collectivités territoriales Paul HERNU Président de section de chambre régionale des comptes Vice-président du club comptable des juridictions financières Fiabilité des comptes et évaluation de la performance dans les collectivités locales La fiabilité des comptes recouvre les notions de régularité, de sincérité et d’image fidèle. Pour être considérés comme fiables, les comptes des collectivités locales doivent donc, en application de leur référentiel comptable et des instructions déclinant ce référentiel, être réguliers, sincères et donner une image fidèle de leur patrimoine et de leur situation financière. Cette définition de la fiabilité des comptes est, bien entendu, commune avec celle énoncée pour les comptes de l’Etat par l’article 27, 3e alinéa, de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1er août 2001. L’évaluation de la performance consiste, pour les collectivités locales, comme pour toute collectivité publique, à mesurer le résultat des activités sur la base des « 3E » : économie, efficience et efficacité. La mesure de l’économie rapporte le coût à l’importance ou au nombre des moyens employés, celle de l’efficience les résultats (production de biens ou de services) au coût des moyens employés et celle de l’efficacité les résultats obtenus aux objectifs fixés. Deux types d’indicateurs sur trois, les indicateurs d’économie et d’efficience, font ainsi appel à la notion de coût. Pour être le plus fidèle possible à la définition de l’efficience, équivalente à celle de productivité dans le secteur marchand, la notion de coût physique doit céder le pas à celle de coût financier et la valorisation doit être effectuée en coût complet, c’est-à-dire intégrer toutes les charges de fonctionnement des moyens humains ou matériels qui, directement ou indirectement, contribuent aux activités de la collectivité. Focalisée pour une large part sur la notion de coût, l’évaluation de la performance gagne donc à pouvoir s’appuyer sur des comptes fiables dont la régularité, la sincérité et la fidélité sont seules à même de garantir une incorporation exhaustive et une évaluation rigoureuse des charges de fonctionnement correspondant au coût complet recherché. A cet égard et au stade actuel de mise au point des référentiels comptables, l’articulation de la comptabilité budgétaire et de la comptabilité générale apparaît plus satisfaisante pour les collectivités locales que pour l’Etat. Dans un cas comme dans l’autre, on relève l’absence ou l’insuffisance de référentiel pour la comptabilité d’analyse des coûts. Ce sont les conditions de mise en œuvre du cadre budgétaire et comptable qui, actuellement, différencient le plus les collectivités locales de l’Etat. L’ARTICULATION DE LA COMPTABILITÉ BUDGÉTAIRE ET DE LA COMPTABILITÉ GÉNÉRALE, SUPPORT D’UNE BONNE ÉVALUATION DE LA PERFORMANCE Les trois types de comptabilités définis pour l’Etat dans la LOLF Le chapitre V de la LOLF, intitulé « Des comptes de l’Etat », dispose, en son article 27 que : « L’Etat tient une comptabilité des recettes 42 et des dépenses budgétaires et une comptabilité générale de l’ensemble de ses opérations. En outre, il met en œuvre une comptabilité destinée à analyser les coûts des différentes actions engagées dans le cadre des programmes. » L’article 28 de la LOLF précise, en outre, que : « La comptabilisation des recettes et des dépenses budgétaires obéit aux principes suivants : – les recettes sont prises en compte au titre du budget de l’année au cours de laquelle elles sont encaissées ; – les dépenses sont prises en compte au titre du budget de l’année au cours de laquelle elle sont payées ». L’article 30 de la LOLF indique, pour sa part, que : « La comptabilité générale de l’Etat est fondée sur le principe de la constatation des droits et obligations. Les opérations sont prises en compte au titre de l’exercice auquel elles se rattachent, indépendamment de leur date de paiement ou d’encaissement. » Selon ces dispositions, la comptabilité budgétaire est définie comme une comptabilité de caisse. Le fait générateur des enregistrements comptables est constitué par l’encaissement de la recette ou le paiement de la dépense et l’année de comptabilisation est celle au cours de laquelle intervient l’encaissement ou le décaissement, y compris au cours de la période complémentaire à l’année civile, dont la durée ne peut excéder vingt jours selon les termes de l’article 28 de la LOLF. En réalité, la comptabilité