E´volution des pratiques et re´sultats factuels de la transplantation

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M ini-revue
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Évolution des pratiques
et résultats factuels de la
transplantation hépatique
pour maladie alcoolique
du foie
Evolution of practices
and factual results of
liver transplantation for
alcoholic liver disease
lie Cannesson(1), Guillaume
Ame
Lassailly(1), Emmanuel Boleslawski(2),
Alexandre Louvet(1), Philippe
Pruvot(2),
Mathurin(1), François Rene
bastien Dharancy(1)
Se
1
CHRU de Lille,
^pital Claude Huriez,
Ho
^le m
Po
edico-chirurgical Huriez,
maladies de l’appareil digestif
et de la Nutrition,
59037 Lille Cedex
2
CHRU Lille,
^pital Claude Huriez,
Ho
service de chirurgie digestive
et de transplantation,
France
e-mail : <sebastien.dharancy@chru-lille.
fr>
sume
Re
La maladie alcoolique du foie est une des principales indications de
transplantation h
epatique (TH) en France et en Europe dont les r
esultats sont
comparables aux autres indications. Les principales evolutions des pratiques ont
et
e : 1) une d
efinition plus pr
ecise des candidats pr
esentant un b
en
efice
individuel en terme de survie, 2) une r
evision de la r
egle des 6 mois d’abstinence,
3) une evaluation de la TH en proc
edure acc
el
er
ee au cas par cas dans une
population s
electionn
ee de patients ayant une h
epatite alcoolique corticor
esistante, et 4) une meilleure pr
evention et d
epistage de la rechute post-greffe.
s : transplantation hepatique, cirrhose alcoolique, hepatite alcoolique, maladie
n Mots cle
alcoolique du foie
Abstract
Alcoholic liver disease (ALD) is one of the leading indications for liver
transplantation (LT) in France and in Europe with results comparable to other
indications. The main changes that have been observed in practice are: 1) a more
precise definition of the candidates with an individual benefit in terms of survival,
2) a revision of the 6 months rule for abstinence, 3) an evaluation of an
accelerated procedure for LT on a case-by-case basis in a selected population of
patients with steroid-resistant alcoholic hepatitis and 4) a better prevention and
detection of alcohol relapse after LT.
n Key words: liver transplantation, alcoholic cirrhosis, alcoholic hepatitis, alcoholic liver disease
Alcool et maladie
alcoolique du foie
en France
y
HEPATO GASTRO
et Oncologie digestive
Tir
es a part : S. Dharancy
248
Pour citer cet article : Cannesson A, Lassailly G, Boleslawski E, Louvet A, Mathurin P, Pruvot FR,
Dharancy S. Evolution des pratiques et resultats factuels de la transplantation hepatique pour
maladie alcoolique du foie. Hepato Gastro 2012 ; 19 : 248-253. doi : 10.1684/hpg.2012.0717
HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 19 n8 4, avril 2012
doi: 10.1684/hpg.2012.0717
Le Comit
e français d’
education pour
la sante estime a 5 millions le nombre
de personnes ayant une consommation excessive d’alcool en France.
M^
eme si cette consommation diminue r
eguli
erement depuis plusieurs
d
ecennies, le niveau elev
e de consom-
mation par habitant reste une
caract
eristique française [1]. On
estime a 45 000 le nombre de d
ec
es
recens
es annuellement en France
li
es a une consommation excessive
d’alcool dont 8 a 10 000 lies a une
complication de la maladie alcoolique
du foie (MAF) [2]. L’OMS a emis des
recommandations pour une consommation a moindre risque. Elle ne doit
pas d
epasser deux unit
es d’alcool par
jour pour les femmes (14 unit
es/
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La maladie alcoolique de foie et transplantation hépatique
semaine) et trois unit
es d’alcool par jour pour les hommes
(21 unites/semaine) [3]. Un risque de MAF existe au-del
a de
ces seuils de consommation et le risque de cirrhose
augmente avec la quantit
e d’alcool consomm
ee [4].
