RÉSUMÉ L’objectif de cette thèse professionnelle est de présenter la technique de communication appelée « placement de produits » de la manière la plus exhaustive possible ainsi que d’étudier son efficacité en terme de mémorisation des produits placés. A cette fin, des recherches ont été menées sur les particularités caractérisant cette forme de communication ainsi que sur le comportement de consommation. Ces deux notions ont été mises en relation afin de cerner les besoins de cette thèse. Une étude qualitative s’est révélée être nécessaire. Elle a été menée par le biais de trois enquêtes. La première dans le but de connaître l’opinion et l’attitude des consommateurs français à l’égard de cette pratique. Tandis que, les deux autres ont été ciblées sur l’attention et la mémorisation des différents annonceurs présents dans les films. Mots-clés : placement de produits, cinéma, publicité, mémorisation, attitudes. SUMMARY The goal of this thesis is to present a communication technique called "product placement" as thoroughly as possible and to study its efficiency in terms of memorising 'placed' products. To this end, researches have been conducted on characteristic features of this form of communication and on consumer behaviour. These two concepts have been linked to identify the needs of this dissertation. A qualitative study was found to be necessary. It was conducted through three surveys. The first, to know the views and attitudes of French consumers with regard to this practice. While, the other two were targeted on attention and memorising of different advertisers present in movies. Keywords: product placement, movies, advertising, memorization, attitudes. SOMMAIRE INTRODUCTION ............................................................................................................. p4 PARTIE I : LES SPÉCIFICITÉS DU PLACEMENT DE PRODUITS ....................... p8 Chapitre 1 : Des origines de la pratique à aujourd’hui ......................................................... p8 Section 1 : Publicité : les premiers pas au cinéma ............................................................... p8 Section 2 : Evolution des rapports entre annonceur et producteur ....................................... p10 Section 3 : Le placement de produits d’aujourd’hui : les différentes formes ...................... p11 Chapitre 2 : Les motivations d’utilisation du placement de produit ..................................... p15 Section 1 : Annonceurs : une solution alternative nécessaire ............................................. p13 Section 2 : Producteurs : Cinéma et publicité, une association utile .................................... pxx Chapitre 3 : Les limites du placement de produits ............................................................... p29 Section 1 : Un investissement difficile à contrôler .............................................................. p28 Section 2 : Un impact complexe à mesurer .......................................................................... p29 Section 3 : Risque de décrédibilisassions du film ............................................................... p29 Section 4 : Le cadre juridique : frein au développement du placement de produits ............. p30 PARTIE II : L’IMPACT DE LA COMMUNICATION SUR LE CONSOMMATEUR .. p34 Chapitre 1: Les caractéristiques de la consommation ......................................................... p34 Section 1 : Le processus de l’acte d’achat ............................................................................ p34 Section 2 : Les facteurs d’influence du comportement du consommateur .......................... p34 Section 3 : Le mécanisme de la perception des informations .............................................. p41 Chapitre 2 : La mémorisation ............................................................................................... p44 Section 1 : Le fonctionnement de la mémoire ...................................................................... p43 Section 2 : Le stockage de l’information ............................................................................. p46 Section 3 : L’extraction des informations ............................................................................ p50 Section 4 : Les concepts de mémoire implicite et explicite ................................................. p52 PARTIE III : ETUDES DE L’IMPACT DU PLACEMENT DE PRODUITS ............ p55 Chapitre 1 : Etude qualitative sur la sensibilité des spectateurs au placement de produits .. p55 Section 1 : Elaboration du questionnaire .............................................................................. p54 Section 2 : Administration du questionnaire ........................................................................ p55 Section 3 : Résultats et analyse du questionnaire ................................................................. p58 Chapitre 2 : Expérimentation de la mémorisation de placements de produits .................... p65 Section 1 : Méthodologie de l’étude .................................................................................... p64 Section 2 : Analyse des réponses ......................................................................................... p66 CONCLUSION GÉNÉRALE ............................................................................................ p74 BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................. ANNEXES ........................................................................................................................... INTRODUCTION INTRODUCTION « Le succès n’a pas de recette. On ne sort pas forcément gagnant d’une entreprise en dosant un tiers de sexe, un tiers de violence, un tiers de rires et de larmes. Un film salué par la critique ne devient pas forcément un succès au box-office. Je m’efforce donc de suivre mon goût personnel ou mon instinct. » OTTO PREMINGER1 « (…) SUZIE : Pour le traiteur, j’ai pensé qu’on pourrait prendre Lenôtre. GEORGETTE : Pourquoi pas ? Et c’est qui ? SUZIE : Comment ? GEORGETTE : Votre traiteur, c’est qui ? SUZIE : C’est Lenôtre. Mais si vous préférez le vôtre… GEORGETTE : Non, on n’a qu’à prendre le vôtre. SUZIE : Parfait. GEORGETTE : Et c’est qui ? SUZIE (après un temps de consternation) : Et bien, c’est Lenôtre. GEORGETTE : Ah, j’ai compris, vous voulez pas le dire ? » Voici un exemple particulièrement réussi d’intégration d’un nom de marque au sein d’un scénario cinématographique. 7,5 millions de spectateurs ont pu écouter le jeu de mot et le quiproquo établis à propos de la marque « Lenôtre » lors de la sortie du film La vérité si je mens 2 de Thomas Gilou, en 2001. C’est ce que l’on appelle le « placement de produits » ou « placement de marques », de l’anglais « product placement ». L’expression désigne le fait de « placer » ou plutôt, « intégrer » un produit ou une marque, dans une ou plusieurs scènes d’un film ou d’une série télévisée, 1 essentiellement, à des fins promotionnelles et contre rémunération. Otto Ludwig Preminger était un réalisateur américain d'origine autrichienne. J-M Lehu, La publicté est dans le film, Paris, Editions d’Organisation, 2006, p7. 4 INTRODUCTION Mais nous pouvons également rencontrer ces insertions commerciales dans des chansons, des romans, des pièces de théâtre ou plus récemment, dans les jeux vidéo. Tous ces placements de produits dans le monde du spectacle et du divertissement forment ce que l’on appelle le « branded entertainment », c'est-à-dire, littéralement, du « divertissement de/avec marque ». Néanmoins, cette étude se concentrera sur le cas le plus répandu du placement de produit ou de marque, dans les films. Si les deux termes, placements de produits ou placements de marques, sont souvent employés de manière synonyme, le placement de marques est une notion plus restrictive puisqu’elle désigne uniquement le fait de faire apparaître le nom de la marque. Tandis que le placement de produits, a une signification plus large et comprend tous les placements possibles : les marques, les produits, les organisations, les lieux, les appellations… C’est à la notion de placement de produits qu’il sera fait référence au cours de cette étude. Cette technique ressemble en certains points à l’achat d’espace publicitaire. Dans sa forme la moins élaborée, elle permet juste à une marque ou à un produit d’apparaître à l’écran. Dans sa forme la plus performante, elle sera si bien intégrée dans le scénario que sa présence semblera indispensable. Ainsi, tant dans la version originale du film The Italian Job (L’or se barre), réalisée par Peter Collinson en 1969, que dans le remake de F. Gary Gray en 2003 (Braquage à l’italienne), l’utilisation d’automobiles « Mini », pour leur compacité et leur mobilité, semble tout à fait naturelle, car elles sont choisies par les voleurs pour des caractéristiques techniques adaptées à leur plan. Malgré la large utilisation de cette pratique, très peu d’annonceurs ont tenté d’évaluer l’impact de leur présence dans les différents films. La difficulté de mise en œuvre d’une étude d’efficacité ainsi que le coût relativement faible, d’un placement moyen, justifient le peu d’intérêt que les marques portent à de telles études. Les agences spécialisées dans le placement de produits fondent leur tarification sur des critères potentiels d’efficacité : le succès prévu du film et l’importance de la place accordée à la marque au sein de celui-ci. En outre, peu de travaux théoriques ont été développés jusqu’à présent sur le fonctionnement de ce type de communication. La plupart d’entre eux se limite à l’étude de l’impact d’une variable (présence d’un placement, proéminence du placement…) Très peu considèrent le placement de produits fondamentalement différent d’un message publicitaire traditionnel. 5 INTRODUCTION L’objectif de cette thèse est par conséquent de proposer une explication de l’efficacité du placement de produits dans les films, ainsi que de développer une méthodologie pour en tester l’influence sur les spectateurs du film. Le fait de placer son nom ou ses produits au sein d’une œuvre cinématographique, permet à l’annonceur de capter l’attention du consommateur et d’éviter les comportements de zapping, cela l’autorise également à se fondre dans un environnement non publicitaire en mettant en scène sa marque ou son produit de manière imprévue. La volonté commerciale associée à la présence de la marque peut être perçue par le spectateur, mais elle n’est pas clairement mise en évidence comme dans le cas de techniques de communication plus classiques, telles que les messages publicitaires ou même le parrainage, par exemple. On parle alors de frontières « troubles »2 entre le message et le support qui le contient, ou même de « communication hybride » 3 (S.K. Balasubramanian) pour désigner ce type de message persuasif qui ne donnent pas l’impression de relever du domaine commercial. L’efficacité de cet outil de communication devrait alors ne plus dépendre de la « réflexion » du consommateur sur les arguments du message publicitaire mais simplement de la qualité de l’exposition de celui-ci à la marque (ou au produit). Il s’agit de comprendre, tout d’abord, dans quelle mesure le spectateur peut faire attention aux placements présents et s’il en gardera une trace à la fin de l’expérience de visualisation. Cette étude se centre ainsi sur la mémorisation des produits placés (au sens large du terme). La méthodologie, afin de répondre à ces interrogations, a consisté dans un premier temps à collecter des informations existantes sur le placement de produits, dans le but de comprendre dans ses moindres rouages cette forme de communication. Ensuite, une application pratique a été mise en place par le biais de trois enquêtes prenant la forme de questionnaires à choix multiples. Le premier, permet de comprendre l’image qu’ont les spectateurs du placement de produits. Les deux autres, ciblés sur leur attention et mémorisation aux différents annonceurs présents dans les films visionnés, juste avant l’administration des questionnaires. A cet effet, deux films ont été sélectionnés, l’un avec une multitude de marques et le second, avec une présence moyenne en termes de quantités d’annonceurs. 2 http://zestedesign.wordpress.com, Alexandre Forest Boucher, L’histoire du placement de produit comme moyen de communication, 26 septembre 2006. 3 Ibid. 6 INTRODUCTION La problématique de cette thèse pourrait alors s’énoncer de la manière suivante : quel est l’impact sur la mémorisation et le comportement des spectateurs exposés à un placement de produits ? Cette étude est structurée en trois grandes parties, permettant d’exposer en premier lieu les éléments théoriques sur la notion de placements de produits, ceux du comportement de consommation et enfin, la troisième partie présente l’application pratique des différentes théories. La première partie présente la technique du placement de produits, en identifiant ses origines et en la replaçant dans son environnement d’évolution. Elle présente également les atouts et les limites pour les annonceurs et les producteurs. Dans un second temps, le comportement du consommateur est développé ainsi que le mécanisme de la mémorisation. Enfin, la troisième partie vise à exposer la méthodologie mise en œuvre, les résultats obtenus ainsi que leur mise en perspective. 7 Chapitre 1 • Des origines de la pratique à aujourd’hui PARTIE I PARTIE I : LES SPÉCIFICITÉS DU PLACEMENT DE PRODUITS « Croyez-moi, si vous enfoncez de la publicité au fond de leur gorge et que vous emballiez leurs yeux et leurs oreilles avec, vous allez générer un ressentiment qui finira par condamner votre business. » CARL LAEMMLE, Président d’Universal Studios4 Chapitre 1 : Des origines de la pratique à aujourd’hui Contrairement à ce que l’on peut penser, les origines du placement de produits, ne se trouvent pas dans les films à gros budget américains. Autrefois, les comédiens de cabarets et de spectacles en tout genre utilisaient les placements de produits pour des marques qui, elles aussi, les employaient parfois comme porteparole publicitaires. Pour ne citer qu’un exemple resté célèbre, Sarah Bernhardt, comédienne de théâtre française, montait sur scène poudrée par « La Diaphane ». Jules Chéret peignit la comédienne pour les besoins d’une affiche publicitaire de la marque, dans les années 1890. Pour rester dans le domaine artistique et plus précisément celui de la peinture, on peut citer le célèbre tableau d’Edouard Manet, intitulé Un Bar aux Folies-Bergère. Au-delà du placement du nom de marque de l’établissement dans le titre de l’œuvre, de chaque côté du tableau se trouve une bouteille de bière. Bien qu’elles soient posées de profil, l’étiquette permet d’identifier le triangle rouge de la bière « Bass ». Edouard Manet, Un bar aux Folies-Bergère (1881-1882) 4 Message à destination des autres producteurs de cinéma et à propos de ce qu’il qualifiait en 1931 de « prostitution à l’écran ». K. Segrave, Product Placement in Hollywood films : a history, McFarland & Co Inc, 2004, p41. 8 Chapitre 1 • Des origines de la pratique à aujourd’hui PARTIE I Bien évidemment, le peintre n’a pas trouvé une source de financement, mais il aspirait à un réalisme, qu’on lui reconnaît aujourd’hui encore. Pour exister, une marque a besoin d’être connue. Pas nécessairement par tous, mais en tout cas par sa cible. Et pour cela, elle doit savoir se placer dans tous les endroits stratégiques lui permettant de rencontrer ce public potentiel. Le cinéma fut rapidement perçu comme un vecteur à très fort potentiel Section 1 • Publicité : les premiers pas au cinéma Les premiers cas de placement de produits remontent à l’époque des frères Lumières, à la demande de François-Henri Lavachy-Clarke, représentant de « Lever Brothers » (Fabricant britannique de savon) en France, en 1896.5 Les studios ont compris très tôt les avantages qu’ils pourraient obtenir à se rapprocher des marques. Dès 1910, les célèbres « Ford modèle T » font partie des comédies de Mack Sennette6. Au départ il ne s’agissait pas de placement de nom de marques, mais plutôt de leurs produits. Pour la simple raison que les annonceurs ne payaient pas ces parutions, c’était davantage une occasion pour les producteurs de bénéficier de produits gratuitement, la contrepartie étant de les voir apparaître à l’écran. Toute l’histoire du cinéma est jalonnée d’exemples représentatifs. En 1916, le studio LKO/Universal, produisait un film muet à l’intitulé explicite : She Wanted a Ford. En 1934, une scène de L’ennemi public n°1, de W.S. Van Dyke, présentait des enseignes de « CocaCola » et de « Chevrolet », parfaitement identifiables. En 1964, dans Docteur Folamour, Stanley Kubrick utilise les propos de l’ambassadeur russe pour présenter le journal « The New York Times » comme la référence la plus fiable de la presse7. Le pouvoir d’interprétation et d’évocation du cinéma est très important. D’ailleurs dans le film Superman II (1980) de Richarg Lester, le personnage de Lois Lane fume des 5 J-M Lehu, La publicté est dans le film, Paris, Editions d’Organisation, 2006, p28. Mack Sennette, fut de 1911 à 1950, l'un des réalisateurs les plus importants du cinéma muet américain. www.universalis.fr 7 www.vivelapub.fr, Quand la publicité rencontre le cinéma, novembre 2010. 6 9 Chapitre 1 • Des origines de la pratique à aujourd’hui PARTIE I « Marlboro » pendant que dans l’une des scènes de lutte, Superman est projeté sur le flan d’un camion aux couleurs de la marque situé en plein écran. 8 Compte tenu du public visé par le film, l’association d’une marque de cigarette avec l’univers héroïque de Superman était très intéressante pour l’annonceur, dans le but de déculpabiliser la consommation de son produit. La marque reconnut avoir payé la somme de 42 000 dollars contre 22 placements tout au long du film.9 Il a fallut attendre 1982, pour prendre réellement conscience de l’impact que le placement de produits peut engendrer. Lorsque Hershey’s décide de placer ses bonbons « Reese’s Pieces » lors de la diffusion du film E.T. Ce placement de produit amena une augmentation des ventes de 65 %, et ce, trois mois après la parution du film 10 . Ceci a été le placement qui a propulsé cette pratique sur le devant de la scène. C’est également à ce moment, que le grand public est informé de cette pratique, notamment par les articles de presse. De la fin des années 80 au début des années 90, l’industrie du film a reçu des critiques virulentes concernant cette pratique jugée décevante et n’étant pas dans l’intérêt du public.11 En 1985, dans le film Les Goonies de Richard Donner, l’acteur Jonathan Ke Quan, portait des chaussures « Nike », ce placement a fortement contribué à en faire le choix incontournable des adolescents, une cible très sensible aux placements.12 Un autre placement intéressant, dans le film Independence Day (1996) de Roland Emmerich, dans l’une des scènes, Jeff Goldblum montre l’exemple en insistant sur le rôle du recyclage à l’aide d’une canette de « Coca-Cola ». L’action est très positive pour l’image de la marque. Tous ces exemples illustrent la présence de placements depuis « toujours » dans les films, mais pour des raisons parfois très différentes. Il n’existe pas un placement de produit, mais de multiples possibilités de mises en scène dans des buts multiples. 8 Ibid. www.01men.com, Amélie Charnay, Quand les grandes marques s’invitent dans les films, 23 juin 2006. 10 http://fr.jurispedia.org, Placement de produit au cinéma, 5 avril 2011. 11 Ibid. 12 www.cccam-exchange.com, 6 février 2011. 