée pour le diagnostic et le typage rapide tandis que le gène de la protéine majeure de capside VP1 permet le génotypage. capside [4] (figure 6). Par ailleurs, l’identification des souches recombinantes et des nouveaux variants nécessite également de disposer des données sur le gène de la capside. Épidémiologie La part des calicivirus humains dans les diarrhées aiguës n’est connue que depuis peu de temps du fait de l’amélioration des méthodes de détection. Il est maintenant admis que les norovirus sont des agents majeurs de gastro-entérite aiguë sporadique dans toutes les tranches d’âge dans la communauté (gastro-entérites ne nécessitant pas de recours à des soins médicaux) et en médecine générale, ainsi que chez les enfants en consultation spécialisée (pédiatre de ville ou service des urgences à l’hôpital) ou hospitalisés. Par ailleurs, les HuCV représentent la cause majeure d’épidémies de gastro-entérites. Gastro-entérites sporadiques Le tableau 2 rassemble des études réalisées dans la population et en médecine générale dans toutes les tranches d’âge ainsi qu’en consultation spécialisée et parmi les enfants hospitalisés. Au total, ces études ont montré que les calicivirus étaient plus fréquents ou aussi fréquents que les rotavirus A dans les infections communautaires, aussi fréquents en médecine générale, le second agent responsable derrière le rotavirus A chez les enfants en consultation spécialisée et hospitalisés. Toutefois, la sévérité des infections pédiatriques reste inférieure à celle du rotavirus A. Les sapovirus sont associés principalement aux gastroentérites pédiatriques et ils représentent une part faible comparés aux norovirus, inférieure ou égale à 30 % des cas d’infections à calicivirus. Virologie, Vol. 9, n° 2, mars-avril 2005 Épidémies Les norovirus représentent par ailleurs la première cause d’épidémie de gastro-entérites et sont à l’origine de plus de 90 % des épidémies non bactériennes survenant au sein de collectivités : crèches, restaurants, hôpitaux, maisons de retraites, institutions médicalisées, écoles, cafétérias, croisières, armée [4]. Ils sont responsables de la moitié des épidémies de gastro-entérites d’origine alimentaire aux États-Unis. Le nombre de personnes touchées par épidémie a été estimé à 25 personnes parmi lesquelles environ 10 % ont recours à un médecin et 1 % sont hospitalisées. Si les infections sporadiques à sapovirus sont essentiellement décrites chez l’enfant, des épidémies ont été rapportées chez l’adulte [37]. Une augmentation des épidémies à sapovirus dues à des souches appartenant au génogroupe IV a été rapportée récemment en Suède [38]. Au total, les infections à calicivirus représentent un réel problème de santé publique dans les pays industrialisés ainsi qu’en témoignent les chiffres suivants : – aux États-Unis, 23 millions de cas annuels, 50 000 hospitalisations, 300 décès [39] ; – en France : 501 384 consultations en médecine générale (rapport de l’INVS : Morbidité et mortalité dues aux maladies infectieuses d’origine alimentaire en France, disponible sur le site http://www.invs.sante.fr ; estimation obtenue à partir des données du Réseau Sentinelles et d’une étude réalisée au cours de l’hiver 1998-99 [40]) et 70 194 cas d’infection alimentaire par an ; – en Angleterre : un coût de 72 millions de livres pour les seules épidémies de gastro-entérites à norovirus dans les institutions de santé d’avril 2002 à mars 2003 [41]. Enfin, s’il est probable que ces infections représentent également un problème important dans les pays en voie de développement, il y a un véritable manque de données dans ces régions. 