La transplantation h
epatique (TH) est depuis 30 ans le
traitement de reference de l’insuffisance h
epatocellulaire
terminale de la cirrhose. La MAF est la principale cause de
cirrhose en France et repr
esentait la deuxi
eme indication de
TH en 2010 apres le carcinome h
epatocellulaire. Apr
es TH,
la MAF peut recidiver et la reprise de la consommation
alcoolique a de nombreuses cons
equences, tant a l’echelon
individuel (risque de dysfonctionnement du greffon) que
collectif (impact sur le don d’organe). Malgr
e ce risque, la
TH s’est positionn
ee au fil du temps comme une
therapeutique incontournable dans le traitement de la
MAF permettant une survie prolong
ee tout en ameliorant
la qualite de vie des patients.
‘‘
La maladie alcoolique du foie
est la principale cause de cirrhose
en France et représentait la deuxième indication
de transplantation hépatique en 2010
après le carcinome hépatocellulaire
’’
Évolution dans la prise en charge des
candidats à la transplantation hépatique
Depuis 2005, plus de 1 000 patients ont eu une TH en France
chaque annee. La MAF est une indication valid
ee de TH avec
une survie identique a celle des autres indications [5].
Cependant, cette indication a et
e longtemps controvers
ee
et souleve encore dans certains centres un d
ebat ethique.
M^eme si la premi
ere TH a et
e r
ealis
ee en 1963 [6], les
premieres survies prolong
ees de patients transplantes pour
MAF n’ont ete constat
ees qu’au d
ebut des ann
ees 1980
gr^ace, entre autres, a l’utilisation de la ciclosporine. Lors de la
premiere Conference de Consensus de Washington en 1983
^t dans
[7], il avait ete propos
e de transplanter les malades to
l’histoire de leur maladie. La principale indication etait alors
la cirrhose biliaire primitive chez l’adulte et l’atr
esie des voies
biliaire chez l’enfant. La cirrhose alcoolique etait consid
er
ee
comme une indication marginale en raison de son caract
ere
de « maladie auto-inflig
ee ». Elle repr
esentait alors moins
de 5 % des indications de TH. Les ann
ees 1990 ont et
e une
p
eriode charniere dans l’histoire de la TH avec une
amelioration consid
erable des taux de survie passant de
32 % a 1 an au d
ebut des ann
ees 1980 a 75 % en 1993
(donnees ELTR). La notion de p
enurie de greffons disponibles est apparue de façon parall
ele a l’
elargissement des
indications definies par la Conf
erence de Consensus de Paris
en 1993 [8]. Le jury d’experts d
efinissait alors trois categories
tait constitue
par les
d’indications. Le premier groupe e
maladies peu fr
equentes pour lesquelles l’indication de la TH
etait clairement valid
ee (cirrhose biliaire primitive, cholangite
scl
erosante primitive, atr
esie des voies biliaires, et hepatites
les
fulminantes). Le deuxi
eme groupe etait celui ou
indications de la TH etaient controversees (cirrhoses posth
epatitiques B et C). La cirrhose alcoolique, groupe le plus
vaste des h
epatopathies chroniques dans notre pays,
devenait une indication reconnue sous r
eserve de candidats
particuli
erement compliants avec maladie s
ev
ere malgr
e une
abstinence compl
ete prolong
ee. Enfin, le troisi
eme groupe
de maladies correspondait aux contre-indications a la TH
(essentiellement les cancers secondaires du foie).
‘‘
Les années 1990 ont été une période
charnière dans l’histoire de la TH avec
une amélioration considérable des taux de survie
passant de 32 % à 1 an au début des années
1980 à 75 % en 1993
’’
me Confe
rence de Consensus e
tait
En 2005, la troisie
consacr
ee a l’
elargissement des indications de TH [9]. Dix ans
apr
es la Conf
erence de Paris, la plupart des conclusions etait
confirmee et en dehors du carcinome h
epatocellulaire,
l’indication de la TH dans la cirrhose alcoolique restait limit
ee
aux cirrhoses compliqu
ees et s
ev
eres (Child-Pugh C). La TH
n’
etait pas recommand
ee chez les patients Child-Pugh B : en
effet, dans une etude de mod
elisation, la TH n’am
eliorait pas
la survie de malades de Child-Pugh B [10] et dans une etude
randomis
ee comparant la TH a une prise en charge medicale,
il existait une surmortalit
e par cancers de novo dans le groupe
^le sans b
transplant
e par rapport au groupe contro
enefice de
survie [11]. L’inscription sur liste d’attente des malades
atteints de cirrhose alcoolique etait conditionn
ee par : 1) un
bilan pr
e-greffe particuli
erement attentif a la recherche des
l
esions li
ees a la toxicit
e alcoolique extrah
epatique, tels les
cancers et les etats pr
ecancereux ORL, bronchiques,
œsophagiens, une pathologie cardiovasculaire et respiratoire, et 2) une prise en charge addictologique aussi pr
ecoce
que possible par une equipe sp
ecialis
ee.
