L`objectif principal de cette étude est d`analyser l`impact

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EFFETS MACROECONOMIQUES DE LA POLITIQUE
FISCALE EN COTE D’IVOIRE
Yaya KEHO
Chercheur CAPEC
BUPED N° 03/2010
.
Ce numéro de BUPED est tiré de Politique Economique et Développement N°03/2010 de la CAPEC
CELLULE D’ANALYSE DE POLITIQUES
ECONOMIQUES DU CIRES
B U L L E T I N D E P O L I T I Q U E E C O N O M I Q U E E T D E V E L O P P E M E N T
( B U P E D )
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Résumé
Les recettes fiscales constituent la principale source des recettes de l’Etat. Les défis actuels auxquels
fait face la Côte d’Ivoire nécessiteront une augmentation soutenue de ces recettes. La politique
fiscale qui organise le système des prélèvements fiscaux pourrait cependant générer des distorsions
économiques et nuire à la croissance économique et aux recettes de l’Etat. L’objectif de cette étude
est d’analyser les effets des prélèvements fiscaux sur l’activité économique en Côte d’Ivoire. Pour ce
faire l’étude applique les tests de cointégration et de causalité sur des données annuelles couvrant
la période de 1960 à 2006. Les résultats révèlent l’existence de relations de long terme entre les
variables fiscales et le PIB, la consommation et l’investissement. La fiscalité ne freine pas la
croissance à long terme et les recettes fiscales sont positivement liées au PIB et à ses composants. A
court terme, cependant, nous trouvons que certains types d’impôts réduisent la croissance
économique. Les résultats suggèrent qu’il existe un espace de recettes fiscales non encore collectées.
Pour accroître les recettes fiscales et le taux de pression fiscale sans compromettre la croissance à
long terme, l’Etat doit améliorer le taux de recouvrement des impôts et chercher à élargir la base
fiscale tout en veillant à leur utilisation efficiente dans l’économie.
Mots clés: te d’Ivoire, Cointégration, Causalité, Croissance, Recettes fiscales.
JEL classification: C22, E62, H30
Abstract
Taxes represent the main state income source. The current challenge faces Côte d’Ivoire will
require a sustainable increase in those resources. The fiscal policy which organizes the taxes
collecting system could however generate economic distortions and reduce economic growth and
state resources. The objective of this study is to analyse the effects of taxes on economic activity in
Cote d’Ivoire. For that purpose the study makes use of cointegration and causality tests on annual
data covering the period 1960 to 2006. The results indicate the existence of long-term relationships
between taxes and GDP, consumption and investment. Taxes do not impede growth in the long-run
and tax revenues are positively related to GDP and its components. In short-run, however, we find
that some tax components are growth-retarding. The findings suggest that there is a space of
potential resources that is not being collected by the tax system. To increase tax revenues and the
overall tax burden without hurting the long-term economic growth, government should look for
ways to improve the collecting system and broaden the tax base while ensuring their efficient use in
the economy.
Key words: Cote d’Ivoire, Cointegration, Causality, Growth, Tax revenues.
JEL classification: C22, E62, H30
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1. Introduction
La légitimité de l’intervention de l’Etat dans
l’économie a longtemps fait l’objet de débats
intenses dans l’histoire de la pensée
économique. Les principaux courants de
pensée débattaient sans porter vraiment
une attention particulière à la fonctionnalité
de certaines dépenses publiques. D’un côté,
les néoclassiques voyaient une perte
d’efficacité dans l’intervention publique qui
se manifeste à travers des effets d’éviction,
alors que, de l’autre, les keynésiens,
soutenaient l’idée d’un effet multiplicateur
induit par l’interventionnisme étatique.
Cependant, ces deux courants de pensées
reconnaissent qu’une taille minimale de
l’Etat est nécessaire pour le développement
économique et social. En effet, l’existence
des biens et services publics qui ne peuvent
être produits par le secteur privé et qui sont
pourtant indispensables à l’activité
économique amène l’Etat à jouer un rôle
important dans le processus de
développement. Par exemple, il lui
appartient de financer les infrastructures
économiques, éducatives et sanitaires,
d’assurer la curité et le maintien de
l’ordre et la justice. Cette vision
« minimaliste » suppose que l’Etat doit
disposer des ressources nécessaires
pouvant lui permettre de conduire sa
politique de façon durable.