9 10 Chapitre 1 • Des origines de la pratique à aujourd’hui PARTIE I Section 2 • Evolution des rapports entre annonceur et producteur Comme nous l’avons vu précédemment, nous sommes devant un marché très concurrentiel. Très rapidement de nombreuses agences ont exploité ce marché de niche, en se spécialisant dans le placement de produits. Aujourd’hui, il n’y a pas de placements de produits sans un contrat comprenant des clauses bien précises. Si les premiers accords comprenaient uniquement le tarif et le temps de visibilité du produit ou de la marque, très vite les négociations ont conduit à leur affinement. En 1988 la « clause du bon » a été créée13, elle précise que le produit doit être utilisé par un personnage « gentil ». Il est également courant de faire des appels d’offres. Dans le film Wall Street (1987), les producteurs ont mis en concurrence deux magazines, « Forbes » et « Fortune ». Ce dernier a bénéficié d’un placement oral et visuel puisqu’il a été cité par le personnage principal comme étant la « Bible de Wall Street »14. L’évolution se trouve donc dans une participation quasi permanente des annonceurs, qui de ce fait, bénéficient de plus de contrôle sur le scénario afin de mettre en avant leur produit (ou marque). Il est courant qu’un annonceur fasse modifier une scène du film dans le but de favoriser son placement. En résumé tant que le contrat n’est pas signé c’est la maison de production qui dirige le scénario mais ensuite, c’est l’annonceur qui a la main mise sur les scènes faisant partie du contrat. En définitive, ce qui encore hier se résumait en un accord oral, prend aujourd’hui une forme beaucoup plus complexe avec des intermédiaires, les agences de placement, qui jouent un rôle de conseil et de démarcheurs. Ce sont de plus en plus eux qui sont en charge des litiges, soit en amont, en vérifiant si les contrats sont bien complets, soit en aval, en négociant avec les sociétés de production. 13 14 feuilletons.blogs.liberation.fr, Tu vas me placer, ce produit, 31 Mars 2011. www.lexpress.fr, Iris Mazzacurati, L’art délicat du placement de produits, 19 novembre 2010. 11 Chapitre 1 • Des origines de la pratique à aujourd’hui PARTIE I Section 3 • Le placement de produits d’aujourd’hui : les différentes formes Si la conceptualisation exacte du placement de produits évolue encore aujourd’hui, nous distinguons habituellement quatre formes d’apparition 15 : le placement furtif, le placement évocateur, le placement classique et le placement institutionnel. Le placement furtif Dans un tel cas de figure, le nom de la marque n'est pas clairement cité ou vu. Ex : Tate Museum dans Ocean’s Twelve (2004), on aperçoit le nom du musé en arrière plan .C'est souvent le cas pour les marques de vêtements haut de gamme telles que « Jean Paul Gaultier » dans Le cinquième élément (1996) ou encore « Jimmy Choo » dans Sex and the City (2008). La marque est donc énoncée uniquement dans le générique de fin. Si l'on peut douter de l'efficacité de telles techniques, les acteurs du marché expliquent qu'elles sont bien souvent associées à des campagnes de publicités classiques dans lesquelles est associée l'image du film à celle de la marque (campagnes de tie-in par exemple). Intérêt principal : le placement furtif est généralement parfaitement intégré à l’histoire, ce qui évite les critiques concernant une connotation trop commerciale. Inconvénient possible : il peut facilement passer complètement inaperçu. Le placement évocateur Ici seul le produit est montré, sans aucune indication de sa marque ou de son logo. Dans le film Matrix, une pile est manipulée, dont seul le code couleur permet d’identifier la marque « Duracell ». Ce type de placement est naturellement réservé aux produits dont le design ainsi que la charte graphique sont suffisamment évocateurs. Intérêt potentiel principal : ce placement est plus subtil que le placement classique et suggère de fait une réelle différenciation concurrentielle. Inconvénient possible : il peut ne pas être identifié par un public pour qui la marque n’est pas familière. 15 http://fr.jurispedia.org, Placement de produit au cinéma, 5 avril 2011. 12 Chapitre 1 • Des origines de la pratique à aujourd’hui PARTIE I Le placement classique Le produit est alors utilisé d'une manière très naturelle, et ne fait que remplacer l'utilisation d'un produit « générique » ou d'un produit pour lequel on dissimulerait la provenance. Ex : la bouteille d’eau de marque « Aquafina » dans Benjamin Gates et le trésor des templiers (2004) ou des voitures « Audi » dans I Robot (2004). Intérêt principal : le placement classique est assez simple et facile à mettre en place. Inconvénient possible : si le nombre de placements pour le film est important, il peut très vite passer inaperçu. Le placement institutionnel Ce placement privilégie la marque au produit, il se fait le plus souvent dans le décor, à l'aide d'un panneau publicitaire ou d'un balayage de la caméra sur une représentation visuelle du nom de la marque et/ou du logo. Il peut cependant prendre une forme proéminente et être cité par un des acteurs, sans pour autant que le produit ou service ne soit utilisé ou mis en avant. Dans le film In the Mood for Love (2000), on verra tout au long du générique de fin, le logo de la marque « LG » en arrière plan, en tant que panneau publicitaire installé en haut d'un building, ou encore la marque « Coca Cola » dans L’arme Fatale 3 (1992). 13 Chapitre 1 • Des origines de la pratique à aujourd’hui PARTIE I Intérêt principal : le placement institutionnel est souvent plus facile à exploiter sur un écran, y compris après le tournage du film et vieillit moins vite. Inconvénient possible : il suppose que les spectateurs connaissent le nom de la marque avant de voir le film, sinon il risque de passer inaperçu. Synthèse Ce premier chapitre permet de comprendre que, contrairement à ce que l’on pourrait penser, le placement de produit n’est pas une technique de communication apparue dans les années 90 aux Etats-Unis. Bien évidemment, au début de la pratique, l’objectif était totalement différent. Que ce soit au théâtre, dans les œuvres artistiques ou encore dans le cinéma muet, l’idée était uniquement de rendre l’œuvre réaliste. C’est bien, le cas mythique de « E.T » avec les bonbons « Reese’s Pieces » qui a révolutionné, non seulement cette technique de communication mais aussi l’univers cinématographique, en démontrant les retombés positives pour les marques. Il est aisé de constater que le placement de produit est utilisé par les annonceurs dans des objectifs très variés. Egalement le fait que, sa mise en scène permette d’exploiter au maximum l’image que souhaite véhiculer le client. Cet intérêt grandissant des annonceurs a engendré une modification de leurs relations avec la production. Des exigences de plus en plus pointues ont fait naître des agences de placements et des contrats très complexes et précis, gérés par ces dernières. Même si le placement de produits est une technique en permanente évolution, nous pouvons, néanmoins, distinguer quatre formes, allant du plus subtile au plus visible et ayant à chaque fois des objectifs différents. 14 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I Chapitre 2 : Les motivations d’utilisation du placement de produits « Les châssis, les moteurs, les volants, les carrosseries, les ailes, les pare-chocs et les roues tombent tous en place en bon ordre et juste au moment voulu. Mais étant donné que la production était arrêtée, cet éventail d’objets précis n’était plus disponible. Pour résoudre ce problème, nous avons emprunté une douzaine de voitures à la société Chrysler, que nous avons démontées pour pouvoir les réassembler devant la caméra ». KING VIDOR16 Si le placement de produits est désormais autant recherché par les annonceurs, c’est qu’il comporte de nombreux atouts, que nous allons développer dans ce chapitre. Selon l’analyse de Richard Heslin, professeur de psychologie à l’université de Purdue, au cinéma les défenses anti-publicité d’un spectateur sont diminuées. Plus la marque est vue ou entendue, plus elle a la possibilité d’être mémorisée et peut inciter le consommateur à penser que cette marque est très connue ou même de meilleur qualité. 17 Néanmoins, cette technique ne consiste pas toujours en une insertion standard dans un long métrage. Il ne s’agit pas de « placarder » un film avec tel logo ou tel produit. La nature du placement doit découler d’un objectif bien définit par l’annonceur. Le but ultime n’est pas juste d’être vu à n’importe quel prix. En 2003, le groupe Allied Domecq refuse le placement de sa vodka « Stolichnaya », dans le film Bad Santa de Terry Zwigoff 18 . Le personnage principal était alcoolique et violent, l’image de la marque aurait pu très vite pâtir d’une telle association. Le Placement peut également devenir un vecteur d’image, James Bond est le symbole d’une éternelle jeunesse et d’une élégance incontestable, les vêtements et accessoires qu’il porte, bénéficient de cette image, qu’ils soient au départ d’une forte notoriété ou non. 16 A propos du tournage de « Une romance américaine » en 1944, alors qu’en raison de la guerre, la fabrication automobile était interrompu. J-M Lehu, La publicté est dans le film, Paris, Editions d’Organisation, 2006, p71. 17 Ibid. p 74. 18 www.aef.com, Gail Schiller, Ties-in often sobering for liquor firms, 1 août 2005. 15 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I Section 1 • Annonceurs : une solution alternative nécessaire Selon Sergio Zyman (ex-directeur marketing de Coca-Cola) le marketing et la publicité tel qu’ils ont été pratiqués dans le passé sont sur le point de mourir 19 . A son tour, quelques années plus tard, Joseph Jaff (PDG du W3C) explique pourquoi le traditionnel spot de 30 secondes est bien révolu et pourquoi il faut désormais penser à toutes les solutions alternatives20. Georges Chetochine fait le pari que sur 3 000 marques existantes aujourd’hui, il n’en restera que 20 % dans cinq ans, et ceci en 2006 21 . Alexandre Hervé (Directeur de création de la DDP Paris) prétend que l’on ressent une réelle perte d’attractivité de la publicité22. Depuis près de 10 ans le constat est a priori très « grave », mais est-ce réellement le cas ou bien, seul le catastrophisme permet d’être entendu ? 1.1 La saturation de l’environnement de communication Il existe une multitude de techniques pour véhiculer un message publicitaire, vers n’importe quel individu de cette planète. Il est indéniable, que ces démarches marketing ont plus de marge de manœuvre dans les pays développés. Chaque individu sur la planète ingurgiterait en moyenne plus de 3000 messages publicitaires par jour (Jean-Marc Lehu 2005). Le consommateur frise bien souvent l'overdose de publicités, et est de moins en moins perméable aux stimuli publicitaires (le taux de mémorisation d'un message, après une exposition, serait de nos jours à 15% pour le petit écran, à 10% pour le print et l'affichage, et à 5% pour la radio). Les annonceurs investissent d’énormes sommes dans leurs campagnes publicitaires mais ne peuvent plus garantir leur impact parmi le déferlement de messages commerciaux subi par le consommateur. 19 www.stratégie.fr, Sergio Zyman, Les derniers jours de la publicité, 7 février 2003. blog.lexpress.fr, Joseph Jaff, Life after the 30 Second Spot: Energize your Brand With a Bold Mix of Alternatives to Traditional Advertising, avril 2006. 21 Interview de Georges Chetochine, Le Figaro, 6 janvier 2006. 22 Marie Maudieu et Olivier Mongeau, Interview d’Alexandre Hervé : «On ressent une réelle perte d'attractivité de la publicité», Strategies Magazine n°1570, 17 décembre 2009. 20 16 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I 1.2 La Dispersion et la fragmentation de l’audience L’explosion de l’offre média s’est progressivement accompagnée d’une fragmentation et d’une dispersion de l’audience, perturbant les processus de segmentation et de ciblage traditionnels.23 Pour la télévision, le premier outil permettant d’éviter la publicité est la télécommande, développée dans les années 1950. En effet, celle-ci permet de changer de chaîne (zapping), sans effort. Aujourd’hui, l’offre télévisuelle comporte plusieurs centaines de chaînes et contribue donc à la dispersion de la population téléspectatrice, en fonction de ses centres d’intérêt. De ce fait, pour atteindre une même cible, les annonceurs doivent être présents sur différents supports et pour un coût plus élevé. Le fameux spot de 30 secondes paraît aujourd’hui trop couteux en termes de volume d’audience atteint, mais paradoxalement afin d’atteindre un GRP voulu (Gross Rating Point : indicateur de la pression publicitaire d’une campagne. C’est le nombre de contacts pour 100 personnes de la cible. On peut le calculer en multipliant le taux de couverture par la répétition moyenne du message) 24 il faudrait multiplier les spots publicitaires. L’intérêt des marketeurs pour l’Internet se justifient de plus en plus. Ce médium présente une population croissante d’internautes, de mieux en mieux identifiée et ceci pour un coût beaucoup plus accessible que les médias traditionnels. La complexité pour les annonceurs se trouve dans le fait que le changement ne se fait pas pour un autre modèle unique, mais pour de multiples modèles. Les combinaisons de plus en sophistiquées entre média, hors-média et Internet sont aujourd’hui incontournables. La démarche n’est plus à la recherche systématique de l’audience la plus large possible, mais elle consiste à identifier celle dont l’implication est la plus grande à l’égard du programme et de son contenu. L’avantage de la production cinématographique est qu’elle est compatible avec cette fragmentation de l’audience. En effet, le choix des genres et des types de films est très large, même si certains sont plus difficiles à vendre aux annonceurs que d’autres. 23 24 cblog.culture.fr, Jérôme Clément, Ministère de la culture et de la communication, 9 mars 2011, J. Lendrevie, J. Lévy, D. Lindon, MERCATOR, Paris, Editions Dunod, 9ème édition, 2009, p550. 17 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I 1.3 Les outils permettant d’éviter la publicité Mais le rejet de la publicité par le consommateur n’est pas le seul phénomène néfaste pour les marketeurs. Les ventes croissantes de programmes préenregistrés, téléchargés ou en vidéo à la demande sont à prendre en compte. Quelque soit le contenu de ces programmes, ils monopolisent l’écran de télévision et, par conséquence, les consommateurs ne peuvent pas être exposés à la publicité. La conséquence est la même, pour les jeux vidéos. Médiamétrie révélait en 2009 que 41.40 % des foyers français était équipés d’au moins une console de jeux, à cela on peut ajouter les jeux en ligne sur ordinateur. Le problème majeur n’est pas tant que l’utilisation de ces jeux ou le visionnement de films, puisse monopoliser l’écran de télévision du foyer. La plupart du temps, celui-ci comprend plus d’un poste. Le problème majeur pour les annonceurs réside dans le fait que pendant qu’ils se divertissent, ces consommateurs ne peuvent pas être exposés à la publicité télévisée. Les principaux outils permettant d’éviter la publicité: Le Replay TV (service permettant de revoir un programme après sa diffusion officielle), Le DVR (Digital Video Recorders), Le streaming (transfert de données multimédias en continu sur Internet), Le podcast (permet le téléchargement de fichiers multimédias, audios et vidéos), La VOD (permet de commander et de regarder de la vidéo en temps réel). Les exemples sont nombreux et leur point commun est que, soit les programmes ne disposent pas de publicité, soit qu’il est très simple de l’éviter. Le temps où nous pouvions entendre « ce soir je reste à la maison sur TF1, il y a mon émission préférée » est bien révolu. Magna Global a déclaré, après une enquête menée sur les UGC (User Generated Content : ensemble des contenus générés par les utilisateurs d'un service sur Internet), qu’ils constituaient une incitation supplémentaire à la pratique du placement de produits, puisque n’étant pas effacés, leur capacité à communiquer perdurait25 25 www.magnaglobal.fr 18 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I 1.4 Un consommateur plus réceptif « Quand vous êtes au cinéma, vous êtes assis confortablement dans le noir et en face de vous il y a un point lumineux : vous ne bougez pas, vous êtes en situation d'hypnose. C'est plus facile de vous montrer les rêves, la magie, la suggestion, parce que votre inconscient est "ouvert" » Ingmar BERGMAN 26 Le spectateur regardant un film ne s’attend pas à se trouver face à une publicité telle qu’il la rencontre au quotidien. La technique du placement de produit est encore loin d’être saturée, l’annonceur peut bénéficier d’un contexte de réception favorable. Car lorsque le consommateur regarde un programme qui lui plaît, ses défenses cognitives sont diminuées, il a donc l’esprit plus ouvert et de ce fait, facilement influençable. En 1986, une étude sur cette réceptivité plus accrue a été menée par les chercheurs, Schwartz, Kumpf et Bussman. Ils ont démontré qu’un message de communication hybride est plus efficace qu’un message de communication classique. Dans un manuel scolaire, deux versions différentes d’une publicité ont été présentées à des étudiants. L’une sous forme classique et l’autre sous forme éditoriale prenant le format d’un article de journal. L’analyse des résultats à mis en lumière une intention d’achat plus marquée que pour la page de la publicité traditionnelle. Une autre étude menée par Jean-Marc LEHU, sur le film « Minority Report » en 2002, confirme que le taux de rappel est intrinsèquement lié à l’affectif des participants. Les amateurs de science fiction étaient beaucoup plus nombreux à se souvenir des placements de produits. 1.5 Un prix très variable, mais relativement peu élevé Le coût d’un placement est très fluctuant. En 1985, la « collective des raisins de Californie » est supposée avoir payé 25 000 dollars pour figurer dans le Retour vers le futur de Robert Zemeckis. En 1992 le placement de France Télécom, dans La belle histoire, de Claude Lelouche, lui a couté 450 000 €. « Ford » a du surenchérir sur «BMW » a hauteur de 30 à 40 millions de dollars, afin d’apparaitre dans les aventures de James Bond, « Meurs un autre jour » (2002) de Lee Tamahori 27. 26 27 www.mymovies.it, Ingmar BERGMAN. J-M Lehu, La publicté est dans le film, Paris, Editions d’Organisation, 2006, p81. 19 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I Il serait possible de retrouver le coût d’une cinquantaine de placement de produit (bien que les annonceurs n’apprécient pas de communiquer à ce sujet) et d’en faire une moyenne. Mais les écarts sont si importants, que ce chiffre ne serait absolument pas représentatif. Il est donc très difficile, voire impossible, de donner le prix d’un placement « standard » puisqu’il en existe pas. Néanmoins, il est possible de présenter les facteurs, influençant son coût. Les facteurs pouvant influencer le coût d’un placement La notoriété de la marque Plus la notoriété est importante, plus le coût pourra être élevé. La forte renommée d’une marque internationale, peut légitimer un coût plus élevé, que pour une petite marque, a qui on demandera parfois seulement l’autorisation de citation. L’identification de la marque Certains produits peuvent être placés de façons peu identifiables, c’est le cas par exemple, de placements furtifs. Plus la marque ou le produit est perceptible, plus le coût peut être élevé. Le budget du film Plus la production est importante, plus le coût du placement est élevé. Nous pourrions penser que les « grosses » productions ont moins besoin du soutien des marques. Ce n’est pas le cas, car cette opération permet d’alléger, ne serait-ce qu’un peu, les frais engendrés par la production. Ces dernières, sont toujours intéressées par des contrats de placement qui comportent des promotions croisées, pour le soutien de la sortie du film. De plus, les petites productions ne disposent pas des mêmes arguments de persuasion à l’égard des marques à forte renommées. Le générique du film La notoriété et l’image du producteur, du metteur en scène ainsi que celle des acteurs ont une valeur considérable. Elle est souvent mise à profit pour la promotion du film. Il est donc compréhensible, qu’elle puisse influencer le coût du placement. 