‘‘
L’indication de la TH dans la cirrhose
alcoolique restait limitée aux cirrhoses
compliquées et sévères (Child-Pugh C)
’’
Problématique du sevrage
le
ment indispensable
Une p
eriode d’abstinence est un e
avant inscription sur liste mais sa dur
ee optimale reste
d
ebattue. « La r
egle des 6 mois » d’abstinence avant TH a
HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 19 n8 4, avril 2012
249
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ete communement retenue par la plupart des centres de
TH a travers le monde. Son int
er^
et etait double : eviter, d’une
part, la transplantation chez des malades qui amelioraient
leur fonction hepatocellulaire a distance du sevrage et
identifier, d’autre part, des malades ayant un risque faible de
rechute de MAF apr
es TH. Une m
eta-analyse a mis en
evidence une augmentation significative du risque de
rechute de la MAF apr
es TH pour un d
elai de sevrage
inferieur a 6 mois avec un risque relatif de 7,8 [12].
Cependant cette dur
ee de sevrage, suivie par 85 % des
equipes [13], ne semble plus ^
etre une r
egle intangible et ne
devrait plus ^etre consid
er
ee comme unique condition
d’acces a la TH. En effet « la r
egle des 6 mois » n’est pas
un critere suffisamment robuste pour pr
edire la rechute de la
consommation d’alcool apr
es TH. Dans une etude reprenant
l’ensemble des donn
ees de la litt
erature a ce sujet, les auteurs
ont montre que ce crit
ere etait un bon pr
erequis d’inclusion
mais un mauvais crit
ere d’exclusion : la probabilit
e de
rechuter dans une MAF apr
es la TH n’etait que de 41 % chez
les malades abstinents moins de 6 mois avant la TH [14].
‘‘
‘‘
Une période d’abstinence est un élément
indispensable avant inscription sur liste
mais sa durée optimale reste débattue
’’
‘‘
Les patients en procédure de TH accélérée
ont été sélectionnés sur leur motivation,
leur entourage familial et affectif structuré, mais
également sur l’absence de décompensation
antérieure de leur maladie alcoolique du foie
et de comorbidités significatives
La règle des 6 mois n’est pas un critère
suffisamment robuste pour prédire la
rechute de la consommation d’alcool après TH
’’
’’
Cas particulier de l’hépatite alcoolique
cortico-résistante
L’hepatite alcoolique (HA) dans sa forme s
ev
ere (definie par
un score de Maddrey > 32) est une des formes les plus
Probabilité de survive
1,000
413 HAA sévères
Lille model < 0,45
62 % des malades
0,750
p < 0,0001
0,500
38 % des malades
Lille model ≥ 0,45
0,250
valuation pr
L’e
ecoce initiale addictologique et la proc
edure
acc
el
er
ee de bilan pr
egreffe etaient egalement des
sp
ecificit
es de cette etude. Les patients s
electionn
es etaient
transplant
es quelques jours apr
es inscription sur liste en
raison du syst
eme d’allocation français des greffons fond
e
sur le score pronostique MELD. Comme attendu, les patients
cortico-r
esistants transplant
es avaient une survie sup
erieure
(77 % a 6 mois) aux patients cortico-r
esistants non
transplant
es (23 % p < 0,001), mais identique a celle des
patients cortico-sensibles (85 %, p = 0,33). Apr
es un recul
post-TH de 24 mois, seuls 3 patients avaient repris une
consommation d’alcool dont un de façon occasionnelle.
Cette etude pilote met en evidence que cette indication de
TH peut ^
etre retenue au cas par cas au sein d’une population
s
electionn
ee d’HA cortico-r
esistante et ne se fait pas au
d
epend des indications conventionnelles de TH [16].