budgétaire de l’État comporte deux volets. L’un retrace les encaissements de recettes et les décaissements de dépenses selon les critères précités et permet de présenter le résultat budgétaire ou le solde d’exécution des lois de finances. L’autre volet rend compte de la consommation des autorisations d’engagement et des crédits de paiement définis à l’article 8 de la LOLF. La comptabilité générale de l’Etat se distingue de la comptabilité budgétaire sous deux aspects : le fait générateur de l’écriture comptable et le périmètre des opérations comptabilisées. En tant que comptabilité des droits constatés, le fait générateur n’est pas le décaissement de la dépense, mais la constatation de l’obligation ou de la dette, ou l’encaissement de la recette, mais la constatation du droit ou de la créance. En comptabilité d’exercice, le droit constaté ne prend pas seulement comme critère la réception ou l’envoi de la facture, mais plus largement le critère du service fait, même si, à la fin de l’exercice, la facture n’est pas reçue ou envoyée, en raison notamment du fait que la date de constatation ou d’évaluation du service fait ne correspond pas à la date prévue pour la facturation. Enfin, en tant que comptabilité patrimoniale, la comptabilité générale de l’Etat incorpore toutes les charges et tous les produits qui n’ont pas vocation à se traduire par un décaissement ou un encaissement, mais qui ont une incidence sur la variation de son patrimoine et que l’on qualifie de charges ou de produits « calculés », tels les variations de stocks, l’amortissement des immobilisations, le provisionnement des dépréciations d’actifs ou des risques et charges. No 1 - Janvier 2008 - collectivités territoriales Ces différences de critères de fait générateur et de périmètre des enregistrements comptables, entre la comptabilité budgétaire et la comptabilité générale de l’Etat, expliquent l’écart entre le résultat budgétaire et le résultat de la comptabilité générale ou résultat patrimonial. Mais une troisième différence est à l’origine de cet écart. En effet, dans le compte général de l’Etat joint au projet de loi de règlement en application de l’article 54 de la LOLF, le résultat budgétaire, contrairement au résultat patrimonial, agrège les opérations d’investissement et les opérations de fonctionnement. Ainsi, pour l’exercice 2006, le déficit budgétaire s’élève à 40,242 milliards d’euros contre un déficit de 31,619 milliards d’euros pour le résultat patrimonial et un état spécifique, intégré au compte général de l’Etat et reproduit ci-après, présente le retraitement des opérations qui permet de passer d’un résultat à l’autre. (En milliards d’euros) Solde budgétaire ........................................................................ – 40,242 Opérations augmentant le résultat patrimonial par rapport au solde budgétaire : – dépenses d’investissement inscrites au bilan ...................... – restes à recouvrer sur créances de l’année courante ...... + 123,953 + 13,824 Opérations diminuant le résultat patrimonial par rapport au solde budgétaire : – recettes d’investissement inscrites au bilan ......................... – valeur comptable des cessions d’immobilisations .............. – recettes sur créances des années antérieures ................... – acomptes d’impôt sur les sociétés encaissés en 2006 et rattachés comptablement en 2007 ..................................... – soldes des opérations d’inventaire (charges et produits de fonctionnement « calculés », stocks, amortissements et provisions, charges à payer et produits à recevoir) .......... – autres ..................................................................................... Résultat patrimonial ................................................................ – 94,261 – 5,826 – 8,371 – 5,995 – 13,053 – 1,648 – 31,619 Seul le résultat patrimonial ou résultat de fonctionnement de la comptabilité générale, excluant les opérations d’investissement, fondé sur les droits constatés, la comptabilité d’exercice et incorporant les charges et les produits calculés en fin d’exercice au moment des opérations d’inventaire, peut servir de base à l’évaluation de la performance et la comptabilité générale former le socle de la comptabilité d’analyse des coûts des actions engagées dans le cadre des programmes telle que définie à l’article 27 de la LOLF. L’articulation entre comptabilité générale et comptabilité d’analyse des coûts peut être ainsi