20 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I La visibilité du placement Plus le placement prend de l’espace à l’écran (par exemple plan rapproché), plus le temps passé à l’écran est long et plus le nombre de scènes où le produit ou la marque apparaissent sont nombreuses, plus le coût peut être élevé. La localisation du placement Comme pour un magazine, toutes les zones d’un écran de cinéma et toutes les scènes n’ont pas le même impact. L’intensité de la scène accueillant le placement ainsi que la disposition centrale de ce dernier, influencent son coût. Intégration dans le scénario Une simple apparition dans le décor d’une scène n’aura ni le même impact, ni le même coût qu’une intégration dans l’histoire. Dans « Minority Report » de Steven Spielberg, Tom Cruise lutte contre le temps et regarde régulièrement sa montre « Bulgari », vue en plein écran. Le contact avec les acteurs principaux L’utilisation ou l’énoncé du nom de la marque ou du produit par l’acteur principal, de surplus qui dispose d’une forte renommé, a bien évidemment une grande importance. Il arrive qu’un contrat parallèle entre la marque et l’acteur se justifie. Pierce Brosnan a porté une montre « Omega » dans James Bond et la marque a utilisé l’acteur pour sa communication publicitaire qui a suivi le film (campagne tie-in). Exclusivité de la marque Un trop grand nombre de placements nuit à la mémorisation des marques ou des produits. Moins il y a de concurrents directs, plus le placement peut prétendre à un cout élevé. 21 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I Le type de distribution L’objectif des annonceurs est d’obtenir une audience la plus large possible. De ce fait, le nombre de salles prévues pour la sortie du film, ainsi que le nombre de pays d’exportation, joue sur les tarifs. La communication d’accompagnement Le coût du placement peut être considérablement réduit, voire nul, si l’annonceur finance des opérations de relations publiques, d’événementiel, des opérations de marchandisage et de PLV (publicité sur lieu de vente), en somme, tout ce qui contribue à la communication et au marketing autour de la sortie du long-métrage. Dans certains cas, l’annonceur cofinance la campagne publicitaire de lancement du film. Le contrat de placement Il existe différents contrats. Il peut s’agir d’un placement simplement négocié contre paiement, ou bien un agent peut être missionné pour l’opération. Pour ce dernier, la rémunération va dépendre des missions qui lui sont confiées (élaboration du contrat, suivi juridique, contrôle des opérations…) Ce prix est très variable, puisque sa rémunération peut aller de quelques pourcents du contrat total à plus de 30 %. Ces principaux facteurs constituent des variables d’une équation très complexe. Sa complexité se renfonce par le fait, que l’on ne puisse pas prendre en compte les facteurs subjectifs, aussi différents et nombreux soient-ils. Par exemple si le metteur en scène affectionne particulièrement la marque ou le produit, si le producteur entretien une relation personnelle avec un responsable de la marque ou encore, si la marque est indirectement liée au studio de production. Tous ces points, dont il est impossible d’en faire une liste exhaustive, sont susceptibles de diminuer le prix. Il est donc aisé de comprendre qu’avancer un prix standard n’aurait pas de sens. Proportionnellement, en termes d’impact brut potentiel (nombre d’individus touchés), le placement de produit reste très inférieur au coût d’un spot publicitaire traditionnel de 30 secondes. L’un des atouts majeur du placement de produits réside dans la démultiplication de son impact potentiel28. 28 J-M Lehu et É.Bressoud, Souvenir des marques placées dans les films : interactions entre proéminence et intégration en conditions réelles d’exposition, Recherche et application en marketing, n°1, mai 2009. 22 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I En effet, le film sera vu une première fois par un grand nombre en salle, puis sur les vidéos payantes ou à la demande, puis lors de la diffusion sur les chaines généralistes et enfin lors des rediffusions. Au final, le nombre de personnes ayant visionné le film au moins une fois est beaucoup plus élevé que celui d’un spot publicitaire classique. 1.6 Prolonger la durée de vie de la communication Même si l’industrie de la vidéo a connu un fulgurent ralentissement cette dernière décennie, le nombre de visionnement des films n’en a pas pour autant ralentie, bien au contraire. Si aujourd’hui, peu de personnes achètent ou même louent des films, les autres outils disponibles sont exploités à leur maximum. Actuellement plus de 450 000 téléchargements quotidiens s’effectuent uniquement pour la France 29 . Si ce chiffre est effrayant pour l’industrie cinématographique, il ne l’est pas directement pour les annonceurs, dont le seul objectif est que le film soit visionné un maximum de fois. Le téléchargement n’est pas le seul moyen de visionner un film à cout réduit, lorsqu’on prend en compte la revente des droits télévisés aux nombreuses chaines, vidéos à la demande…, nous nous trouvons devant un vivier de visionnage et de re-visionnage de films et une multiplication de l’exposition des produits placés. Ainsi, non seulement la probabilité que le placement touche plusieurs fois un consommateur est très élevée mais des outils relais comme l’internet ou les spots publicitaires permettent un « matraquage » du produit ou de la marque très puissant. 1.7 Internet, un puissant outil de relais Certaines marques mettent en place des sites Internet avant la sortie du film pour accueillir le trafic d’internautes qui ont vu la bande annonce sur un autre site. Il permet d’informer les visiteurs du site sur le placement en question. Ce dernier sera perçu encore plus facilement lors du premier visionnement. Il permet également d’organiser des opérations promotionnelles en lien avec la sortie du film, et tout ceci à faible coût. Mais l’outil Internet ne se limite pas aux sites, il abrite de nombreux forums, qui offrent aux annonceurs la possibilité d’appréhender l’impact du placement, surtout lorsque le produit n’est pas facilement identifiable. 29 www.generation-nt.com 23 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I L’exemple des lunettes est assez explicite. En effet, il est souvent impossible d’apercevoir la marque alors que, comme tous les accessoires portés par une star, lunettes font souvent l’objet de recherches sur Internet. D’ailleurs, ce constat combiné à l’autorisation de cette technique à la télévision française, a contribué à la création, en janvier 2011, du premier Site Internet français de référencement et de vente des produits placés dans les médias, « Brand On Air », ce site à générer 140 000 visiteurs en trois mois. Le créateur de ce site affirme que le le T-shirt jaune imprimé d’un labrador vu dans le film Very bad trip 2 (2011) a généré 121 ventes le jour de la sortie et la peluche « Minion », icone du film Moi moche et méchant : plus de 220 ventes directes en 1 journée. Une autre information intéressante témoigne du grand intérêt du public pour les produits visibles à l’écran : un article chez BrandsOnAir est en moyenne relayé 400 à 500 fois sur Facebook, et 100 fois sur Twitter 30. Ce types d’outils n’est non seulement une mine d’or pour les annonceurs mais il permet, dans une certaine mesure, d’appréhender le réel impact du spectateur ayant été exposé aux différents placements. 1.8 La communication croisée (Tie-in) Cette technique permet à l’annonceur de prolonger l’effet du placement en dehors du film ainsi qu’une identification qui aurait pu passer inaperçue. En effet, les opérations de promotions croisées (tie-ins) reposent sur des contrats permettant à l’annonceur de faire référence au film dans lequel sa marque (ou produit) est placée. Cette communication peut prendre différentes formes, spots publicitaires, affichages… Il est également fréquent que le site internet du film renvoie à celui de la marque et vice versa. On voit aussi couramment des dossiers de presse de marques réalisés spécifiquement pour annoncer leur présence dans un film… Cependant, les possibilités ne s’arrêtent pas ici, il peut s’agir d’une commercialisation de produits spécifiques en lien avec le film, par exemple une série limitée de 10 007 montres « Omega Seamuster » qui rappelle l’association de l’horloger avec James Bond31 (cf. Annexe 2). Ceci peut être également des jouets dont les personnages sont tirés d’un film, qui sont offerts dans les menus pour enfants, chez « Burger King » ou « Mac Donald’s ». 30 http// : Placementdeproduits.com, Alain Maes, Efficacité du Placement de Produits : Du discours à la réalité, 15 juillet 2011. 31 Anne Lise Carlo, Placement de produits, Stratégies Magazine n° 1532, Février 2009. 24 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I La communication croisée est donc bénéfique aux deux parties : les annonceurs peuvent communiquer sur leur présence au sein d’un film, développer leur notoriété, leur image et éventuellement leurs ventes. Les productions, à leur tour, profitent de ces actions qui créent généralement un « buzz » autour de la sortie du film et augmentent ainsi considérablement la communication faite autour de celui-ci, ce qui a souvent comme effet d’augmenter le nombre de spectateurs en salle. Section 2 • Producteurs : Cinéma et publicité, une association utile Clos du Val est un petit producteur de Cabernet Sauvignon dans la Napa Valley en Californie. N’ayant pas les moyens des grands producteurs, il envoie chaque année aux chefs accessoiristes une petite partie de sa production. Lors du tournage Le Terminal en 2004, Steven Spielberg, estima que la bouteille de champagne prévue pour une scène était un peu excessive. David Harlocker, chef accessoiriste, proposa la bouteille de Clos du Val. Celle-ci a été utilisée pour la scène du dîner entre Tom Hanks et Catherine Zeta-Jones 32. De tels cas sont très rares, aujourd’hui le but est de réfléchir, le plus en amont aux différentes possibilités de placement qu’offre le film. Pour ce faire, une liste (wish list) est établie par le metteur en scène et le producteur, parfois aidés du scénariste. Celle-ci précise les lieux, les services ainsi que les produits et marques dont le film a besoin. Lors de la production d’un film, trois grandes familles de coûts sont à considérer33 : Le coût artistique (above the line cost) : ensemble des coûts liés aux droits, aux acteurs, producteurs et metteurs en scène. Le coût technique (below the line cost) : ensemble des coûts de fonctionnement de l’équipe de tournage (hors coûts artistiques) incluant les frais de personnels (dont les figurants), les moyens techniques, les services logistiques, les frais financiers et d’assurances. Le coût de postproduction (postproduction cost) : ensemble des coûts hors tournage (effets spéciaux, montage, bande musicale, génériques, développement ou édition numérique…). 32 33 www.latimes.com, Jerry Hirsch, Winery wins the game of product placement, 7 juin 2004. www.cnc.fr, Les coûts de production des films en 2009, mars 2010. 25 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I Les coûts techniques peuvent rapidement représenter le premier poste de dépenses, en fonction des besoins du scénario. C’est bien pour réduire ce poste que les contrats de placement furent imaginés. 2.1 Une source de financement non négligeable En 2007, l’association professionnelle américaine, « Motion Picture Association of America » a calculé que le coût moyen d’un long métrage, produit par les grands studios s’élevait à 106 millions de dollars 34. En France, même si les budgets sont moins impressionnants, ils ont également de plus en plus élevés 35 . Le film français Michel Vaillant de Louis Pascal Couvelaire (2005), s’est appuyé sur un soutien financier de « Total », « Peugeot » et « Michelin »36. La concurrence étant de plus en plus rude, afin de s’assurer une équipe de qualité, des acteurs et metteurs en scènes générateurs de trafic, une post production dotée des effets spéciaux nécessaires…, des investissements de départ importants sont indispensables. Le budget d’un film n’a jamais été un gage de succès, mais paradoxalement, il rassure les investisseurs potentiels. Il faut noter, que même si majoritairement les contrats de placement, donnent lieu à un paiement, certains contrat de partenariat, se trouvent être une source de financement encore plus intéressante. En effet, ceci dépend des produits concernés, cette pratique est assez courante dans le secteur de l’automobile. En 2002, David Wilson, vice président de « Global business strategy » de « Ford », reconnaissait que pour le tournage de Meurs un autre jour de Lee Tamahori, la valeur des véhicules obtenus, excédait très largement ce qu’un contrat de placement classique aurait permis d’obtenir37. 34 www.romow.com Nathalie Silbert, Cinéma : des films de plus en plus chers à produire, Les Echos, 12 mars 2005. 36 Léna Lutaud, Les marques entrent en force dans le cinéma français, Le Figaro, 5 nov 2005. 37 www.time.com, Jeff Chu et Reema Ameer, For your wallet only, 18 nov 2002. 35 26 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I 2.2 La capacité d’évocation naturelle de la marque L’image d’une personne passe, en très grande partie, par sa consommation. Une femme lisant le magazine « Elle » ou « Challenges » ou encore « Vogue », ne véhiculera pas la même image. Chaque produit ou marque, présents dans une scène, contribuent évidemment au réalisme du film, mais surtout à véhiculer l’image souhaitée des personnages. Dans le film de Mick Jackson The Bodyguard (1992), le magazine « The Hollywood Reporter » donne lieu à un placement. C’est un titre de presse référence aux Etats-Unis, il crédibilise le milieu du monde du spectacle dans lequel se déroule l’histoire. En 1998, dans la scène d’ouverture du film Ma meilleure ennemie de Chris Colombus, l’actrice Julia Roberts interprète une photographe. Son personnage n’est pas encore décrit, qu’on la voit prendre des photographies de personnes qui paraissent être des mannequins. Lorsque la griffe « Valentino » apparaît, le personnage est alors identifié comme étant une photographe de mode. Du côté de l’annonceur, le placement est révélateur de la cible qu’il souhaite viser, et du côté du metteur en scène, sur la cohérence qu’il souhaite évoquer. Dans La Firme de Sydney Pollack (1993), une « Mercedes » est offerte à un jeune avocat, interprété par Tom Cruise pour le convaincre de travailler pour un cabinet. Le choix n’est pas anodin, le positionnement de la marque est symbolique de la réussite professionnelle. 2.3 Le réalisme d’un univers de consommation de masse Nous vivons dans un univers consumériste de marques. Il serait difficile d’imaginer Rocky Balboa (2007) monter sur un ring sans sponsors aux alentours. Ou bien encore de ne pas citer de marques dans le film de Nancy Meyers, Ce que veulent les femmes, (2000), ayant pour toile de fond une agence de publicité. Cet univers encombré de marques est ici totalement logique. Les cas de compétition de sports sponsorisés ou d’agences de publicité, sont extrêmes. Mais l’univers dans lequel nous évoluons au quotidien est lui aussi rempli de marques. Une scène dans un supermarché où le nom des marques aurait été masqué, paraitrait étrange et ne contribueraient pas, bien au contraire, au réalisme du film. Le brasseur américain « Budweiser » paie pour placer sa bière dans 8 à 10 films par an, mais en définitif, il apparaît dans 40 à 50 longs métrages, parce que le réalisateur ou l’accessoiriste a jugé que la marque sera utile à son œuvre38. 38 www.nouvellesdulac.com, 16 mars 2011. 27 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I 2.4 La crédibilité d’un environnement particulier La présence de certaines marques dans des contextes bien particuliers, permet aux spectateurs de comprendre plus facilement l’environnement du film, qu’il soit historique, imaginaire ou tout simplement très spécifique. Le réalisateur Steven Spielberg a expliqué la raison pour laquelle il a placé de nombreuses marques telles que « Bulgarie, Gap, Lexus, Century 21, Fox, USA Today, Guiness, Burger King, Nokia, Pepsi … » dans un film censé se dérouler en 2054 (Minority Report, 2002). Son souhait était que, d’une part, le consommateur comprenne que l’action se déroule sur terre et non pas dans un monde inconnu et que, d’autre part, sa familiarité avec ces mêmes marques lui permet de comprendre, que ce futur n’est pas si éloigné39. Dans le film King-Kong, de Peter Jackson (2005), l’histoire se déroule en 1933 et de nombreuses scènes ont lieu à New York. Les plans de Times Square, qui est habituellement encombré de marques, sont très réalistes. En effet, leur sobriété commerciale convient parfaitement aux années 1933. Les placements des pneus « Fisk » ou encore la devanture d’un magasin « Woolworth », ne sont pas anodins, ces deux marques ont disparues mais existaient à l’époque à laquelle l’histoire est censée se dérouler et qui contribuent à la crédibilité naturelle du film. 40 39 www.decisionsmarketing.fr, Jean-Marc LEHU, Le placement de marques au cinéma, proposition de la localisation du placement à l’écran comme nouveau facteur d’efficacité potentielle, mars 2005. 40 J-M Lehu, La publicté est dans le film, Paris, Editions d’Organisation, 2006, p67 28 Chapitre 2 • Les motivations d’utilisation du placement de produits PARTIE I Synthèse Ce chapitre met en lumière les raisons justifiants l’intérêt que portent les annonceurs et les producteurs au placement de produits. Différents phénomènes expliquent cet engouement. Dans un premier temps, un univers de communication saturé par la multitude de marques provoquant un désintérêt voire un agacement des consommateurs. Puis une audience de plus en plus difficile à cibler et à segmenter en raison des multiples outils permettant d’éviter le « légendaire » spot de 30 secondes. Et enfin, un prix assez attrayant. En effet, en comparaison avec le coût d’une insertion ou apparition dans un autre média, celui du cinéma reste relativement peu élevé, surtout en considérant la démultiplication de son impact grâce aux outils relayant les informations sur les différents placements et le prolongement de cette communication par le biais du re-visionnage à « l’infini ». Pour la production les enjeux sont tout autre, comment à la fois alléger les frais engendrés par la réalisation et la production d’un long métrage, devenu exorbitants, et captiver le public par un scénario abouti. Le placement de produit est devenu une réelle source de financement, à tel point que la liste des différents placements et le rendement de chacun d’entre eux sont établis bien avant le début de la réalisation. Mais l’aspect financier n’est pas le seul atout pour la production, les marques et les produits crédibilisent un environnement, assurément, chaque marque véhicule une image ou même pour certaines une époque. En somme, les produits rendent les films réalistes et implicitement donnent le « tempo » à chaque scène. 