101 revue Tableau 2. Part des HuCV dans les gastro-entérites communautaires (C), en médecine générale (MG), en consultation pédiatrique (ville ou hôpital, urgences) (CP) et parmi les enfants hospitalisés (H) Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. Références Wheeler et al. [44] Pays Angleterre Durée et type d’étude 3 ans C Pang et al. [27] Finlande De Wit et al. [45] Pays-Bas 2 ans C enfants 1 an Tompkins et al. [46] Angleterre De Wit et al. [47] Pays-Bas 3,5 ans MG Chikhi-Brachet et al. [40] France 1 hiver MG Bon et al. [48] France 3 ans CP Australie 3 ans CP Marie-Cardine et al. [50] France Bon et al. [51] France 2 hivers 1997-99 H 2 ans H Ratcliff et al. [49] C 3 ans MG Matson et al. [28] États-Unis H Oh et al. [52] Allemagne 1 an H Prévalence( %) NV 6 SV 0,01 RV 3 NV 20 SV 9 RV 20 NV 16,1 SV 6,3 RV 7,3 NV 6,5 SV 1,5 RV 7,7 NV 5,1 SV 2,4 RV 5,3 NV 16,3 SV 2,9 RV 17,4 NV 14 SV 0 RV 61 NV 14 SV 3,5 RV 45 NV 9,8 SV RV 21,5 NV 12,4 SV 0,7 RV 52,3 NV 7,1 SV 1,4 RV 26 NV 21 SV nd RV 47 Méthodes* ME EIA RT-PCR RT-PCR EIA ME EIA RT-PCR EIA RT-PCR EIA RT-PCR EIA RT-PCR EIA RT-PCR agglutination RT-PCR EIA RT-PCR EIA RT-PCR RT-PCR * Méthode identique pour les norovirus et les sapovirus dans toutes les études. ME : microscopie électronique ; EIA : dosage immunoenzymatique ; NV : norovirus ; SV : sapovirus ; RV : rotavirus A. Saisonnalité Les cas sporadiques de diarrhée à norovirus sont rencontrés à bas bruit toute l’année avec un pic hivernal. Lors d’une surveillance menée entre 1992 et 2000 en Angleterre, sur 1 877 épidémies de gastro-entérites à norovirus, Lopman et al. ont observé deux profils épidémiologiques différents : d’une part, les épidémies dans des structures de santé et, d’autre part, les autres épidémies englobant épidémies alimentaires, hydriques et de personne à personne (écoles, hôtels) [29]. Les épidémies rencontrées dans les hôpitaux ou institutions médicalisées sont les seules à présenter un 102 pic hivernal (superposable à celui des cas sporadiques). Toutefois, l’émergence du nouveau variant Lordsdale en 2002 a été à l’origine d’épidémies au printemps et en été dans les institutions de santé [17]. Épidémiologie moléculaire On a vu que les norovirus étaient nettement prédominants comparés aux sapovirus. Parmi les norovirus, une grande diversité de souches appartenant notamment aux génogroupes I et II cocirculent au cours d’une même période. La Virologie, Vol. 9, n° 2, mars-avril 2005 revue 70 Sapovirus A - Cas sporadiques Alphatron 60 Autres GII 50 Variant Lordsdale Lordsdale 40 GGIIb Autres GI Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. 30 Desert Shield 20 Norwalk 10 0 16 B - Epidémies 14 12 10 8 6 4 2 0 Nov 98 Avr 99 Mai Oct 99 Nov 99 Avr 00 Mai Oct 00 Nov 00 Avr 01 Mai Oct 01 Nov 01 Avr 02 Mai Oct 02 Nov 02 Avr 03 Mai Oct 03 Nov 03 Fev 04 Figure 7. Épidémiologie moléculaire des HuCV détectés chez des cas sporadiques et au cours d’épidémies en France de 1998 à 2004 [42]. surveillance des souches de calicivirus en France entre 1998 et 2004 (figure 7) montre bien cette diversité [42]. Toutefois, le génogroupe II (GII) et en particulier le génotype Lordsdale (GII-4, souches proches du virus Grimsby) est prédominant dans toutes les études rapportées, notamment lors d’épidémies transmises de personne à personne. Par ailleurs, des phénomènes épidémiques au cours desquels on observe l’émergence d’une souche particulière (souches GGIIb [15], variant Lordsdale [17]) caractérisent certaines années dites « épidémiques ». L’émergence de telles souches se propageant rapidement à une grande Virologie, Vol. 9, n° 2, mars-avril 2005 échelle est le reflet d’un avantage sélectif de tels virus. Cependant, les déterminants biologiques expliquant leur émergence restent à élucider. Il est intéressant de noter que les épidémies d’origine environnementale (huîtres, eau) sont en général associées à plusieurs souches tandis que les épidémies pour lesquelles le mode de transmission se fait de personne à personne sont associées à une seule souche [42] (figure 8). De plus, on trouve plus souvent au cours des épidémies d’origine environnementale des norovirus appartenant au génogroupe I. 103 revue 18 GI + GII + SV GI + GII GII + GI + GII GI 16 14 12 10 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. 