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Réponses.
Examen clé devant une dysphagie.
L'endoscopie digestive haute est l’examen para
clinique de première intention devant toute dysphagie
aiguë. En effet, les sténoses œsophagiennes constituent
l’étiologie la plus fréquente. Elles peuvent être d’origine
tumorale (primitive ou secondaire), ou secondaire à une
œsophagite peptique, post-radique ou caustique. Une
œsophagite infectieuse ou médicamenteuse est
s’accompagne souvent d'une douleur à la déglutition
(odynophagie). L'endoscopie œsophagienne ne constitue
pas un bon examen pour affirmer le diagnostic d'un
trouble moteur œsophagien, primitif ou secondaire. Des
troubles fonctionnels sans anomalie de la motricité sont
également possibles. Une suspicion de corps étranger
œsophagien motive la réalisation sans délai d’une
gastroscopie. Une lésion identifiée guide le cas échéant la
réalisation de biopsies. L’absence de lésion
macroscopique justifie également la réalisation de
biopsies étagées de la muqueuse œsophagienne afin de ne
pas méconnaître une œsophagite à éosinophiles. La
manométrie œsophagienne, le transit œsophagien et le
scanner cervico-thoracique sont des examens de seconde
intention, guidés par le contexte clinique et les résultats
endoscopiques.
Évocation d’une œsophagite à éosinophiles.
Les « guidelines » diagnostiques comportent : présence
de signes cliniques de dysfonction œsophagienne quels
qu'ils soient, échec d'un traitement par inhibiteur de la
pompe à protons à une posologie optimale de 2 mg/kg,
infiltration éosinophilique de la muqueuse œsophagienne
dépassant 15 éléments par champ à fort grossissement (x
400) et absence de reflux gastro-œsophagien
pathologique documentée à la pH métrie des 24 heures.
Un infiltrat éosinophilique de la muqueuse
œsophagienne.
La muqueuse malpighienne œsophagienne est
dépourvue à l'état normal de polynucléaires éosinophiles.
Une infiltration éosinophilique est possible dans de
nombreuses affections. En cas de faible densité (< 10
éléments par champ à fort grossissement), il convient
d'évoquer un reflux gastro-œsophagien, une infection
(Candida, Herpès virus), une allergie médicamenteuse, et
plus rarement une gastroentérite à éosinophiles, une
localisation œsophagienne d'une maladie de Crohn, une
connectivite et le syndrome hyperéosinophilique. Un
infiltrat de plus de 15 éléments par champ à fort
grossissement dans un contexte clinico-endosopique
évocateur est très en faveur d'une œsophagite à
éosinophiles.
L’œsophagite à éosinophiles, une affection
concernant les médecins militaires.
Affectant préférentiellement les hommes (66 % chez
les enfants, 76 % chez les adultes), jeunes (âge moyen 8
ans chez les enfants, 38 ans chez les adultes), sa rencontre
en milieu médico-militaire est naturellement inéluctable,
d'autant que son incidence croît parallèlement avec les
allergies et que sa prévalence augmente dans les pays
industrialisés. La triade « allergie, homme jeune et
impaction de corps étrangers » est très évocatrice du
diagnostic.
Décision médico-militaire d'aptitude.
L'œsophagite à éosinophiles est une affection de
l'œsophage non spécifiquement listée dans le titre V–
Gastro-entérologie de l'instruction N° 2100/DEF/
DCCSA/AST/AME du 1er octobre 2003 (modifiée par le
1er modificatif N° 3434/DEF/DCSSA/AST/AME du
18 novembre 2004) relative à la détermination médicale à
servir. Le pronostic est habituellement bon en dehors des
formes compliquées, dont des sténoses nécessitant des
dilatations répétées et des évolutions récidivantes
justifiant des traitements prolongés. Les modalités
évolutives et les complications sont donc les éléments
déterminants pour le spécialiste hospitalier pour établir
l'aptitude et légitiment un classement sur le sigle G avec
des coefficients variant de 2 à 5, par analogie avec les
coefficients appliqués au RGO (2 à 5 selon le
retentissement fonctionnel et les complications), aux
troubles moteurs de l'œsophage (2 à 6 suivant le type et
son retentissement) et aux sténoses non tumorales de
l'œsophage (3 à 5).
Discussion.
Longtemps considérée comme une entité rare,
l'œsophagite à éosinophiles est devenue une maladie
émergente dont font état de nombreuses et récentes
publications (1-5). Elle connaît en effet un regain d'intérêt
en raison d’une augmentation de sa prévalence dans les
pays industrialisés (0,1 % en 2001 à 1,9 % en 2005 aux
États-Unis), ainsi que de son incidence qui croît
parallèlement aux maladies allergiques (1-5). En 2006,
un groupe international d'experts la définissait comme
« une infiltration dense de la muqueuse de l’œsophage par
des granulocytes éosinophiles, associée à des symptômes
œsophagiens et résistante aux inhibiteurs de la pompe à
protons » (3). Elle affecte principalement les enfants et les
adultes jeunes de sexe masculin (sex-ratio masculin à 3,
âge moyen adulte 38 ans). La physiopathologie, mal
connue, fait état d'une réponse immunitaire à des
allergènes exogènes, peut être alimentaires (3, 4). Il en
résulte une infiltration de la muqueuse œsophagienne par
des cellules exprimant l’interleukine 5 (IL-5) et une
hypersécrétion de tumor factor necrosis alpha (TNF α)
par les cellules de l’épithélium pavimenteux œsophagien
(6). Ce mécanisme, associé à la présence accrue de
cellules T et de mastocytes (3, 6), serait en faveur d’une
réaction allergique de type TH2 (4). Le diagnostic est
évoqué devant la triade clinique « adulte jeune, terrain
allergique et épisodes d’impaction alimentaire » associée
souvent à une dysphagie chronique intermittente (3).
La dysphagie, bien que prolongée, ne s'accompagne
habituellement pas d'un retentissement sur l'état
général (1). Souvent révélée lors de l'ingestion d'aliments
solides, elle peut occasionner une simple gêne jusqu'à une
d. billot