29 Chapitre 3 • Les limites du placement de produits PARTIE I Chapitre 3 : Les limites du placement de produits Il n’existe pas de solution miracle aux problématiques contemporaines des annonceurs, le placement de produits répond à certaines d’entre elles, mais comme toute chose ses limites sont bien présentes et identifiables. Le principal inconvénient de cette technique, pour l’annonceur, est la difficulté de mesurer son impact et de ce fait, de juger de son efficacité. Section 1 : Un investissement difficile à contrôler Lorsque l’annonceur décide de placer sa marque ou l’un de ses produits dans une ouvre cinématographique, ce dernier, signe un contrat de placement avec la production. Si en règle générale l’annonceur a le dernier mot sur les scènes du ou des placements, en imposant des contraintes détaillées et en évitant toutes associations négatives, le contrôle des modalités d’apparition comporte parfois des incertitudes. En effet, même si le risque semble moindre aujourd’hui qu’aux débuts des années 1990, lorsque la pratique se professionnalisait il persiste tout de même un risque qu’au moment du montage final les envies du réalisateurs priment sur ceux de l’annonceur, entrainant la modification voire la suppression du placement. Contrairement à un spot publicitaire pour lequel tous les éléments de la production et de la réalisation ne peuvent pas être contrôlés par l’annonceur et son agence. De plus, il arrive que certaines stars refusent contractuellement un placement qui aurait pourtant été signé entre l’annonceur et la maison de production. En 1989, lors du tournage de 58 minutes pour vivre (1990), un contrat de placement est signé entre « Black & Decker » et « 20th Century Fox Corporation ». Ce contrat stipulait comme principale condition l’engagement de l’entreprise d’outillage à lancer une campagne de communication reprenant le thème du film au moment de sa sortie en salle. Mais au montage, les scènes des placements sont supprimées, pour des raisons esthétiques. La société « Black & Decker » se retrouve donc à lancer une campagne de communication intégralement axé sur le film, avec pour slogan un jeu de mots reprenant le titre du film, alors qu’aucun de ses produits ne figurent dans l’œuvre. 30 Chapitre 3 • Les limites du placement de produits PARTIE I Section 2 • Un impact complexe à mesurer « Le placement de produits n’a pas pour objectif les ventes, il a pour objectif la notoriété de la marque », affirme l’expert Samuel Turcotte41 Il est très difficile d’identifier l’impact d’un placement de produits, sur la population concernée. Certes, comme évoqué précédemment, des cas d’impacts sur les ventes existent, mais ils ne peuvent pas prétendre à un mécanisme simple pouvant s’assurer d’un tel effet. La seule certitude est qu’il existe une forte demande de la part des annonceurs. Il existe différents logiciels élaborés à cet effet, reprenant de nombreux critères (visibilité, perception de la marque, image, notoriété….) plus ou moins fiables, mais même s’ils permettent de mesurer la qualité d’un placement, il n’aura pas forcement l’impact commercial attendu. La grande complexité réside dans l’élaboration d’un modèle fiable, en effet, la nature et le contexte d’un placement (chaque film est unique) varient considérablement d’un cas à l’autre. En France, depuis la réglementation et l’autorisation explicite du placement de produits (2010), un logiciel présenté comme la solution miracle a vu le jour. Quattro, mesure l’efficacité sur une base de 50 critères regroupés autour de quatre axes d’analyse : la visibilité de la marque et du produit, la perception du public, l’amélioration de la notoriété de la marque et la market value générée par l'opération. Par ailleurs, lorsque l’annonceur reçoit le rapport d’étude, il dispose également de comparatifs sur des produits similaires.42 Mais au vu des différentes critiques, il serait comparable aux outils existants. Il est donc justifié de dire, qu’à ce jour il n’existe pas d’outils performants permettant de mesurer que ce soit, l’augmentation de la notoriété, l’amélioration de l’image, le repositionnement de la marque, l’impact sur les ventes ou tout autre changement d’attitude du consommateur. Section 3 • Risque de décrédibilisassions du film Certains films, programmés pour devenir des blockbusters, abondent parfois tellement de marques et de produits, qu’il est permis de s’interroger sur la capacité de chacun d’eux à être repéré par le spectateur. A titre d’exemple l’agence Interbrand a identifié 54 placements distincts dans le film Hitch de Andy Tennant (2005). Si un film se transforme en une longue publicité, le placement de produit n’a plus lieux d’être puisqu’il ne bénéficie plus des avantages de cette technique. 41 42 www.iletaitunefoislecinema.com, Anne Luzin, Les marques au cinéma. www.e-marketing.fr, Damien Grosset, 2011 sera l'année du placement de produit, 24 janvier 2011. 31 Chapitre 3 • Les limites du placement de produits PARTIE I Le produit n’est plus remarqué par le spectateur voire dénigré par ce dernier. Le film est critiqué par les acteurs économiques qui font le succès de celui-ci et ensuite le « bouche à oreille », prend très rapidement le relais. En fin de compte, les entrées seront moindres, les produits moins remarqués et donc moins mémorisés et les deux protagonistes, l’annonceur et le producteur auront à pâtir d’une mauvaise image. Section 4 • Le cadre juridique : frein au développement du placement de produit Cette thèse traite le placement de produits sans restriction géographique, néanmoins les cas les plus parlants et les plus fréquents se trouvent dans les « blockbuster » américains. Cependant, outre-Atlantique la législation n’est pas un frein à la pratique du placement de produits, de ce fait nous allons traiter le cas de la France, très restrictif et réticent à cette forme de communication. 2.1 Une pratique non réglementée en France Le placement de produit que ce soit dans les ouvres cinématographiques ou télévisuelles a toujours été monnaie courante aux Etats-Unis. Dans l’hexagone le constat est tout autre. En effet, la protection du consommateur est une préoccupation majeure en Europe et d’autant plus en France. Jusqu’en 2007, le placement de produits au cinéma présentait un vide juridique au niveau européen. La commission européenne considérait que le placement de produits « est une pratique courante dans les productions indépendantes et les films cinématographiques, et ne fait l’objet ni de règles de protection du consommateur, ni de règles garantissant une certaine sécurité juridiques pour les annonceurs concernés » 43 . En France cette pratique était totalement interdite à la télévision et pour le cinéma, elle devait respecter un certain nombre de directives, telles que l’interdiction pour les parties politiques, syndicats ou groupements professionnels ou encore l’interdiction de publicité sur certaines catégories de produits (tabac, alcool, médicaments sous ordonnance…), mais il n’existait aucun cadre spécifique pour ce dernier. En somme concernant le cinéma le placement de produits était toléré par le CSA, mais n’ayant aucun repère, les protagonistes de cette pratique étaient assez réticents. Quant à la télévision, cette pratique était tout simplement interdite en France. 43 Junon.univ-cazanne.fr, S. Tricard, Le nouveau droit communautaire des communications commerciales audiovisuelles, 2009. 32 Chapitre 3 • Les limites du placement de produits PARTIE I 2.2 Mise en place d’un cadre juridique communautaire puis français Le 30 novembre 2007 a été accepté, sous la direction de la commissaire européenne Viviane Redding, la nouvelle directive de l’Union européenne qui a modifié l’ancienne directive « télévision sans frontières » de 1989. Cette directive autorise le placement de produit au cinéma ainsi qu’à la télévision, jusqu’alors interdite (sauf parrainage), mais soumis à des réglementations 44: Interdiction dans des programmes de conseils, d’informations, d’actualités, dans des documentaires et des programmes pour enfants Principe d’identification : les spectateurs doivent être clairement informés de la présence des marques placées. Garantir l’indépendance du fournisseur du média : les placements ne doivent en aucun cas influencer l’indépendance éditoriale du fournisseur de service du média. Ne pas inciter directement à l’achat : les placements de produits ne doivent pas inciter directement à l’achat ou à la location de bien ou de services, notamment en faisant des références promotionnelles sur ces produits ou services. Interdiction de certains types de produits : tabac et médicaments délivrés sous ordonnance. Cette directive n’a rien changé à la pratique au cinéma, mais symboliquement elle a induit un cadre juridique et donc légalisé cette forme de communication au niveau communautaire. Quant à la France la transposition de cette directive est restée en suspend et n’a rien changé pour l’utilisation du placement de produits. Il a fallu attendre février 2010 pour que cet outil de communication prenne une forme légale, par le biais de la « Délibération n° 2010-4 du 16 février 2010 » (publication au journal officiel le 5 mars 2010).45 Cette autorisation a donc un double effet en matière de placement de produit, puisque d’une part, elle légalise l‘utilisation de la technique à la télévision et que d’autre part elle dote la pratique en matière cinématographique d’une base légale attendue depuis de nombreuses années. Cette évolution législative donne enfin une sécurité juridique à une pratique commerciale qui prend chaque année une ampleur de plus en plus importante et qu’on ne peut ignorer. 44 www.droit-technologie.org, La directive sur les médias audiovisuels est adoptée. Transposition attendue en 2009, 30 novembre 2007. 45 www.csa.fr, Délibération du 16 février 2010 relative au placement de produit dans les programmes des services de télévision, 5 mars 2010. 33 Chapitre 3 • Les limites du placement de produits PARTIE I Cette nouvelle législation va permettre aux annonceurs de diffuser des messages plus efficaces et aux producteurs de bénéficier de nouvelles sources de financement dans un contexte où les recettes publicitaires sont en chute libre. Synthèse Ce troisième chapitre a pour objet de mettre en relief les points négatifs du placement de produits. Si en quantité ils ne sont pas très nombreux, leur impact peut être catastrophique pour les protagonistes. Dans un premier temps, le contrôle des placements par l’annonceur n’est pas toujours aisé. En effet, le temps écoulé entre la signature du contrat de placement et le montage final du film augmente les chances de modification ou de suppression du placement par le producteur. Pour l’annonceur ce manque de contrôle peut être très nuisible car en cas de modification, le produit ou la marque peut pâtir d’une mauvaise image et en cas de suppression les campagnes de communication annexes peuvent avoir un impact moindre voire nul. Concernant la mesure de cette pratique, différents outils informatiques existent permettant de juger de la performance d’un placement, mais aucun ne peut prétendre de mesurer l’impact sur le consommateur, que ce soit en termes d’image, de mémorisation, de notoriété ou encore de changement d’attitudes. A cela s’ajoute un cadre juridique très flou, jusqu’en 2011. Si aux Etats-Unis, l’éthique est quasiment la seule limite, en France, la pratique était tout aussi courante, mais elle était considérée comme tolérée, le non encadrement de cette pratique freinait les investissements sur ce marché. En effet, les annonceurs n’ayant pas de budgets communication faramineux craignaient non seulement de perdre de l’argent en cas de réprimande mais aussi en image. Mettre le doigt sur un placement dans un film trop insistant ou pire interdit est toujours néfaste pour l’image de l’entreprise auprès des consommateurs. 34 Chapitre 1 • Les caractéristiques de la consommation PARTIE II PARTIE II : LE CONSOMMATEUR "L'être humain est un animal frustré, rarement satisfait au-delà d'une courte période. Lorsqu'il a assouvi un désir, il lui en vient un autre. Quand il est comblé, un autre surgit à sa place, puis un autre encore. L'état de désir permanent est caractéristique du genre humain". Abraham H.MASLOW, 1970 Chapitre 1 : Les caractéristiques de la consommation Le temps où l’achat était synonyme de « l’utilitaire » est depuis bien longtemps révolu, l’acte d’achat est la synthèse de caractéristiques très nombreuses et variées. Les consommateurs évoluent en permanence, ce qui met en relief l’importance des mécanismes d’apprentissage et les multiples variations internes (au consommateur), environnementales ou culturelles, dans le comportement de consommation. L’enjeu des annonceurs est donc de saisir l’ensemble des motivations des consommateurs, de les trier en groupes homogènes et ainsi accorder à leur valeur les offres de l’entreprise. Au-delà des motivations, il est crucial de connaitre le consommateur en lui-même, ses attentes et la logique avec laquelle il déroule son processus de décision. Il est évident que le consommateur qui se rend dans un magasin n’est pas seulement attiré par une démarche pratique. En effet, il peut rechercher en priorité l’émotion, le plaisir, de la nostalgie, un moment partagé avec des amis... En somme, il veut vivre une expérience. La « persuasion » publicitaire ne passe plus uniquement par une prise en compte des éléments d’arguments du message, mais peut être le transfert d’attitude de l’annonce (critères principaux : histoire, personnage, décors, musique) vers la marque sans fondement cognitif. Le ressenti des messages publicitaires fait une place plus grande aux variations individuelles. L’acte de consommation est profondément lié à l’environnement dans lequel évolue son auteur. Les normes qui commandent la consommation ne sont pas décorrélées de celles qui gouvernent les autres activités individuelles et collectives. 35 Chapitre 1 • Les caractéristiques de la consommation PARTIE II Section 1 • Le processus de l’acte d’achat Prise de conscience du problème Recherche d'informations Ecart important entre un état actuel et un état désiré. Désir de résoudre ce problème, analyse des informations stockées en mémoire laquelle est complétée par une recherche active Evaluation des solutions Confrontation des éléments disponibles avec les critères personnels. Choix du produit Le choix d’une de ces alternatives : critères (disponibilité, prix, amabilité du vendeur…) Analyse post-achat Vise à apprécier l’adéquation de la solution retenue au problème initial. Susceptible d’amener une recherche complémentaire. Le placement de produits a donc pour but principal de provoquer le désir chez le spectateur. Le rôle des annonceurs est alors de communiquer sur ce désir et d’informer le spectateur sur les moyens d’acquisition du produit placé. Section 2 • Les facteurs d’influence du comportement du consommateur Chaque individu est différent et les facteurs pouvant influencer son comportement sont extrêmement nombreux et variés. L’objectif de cette section n’est pas de proposer une liste exhaustive de ces facteurs d’influence, ni même de rentrer dans le détail, car face à la complexité de l’être humain, cette partie pourrait faire l’objet d’un mémoire à part entière. Néanmoins, il est important de comprendre certains mécanismes communs à tous les consommateurs. 36 Chapitre 1 • Les caractéristiques de la consommation PARTIE II 2.1 Les facteurs individuels Ce sont des facteurs qui représentent les caractéristiques individuelles de chaque consommateur et qui modifient leur comportement et la prise de décisions. Les motivations et besoins Il existe plusieurs théories et approches de la motivation : la hiérarchie des besoins de Maslow, théorie des deux facteurs d’Herzberg, etc. Chacune étudie et propose les origines et sources de motivation. Mais, elles peuvent s’accorder sur le principe, selon lequel, la motivation est une forme d’expression, des individus, de la volonté de combler un sentiment ou une prise de conscience d’un besoin. Autrement dit, la motivation représente un canal dans lequel de l’énergie est acheminée pour atteindre un but spécifique (satisfaire un besoin). Ce dernier peut être défini comme étant une force intérieure, qui pousse un individu à entreprendre des actions visant à rendre une situation plus satisfaisante. Les besoins ont la particularité d’être infinis et divers, certains sont de nature biologique (la faim, la soif, etc.) et d’autre psychologique (l’affection, reconnaissance, etc.). De ce fait, la bonne connaissance des besoins et des motivations de sa cible constitue un atout concurrentiel majeur pour une entreprise. L’âge et le cycle de vie familial De nombreux actes d’achat sont étroitement liés à l’âge mais surtout au cycle de vie familiale. Le célibataire est caractérisé par une surconsommation de loisirs, de vêtements et différents « outils » de séduction (parfums, cosmétiques, soins…). Le jeune couple quant à lui présente des revenus croissants avec une consommation partagée entre loisirs et biens durables notamment d’équipements. Le couple avec enfants a des priorités de consommation touchant au logement, éducation, acquisition de patrimoine… Les retraités ont des revenus en baisse, et une importante consommation en loisirs, voyages et santé. Bien évidement, ces caractéristiques sont fortement variables et ne présentent qu’une façon de classifier la consommation à chaque stade de la vie d’un individu. Par exemple un couple de retraités n’aura pas la même façon d’agir qu’un retraité seul. 37 Chapitre 1 • Les caractéristiques de la consommation PARTIE II L’implication On définit l’implication comme : « un état psychologique de l’individu qui exprime l’intensité de la force engagée par la personne dans sa relation avec un objet commercial : le produit, la marque, le service, la publicité... ».46 L’intensité de l’implication et sa nature, cognitive ou affective, influencent le comportement du consommateur. D’une façon générale, plus la personne se sentira impliquée, plus le processus de décision d’achat sera complexe, plus l’information traitée sera abondante et plus nombreuses seront les marques examinées. Le degré d’implication varie selon l’appréciation d’un produit ou d’un service Valeurs et style de vie Les valeurs et les styles de vie représentent la façon avec laquelle les consommateurs vivent et occupent leurs temps. Pour un consommateur, le style de vie est un repère très important dans la recherche des caractéristiques d’un produit. Ce dernier doit présenter des attributs compatibles avec leur style de vie. Ainsi, le succès légendaire du constructeur automobile Rolls-Royce revient à la conception luxueuse et raffinée de ses véhicules, qui correspondent parfaitement aux valeurs et styles de vie de la haute société britannique. L’attitude Elle peut se définir comme un ensemble des prédispositions d’un individu par rapport à un objet. Pour le consommateur c’est la tendance à agir d’une manière favorable, défavorable ou neutre face à un produit ou service donné. L’attitude est caractérisée par trois aspects : L’aspect cognitif : il correspond aux connaissances et aux croyances du consommateur, c'est-à-dire les idées développées envers un produit. Ils proviennent d’informations extérieures (publicité, bouche à oreille…) et des expériences du consommateur. L’aspect affectif : il représente l’ensemble des émotions, sentiments approuvés vers un produit donné, ils peuvent être favorables ou défavorables. L’aspect conatif : c’est la tendance à agir, vis-à-vis d’un produit. A la différence des deux composantes précédentes, elle n’est pas toujours présente. Elle peut être irrationnelle face aux informations dont dispose l’individu. Tout en sachant que le tabac est nocif pour la santé sa consommation persiste. 