E&D
Les Cahiers d’Éducation & Devenir - Numéro 6 - Décembre 2009 1
P
ourquoi l’accompagnement est-il devenu incontournable ?
Le nouveau public scolaire nous impose de passer d’une logique de
transmission à une logique de réception de l’apprentissage. On ne peut plus
concevoir désormais l’enseignement comme une distribution aveugle de
connaissances –lancées « à la volée »- en escomptant que seuls les élèves les plus
rapides ou les plus chanceux les saisissent au passage. Il est devenu nécessaire de
se préoccuper du chemin que les connaissances font, font mal, ne font pas, dans
l’esprit des élèves.
« Accompagnement personnalisé » = tentative de répondre à l’hétérogénéité des
groupes, hétérogénéité des niveaux, des profils, bref, à la variabilité des besoins
des élèves. La personnalisation de l’accompagnement est la condition de son
efficacité.
Nous avons à y gagner un regain de motivation chez nos élèves, qui pourraient
grâce à lui redonner du sens à leur présence dans l’établissement scolaire. Et nous
avons à y gagner notre propre plaisir à enseigner : L’accompagnement représente
en effet un chantier pédagogique immense, c’est un terrain de créativité extrême.
1 – Les enjeux de l’aide à l’élève
a) Quelle définition de la « Difficulté scolaire » ? Expression vague et générique
qui ne dit rien de la nature ni de l’amplitude de la difficulté. Un élève est en
difficulté lorqu’il n’atteint pas le niveau requis par la norme, qui serait celle de la
réussite.
2 représentations différentes - et décisives !- de la difficulté scolaire :
1 – une représentation essentialiste : L’élève est en difficulté.
L’élève peut s’installer dans cet état, vécu comme indépassable. C’est le destin !
L’élève se sent condamné, (je suis nul en... dira-t-il, sous entendant, je l’ai toujours
été, il n’y a aucune raison pour que cela change). La difficulté est en ce sens
constitutive, identitaire : l’élève ne se reconnaît que dans la difficulté, il l’assume, la
revendique, voire, la radicalise : à l’extrême, certains se mettent volontairement
en difficulté dans toutes les disciplines, alors qu’ils ne sont fragiles que dans une
matière : on appelle cela le « suicide scolaire », qui agit paradoxalement par
protection narcissique.
Cette représentation correspond à une conception innéiste de la difficulté,
évidemment très fataliste (déterminisme).
2- une représentation contingente, plus volatile, qui légitime l’aide à l’élève.
L’élève a des difficultés (même les bons élèves peuvent avoir des difficultés)
Difficulté = ponctuelle et non identitaire.
La difficulté est une étape incontournable de l’apprentissage : on n’apprend pas
sans être en difficulté (risque de l’erreur inhérent à l’acte d’apprentissage) Donc, la
difficulté est la norme de l’apprentissage !
Elève en difficulté = pléonasme.
Selon cette représentation, la difficulté est dépassable : l’élève est capable de
progrès. (on parle d’éducabilité, de modifiabilité, ou de plasticité cérébrale) En
pédagogie, la notion de perfectibilité existe.
b) Ce postulat de la perfectibilité a trois conséquences pédagogiques :
L’indispensable inscription dans le temps (tout progrès suppose le passage
du temps).
Il faut tenir compte du temps qui passe, dans toute démarche d’aide et
d’accompagnement :
être patient : L’élève espère une hausse immédiate et mécanique de ses
notes, lorsqu ‘il se remet à travailler. Or, cela n’arrive que très rarement ainsi
et le découragement est à craindre. Il faut donc penser à anticiper cette
période sensible et prévenir l’élève qu’elle peut durer un à trois mois, et
L’ACCOMPAGNEMENT
PERSONNALISE
Chantal BLANCHAR,
Professeur et formatrice, académie
de Rouen
COMMENT ACCOMPAGNER DANS LA CLASSE EXPÉRIENCES ET PRATIQUES ?