Identifie 76% des décès à 6 mios
0,000
0,0
50,0
100,0
150,0
200,0
Jours
Figure 1. Survie des patients avec hepatite alcoolique severe selon le
mod
ele de Lille (adaptee de Louvet A et al.).
250
graves de MAF dont le traitement de r
ef
erence repose sur les
corticoı̈des. L’application d’un score simple (score de Lille)
incluant, entre autres, la variation du taux de bilirubine a7
jours de corticoth
erapie a permis, dans une s
erie de 269
malades, de pr
edire 80 % des d
ec
es [15]. Chez les non
repondeurs a la corticotherapie selon ce mod
ele (score
> 0,45), la probabilit
e de d
ec
es est de 76 % a 6 mois ; dans
ce contexte l’application de « la r
egle des 6 mois » recuse de
facto la grande majorit
e des patients a haut risque de d
ec
es
(figure 1). La conf
erence de consensus française sur les
extensions d’indication de TH avait sugg
er
e la r
ealisation
d’une etude pilote proposant la TH chez des patients
s
electionn
es atteint d’HA cortico-r
esistante avec un
sevrage r
ecent. Cette etude franco-belge multicentrique,
a la
r
ecemment publi
ee, a inclus 26 patients non repondeurs corticoth
erapie avec un score de Lille sup
erieur a 0,45 dans
un projet de TH en proc
edure acc
el
er
ee. Cette indication de
TH repr
esentait moins de 3 % des indications des diff
erents
centres. Les patients ont et
e s
electionn
es sur leur motivation,
leur entourage familial et affectif structur
e, mais egalement
sur l’absence de d
ecompensation ant
erieure de leur MAF et
de comorbidit
es significatives.
^ tre
La TH en procédure accélérée peut e
retenue au cas par cas au sein d’une
population sélectionnée d’hépatite alcoolique
cortico-résistante et ne se fait pas au dépend
des indications conventionnelles de TH
‘‘
HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 19 n8 4, avril 2012
’’
La maladie alcoolique de foie et transplantation hépatique
– un ^
age physiologique dissuasif.
patiques (+ 4,3 %) ont e
te
En France, 1 092 greffes he
r
ealisees en 2010. La principale indication etait le carcinome
h
epatocellulaire (24,5 % de l’activit
e), puis la cirrhose
alcoolique (23,9 %) (figure 2) et la cirrhose virale C
(10,3 %). La survie des patients transplant
es pour cirrhose
alcoolique entre 1993 et 2009 etait respectivement de
94 %, 86,6 %, 75 % et 59,5 % a 1 mois, 1 an, 5 ans et
10 ans apres TH (figure 3). La survie post-TH globale toutes
etiologies confondues etait de 92,6 %, 83,8 %, 72,3 % et
62,3 % aux m^emes temps. En France, la cirrhose alcoolique
est responsable de 10 000 d
ec
es/an et environ 250 malades
sont transplantes par an pour cette indication.
‘‘
En Europe, il y a eu environ 6 000 TH en 2010. La cirrhose
alcoolique etait la deuxi
eme indication de TH apr
es la
cirrhose virale (respectivement 33 % et 39 %). Une
augmentation significative de 8,3 % des causes li
ees a
l’alcool avec ou sans virus a et
e observ
ee entre 1996-2005
par rapport a la p
eriode 1988-1995 [18]. La survie des
patients transplant
es pour cirrhose alcoolique etait respectivement de 84 %, 79 %, 73 % et 59 % a 1, 3, 5 et 10 ans
apr
es TH. Celle-ci etait significativement plus elevee que
celle des causes virales. Apr
es TH, les principales causes de
es pour cirrhose alcoolique sont
d
ec
es des patients transplant
les infections (15,5 %), les cancers de novo (13,7 %) et les
complications cardiovasculaires (8 %) qui sont significativement plus fr
equents que pour les autres etiologies [18].
En France, 1 092 greffes hépatiques
(+ 4,3 %) ont été réalisées en 2010
’’
Rechute de la MAF après TH
4 % des patients ayant une cirrhose
Il n’y a donc que 3 a
alcoolique qui acc
edent a la TH.