46 J.P. Helfer et J. Orsoni, Marketing, Paris, Vuibert 7éme édition, 2001, p 116. 38 Chapitre 1 • Les caractéristiques de la consommation PARTIE II La personnalité Chaque individu est doté d’une personnalité, qui se manifeste dans son comportement. « La personnalité se définit comme l’ensemble des traits d’un individu qui le font penser ou agir dans un sens déterminé »47. La définition révèle l’existence de plusieurs composantes (traits) qui représentent des repères importants dans l’explication et la compréhension du comportement humain. Il est très important pour le responsable marketing d’avoir une meilleure connaissance de la personnalité du consommateur, afin de pouvoir prédire certains comportements mais aussi d’en provoquer d’autres en faisant éveiller certaines pulsions par le biais de messages publicitaires. L’apprentissage Le terme « apprentissage » désigne, une acquisition de savoir-faire et d’attitude en fonction des expériences passées par l’individu. Ce dernier peut alors changer de comportement chaque fois que son apprentissage s’enrichit d’une nouvelle expérience. Dans le cas où le client est satisfait après son achat, il y a de fortes chances pour qu’il renouvelle l’achat du produit, inversement s’il n’est pas satisfait, il va probablement éviter ce produit ou cette marque. 2.2 Les facteurs socioculturels (société) et psychosociaux (groupe) « L’ Homme », de nature, est un être qui vit au rythme d’une société portante d’une culture et de valeurs relativement communes. De ce fait, son comportement individuel est, généralement, soumis à des lois et paramètres socioculturels bien précis. Le comportement de consommation n’échappe pas à cette règle. En effet, l’acte d’achat ou de consommation d’un produit peut devenir un signe de richesse, d’appartenance à une classe sociale, de différenciation, etc. 47 J.P. Helfer et J. Orsoni, Marketing, Paris, Vuibert 7éme édition, 2001, p 117. 39 Chapitre 1 • Les caractéristiques de la consommation PARTIE II Les classes sociales On peut définir les classes sociales comme : « Des groupes relativement homogènes et permanents, ordonnés les uns par rapport aux autres et dont les membres partagent le système de valeurs, le mode de vie, les intérêts et le comportement »48 L’analyse de cette définition permet de faire émerger cinq caractéristiques des classes sociales49. Homogènes : les comportements des individus appartenant à la même classe sont généralement similaires. Cette homogénéité se caractérise par un langage commun, par la même façon de s’habiller etc. Ordonnés : les classes sociales sont des groupes hiérarchisés, la notion de supériorité et d’infériorité en sont les principes fondamentaux. Cette caractéristique représente un facteur clé dans l’explication du comportement du consommateur. Ce dernier préfère acheter un produit apprécié par les membres d’une classe sociale supérieure à la sienne. Groupes secondaires : les classes sociales ne sont pas des groupes au sens propre du terme. A ce titre, l’influence de ces groupes sur le comportement des individus est symbolique. Evolutifs : l’évolution des classes sociales s’exprime par le passage des individus d’une classe à une autre. Ainsi, un employé dynamique et ambitieux peut être promu au poste de chef de service, ce qui lui procurera un nouveau statut social. Multidimensionnels : contrairement à l’approche marxiste, les classes sociales sont fondées sur la base de plusieurs critères tels que le niveau d’étude, le revenu, la profession, le lieu de résidence, etc. 48 P. Kotler, K.Keller, B. Dubois, D. Manceau, Marketing management, Paris, Publi-union 12éme édition, 2006, p 197. 49 Ibid., p 198. 40 Chapitre 1 • Les caractéristiques de la consommation PARTIE II Les groupes de références Ce sont des groupes, auxquels l’individu n’appartient pas nécessairement, mais auxquels il se réfère et qui ont une influence directe sur son comportement. « Un groupe de référence est celui sur lequel l’individu se base pour se composer une attitude, déterminer ses jugements, ses croyances et ses comportements »50. Selon D. Darpy et P. Volle51, les groupes de référence sont composés de deux entités : des groupes d’identification dont l’influence est positive ; des groupes de rejet qui influence négativement le comportement des individus. Les groupes d’appartenance Groupe auquel l’individu s’intègre, y trouve une identité, y développe, en interaction avec les autres membres de ce groupe. Groupe sécurisant qui sert de base à la comparaison avec l’extérieur (du groupe). L’individu y puise des valeurs, des habitudes de vie… C’est un groupe dont il se réclame. Le premier groupe d’appartenance est la famille. Nous avons tous besoin de ce type de groupe qui sert de base à l’élaboration de notre identité en se conformant à des normes, des valeurs. Le groupe d’appartenance sert également au processus de différenciation. L’individu tout en restant attaché à son groupe d’appartenance met en œuvre des processus d’individualisation pour ne pas se fondre totalement dans la masse. La culture La culture représente l’ensemble des coutumes, attitudes, croyances acquises par un ensemble d’individus partageant les mêmes valeurs. Edward. B. TAYLOR a défini la culture comme étant : « Un tout complexe qui comprend les valeurs, les idées, les traditions, les mœurs et les coutumes acquises par l’homme en tant que membre de la société. »52 Il existe plusieurs caractéristiques de la culture, qui sont : 50 J. Lendrevie, J. Lévy, D. Lindon, MERCATOR, Paris, Editions Dunod, 9ème édition, 2009, p157. 51 D. Darpy, P. Volle, Comportement du consommateur: concepts et outils, Paris, Editions Dunod, 2003, p 264265. 52 www.groundreport.com, What is the concept of culture in sociology, mars 2009. 41 Chapitre 1 • Les caractéristiques de la consommation PARTIE II La culture est acquise : c'est-à-dire qu’au fur et à mesure que l’individu vit des expériences et fait de l’apprentissage, il apprend les normes et les règles d’une culture. La culture est transmise : la famille, l’école, la religion, les médias et les groupes de référence représentent les outils de transmissions de la culture. La culture est sociale : c'est-à-dire que l’individu ne peut pas s’approprier de la culture, au contraire elle est partagée avec d’autres individus, la culture s’inscrit dans un contexte collectif et non pas individuel. La culture est normative : la culture contient des règles (normes) qui déterminent les comportements de l’individu dans la société. La culture est fonctionnelle : la culture exerce une fonction d’intégration aux groupes de sentiments d’appartenance, en faisant éviter à l’individu tout rejet ou questionnement sur une règle ou un geste dicté par celle-ci. La culture est perfectionnée : les règles dictées par la culture tendent vers la génération des comportements idéals. La culture est évolutive : la culture évolue, se renouvelle et s’adapte à l’environnement, c’est ce qui explique la différence des valeurs entre une génération et une autre. Pour le responsable marketing, la culture représente un facteur très important dans la conception du produit et les modes de consommation d’une société donnée, afin de proposer un produit adapté et d’élaborer les stratégies marketing appropriées, on ne peut pas proposer aux consommateurs qui vivent dans une société musulmane un produit interdit par leur foi (alcool, viande de porc, etc.) Facteurs situationnels La situation est un contexte spatial, temporel et humain (autres personnes présentes) indépendante de la nature du consommateur et du produit. Les principaux facteurs de situation sont : L’environnement physique : son, éclairage, décors, odeurs... La destination de l'achat : achat pour soi-même (hédoniste), pour offrir (oblative), pour la famille, pour des invités... L’état mental au moment de l'achat : fatigue, stress, faim, anxiété, excitation... La perspective temporelle : temps disponible, moment de la journée, en attente... L’activité : travail, loisirs, vacances... La présence ou absence d'une tierce personne. 42 Chapitre 1 • Les caractéristiques de la consommation PARTIE II Section 3 • Le mécanisme de la perception des informations La perception est le processus par lequel des sensations physiques, telles que les images, les sons et les odeurs, sont sélectionnées, organisées et interprétées. L’interprétation d’un stimulus permet de lui attribuer une signification. Toutes les sensations ne parviennent pas au bout du processus de perception. De nombreux stimuli sollicitent notre attention, mais pour la plupart, ils demeurent ignorés ou incompris. Pour qu’il y ait perception, il faut que l’individu passe par 3 phases : Exposition à l’information Une attention Un décodage Facteurs influençant la perception d’un stimulus : Intensité d’exposition Taux d’attention qu’il génère Son interprétation Un stimulus n’est jamais perçu isolement. Il est classifié et organisé selon les principes de l’organisation perceptuelle. Il existe trois principes de groupements (Théories de la Gestalt) 53 Le principe de clôture : les individus ont tendance à percevoir une image incomplète comme si elle était complète. Chacun remplit les vides avec ce qu’il garde en mémoire d’expériences antérieures. Ex : Le Pl cem nt de Pr du t. Le principe de similitude : les consommateurs ont tendances à regrouper des objets qui représentent des caractéristiques similaires. Lors d’extensions de marques, les consommateurs auront tendance à considérer que les « produits filles » ont les mêmes caractéristiques ou qualités que la marque mère. La glace de « La Laitière » sera perçue comme possédant les mêmes qualités gustatives que le yaourt de la même marque. Le principe figure-fond : développe l’idée qu’une partie du stimulus ressort (la figure), les autres parties demeurent en arrière-plan (le fond). Le cerveau aurait pour fonction de classifier et regrouper chaque petite perception avec celles qui lui ressemblent. Il structure les informations de telle façon que ce qui possède une signification pour nous, se détache du fond. 53 www.psychoweb.fr, Stephane Debrosses, Gestalt Theorie : les théories de la forme, 20/12/2007. 43 Chapitre 1 • Les caractéristiques de la consommation PARTIE II C'est cette distinction figure-fond, qui nous permettrait par exemple de distinguer un visage connu au milieu d'une foule, une odeur de rose parmi l'ensemble des odeurs perceptibles, ou le son d'une voix parmi des dizaines d'autres. . Sur cette image il est possible d’apercevoir une jeune femme ou une dame âgée. La dernière étape du processus de perception est l’interprétation. Les symboles permettent de donner du sens à notre environnement grâce à des interprétations culturellement partagées. La compatibilité de ces symboles avec les expériences antérieures affectent le sens donné aux objets. Synthèse Ce chapitre met en exergue la complexité de l’être humain, le processus de réflexion et éventuellement d’action, dans ce cas l’acte d’achat, est un « mix » de multiples facteurs. Les consommateurs sont constamment confrontés au besoin de prendre des décisions au sujet des produits. Certaines sont très importantes et impliquent un effort important, d’autres se prennent presque automatiquement. Mais quelque soit l’implication des recherches de l’individu sur le produit, elle est motivée par des besoins eux-mêmes corrélés non seulement aux facteurs individuels mais aussi situationnel de l’action. Toutes ces composantes aux caractéristiques très complexes sont en permanence influencées par des facteurs extérieurs (société, entourage, classe sociale, groupes d’appartenance et de référence…) et exercent une pressions quasi-constante sur le comportement. A tout ceci s’ajoute la perception, des messages de communication, pouvant être différente d’un individu à l’autre et influencée également par les composantes personnelles et environnementales. La difficulté des annonceurs en devient évidente, à cela s’ajoute des marchés très concurrentiels sur lesquels il faut se distinguer et maintenir un contact constant avec sa cible. 44 Chapitre 2 • La mémorisation PARTIE II Chapitre 2 : La mémorisation « La mémoire, la raison proprement dite, et l'imagination sont les trois manières différentes dont notre âme opère sur les objets de ses pensées. » Jean le Rond d’Alembert Le chapitre précédent met en lumière le cheminement complexe des consommateurs jusqu’à l’acte d’achat. Avant d’arriver à cet acte ultime la marque ou ses produits ont besoins d’être connus. Pour ce faire, le consommateur doit le mémoriser parmi le déferlement de ses concurrents. Ce chapitre est consacré à la compréhension de la mémorisation. Section 1 • Le fonctionnement de la mémoire Qu’est ce que la mémoire Le Dictionnaire Fondamental de la Psychologie (référence dans ce domaine) définit la mémoire comme la « capacité d’un système de traitement naturel ou artificiel à encoder l’information extraite de son expérience avec l’environnement, à la stocker dans un format approprié puis à la récupérer et à l’utiliser dans les actions ou les opérations qu’il effectue ». Figure 1 : Les différentes phases de la mémorisation Information externe Codage de l'information Stockage de l'information (mémoire de travail) Connaissances Stables. Mémoire à long terme 1.1 Le codage des informations La façon dont les informations sont codées ou mentalement programmées, détermine comment elles seront représentées en mémoire. En général, les données d’entrée associées à d’autres informations déjà en mémoire ont plus de chances d’être mémorisées. Ainsi, des noms de marques ou des produits liés aux caractéristiques physiques d’une catégorie de 45 Chapitre 2 • La mémorisation PARTIE II produits (Yoplait, Mr Propre) ou faciles à visualiser (Ferrari), sont plus aisément retenus que des noms de marques plus abstraits.54 Types de signification Un consommateur peut traiter un stimulus simplement, en fonction de sa signification sensorielle, par exemple sa couleur ou sa forme. Dans ce cas, la signification peut être activée par la vue d’une image du stimulus. Cependant, la plupart du temps, les significations sont codées à un niveau plus abstrait. La signification sémantique fait référence à des associations symboliques : « les riches mangent du caviar » ou « les femmes branchées ont des piercings ». Pertinence personnelle Si les souvenirs épisodiques portent sur des événements qui ont un sens pour l’individu, il sera alors fortement motivé pour les retenir. Un couple a souvent « sa chanson » qui lui rappelle son premier rendez-vous ou son mariage. Certaines associations particulièrement précises sont regroupées sous le terme mémoire flash. Un souvenir passé peut influencer un comportement futur. Un placement de produit bien orchestré peut permettre un codage particulièrement bien réussi, car une grande partie des informations acquises par un individu est représentée dans la mémoire sous forme d’histoire. Les histoires et les images amènent l’individu à construire une représentation mentale plus développée et plus détaillée des informations qu’il reçoit. 55 54 55 Michael Solomon, Comportement du consommateur, Paris, Person Education France 6e édition, 2005, p 91. Joël Brée, Le comportement du consommateur, Paris, Edition Dunod 2e édition, 2009, p 44. 46 Chapitre 2 • La mémorisation PARTIE II 1.2 Les systèmes mémoriels 56 Les travaux menés en psychologie cognitive établissent différentes distinctions en ce qui concerne la mémoire. La mémoire sensorielle, la mémoire à court terme et la mémoire à long terme. Chacune joue un rôle dans le traitement de l’information. Figure 2 : Différentes formes de mémoire TRAITEMENT COMPLEXE ATTENTION • Stockage temporaire des informations sensorielles • Durée: moins d'une seconde • Les informations qui franchissent le filtre attentionnel sont trenferées vers la mémoire à court terme. • Stockage bref des informations en cours d'utiliation • Durée: moins de 20 secondes MEMOIRE SENSORIELLE • L'information soumise à un traitement comlèxe est transferée dans le mémoire à long terme MEMOIRE A COURT TERME • Stockage relativement permanent des informations • Durée: longue ou permanente MEMOIRE A LONG TERME La mémoire sensorielle La mémoire sensorielle stock les informations que nous recevons de nos sens, et dure généralement moins d’une seconde. Par exemple, en passant devant une boulangerie, l’individu sent l’odeur qui s’en échappe. Cette sensation très brève suffit pour décider s’il souhaite en savoir plus. Si l’information est retenue pour un traitement, elle passe dans un « filtre attentionnel » et est transférée vers la mémoire à court terme. La mémoire à court terme La mémoire à court terme concerne l’information qui reste dans la conscience entre sa présentation et sa récupération. Elle est donc caractérisée par une capacité limitée, mais permet un traitement très rapide de l’information qu’elle contient. Actuellement, la mémoire à court terme est plutôt envisagée comme une « mémoire de travail » (working memory) (Eysenck, 1990). Il s’agit d’une « mémoire transitoire intervenant dans la réalisation des activités cognitives, dont le rôle est lié à la dimension temporelle de ces activités et à la 56 www.psychoweb.dnsalias.org 47 Chapitre 2 • La mémorisation PARTIE II nécessaire mise en relation d’informations dispersées ». Elle concerne donc les informations que nous sommes entrain de traiter. Par exemple, les entrées verbales peuvent être traitées de façon acoustique (selon leur sonorité) ou de façon sémantique (selon leur signification). Les informations soumises à un traitement complexe (par exemple, analyse de leur signification) sont transférées vers la mémoire à long terme. Il semble que la durée de la mémoire à court terme dépasse rarement les deux ou trois secondes consécutives à la fin de la présentation de l’information57. C’est en effet durant cette brève période qu’il est possible d’identifier des phénomènes distincts de ceux observés pour la mémoire à long terme (Florès, 1997). Ainsi, l’impact positif de la répétition, par exemple, n’est mis en évidence que lorsque le rappel a lieu au moins quatre secondes après l’exposition, suggérant que cette variable n’influence que la mémoire à long terme et pas celle à court terme. La mémoire à long terme La mémoire à long terme est le système qui nous permet de retenir les informations pour une longue période. Pour qu’une information passe de la mémoire à court terme à la mémoire à long terme, une répétition élaborative est nécessaire. Ceci consiste à réfléchir sur la signification d’un stimulus et à lier à d’autres informations déjà en mémoire. Les professionnels du marketing aident souvent ce processus par des slogans ou des jingles accrocheurs et facilement mémorisables. La mémoire implicite fait partie de la mémoire à long terme, elle enregistre des éléments sans que l’individu en soit conscient, à la différence de la mémoire explicite. Le consommateur peut voir et enregistrer des images publicitaires ou des produits placés dans les films sans en être conscient. Ainsi une recherche à démontrer que les consommateurs mémorisés, sans traitement conscient, les marques ou produits présentés dans les films.58 57 58 www.inserm.fr, La mémoire. www.tns-sofres.com 48 Chapitre 2 • La mémorisation PARTIE II Section 2 • Le stockage de l’information Les relations entre les types de mémoire font l’objet d’une controverse. Le point de vue traditionnel considère que les mémoires à court terme sont des systèmes séparés. Des recherches plus récentes penchent plutôt en faveur d’une interdépendance entre les deux : selon le cas différents niveaux de traitement interviennent, qui activent certains aspects de la mémoire plutôt que d’autres. Ces approches sont appelées « modèles d’activation de la mémoire »59. Plus l’effort de traitement l’information est important, plus l’information a des chances d’être stocké dans la mémoire à long terme. Réseaux associatifs Une information entrante est stockée dans un réseau associatif contenant de nombreuses informations organisées en fonction d’un ensemble de relations. Le consommateur a organisé des systèmes de concepts liés aux marques, aux fabricants et aux magasins. Ces unités de stockage, nommées « structures de connaissances », sont comme des toiles d’araignée reliant des données. Ces informations sont placées dans des nœuds connectés par des liens associatifs au sein des ces structures. Les informations considérées comme similaires sur un point ou un autre sont regroupées en blocs sous une catégorie plus abstraite. Les nouvelles informations entrantes sont interprétées en fonction de la logique de la structure déjà en place60. Selon le « modèle de traitement hiérarchique », un message est traité en mode ascendant : le traitement commence à un niveau très élémentaire puis implique des opérations de plus en plus complexes nécessitant une capacité cognitive plus élevée. Si le traitement d’un message publicitaire, tel que le placement de produit, échoue à un niveau et ne passe pas au niveau supérieur, il est abandonné et la capacité de traitement est allouée à d’autres tâches61. Un réseau associatif se développe avec les liens qui se forment entre les nœuds. Exemple d’un consommateur ayant un réseau « parfum ». Chaque nœud représente un concept apparenté à la catégorie. Ce nœud peut être un attribut, une marque, une personne célèbre associée à un parfum, ou même un produit apparenté. 