schématisée : Charges de fonctionnement de la comptabilité générale + Charges supplétives – Charges non incorporables = Charges retenues pour le calcul des coûts complets de fonctionnement en comptabilité d’analyse des coûts (CAC) Les charges supplétives sont les charges non enregistrées dans les charges de fonctionnement de la comptabilité générale qui correspondent à la rémunération (fictive) de moyens de fonctionnement : par exemple, la rémunération (coût d’opportunité) des capitaux propres investis (pour une entreprise) et, pour l’Etat, le coût de certains avantages en nature au titre de l’occupation « gratuite » des bâtiments (1). Les charges non incorporables sont, par exemple, les charges à caractère exceptionnel, telles les dotations aux provisions de certains risques qui, n’étant pas récurrentes et représentatives des charges de la gestion courante, n’ont pas être incorporées dans un calcul de coûts complets. - No 1 - Janvier 2008 Ce calcul s’opère donc, dans un premier temps, par retraitement des charges de fonctionnement enregistrées en comptabilité générale. Mais, comme le rappelle le rapport de la Cour des comptes sur les résultats et la gestion budgétaires de l’Etat pour l’année 2006 (note en bas de la p. 79) : « Les coûts complets sont calculés en intégrant l’ensemble des moyens mobilisés, directement ou indirectement, pour conduire une action ou pour atteindre un objectif. » Le calcul des coûts complets suppose donc, dans un deuxième temps, une méthodologie comportant notamment la définition de clés analytiques de répartition pour ventiler les charges de fonctionnement indirectes entre les différentes actions d’un même programme et obtenir le coût complet de ces actions par sommation des charges directes et de la quote-part de charges indirectes qui s’y rapportent. Comme le souligne la Cour des comptes dans le rapport précité (p. 79), la comptabilité d’analyse des coûts de l’Etat reste encore très lacunaire, en raison de la non-prise en compte de données issues de la comptabilité générale (charges à payer, provisions et amortissement des immobilisations...), mais également de l’adaptation de clés analytiques de répartition des charges indirectes simplement amorcée, sans être généralisée. La Cour souligne également, dans le même rapport (p. 82), que « la mesure de la performance ne pourra revêtir une cohérence d’ensemble et un degré de signification conforme aux exigences de la LOLF que lorsque aura été établi... un lien plus étroit entre les données issues de la comptabilité budgétaire et celles propres à la comptabilité générale. » Sur cet aspect, elle recommande (p. 12 du rapport) l’engagement de travaux pour définir un véritable référentiel de comptabilité budgétaire et assurer son articulation avec le référentiel de comptabilité générale. A cet égard, on peut penser, par exemple, qu’une meilleure articulation de l’un des deux volets de la comptabilité budgétaire, consacré à la consommation des autorisations d’engagement de dépenses, serait de nature à fiabiliser, sur le critère du service fait, le rattachement des charges de fonctionnement en comptabilité générale. En résumé, l’évaluation de la performance des actions de l’Etat semble être lancée sur de bons rails, au regard du caractère étendu du cadre comptable prévu dans la LOLF. Toutefois, l’absence de véritable référentiel de comptabilité budgétaire et de comptabilité d’analyse des coûts et les lacunes de la comptabilité générale qui ont fait l’objet de treize réserves substantielles de la part de la Cour dans son rapport de certification des comptes de l’exercice 2006, ne permettent pas encore (2) à l’Etat de disposer d’un système budgétaro-comptable fiable et complet pour une bonne évaluation de la performance de ses activités. La comparaison du cadre budgétaire et comptable des collectivités locales à celui de l’Etat (3) Le cadre budgétaire et comptable des collectivités locales se distingue fortement de celui de l’Etat, en raison d’une connexion quasi totale (4) de la comptabilité budgétaire et de la comptabilité générale. (1) Sur ce plan, l’expérimentation lancée d’une évaluation du loyer à comptabiliser au profit de l’agence « France-domaine » par les services de l’Etat installés dans des bâtiments dont il est propriétaire, devrait permettre d’incorporer la charge de loyer aux charges de fonctionnement de ces services. (2) Cette constatation doit être nuancée par la prise en compte du