8 6 4 2 0 Personne-àpersonne Huîtres Aliments Inconnu Eau Figure 8. Distribution des souches de calicivirus détectées en France de décembre 1998 à février 2004 dans des épidémies de gastro-entérites selon le mode de transmission [42]. SV: sapovirus; GI+, GII+, GI+GII : > 1 souche de norovirus appartenant aux génogroupes I et/ou II. Immunité Les déterminants de la protection ne sont pas connus. Une étude réalisée chez la souris avec un norovirus murin a montré que l’immunité innée était essentielle pour la résistance au norovirus au contraire des réponses adaptatives T et B. Chez l’homme, pour les norovirus, si le principe d’une immunité à court terme semble acquis contre le virus homologue, il n’en est pas de même de l’immunité à long terme pour laquelle subsistent encore de nombreuses inconnues [43]. Le blocage hétérotypique pourrait être supérieur à l’intérieur du génogroupe I comparé au génogroupe II. Enfin dans le cas des sapovirus, il semble qu’une meilleure protection à long terme soit induite, en effet les infections sont rares chez l’adulte. La survenue d’épidémies à sapovirus chez l’adulte en 2004 pourrait être un phénomène ponctuel lié à l’apparition d’une nouvelle souche. Traitement et prévention Les gastro-entérites à calicivirus sont généralement sans complication et évoluent spontanément vers la guérison. Un traitement symptomatique des douleurs abdominales et de la déshydratation lors de diarrhées ou de vomissements sévères peut être mis en place. Les découvertes récentes 104 concernant le rôle des oligosaccharides de groupes sanguins pour la liaison des norovirus aux cellules intestinales pourraient conduire à la mise au point de thérapeutiques antivirales inhibant cette liaison. Les mesures classiques d’hygiène des mains et de désinfection des surfaces représentent une méthode de prévention très efficace pour la prévention des infections à calicivirus. Par ailleurs, les épidémies transmises par les aliments autres que les coquillages et les fruits et légumes contaminés de façon hydrique (contamination environnementale) étant dues à l’introduction de virus par du personnel infecté, leur prévention peut être réalisée par application de mesures d’arrêt de travail en cas d’épisode de gastro-entérite, mais surtout de mesures strictes d’hygiène. Il faut en effet rappeler la possibilité de transmettre le virus par une personne asymptomatique, porteur sain ou patient en phase pré- ou post-symptomatique. Il n’existe pas de vaccin à l’heure actuelle. Un vaccin norovirus serait utile pour certaines catégories de personnes comme les militaires, le personnel des hôpitaux ou encore les voyageurs. Étant donnée la diversité des souches, il devrait inclure différentes souches appartenant aux génogroupes I et II. Des recherches en cours s’orientent vers l’utilisation de pseudo-particules virales recombinantes [43]. Toutefois, il n’existe pas de modèle animal permettant d’évaluer l’efficacité d’un tel vaccin. Virologie, Vol. 9, n° 2, mars-avril 2005 revue Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 03/06/2017. Conclusion La part des calicivirus a été longtemps sous-estimée en pathologie humaine. La mise en place des nouvelles techniques moléculaires de diagnostic et de caractérisation a permis, ces dernières années, de prendre conscience de l’impact sanitaire et économique de ces virus dans toutes les tranches d’âge. Une surveillance épidémiologique active de ces virus reste évidemment d’actualité, dans le but notamment de mettre en évidence de nouvelles souches, d’évaluer le risque zoonotique ou encore de détecter des sources communes d’infection. Une telle surveillance a été mise en place au niveau européen depuis 2000 grâce à la création d’un réseau de laboratoires (projets Foodborne Viruses in Europe et Enteric Virus Emergence, New Tools). Elle a notamment permis de mettre en évidence l’émergence de deux et probablement trois types de souches nouvelles présentant un potentiel de diffusion élevé (recombinants GGIIb et nouveaux variants GII-4). Par ailleurs, bien que des progrès importants aient été réalisés ces dernières années dans le domaine de la biologie des norovirus, leur contrôle est loin d’être acquis. À cet égard, l’élucidation du site de liaison des norovirus à leurs récepteurs, la mise au point d’un système de culture in vitro et une meilleure connaissance des déterminants de l’immunité devraient être utiles. Références 1. Ruvoën-Clouet N, Le Pendu J. Fixation des norovirus sur des glycannes : conséquences biologiques et perspectives prophylactiques. Virologie 2004 ; 8 : 425-34. 2. Karst SM, Wobus CE, Lay M, Davidson J. Virgin HWt. STAT1dependent innate immunity to a Norwalk-like virus. Science 2003 ; 299 : 1575-8. 3. Kapikian AZ, Wyatt RG, Dolin R, Thornhill TS, Kalica AR, Chanock RM. 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