59 Michael Solomon, Comportement du consommateur, Paris, Person Education France 6e édition, 2005, p 94. Michael Solomon, Comportement du consommateur, Paris, Person Education France 6e édition, 2005, p 97. 61 I. Fontaine, Impact persuasif du rôle accordé aux marques au sein de supports non publicitaires : le cas du placement des marques dans les films, Acte du 18 Congrès AFM de Lille, 2002, p177-200. 60 49 Chapitre 2 • La mémorisation PARTIE II Un réseau parfum pourrait inclure des concepts tels que les noms « Chanel », « Guerlain » ou Opium, ainsi que des attributs tels que « sexy » ou « élégant ». Lorsqu’une marque est très représentative de sa catégorie, on dit qu’elle est typique, ou qu’elle a un fort degré de typicalité. 62 S’il est invité à citer des parfums, le consommateur ne se rappellera que les marques contenues dans la catégorie appropriée. Ce groupe constitue « l’ensemble évoqué » de cette personne. Un nouvel arrivant qui souhaite se positionner comme membre d’une catégorie (par exemple, un nouveau parfum de luxe) doit fournir des indices qui facilitent son classement dans celle-ci. Figure 3 : Réseaux associatifs Source : www.cybergeo.revues.org L’activation de la mémoire Une signification peut activée indirectement. Lorsqu’un nœud est activé, d’autres nœuds associés commencent a être stimulés. La signification se répand ainsi à travers le réseau, ce qui évoque des concepts, notamment les marques concurrentes et les attributs correspondant, qui sont utilisés pour former une attitude vis-à-vis de la marque. 62 Michael Solomon, Comportement du consommateur, Paris, Person Education France 6e édition, 2005, p 97. 50 Chapitre 2 • La mémorisation PARTIE II Ce processus d’activation permet aux consommateurs de basculer entre plusieurs niveaux de signification. La façon dont une information est stockée en mémoire dépend du type de signification qui lui est assigné. Ce type de signification détermine à son tour comment et quand la signification sera activée. Par exemple, la trace mémorielle d’un placement de produit peut être stockée de plusieurs façons : Spécificité de la marque : selon les qualités revendiquées par la marque Spécificité du placement : selon le film et le contenu du placement Identification de la marque : selon le nom de la marque Catégorie du produit : selon le fonctionnement du produit ou son lieu d’utilisation Réaction d’évaluation : selon les émotions positives ou négatives que le message publicitaire suscite, exemple : « ceci semble amusant » 63 Niveau de connaissance La connaissance est codée à différents niveaux d’abstraction et de complexité. Les concepts signifiants sont des nœuds distincts (par exemple : élégant). Ils peuvent être combinés dans une unité plus vaste, nommée proposition ou croyance. Une proposition relie deux nœuds pour former une proposition plus complexe qui peut servir de bloc d’informations. Par exemple, une proposition peut être « Chanel N°5 est un parfum pour les femmes élégantes ». Les propositions sont à leur tour intégrées pour produire une unité complexe, le « schéma » qui est un cadre cognitif développée avec l’expérience. Les informations cohérentes avec un schéma existant sont plus facilement codées. La capacité à monter et descendre parmi les niveaux d’abstraction accroit la facilité et la souplesse du traitement. Pour cette raison, les jeunes enfants qui ne possèdent pas encore de schéma bien développés ne sont pas en mesure d’utiliser les informations d’achat aussi efficacement que les adultes64 Le script (séquence d’événements attendus par un individu), est un type de schéma cohérent avec le comportement d’un consommateur. Il s’attend à une certaine séquence d’événements et risque de se sentir mal à l’aise si le script ne se déroule pas de la manière attendue. 63 Michael Solomon, Comportement du consommateur, Paris, Person Education France 6e édition, 2005, p 95. I. Fontaine, Etude des réponses mémorielles et attitudinales des spectateurs exposés aux placements de marques dans les films, Thèse Docteur en science de gestion, 3 décembre 2002 64 51 Chapitre 2 • La mémorisation PARTIE II Par exemple un script de séquence d’événements pour une visite chez le dentiste : 1. Je vais en voiture jusqu’au cabinet dentaire 2. Je lis de vieux magazines dans la salle d’attente 3. J’attends l’appel de mon nom 4. Je salue le dentiste et m’installe dans le fauteuil...etc. Ce désir de respecter un script explique en partie pourquoi les innovations comme les automates bancaires, les pompes à essence en libre service ou les caisses automatiques d’hypermarchés rencontrent parfois la réticence des consommateurs qui ont besoin d’un certain temps avant d’adopter une nouvelle séquence d’événements65. Section 3 : L’extraction des informations L’extraction est le processus de récupération des informations dans la mémoire à long terme. Chaque personne a une grande quantité d’information en tête, qui n’est pas toujours disponibles à la demande. Facteurs influençant l’extraction Des facteurs psychologiques expliquent certaines différences dans les capacités de souvenir. Les personnes âgées montrent toujours des capacités de souvenir inférieures pour des informations immédiates, telles que les prescriptions d’une ordonnance, mais les événements de leur jeunesse leur reviennent parfois très clairement. D’autres facteurs sont liés à l’environnement de transmission du message. Il est évident que le souvenir est meilleur lorsque le consommateur a porté plus d’attention au message à l’origine. Il semblerait que les informations sur une marque innovante (la première à entrer sur un marché) soient plus faciles à se remémorer que celles des suiveurs, car l’introduction de ce premier produit attire une attention qu’aucun concurrent n’a encore détournée 66 L’environnement de visualisation du message peut aussi affecter son souvenir. Par exemple durant un match de base-ball, les publicités sont nettement moins bien mémorisées que durant un match de football, parce que le rythme du base-ball n’est pas régulier et comporte des temps morts durant lesquels l’attention peut diminuer considérablement. 65 www.marketingpower.com, Journal of marketing research, A Role Theory Perspective on Dyadic Interactions: The Service Encounter, 1985. 66 www.e-marketing.fr, Rita Mazzoli, Quand l’innovation propulse la marque, 1er Mai 2004. 52 Chapitre 2 • La mémorisation PARTIE II Une étude a montré qu’un consommateur mémorise le même nombre de spots dans un écran court (7 spots) que dans un écran long (14 spots), soit une moyenne de 3 spots. Ce qui signifie qu’un annonceur a beaucoup plus de chance que sa publicité soit mémorisée dans un écran court. De plus, un spot placé en fin ou en début de l’écran publicitaire a une probabilité de mémorisation supérieure de 17%67. La mémorisation varie selon les médias, pour cette raison un indicateur a été crée, le Bêta. On estime qu’il est de 75 % pour le cinéma, 15% pour la télévision, 11 % pour Internet, 9.5 % pour l’affichage et 5 % pour la radio68. Une enquête sur les effets de la publicité post-expérience souligne à quel point les messages publicitaires peuvent influencer nos expériences quotidiennes. Le langage et les images d’une publicité vue récemment peuvent se confondre avec des souvenirs d’expériences personnelles et nous amener à confondre ce que nous avons vu dans la publicité avec notre propre expérience du produit. Cette enquête a montré que si un consommateur voit une publicité après avoir expérimenté lui-même le produit, le message peut modifier le souvenir de son expérience69. Extraction liée à l’humeur L’individu retrouve plus facilement les informations s’il est dans le même état psychologique que lorsqu’il les a apprises. Ce phénomène, nommé effet de congruence à l’humeur, souligne l’importance d’orienter l’humeur d’un consommateur au moment de l’achat. Ainsi, le consommateur se souviendra mieux d’une publicité si son humeur ou son niveau d’éveil lors de l’exposition est analogue à son état dans l’environnement d’achat. En recréant les indices présents lors de la première présentation des informations, il est possible d’améliorer le souvenir. Familiarité et mémorisation Une familiarité antérieure avec un produit améliore sa mémorisation. L’un des premiers objectifs du marketing est de créer et d’entretenir la présence à l’esprit du produit. Plus un consommateur a d’expériences avec ce produit, mieux il exploite les informations sur ce produit. Il existe cependant un inconvénient, une extrême familiarité peut nuire à l’apprentissage et à la mémorisation. 67 www.lemarketingenligne.com, Comment mesurer la mémorisation des publicités sur Internet, 4 nov. 2010. Ibid. 69 www.e-marketing.fr, Christophe Maëc, Le comportement des consommateurs, 23 Août 2011. 68 53 Chapitre 2 • La mémorisation PARTIE II Des consommateurs très familiers avec une marque ou une publicité remarquent moins d’attributs parce qu’ils ne pensent pas qu’un effort cognitif leur fera mieux connaître le produit70. Saillance et mémorisation La saillance d’une marque est sa proéminence ou son degré d’activation dans le cerveau. Les stimuli qui contrastent avec leur environnement retiennent plus l’attention et ont donc plus de chance d’être mémorisés. Les techniques augmentant la nouveauté d’un stimulus améliorent souvent sa mémorisation, ce phénomène est appelé d’effet Von Restorff 71. Cet effet explique pourquoi une publicité inhabituelle ou un emballage original améliorent la mémorisation de la marque. L’introduction d’un élément de surprise peut aider considérablement le souvenir même si cet élément n’est pas cohérent avec les faits présentés72. Notions de la mémoire implicite et explicite Définition et fondements La mémoire implicite, également connue sous le nom de mémoire non déclarative, est le souvenir des habiletés perceptives, motrices ou cognitives en l’absence de récupération consciente. Par exemple, un patient amnésique peut oublier le nom de ses enfants mais il n'oublie pas comment parler. Tandis que la mémoire explicite, appelée mémoire déclarative, est observée lorsque l’accomplissement d’une tâche requiert la récupération consciente d’expériences passées. C'est le souvenir des faits personnels. Ainsi, nous observons une mémorisation implicite chez un individu qui, après avoir été exposé à un mot et sans se souvenir de cette exposition, est ensuite capable de le lire ou de l’épeler plus rapidement que des sujets non exposés. On parle en revanche de mémorisation explicite lorsque l’individu cite le mot précédemment montré, au cours d’un test de rappel ou de reconnaissance.73 70 Michael Solomon, Comportement du consommateur, Paris, Person Education France 6e édition, 2005, p 89 71 Blogs.wefrag.com, Stratégies et caractéristiques du placement de marques, 14 mars 2010. 72 http://wn.com, Von Restorff effect. 73 www.snptv.org, Efficacité publicitaire : Marques, mémoires et comportements : Influence des facteurs temps et répétition. 54 Chapitre 2 • La mémorisation PARTIE II Sans entrer dans les détails, certains placements de produits, ne sont pas traités par la mémoire dite explicite mais sont tout de même stockés dans la mémoire à long terme et peuvent provoquer par exemple un sentiment (positif ou négatif), une envie… Cette distinction était incontournable dans la partie consacrée à la mémorisation. Néanmoins, cette étude ne traitera que le cas de la mémoire explicite. Synthèse Ce chapitre consacré à la mémorisation, permet de comprendre qu’avant d’être mémorisée une information passe par différentes phases et à chaque phase un risque de perte totale ou partielle subsiste. C’est la mémoire à long terme qui permet le souvenir mais avant d’arriver à ce stade le chemin est long et semé d’embuches. Une information n’est jamais mémorisée seule, elle est intégrée à un réseau existant dans lequel chaque information présente un certain degré d’interdépendance avec les autres. Bien évidement, ce réseau est différent d’une personne à une autre mais des similitudes entre les personnes de même « culture » existent. Des relations universelles permettent l’utilisation de ces réseaux par les annonceurs. Par exemple le rouge symbolise la passion. Mais il ne suffit pas à un message d’être placé dans la mémoire à long terme, faut-il encore être « disponible ». De nombreuses informations sont stockées dans cette partie du cerveau mais elles ne sont pas toutes actives. Elles peuvent être gardées dans le conscient ou l’inconscient. Leur récupération constitue également un processus plus ou moins long et complexe. En somme, la mémoire a besoin d’être stimulée en permanence et plus un consommateur a de précédent avec un produit ou une marque plus le message diffusé aura de chance d’être utilisé au moment souhaité. 55 Chapitre 1 • Etude qualitative sur la sensibilité des spectateurs au placement de produits PARTIE III PARTIE III : ETUDES DE L’IMPACT DU PLACEMENT DE PRODUIT Chapitre 1 : Etude qualitative sur la sensibilité des spectateurs au placement de produits L’objectif de ce questionnaire est de mesurer la sensibilité des spectateurs aux marques/produits placés dans les films. Section 1 • Elaboration du questionnaire 1.1 Détermination de la taille de l’échantillon Afin d’obtenir des résultats représentatifs, il est essentiel d’obtenir un nombre de réponses conséquentes. Afin de déterminer la taille minimale de l’échantillon, nous allons utiliser la loi normale pour formule : n = (z2 p q) / e2 n = taille de l’échantillon z = valeur fournie par la table de la loi normale (5 % d’erreur soit z = 1,96) p = pourcentage de la population française de plus de 15 ans74 (81 %) q = 1-p e = marge de fluctuation acceptée pour généraliser les résultats 5 % Donc n = ((1,962)*0,81*0,19) / (0,052) = 236.48 Donc la taille de l’échantillon interrogé devrait être au minimum de 237 personnes. L’échantillon de cette étude se compose de 271 personnes sondées. 74 www.insee.fr, Population âgée de moins de 15 ans, 2011. 56 Chapitre 1 • Etude qualitative sur la sensibilité des spectateurs au placement de produits PARTIE III 1.2 Le tirage de l’échantillon Il existe différentes manières d’extraire un échantillon de base de sondage. Il y a le sondage aléatoire fait à partir d’un tirage au hasard. C’est celle que nous avons effectuée pour des raisons de coûts et de temps. L’autre technique se trouve dans le sondage empirique c’est la plus représentative de la population mère. Il faut déterminer une population suivant des critères socio-demographiques (âge, sexe, revenu, région). Néanmoins dans notre cas, une segmentation de la population ne serait pas perspicace car, le cinéma est un loisir touchant tous les français quelque soit la catégorie socio professionnelle ou la tranche d’âge. 1.3 Rédaction du questionnaire Ce questionnaire s’efforce de répondre aux questions suivantes : 1. Le spectateur est-il conscient qu’il reçoit des messages publicitaires lors du visionnage d’un film ? 2. Quel est le ressenti des spectateurs face aux placements de produits ? 3. Le placement de produits est-il un réel facteur influant sur l’intention d’achat ? 4. Quelles sont les catégories de produits auxquelles les spectateurs accordent le plus d’attention ? Et celles qui suscitent l’intention d’achat ? 5. Le placement de produits est-il une bonne technique marketing pour lancer de nouveaux produits ? Le spectateur s’attend-il à ces découvertes ? Chaque question posée avait pour but de répondre aux interrogations précédentes (cf. Annexe 3) 57 Chapitre 1 • Etude qualitative sur la sensibilité des spectateurs au placement de produits PARTIE III Section 2 • Administration du questionnaire Après avoir élaboré le questionnaire, une interrogation se posait ; à savoir comment toucher un maximum de personnes avec un taux de retour important ? L’utilisation de Facebook est apparue comme une évidence. En effet, ce réseau social réunit plus de 622 millions de personnes75 et chaque personne inscrite possède en moyenne 13076 « amis facebook », c’est le plus grand réseau social mondial. Hébergement du questionnaire en ligne Dans un premier temps, le questionnaire a été hébergé en ligne, sur le site : www.monenquete-enligne.fr. L’objectif de cette démarche était de faciliter la manipulation pour les sondés. En effet, demander à chaque personne de renvoyer par e-mail un fichier complété auparavant, avait de fortes chances de diminuer le nombre de réponse. L’idée était de faire le plus simple et rapide possible. Ce site d’hébergement permettait d’obtenir un lien web, sur lequel il suffisait de cliquer afin d’être directement redirigé sur le questionnaire, http://www.mon-enquete enligne.fr/index.php?sid=26264&lang=fr. Après avoir répondu aux questions, il suffisait de cliquer sur « envoyer » (cf. annexe 4). Diffusion de l’information sur le réseau Facebook Un e-mail (ci-dessous) avec le lien du questionnaire a été envoyé sur facebook à 180 contacts. Ce message est à destination de tous mes AMIS de Facebook, j’insiste sur le mot « amis » car j’ai une petite faveur à vous demander. Dans le cadre de mon mémoire de fin d’études je réalise une enquête, et dans le but de toucher un public le plus large et le plus varié possible, j’utilise Facebook pour diffuser l’information. C’est un petit questionnaire dans lequel il suffit de cocher des cases, ceci vous prendra à peine 5 minutes (lien ci-dessous). Je ne vous précise pas le sujet car je souhaiterais des réponses spontanées. Pourriez-vous également transférer cet e-mail à vos amis. Merci beaucoup Cliquer ici : http://www.mon-enquete enligne.fr/index.php?sid=26264&lang=fr 75 76 www.lepost.fr, Facebook a exactement...622.276.680 utilisateurs dans le monde !, 24/02/2011. www.seomanager.fr, juillet 2010 58 Chapitre 1 • Etude qualitative sur la sensibilité des spectateurs au placement de produits PARTIE III Les retours ont été très rapides, deux heures après l’envoi du questionnaire, le logiciel comptabilisait une trentaine de réponses. Après une semaine, les réponses se faisaient assez rares, de ce fait, un nouveau message a été posté sur le « mur facebook » cette fois (ci-dessous), ce qui a engendré une nouvelle vague de réponses. Très rapidement, de nombreuses personnes ont commenté ce lien (ci-dessous), et à leur tour ont partagé ce lien sur leur propre mur, cette manipulation a permis de toucher des personnes qui au départ n’avait pas accès au lien du questionnaire. En somme, en deux semaines et demi 271 réponses ont été comptabilisées. 