‘‘ ’’
Il n’y a que 3 à 4 % des patients ayant
une cirrhose alcoolique qui accèdent
à la TH
Les raisons sont multiples :
aux soins ;
– un d’acces plus faible et retarde
– un deces rapide apr
es une premi
ere d
ecompensation [17] ;
^ l
– une alcoolo-dependance majeure non contro
ee et/ou
un deni de la maladie ;
– l’existence de contre-indications a la TH pour
comorbidites severes, ant
ec
edent de cancer ou cancer
evolutif ;
CHC : 24,5 %
35
% activité de TH
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Activité de transplantation hépatique
pour maladie alcoolique du foie
30
25
20
Apr
es TH pour MAF, il existe un risque de rechute de la
maladie alcoolique. Le terme de « r
ecidive » apparaı̂t
impropre car il sous-entend que le malade a et
e totalement
gu
eri par la TH alors que la « composante addictive » de la
maladie alcoolique reste un enjeu majeur dans le suivi des
patients. C’est dans ce domaine que les mentalit
es et la prise
en charge des patients ont le plus evolu
e ces derni
eres
ann
ees. En effet, il est maintenant admis que le spectre de la
rechute est un continuum h
et
erog
ene (d
ebutant par la
r
ealcoolisation ponctuelle en faible quantit
e ou « faux pas »,
qui aura peu d’impact sur la survie du greffon, et allant jusqu’
a
la rechute s
ev
ere massive) et non pas une probl
ematique
binaire (alcool + vs alcool –). La rechute ne doit donc plus ^
etre
v
ecue comme un echec de la TH, mais comme une
complication en tant que telle. Le diagnostic pr
ecoce de
rechute de la maladie alcoolique apr
es TH est souvent difficile
car culpabilisante pour le transplant
e. Il se fait sur un faisceau
d’arguments directs et indirects : interrogatoire du patient
et de ses proches, examens clinique et biologique. Cependant, il n’y a pas de consensus sur les modalit
es de d
epistage
et de prise en charge de la r
ecidive de la MAF apr
es TH.
MAF : 23,9 %
15
‘‘
‘‘
Après transplantation hépatique pour
maladie alcoolique du foie, il existe
un risque de rechute de la maladie alcoolique
10
5
0
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
Années
Figure 2. Evolution de l’activite de transplantation hepatique en
France pour cirrhose alcoolique et carcinome hepatocellulaire
(donn
ees : Agence de la Biomedecine).
’’
Le spectre de la rechute est un continuum
hétérogène débutant par la réalcoolisation
ponctuelle en faible quantité jusqu’à la rechute
sévère massive et non pas une problématique
binaire (alcool + vs alcool –)
HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 19 n8 4, avril 2012
’’
251
100%
90%
Taux de survive
80%
70%
60%
50%
40%
30%
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20%
10%
p : <0,001
0%
0
12
24
36
48
60
72
84
86
108
120
132
144
156
Temps (mois)
Autre cause
Cirrhose post-hépatite (B, C ou D)
Pathologie biliaire
Cirrhose alcoolique
Défaillance hépatique aiguë
Tumeur hépatique
Figure 3. Survie du receveur apres greffe hepatique selon la pathologie a la premiere inscription (1999-2009). Donnees de l’Agence de la
decine.
Biome
s
Le risque de rechute de la maladie alcoolique est tre
variable selon les etudes : de 7 a 95 % en raison de la
variabilite de la definition de la rechute, du manque d’outils
d’analyse et de la variabilit
e de la dur
ee du suivi post-TH. Le
risque de rechute massive est de l’ordre de 10 a 20 %. La
consommation en alcool apr
es TH existe aussi chez les
patients transplant
es pour d’autres causes et le pourcentage global de consommateurs n’est pas different de
celui des transplant
es pour MAF : 16,9 % pour MAF
100
TH pour MAF
90
TH autre causes
80
70
60
50
– l’^
age ;
– les troubles de l’humeur avec risque suicidaire ;
– les conditions sociales pr
ecaires ;
– les addictions multiples ;
– et le niveau d’alcoolo-d
ependance avec ant
ec
edents de
cure de sevrage.