Dans de nombreux pays, la politique fiscale
constitue le pilier essentiel des
interventions de l’Etat dans l’économie. En
Côte d’Ivoire les recettes fiscales constituent
la principale ressource de l’Etat avec une
contribution de plus de 80% aux recettes
totales. L’Etat peut s’en servir pour réguler
l’activité économique en modifiant l’effort
fiscal demandé aux contribuables. Depuis
1960 la Côte d’ivoire a mis en œuvre une
série de réformes fiscales qui se sont
intensifiées depuis 2000. Ces reformes
fiscales visent explicitement à élargir la base
fiscale et à modifier la structure fiscale dans
le sens d’une mobilisation plus accrue des
ressources. La crise de septembre de 2002 a
affecté les performances du dispositif fiscal
et resserré les contraintes budgétaires en
faisant naître de nouvelles préoccupations
liées à la sortie de crise. Non seulement les
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conditions de vie des populations se sont
dégradées, les infrastructures économiques
et la croissance économique s’en sont
trouvées également affectées1. Pour
relancer l’économie et assurer les
conditions d’un développement durable, le
pays doit intervenir massivement dans
l’économie en assurant la réhabilitation des
infrastructures économiques et sociales.
Cette intervention nécessitera une
mobilisation plus accrue des ressources
fiscales. Cependant, la mobilisation des
ressources publiques est à l’origine de coûts
économiques et sociaux. En effet, la théorie
économique sur la taxation indique qu’une
fiscalité pesante entraîne des distorsions
aussi bien sur les comportements de
consommation que sur ceux de production
des agents économiques. Elle peut
engendrer également une perte de revenus
pour l’Etat en faisant naître des
1 Les données issues des différentes enquêtes
sur le niveau de vie des ménages indiquent une
progression de la pauvreté. L’incidence de la
pauvreté est passée de 32,3% en 1993 à 36,8%
en 1995, 33,6% en 1998, 38,4% en 2002 pour
atteindre 48,9% en 2008 (INS, 2008). Sur le plan
économique, le taux de croissance est passé de
6,1% en moyenne sur la période 1995-1998 à
0,15% en moyenne sur la période 2002-2006
(WDI, 2008).
comportements de fraude ou d’évasion
fiscale. La situation économique actuelle
impose que la politique fiscale soit menée
de sorte à ne pas pénaliser la croissance
économique et affecter le bien-être des
populations.
Au regard des défis d’une mobilisation plus
importante des ressources fiscales, il
convient d’analyser les effets probables de
la fiscalité sur l’économie afin d’orienter la
politique fiscale. Comment générer des
recettes fiscales importantes sans toutefois
compromettre le potentiel de croissance à
long terme de l’économie? La politique
fiscale peut-elle servir d’instrument de pol
La présente étude apporte une contribution
empirique à l’analyse des effets
macroéconomiques des prélèvements
fiscaux en Côte d’Ivoire. De façon spécifique,
il s’agit d’évaluer l’impact des différents
types d’impôts sur différents agrégats
macroéconomiques dont l’investissement
privé, la consommation privée et le Produit
Intérieur Brut (PIB). Ensuite, l’étude
examine les relations de causalité entre ces
agrégats et la fiscalité. Les résultats
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permettront ainsi de déterminer les types
d’impôts qui sont porteurs de croissance et
ceux qui ne le sont pas. L’analyse empirique
utilise les tests de cointégration et de
causalité à partir des données couvrant la
période allant de 1960 à 2006. La suite de
l’étude est structurée de la façon suivante.
La section 2 analyse la structure fiscale. La
section 3 fait une revue de littérature
théorique et empirique sur la relation entre
la fiscalité et la croissance économique. La
section 4 présente la méthodologie
économétrique ainsi que les sources des
données statistiques utilisées. La section 5
discute les résultats des estimations. La
section 6 conclut et propose des
recommandations de politique économique.
2. Analyse des recettes
fiscales
La présente section fait une analyse des
caractéristiques du système fiscal ivoirien.
Cette analyse s’articulera autour de deux
points. Dans un premier temps, nous
analysons l’évolution de l’effort fiscal à
travers le concept de taux de pression
fiscale. Deux caractéristiques du
prélèvement fiscal, son niveau et son degré
d’instabilité, qui déterminent sa capacité à
financer de façon durable ses dépenses
publiques, seront analysées. Dans un
deuxième temps, nous examinons
l’évolution de la structure des recettes
fiscales.
2.1 La pression fiscale
L’évolution du ratio des taxes au PIB est
représentée dans le graphique 1. Deux
caractéristiques essentielles du prélèvement
fiscal se dégagent de ce graphique.
Premièrement, il apparaît que le taux de
pression fiscale globale est sujet à
d’importantes variations dans le temps,
variant entre 14% et 23%. Cette variation
traduit l’instabilité des recettes fiscales et
rend, par ailleurs, difficile leur prévision.
Toutefois, ces variations se révèlent
intéressantes pour mener des analyses
économétriques, car on peut
raisonnablement supposer que les effets de
ces changements seront perceptibles. Le
deuxième fait important à souligner est la
baisse du taux de pression fiscale à partir de
1987. En effet, le taux de pression fiscale
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