59 Chapitre 1 • Etude qualitative sur la sensibilité des spectateurs au placement de produits PARTIE III Section 3 • Résultats et analyse du questionnaire Le tri à plat ainsi que le tri croisé des résultats de ce questionnaire se trouvent en annexe 5 et en annexe 6. 3.1 La composition de l’échantillon La taille de l’échantillon analysé est assez importante afin d’être représentative puisqu’elle se compose de 271 personnes. En revanche, elle se trouve être peu équilibrée, que ce soit en terme d’âge ou de sexe, en raison de moyens limités. En effet, plus de 47% des sondés ont entre 20 et 30 ans et la majorité sont des femmes (environ 73%). Néanmoins, nous espérons obtenir des résultats concluants grâce à la taille importante de l’échantillon. 3.2 Un terme globalement peu connu du grand public Le dépouillement de la question n°1 « Savez-vous ce qu’est le placement de produits au cinéma ? », met en exergue une assez mauvaise connaissance du terme « placement de produits » de la part du public visé. Spontanément, seulement 35 % des interrogés affirment connaître le terme de placement de produits. Parmi ces 35 %, sans prendre en compte les tranches d’âges des deux extrémités (10-15 ans, 60 et plus), étant moins représentatives en raison d’un nombre limité de sondés, ce sont les 50-60 ans et les 30-40 ans, suivis de près par les 20-30 ans, qui sont les plus nombreux à connaitre ce terme. Le croisement entre cette question et le sexe des sondés, permet de mettre en relief que les hommes sont beaucoup plus nombreux, plus de 51 % contre environ 29 % pour les femmes, à être familier avec le placement de produits. Et enfin, sans prendre en compte les retraités, qui sont au nombre de trois, ce sont les chefs d’entreprises, les cadres suivis des étudiants qui sont les plus nombreux à connaître ce terme. En effet, les journaux et magazines économiques, en tous genres, communiquent de plus en plus au sujet de cette pratique et elle commence à être étudiée dans les filiales commerciales et de communication. Cette première question a mis en lumière le fait que le terme de « placement de produit », n’est que très peu connu du public, néanmoins cela ne signifie pas que ce soit le même constat pour la technique dans son utilisation. Après avoir défini le terme en question n°2, la question n°3 avait pour objet de mettre en évidence la notoriété de l’application de cette pratique. 60 Chapitre 1 • Etude qualitative sur la sensibilité des spectateurs au placement de produits PARTIE III 3.3 Une pratique, quant à elle, bien connue par les consommateurs Le croisement des réponses aux questions n°1 « Savez-vous ce qu’est le placement de produits au cinéma ? » et n°3 « Remarquez-vous les placements de produits lorsque vous regardez un film ? » met en évidence la conscience des sondés quant à la pratique de cette technique. En effet, un grand nombre de personnes ayant affirmé ne pas connaitre le terme de placement de produits, remarquent, néanmoins, leurs présences dans les films, que ce soit régulièrement ou occasionnellement. Plus de 58% des sondés ayant répondu « non » à la première question affirment remarquer cette pratique dans les films et 64.46% de façon occasionnelle. En somme, seulement 9.23% des personnes sondés répondent ne pas connaitre le terme et ne pas remarquer les placements lors des visionnements des différents films. Et seulement 9.60% de l’échantillon total, ne remarquent jamais l’utilisation de cette pratique. (Une seule personne connaissait le terme et ne remarquait jamais sa présence). Donc, plus de 90% des personnes, sont conscientes de l’utilisation de cette pratique. Nous pouvons donc en conclure, que le terme usuel donné à cette technique reste assez flou pour une grande partie de la population mais dans son utilisation cette pratique est bien connue par les consommateurs même s’ils ne peuvent la définir avec précision. 3.4 Facteurs influençant la « détection » des placements de produits La lecture des résultats de la question n°4 « Selon vous, de quoi dépend le fait que vous remarquiez ou non les placements de produits dans un film ? » montre que la majorité des personnes (plus de 50 %) pensent remarquer les placements en raison du plan de caméra, c'est-à-dire de sa visibilité à l’écran. Proportionnellement au nombre de sondés par tranches d’âges ce sont les 40-50 ans et les 60 ans et plus qui sont les plus nombreux à affirmer cette proposition. Globalement toutes les tranches d’âge, s’accordent sur cette dernière proposition à part les 50-60 ans qui donnent plus d’importance à la marque. Ce constat confirme la présence d’un public assez averti puisque le plan de caméra fait partie des critères assez « techniques », nous nous attendions à une majorité de réponses concernant le critère de la marque. Les réponses autres ont été majoritairement « selon la fréquence », « selon mon attention » et « selon mon intérêt pour la nature du produit ». Ces réponses vont également dans le sens d’un public assez averti, car elles font preuve d’une réflexion relativement mure sur le sujet. 61 Chapitre 1 • Etude qualitative sur la sensibilité des spectateurs au placement de produits PARTIE III 3.5 Une technique relativement bien perçue par le public Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les consommateurs ne sont pas hostiles à cette pratique. Selon la question n°5 « Pensez-vous que les placements de produits nuisent à la qualité d’un film ? », plus de 56 % des sondés estiment que le placement de produit ne nuit pas à la qualité d’un film. Seulement 4.20% pensent le contraire. Et environ 39 % estiment que cela dépend du cas de figure. Etonnamment ce sont les 10-15 ans qui sont les plus réticents, à l’autre extrémité ce sont les 20-30 ans qui sont les moins nombreux à considérer de façon négative cette pratique. A la question n°6 « Pensez-vous que le placement de produits soit utile pour rendre un film plus réaliste ? », les avis sont partagés, environ 46% de l’échantillon pensent que non, environ 22 % estiment que cette technique rend les films plus réalistes et 32 % estiment que cela dépend du produit placé et/ou du film. En somme, moins de la moitié des sondés estiment de façon catégorique, que le placement de produits n’est pas utile au réalisme de l’œuvre cinématographique. Nous pouvons en conclure, que l’image de cette pratique n’est pas négative puisque très peu de personnes pensent qu’elle peut nuire à la qualité d’un film, néanmoins, elle n’est pas non plus considérée comme indispensable car seulement 22% des sondés jugent qu’elle contribue au réalisme de l’œuvre. L’objectif de la question suivante était de comprendre le ressenti des sondés dans la nuance la plus poussée. Les questions précédentes permettent de comprendre leur point de vue global sur cette technique mais la question sept « Avez-vous déjà été agacé par un placement de produits trop insistant ? », permet de l’appréhender de façon plus personnelle, et nous montre si les personnes se sont posé ces questions avant cette étude et si ce sujet leur est familier. La majorité des sondés disent ne jamais avoir été agacé par cette technique (plus de 62 %), contre 37% de l’échantillon qui affirme avoir déjà été agacé par un placement de produit. Par tranche d’âge, proportionnellement, ce sont les 60 ans et plus qui ont été les plus agacés et ce sont les 50-60 le moins. 37 % est un chiffre important, mais qui révèle une réelle connaissance de cette pratique, de plus cela ne prouve pas nécessairement un mauvais apriori global mais peutêtre seulement quelques cas très ponctuels. 62 Chapitre 1 • Etude qualitative sur la sensibilité des spectateurs au placement de produits PARTIE III Afin de confirmer cette hypothèse, nous avons croisé les réponses des questions n°5 « Pensezvous que les placements de produits nuisent à la qualité d’un film ? et n°7 « Avez-vous déjà été agacé par un placement de produits trop insistant ? » En effet, le croisement de ces deux questions, montre que pour une partie cette mauvaise image n’est que le reflet de cas occasionnels. Puisque, plus de 21 % des personnes ayant répondu que cette technique nuit à la qualité d’un film, n’ont jamais été agacé par un placement et quasiment 20 % des sondés qui ont répondu que cette pratique ne nuit en aucun cas à la qualité du film, prétendent avoir déjà été agacé par un placement. Néanmoins, même si les personnes pensant que cette technique nuit à la qualité d’un film sont peu nombreuses (4.20%), parmi elles plus 78% ont également déjà été agacées par un placement de produit. Ce qui nous ramène à 4% de personnes sondées à priori réfractaires à cette technique. La question n°8 « Pensez-vous que la présence de produits ou marques peut vous empêcher d'aimer un film ? », va dans le même sens que les réponses précédentes, seulement 4.80 % des sondés pensent que la présence de marques ou de produits peuvent les êmpecher d’aimer un film, plus de 80 % estiment que cela n’a aucun impact et enfin, environ 14% ont un point de vue plus contrasté en cochant la case « en partie ». Nous pouvons donc affirmer que la population tout en étant consciente de la courante pratique du placement de produits n’est pas réfractaire à cette forme de communication. Ce constat est crucial dans cette étude, car il conteste de nombreuses publications sur le sujet, qui justifient une moins mauvaise image que le spot publicitaire classique, par la méconnaissance du sujet par les spectateurs. 3.6 Influence sur l’acte d’achat La question n° 9 est plus direct, « Pensez-vous avoir été incité à acheter un produit placé dans un film que vous avez vu ? ». Bien évidemment, elle ne permet pas une réelle réponse à cette « grande » interrogation, puisqu’une partie du mécanisme d’achat s’effectue de manière inconsciente. Néanmoins, elle permet d’obtenir le point de vue de la population et de confirmer au moins ceux qui ont été incité. Les résultats montrent que plus de 31 % des personnes interrogées affirment déjà avoir été incité à acheter un produit placé dans un film. Ce sont les 10-15 ans et les 20-30 ans qui sont les plus nombreux à estimer avoir déjà été incité à l’achat par cette pratique. 63 Chapitre 1 • Etude qualitative sur la sensibilité des spectateurs au placement de produits PARTIE III A l’inverse ce sont les 60 ans et plus ainsi que les 30-40 ans sont les plus nombreux à ne jamais avoir été incité à l’achat. Ces chiffres sont cohérents, car les enfants et les jeunes semblent être les plus sensibles à cette technique. Les hommes et les femmes sont quasiment autant incités à l’achat, néanmoins le pourcentage est légèrement plus élevé chez les femmes, sans en être réellement significatif (différence de 3.95 %). On peut en conclure qu’au moins 31% de la population est sensible aux placements produits au point de passer à l’acte d’achat après avoir vu une marque ou un produit. Pour les 69 % restant, nous pouvons penser qu’une certaine partie peut être influencée de façon inconsciente et indirecte et une autre certainement complètement imperméable à cette forme de communication. D’ailleurs la question n°11, « Si non, pensez-vous que vous pourriez l'être dans le futur ? », nous montre que parmi les personnes qui n’ont jamais été incité à acheter un produit placé, plus de 50 % pensent pouvoir l’être dans le futur, contre environ 43% qui sont certains de ne pas l’être et enfin, un peu plus de 6% sont certains d’être influencé un jour. 3.7 Influence en fonction de la nature du produit Afin de définir aux quelles natures de produits les sondés accordent plus d’intérêt, en dixième position a été posé un complément de la question n°9, « Si oui, quelle nature de produits ? » En première position se trouvent les vêtements avec 23.67 % suivi de près des accessoires avec 21.63 % et en troisième position se trouvent les nouvelles technologies. Les catégories de produits qui attirent le moins d’intérêt sont les services et les équipements sportifs. Les 10-15 ans sont les plus sensibles aux accessoires, les 15-20, les 40-50 ans ainsi que les 20-30 ans aux vêtements, les 30-40 ans apportent tant d’intérêt aux produits alimentaires qu’aux vêtements. Pour les 50-60 ans sont au même niveau les produits alimentaires et les nouvelles technologies. Pour les femmes, les produits qui attirent le plus leur attention sont les vêtements et les accessoires alors que pour les hommes ce sont les véhicules et les nouvelles technologies (les services et les équipements sportifs ne sont pas pris en compte car le nombre de réponses est trop faible) 64 Chapitre 1 • Etude qualitative sur la sensibilité des spectateurs au placement de produits PARTIE III 3.8 Le placement de produits favorise la découverte de nouveaux produits La question n°12, « Selon vous, le placement de produits au cinéma favorise t-il la découverte de nouveaux produits ? », met en exergue que plus de 61 % des personnes s’attendent à découvrir de nouveaux produits lorsqu’ils regardent un film. Ce sont les 20-30 ans qui sont les plus nombreux à partager cette idée par contre ce sont les 30-40 ans qui le pensent le moins mais avec tout de même 45.76 %. Nous pouvons donc estimer que le placement de produits peut présenter un certain intérêt pour le lancement de nouveaux produits. En analysant la question n°13, « Si oui, quelle nature de produits ? », il en ressort que les spectateurs s’attendent à découvrir de nouveaux produits principalement dans le domaine des nouvelles technologies, vêtements, accessoires, et automobiles. Synthèse L’analyse de ce questionnaire a permis de mettre en lumière certaines théories et surtout d’appréhender l’approche de cette technique par les spectateurs. Contrairement à ce que l’on peut lire au sujet de la « naïveté » des consommateurs à l’égard du placement de produit, son utilisation est bien connue par le public. Certaines réponses spontanées, telles que « ceci dépend de mon attention » ou « cela dépend de l’intérêt que je porte à la marque », prouve une réelle maturité quant à la connaissance de cette pratique. Bien que le placement de produits ne soit pas considéré comme un élément utile pour la qualité du film, il n’est pas non plus un élément nuisible. D’ailleurs, un tiers de la population affirme déjà avoir été incité à l’achat par les produits placés et le plus surprenant est que la quasi-totalité déclare pouvoir l’être un jour. Les catégories de produits auxquels les spectateurs accordent le plus d’attention sont les vêtements, les accessoires et les nouvelles technologies. De plus, nous pouvons souligner que la population considère le placement de produits comme un outil permettant la découverte de nouveaux produits. Les deux questionnaires suivants permettront de confirmer ou bien d’infirmer cette notion. Notons aussi, que la jeune population est la plus incitée par le placement de produits. En effet, de nos jours, la culture des marques est plus importante qu’elle ne l’a jamais été et influence de façon très flagrante l’image de chaque individu, très affectionnée par les plus jeunes. 65 Chapitre 2 • Expérimentation de la mémorisation de placement de produits PARTIE III Chapitre 2 : Expérimentation de la mémorisation de placements de produits Afin de connaître l’impact des placements de produits sur la mémorisation des spectateurs, nous avons décidé de procéder à une expérimentation. Deux films ont été choisis a cette fin, l’un faisant la promotion de nombreuses marques, « Confessions d’une accro du shopping » et le second, une comédie romantique « Sex friends ». Après la diffusion de chaque film, un questionnaire a été distribué aux sondés (deux groupes distincts). Section 1 • Méthodologie de l’étude 1.1 Choix des films « Sex friends » Le choix s’est porté sur le film « Sex friends » en raison de son genre (comédie romantique destinée à une cible large) et de sa récente sortie au moment de l’expérimentation car il était crucial que les sondés voient le film pour la première fois. De plus, comparativement à d’autres comédies, celle-ci présentait des placements plus intéressants et variés dans leurs formes. « Confessions d’une accro du shopping » Ce long métrage tourné en 2009, est totalement « submergé » de placements de produits qui sont au centre du scénario. L’actrice principale est obnubilée par les marques et ces dernières font partie intégrante de son quotidien. Si ce film présente des formes de placements variées, la nature des produits est en grande partie occupée par les vêtements et accessoires de mode, de ce fait ce seul film ne suffisait pas afin de valider l’étude. De plus, il est intéressant de comparer deux extrêmes, étant donné que de nombreux spécialistes considèrent qu’un trop grand nombre de placement, diminue leur mémorisation. Il a également été choisi en raison d’une assez faible notoriété, comparativement à des films dans le même esprit (nombreuses marques), tels que « Le diable s’habille en Prada » ou encore « La famille Jones ». 66 Chapitre 2 • Expérimentation de la mémorisation de placement de produits PARTIE III Ces questionnaires devront répondre aux interrogations suivantes : Quels sont les produits ou marques marquant le spectateur ? Obtiennent-ils une meilleure notoriété ? Souhaitent t-ils les acquérir après le visionnage du film ? Y a t il des placements de produits qui ne méritent pas leur place dans le film ? (au niveau de l’intrigue, au niveau de l’attention du spectateur) Quelles techniques employées pour placer un produit engendrent un impact plus important ? Quelle est la considération des spectateurs face à cette technique après avoir visionné un film ? Est-ce la même que pour le premier questionnaire ? Les deux questionnaires se trouvent en annexe 7 et 8 Echantillon Nos deux échantillons, ne pourront répondre aux critères de taille de la loi normale, comme le premier questionnaire, en raison de la difficulté supplémentaire du temps, plus d’une heure trente est nécessaire pour visionner le film puis environ 10 minutes pour répondre au questionnaire. De ce fait, l’un sera composé de 51 sondés et le second de 52. 1.2 Analyse des films Les placements de produits ont été choisis pour les questionnaires en fonction de différents critères, (ci-dessous). Les captures des placements de produits du film « Sex friends » sélectionnés pour le questionnaire se trouvent en annexe 9. Critères étudiés pour chaque placement : Proéminence : durée (en s), nombre d’apparitions Clarté : netteté, perception totale ou partielle de la marque ou du produit, immobile ou en mouvement, visuel ou auditif. Intégration au scénario : insertion dans l’action, contact physique avec l’acteur Localisation à l’écran 67 Chapitre 2 • Expérimentation de la mémorisation de placement de produits PARTIE III Présentation positive ou négative dans l’intrigue du film Section 2 • Analyse des réponses Le tri à plat des résultats obtenus pour les deux filmes se trouve en annexes 10 et 11. Les deux films ont été visionnés par deux échantillons différents et de nombreuses similitudes dans les réponses sont flagrantes. 