40
30
20
10
0
Récidive de
Récidive de
Consommation Consommation
alcool à 6 mois alcool à 12 mois rare ou modérée
excessive
après TH
après TH
Figure 4. La consommation d’alcool occasionnelle et excessive chez
les transplant
es pour MAF et autres causes (adaptee de Pageaux GP
et al.).
252
versus 16,2 % pour les autres etiologies a 12 mois de la TH.
En revanche, le risque d’avoir une consommation massive
est significativement plus important chez les patients
transplant
es pour MAF (figure 4) [12]. Le risque de rechute
augmente avec le temps apr
es TH : 4 a5 %
a 6 mois, et 16
a 17 % apr
es 12 mois [12]. L’histoire naturelle de la
rechute n’est pas univoque. La plupart des etudes ne
mettent pas en evidence d’impact sur la survie post-TH a
court terme, ni sur la compliance au traitement immunosuppresseur. En revanche, il apparaı̂t clairement que la
rechute massive de la MAF diminue la survie des patients
transplant
es a long terme. Elle entraı̂ne un risque de
r
ecidive de la fibrose sur le greffon et est associee a un
d
efaut de compliance au traitement immunosuppresseur
avec le risque potentiel de rejets tardifs [19, 20]. Les
facteurs de risque de rechute les plus fr
equemment trouv
es
sont :
L’int
er^
et de ces facteurs n’est donc pas de s
electionner a
^t d’identifier les
priori les candidats a la TH mais pluto
patients a haut risque de r
ecidive afin de leur proposer une
prise en charge sp
ecifique pr
ecoce. La pr
evention de la
rechute n
ecessite une prise en charge multidisciplinaire qui
doit commencer id
ealement avant m^
eme la TH [5, 19, 21].
HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 19 n8 4, avril 2012
La maladie alcoolique de foie et transplantation hépatique
‘‘
‘‘
La rechute massive de la maladie
alcoolique du foie diminue la survie
des patients transplantés à long terme
Références
Les r
ef
erences importantes apparaissent en gras
’’
’’
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gouv.fr/IMG/pdf/rapport_etatsgeneraux.pdf.
2. Mathurin P. Alcohol and the liver. Gastroenterol Clin Biol 2009 ; 33 : 840-9.
La prévention de la rechute nécessite une
prise en charge multidisciplinaire qui doit
^ me la TH
commencer idéalement avant me
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http://www.who.int/substance_abuse/terminology/who_lexicon/en/.
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predictors of relapse after orthotopic liver transplantation for alcoholic
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7. National Institutes of Health Consensus Development Conference: liver
transplantation. R I Med J 1984 ; 67 : 73-6.
& La maladie alcoolique du foie est la principale cause
de cirrhose en France et repr
esente la deuxi
eme
indication de TH apr
es le carcinome h
epatocellulaire
mais il n’y a que 3 a 4 % des patients pr
esentant une
cirrhose alcoolique qui acc
edent a la TH.
8. Consensus Conference on Indications of Liver Transplantation. Paris, France,
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riode d’abstinence est un & Une pe
el
ement indispensable avant inscription sur liste mais « la r
egle des 6
mois » d’abstinence n’est pas un crit
ere suffisamment
robuste pour predire la rechute de la consommation
d’alcool apres TH.
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^tre a
l’avenir
Une indication de TH pourrait e
ponctuellement retenue au cas par cas en cas d’h
epatite
alcoolique cortico-r
esistante (score de Lille > 0,45). Les
criteres de selection potentiels seraient : une motivation
importante, un entourage familial et affectif structur
e,
l’absence d’episodes de d
ecompensations ant
erieurs et
de comorbidites significatives.
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treated with steroids. Hepatology 2007 ; 45 : 1348-54.
Le spectre de la rechute apr
es greffe est un
continuum heterog
ene d
ebutant par la r
ealcoolisation
ponctuelle en faible quantit
e, qui aura peu d’impact sur
la survie du patient et du greffon, jusqu’
a une
consommation massive qui diminue significativement
la survie des patients a long terme.
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& Une minorit
e de patients pr
esente une rechute
massive de la maladie alcoolique du foie apr
es TH. La
prevention de cette rechute n
ecessite une prise en
charge specialisee addictologique pr
ecoce qui doit
commencer idealement avant m^
eme la TH.
re
^ts : aucun
Conflits d’inte
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HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 19 n8 4, avril 2012
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