2.1 Une bonne image du placement de produits A la question « Pensez-vous qu’un film serait meilleur sans placement de produits ? », une grande majorité des sondés ont répondu « non ». (Annexe n° 7 : question n°21 et annexe n°6 : question n°16). Le plus étonnant est de constater que malgré cette attitude positive vis–à-vis de cette pratique, la population est consciente que l’un des objectifs principaux est l’incitation à l’achat. En effet, à la question « Selon vous, quel(s) est/sont les raisons de ces placements de produits dans les films ? », dans les deux questionnaires la réponse la plus choisie a été « Créer un désir de consommation de ces produits ». Ces réponses vont dans le même sens que le premier questionnaire, en l’occurrence, un public bien conscient de l’objectif principal du placement de produits mais peu gêné par celui-ci. 2.2 Un film aux nombreux placements ne nuit pas nécessairement à la mémorisation Dans le questionnaire sur le film « Sex friends » uniquement 7.84 % des sondés ont affirmé avoir été dérangé par un ou plusieurs placements et personne ne l’a été pour le film « Confessions d’une accro du shopping ». Même si ce dernier cas peut paraître surprenant, sachant que le second film peut être considéré par certains comme une « longue publicité », il n’en est pas moins très cohérent. Les marques sont beaucoup plus nombreuses dans le film « Confessions d’une accro du shopping » mais le spectateur se trouve dans un univers bien particulier et « l’intrigue » principale du film tourne justement autour des marques. Alors que dans « Sex friends » qui est une comédie romantique l’I-phone n’est pas indispensable et sa forte visibilité ne contribue d’aucune manière à la qualité du scénario. Voici un exemple flagrant allant à l’encontre de l’idée qu’un nombre très importants de placement nuit à l’image 68 Chapitre 2 • Expérimentation de la mémorisation de placement de produits PARTIE III du film. C’est moins la quantité qui compte que la qualité, un seul placement « matraquant » l’esprit du spectateur suffit à ce qu’il se sente « agressé ». 2.3 Cette technique suscite l’envie d’acheter Au total dans les deux questionnaires dix questions relatives à l’envie d’acquisition d’un produit ou une marque sont posées. La moyenne de réponses positives est de 45,47%. Ce pourcentage est très élevé, bien évidemment, cela ne signifie pas que ces personnes franchiront le pas du réel achat, mais l’envie de posséder un produit a été stimulée. En poussant l’analyse plus loin qu’une simple moyenne, il apparait nettement que les produits connus par le spectateur suscitent davantage l’acquisition, il est également possible de se demander si l’envie ne préexistait pas déjà et que ce questionnaire n’a fait que la révéler. Dans ce dernier cas le placement aura servi de rappel. Cette distinction entre les marques est très flagrante en comparant le foulard vert de la marque « Denney & George » peu connue du public sondé et celle de l’I-phone de la marque Apple jouissant d’une notoriété spontanée en France. Le foulard n’a donné l’envie qu’a 9,62 % alors que l’I-phone à 39,22 %, sachant que 50,98 % le possèdent déjà. De ce fait parmi les personnes ne disposant pas de cet appareil, environ 80 % souhaitent en faire l'acquisition. Alors que paradoxalement c’est le seul produit qui a pu agacer certaines personnes lors du visionnage du film « Sex friends ». Nous pouvons donc nous demander si dans une certaine mesure, une très forte notoriété peut mettre à l’abri, le produit ou la marque, d’une mauvaise image. 2.4 Le placement de produit n’est pas la meilleure technique pour faire découvrir de nouveaux produits Les réponses à la question « Avez-vous découvert de nouvelles marques ou de nouveaux produits au cours de ce film ? » sont très parlantes. Pour le film « Sex friends » aucune personne n’a découvert de nouveaux produits et pour le film « Confessions d’une accro du shopping » seulement 13,46 % affirment avoir découvert des produits. Cette dernière réponse est très surprenante au vue de la quantité de différents produits et marques placées. Nous aurions pu supposer que notre échantillon était bien avertie quant aux différentes marques de renommé en France et aux Etas-Unis, mais leurs réponses aux autres questions ne vont pas 69 Chapitre 2 • Expérimentation de la mémorisation de placement de produits PARTIE III dans ce sens. Pour ne citer qu’un exemple, le produit phare du film « Confessions d’un accro du shopping » est le foulard vert, sa mémorisation a été total alors que le nom de sa marque n’a été mémorisée que par 11,54 % des sondés. Ce contraste met en exergue que la marque était peu connue par le public interrogé ce qui n’est pas très étonnant car cette marque bénéficie d’une moins forte renommé qu’aux Etats-Unis. Au vue de la multitude de différents annonceurs il est évident qu’une majorité des spectateurs ont aperçues au moins une marque qu’ils ne connaissaient pas auparavant, mais n’y ont pas fait attention. En somme, les nouveaux produits ou marques ont un taux de mémorisation beaucoup plus faible et leur communication doit absolument être complétée en amont de la sortie du film via d’autres outils de communication. Cependant, le premier questionnaire met en évidence le fait que les sondés s’attendent à découvrir de nouveaux produits mais paradoxalement ne les mémorisent que très peu. 2.5 La mémorisation est favorisée par la notoriété de la marque Confessions d’un accro du shopping A la question n°2 « Avez-vous aimé le foulard vert que Rebecca a acheté pour son entretien chez Alette » plus de 84% des sondés ont répondu « oui ». Nous pouvons donc affirmer qu’au moins cette partie des personnes a mémorisé ce produit. Mais il est aisé d’avancer que la totalité de l’échantillon se sont également souvenus de ce foulard, car il faisait entièrement partie de « l’histoire ». En effet, le pseudonyme de l’actrice principale était « la fille au foulard vert » et c’est ce même foulard qui lui a permit de rencontrer l’homme de qui elle va tomber amoureuse. Malgré les nombreuses apparitions à l’écran de ce foulard, seulement 11,54 % ont mémorisé sa marque (questions n°4). A la question n°5 « Avez-vous reconnue la marque de l’ordinateur portable de Rebecca ? », Cet ordinateur n’a fait l’objet que de 3 placements très courts et dont le logo n’est visible que dans un seul. Plus de 92 % des sondés, ont mémorisé la marque « Apple », en effet, celle-ci jouit d’une très forte renommée et popularité depuis quelques années. Et plus de 41 % sont tentés de l’acheter (question n°6), contre seulement 9.62 % pour le foulard vert (question n° 3). 70 Chapitre 2 • Expérimentation de la mémorisation de placement de produits PARTIE III Sex friends A la question n°7 « Adam et ses amis aiment boire de la bière lorsqu’ils se réunissent. Avezvous remarqué la marque de cette bière ? » une majorité de personnes ont répondu Heineken, au lieu de Stella Artois. En effet, en France la marque Heineken est beaucoup plus connue nous pouvons donc supposer que cette forte notoriété a induit en erreur les personnes interrogées. Il est possible d’emmètre la supposition que les placements de produits d’une marque de notoriété moyenne, peuvent être bénéfiques pour celle qui dispose d’une notoriété spontanée dans la même catégorie de produits, mais n’ayant pas été placée dans le film. Evidemment, il serait peu judicieux d’en faire une règle, car de nombreux facteurs doivent être réunis (faible visibilité et notoriété de la marque, une présentation assez ressemblante aux produits des autres marques…). 2.6 Placements oraux contribuent a une meilleur mémorisation Confession d’un accro du shopping L’intégralité des personnes interrogées a mémorisé le placement de produit pour « Finance pour les nuls » en question n°8 « Souvenez-vous du titre du livre dans lequel Rebecca a trouvé les informations pour son premier article financier ? ». Ce produit n'a été placé qu'une seule fois, mais la combinaison entre la forte notoriété de la marque et un placement visuel et oral, a été très positive. A la question n°9 « Avez-vous remarqué un ou plusieurs moteurs de recherche Internet ? », seulement 3.85 % n’ont pas mémorisés Google. Ce dernier n’a bénéficié que d’un unique placement mais combiné avec une citation orale. Le constat est le même pour la question n°10 « Selon-vous, dans quel magasin se rend Rebecca avec son patron pour lui acheter un costume ? ». La seule phrase prononcée par l’actrice principale « Mais vous parlez Prada ? », a permis une mémorisation de la quasitotalité des sondés. A la question n °13 : Outre les différents produits présents dans ce film, de grandes enseignes ont également été mises en avant. La/lesquelles avez-vous remarqué ? Après la marque Yves Saint Laurent ayant une très forte notoriété, c’est Barney’s qui a été choisie le plus de fois. Cette dernière n’a pas le même degré de notoriété que la précédente, 71 Chapitre 2 • Expérimentation de la mémorisation de placement de produits PARTIE III mais elle a fait l'objet de plusieurs placements dont l'un oral. Cela dit le fait de donner des propositions de choix doit certainement fausser légèrement les résultats, car la marque Kleinfeld a été choisie 2 fois, alors qu'elle n'a été placé que pour la robe de mariée de l'amie de l'actrice principale, en question n°12, et aucun sondé n'a su la reconnaître. De ce fait on peut se demander si nommer les marques permet seulement un rappel ou bien certaines réponses sont cochées au hasard. Sex friends A la question n°8 « Selon-vous, quelle est la marque de la voiture du collègue d’Emma (rival d’Adam) ? La marque Toyota a fait l'unanimité des réponses avec seulement 4 placements, néanmoins, elle a bénéficié d'un placement oral contrairement aux autres marques de voitures. De plus, à la question suivante, qui demandait de citer le modèle de cette voiture de façon spontanée, plus de 90% des sondés ont su répondre. 2.7 Mémorisation moins importante qu’attendue La mémorisation est au cœur de ce mémoire, de ce fait l’une des principales raisons de l’analyse des questionnaires a été de connaître la propension des sondés à mémoriser les différentes marques du film. Pour ce faire une moyenne pondérée de la mémorisation a été calculée pour les deux films. Le taux de mémorisation pour les deux films confondus est de 59 %. Même si ce taux est élevé il n’atteint pas les 75% de mémorisation avancés à partir de l’indicateur Bêta77. Cela dit nous pouvons prendre en compte le fait que les deux expériences ont été réalisées sur un écran télévisé et non pas dans un cinéma. Le spectateur est beaucoup plus attentif dans une salle de cinéma, isolé de tout bruit et de tout autre visuel et de ce fait de son environnement au moment de visionner l’œuvre. Ce facteur a certainement contribué à un taux plus faible. Néanmoins, ce taux est beaucoup plus important que celui des autres médias : TV 15 % - Affichage 9,5 % - Presse Magazine 10 % - Radio 5 % 78 Il a également été très intéressant de comparer ce même pourcentage de façon séparé pour chaque film. « Sex friends » a obtenu un taux de 51 %, alors que « Confessions d’une accro du shopping l’a devancé avec 66 %. Ce constat est surprenant au vue de la multitude de 77 www.lemarketingenligne.com, Comment mesurer la mémorisation des publicités sur Internet, 4 novembre 2010. 78 Ibid. 72 Chapitre 2 • Expérimentation de la mémorisation de placement de produits PARTIE III marques présentes dans le film, qui d’après différents spécialistes auraient dû se nuire mutuellement. 2.8 Les limites de l’étude La limite principale de cette étude est le nombre de réponses restreintes aux questionnaires; La seconde limite est l’interrogation de personnes de nationalité exclusivement française. Il est évident que d’une culture à l’autre les réponses ne seront pas les mêmes ; Ce questionnaire n’inclut pas les actions marketing qui suivent le placement de produits et qui peuvent, elles aussi, avoir un impact sur la mémorisation ou bien la décision d’achat d’un produit placé. 73 Chapitre 2 • Expérimentation de la mémorisation de placement de produits PARTIE III Synthèse La théorie affirmant qu’un grand nombre de placements nuit aux annonceurs présents dans un film n’a pas été validée par cette expérimentation. En effet, il en est ressorti que c’est davantage la forme du placement et l’image de la marque qui prédominent, puisque le taux de mémorisation a été plus important pour le film « Confessions d’une accro du shopping » et aucun sondé n’a été dérangé par la présence des produits contre quasiment 8% pour le film « Sex friends ». Ce questionnaire a également permis de constater que cette technique provoque « l’envie » chez un important pourcentage de personnes. Par contre, l’hypothèse que cette pratique est adaptée au lancement de nouveaux produits, n’a pas été validée par les questionnaires. Le premier plus théorique, nous a montré que le public s’attend à découvrir de nouveaux produits, alors qu’en pratique, ils en découvrent certainement, mais ne les mémorisent pas ou très peu. Le placement de produit est donc plus performant pour les marques ou produits ayant un taux de notoriété assez élevé avant sa présence dans les films. Une meilleure mémorisation pour les marques renommées n’est en effet pas très surprenant, mais ce qu’il l’est, c’est que dans certains cas, une marque légèrement moins connue peut être confondue avec la marque « top of mind »79. Tel a été le cas pour la bière « Stella Artois » confondue avec la bière « Heineken ». Comme avancé précédemment, les formes de placements ont une importance cruciale. Cette analyse met en avant une très forte mémorisation des placements oraux, en effet cette forme a été de loin la mieux mémorisée pour les deux films. L’un des placements a même été mémorisée à 100%, car en plus de l’énoncé de son nom il a été parfaitement intégré au scénario (« Mais vous parlez Prada ? »). Et la modèle Prius de la marque Toyota a été cité de façon spontanée par 90% des personnes. Le pourcentage de la mémorisation au cinéma est de loin plus élevé que les autres médias, cela dit cette expérimentation a été réalisée sur un écran télévisé et à chaque fois en pleine journée ce qui a certainement diminué l’attention du public ainsi que sa mémorisation. 79 Jacques Lendrevie, Arnaud de Baynast et Catherine Emprin, PUBLICITOR, Paris, Dunod 7ème édition, 2008, p 157. 74 CONCLUSION GÉNÉRALE CONCLUSION GÉNÉRALE Le placement de produit, nous l’avons vu, est un message de communication assez ancien adapté par l’industrie de la publicité. Depuis quelques années, ces publicitaires ont donné à cette démarche marketing une nouvelle jeunesse. Les avancées de cette forme de communication permettent de voir qu’il s’agit d’un phénomène croissant, n’ayant pas encore atteint son apogée et qui est susceptible de perdurer. Les recherches menées au cours de ce mémoire ont soulignés les atouts et les risques potentiels associés à une telle pratique. Ainsi, les annonceurs recherchent principalement trois choses dans le placement de produits : exposer un public attentif et impliquer à leur nom ou à leurs produits, bénéficier du caractère discret de cette communication et du contexte valorisant du cinéma. Cependant, les professionnels lui reprochent son caractère risqué et son succès aléatoire. Les annonceurs ne sont pas en mesure de contrôler leur message, puisqu’ils insèrent leur nom au sein d’une œuvre artistique, dont l’auteur a la maîtrise. En outre, ils n’en connaissent pas la réelle efficacité car elle dépend fortement du succès du film. Néanmoins, ces risques n’ont pas pour effet de freiner les annonceurs. En ce début de 21ème siècle, les marques sont confrontées à de nombreuses difficultés de communication, notamment en termes d’audiences. Auparavant, les populations auxquelles elles s’adressaient étaient parfaitement regroupées au sein de vecteurs de communication de masse. Aujourd’hui on note une fragmentation et une dispersion de l’audience et de ce fait, inéluctablement il est de plus en plus difficile de la toucher. En Europe la législation est particulièrement stricte avec les annonceurs. Dans les pays aux réglementations beaucoup plus souples, la quête du « Saint Graal » des entreprises, autrement dit, être vu par tous les moyens est flagrante. La photographie ci-dessous en témoigne. Publicité à même le sol Photographie prise à Kiev (Ukraine), juillet 2011. 75 CONCLUSION GÉNÉRALE La prise en compte des spécificités du placement de produits et des incertitudes des professionnels a permis d’identifier les besoins de recherche dans ce domaine et d’élaborer la problématique du mémoire. La seule considération de la fréquence et de la proéminence des produits placés est apparue insuffisante pour tenter d’identifier l’impact sur le spectateur. L’expérimentation menée pour les besoins de ce mémoire, permet d’affirmer une réelle efficacité du placement de produits. Cette efficacité se traduit par une forte mémorisation des annonceurs et de leurs produits placés. En effet, la mémorisation est la seule réaction qu’un annonceur puisse raisonnablement attendre d’un spectateur. Quand bien même, des cas anecdotiques existent, il serait utopique de penser que cette communication augmente les ventes de façon directe. D’ailleurs aucune forme de publicité ne peut le garantir. La consommation résulte d’un mix trop complexe pour pouvoir affirmer qu’en utilisant telle technique, la cible se précipitera dans les points de vente. L’évolution de cette technique de communication est inéluctable. La crainte de nombreuses personnes, de voir les films se transformer en une publicité « géante », est peu probable. Car si tel était le cas, le placement de produit n’aurait plus de raison d’exister. Ce n’est pas un vecteur de substitution, mais bel et bien un vecteur complémentaire. L’évolution se trouve dans la forme du placement et plus précisément par l’amélioration de son intégration au scénario. Elle se caractérise par une recherche plus en amont sur les possibilités de valorisation de l’annonceur et de l’œuvre cinématographique. Il serait également possible d’envisager une transformation en « un placement one-to-one parfaitement ciblé », grâce a une solution technologique. Il s’agit de l’insertion numérique a posteriori. En effet, le placement virtuel est aujourd’hui parfaitement maîtrisé d’un point de vue technologique. Les exemples se multiplient : modifications des panneaux, incrustation des marques et logos sur le sol des rencontres sportives etc. Cette technique peut alors facilement s’insérer dans le décor du film par exemple. Ce système permettrait d’adapter les placements suivant le pays de diffusion, de les actualiser en fonction de l’époque et surtout de les ajuster au public ciblé. En outre, il est possible de générer de nouveaux revenus publicitaires grâce aux anciens DVD en y insérant des produits. À l’évidence, la recherche sur le placement de produits n’en est qu’à ses prémices. Serait-il irréaliste d’imaginer que « demain », pour un plus grand impact, un système informatique identifie le public utilisateur du support, puis sélectionne les placements de produits les plus appropriés et choisit alors la version du film qu’il convient de leur diffuser ? 76