fait que les nouvelles règles budgétaro-comptables d’enregistrement des données ne sont devenues pleinement applicables qu’à partir de l’exercice 2006 et qu’il faut nécessairement un temps d’adaptation pour que les services de l’Etat rendent compte de leurs actions en termes de coûts et de résultats. (3) Une note en annexe 1 illustre cette comparaison. (4) Depuis l’exercice 2006, l’instruction budgétaire et comptable M 14, applicable notamment aux communes et aux EPCI, prévoit la débudgétisation des recettes d’investissement au titre des ICNE et des provisions et celle des dépenses d’investissement au titre de la reprise des ICNE et des provisions. Toutefois, cette débudgétisation importe peu ici, dans la mesure où elle n’affecte pas les opérations de fonctionnement, plus particulièrement les charges de fonctionnement seules prises en compte pour la mesure des coûts complets. 43 collectivités territoriales Dans les collectivités locales, l’une et l’autre appliquent, en effet, les mêmes critères d’enregistrement comptable des données, qu’il s’agisse du critère des droits constatés pour l’enregistrement de la créance ou de la dette au titre de l’exercice où elles sont constatées, indépendamment de leur encaissement ou décaissement, du critère du service fait pour le rattachement des charges et des produits de fonctionnement, indépendamment de la réception ou de l’envoi de la facture, ou du critère de prise en comptes des opérations d’inventaire en fin d’exercice, sous la forme de charges et de produits « calculés », pour la mise à jour complète des variations du patrimoine. Cette connexion parfaite entre les deux comptabilités s’exprime, contrairement à l’Etat, par la présentation d’un compte unique de résultat des opérations de fonctionnement, identique en comptabilité budgétaire et en comptabilité générale, sans le besoin d’un état spécifique destiné au raccordement des deux comptabilités. Plus largement, les états financiers des collectivités locales présentent les opérations en deux sections, une section de fonctionnement et une section d’investissement, le solde de chacune d’elles exprimant un résultat identique de la comptabilité budgétaire et de la comptabilité générale (5), avec une section de fonctionnement détaillant les charges et les produits à l’origine d’une variation du patrimoine et une section d’investissement enregistrant les variations du patrimoine et permettant, en fin d’exercice, une actualisation des soldes de bilan. Cette répartition des opérations entre deux sections n’est pas retenue, au stade de leur exécution, dans le compte général de l’Etat et la LOLF ne contient aucune disposition expresse en la matière. Par contre, son article 51 prévoit qu’en prévision, une présentation des recettes et des dépenses budgétaires en une section de fonctionnement et une section d’investissement soit jointe à la loi de finances de l’année. L’état joint à la loi de finances de 2007 peut être synthétisé de la façon suivante (en milliards d’euros) : (5) Sous réserve de la débudgétisation partielle précitée, en investissement, des ICNE et des provisions. Section de fonctionnement Dépenses Recettes Dépenses de fonctionnement (hors personnel) ........................... Charges de personnel ...................................................................... Autres charges de gestion courante ............................................. Charges financières .......................................................................... Dotations aux amortissements et provisions .................................. Reversements sur recettes ............................................................... 33,55 119,15 62,17 39,19 – 62,72 Recettes non fiscales ......................................................................... Recettes fiscales ................................................................................ Produits financiers .............................................................................. Déficit (prévisionnel) de la section de fonctionnement .............. 26,31 267,17 0,52 22,78 Total ..................................................................................................... 316,78 Total ..................................................................................................... 316,78 Section d’investissement Dépenses Recettes Déficit de fonctionnement (prévisionnel) ...................................... Dépenses d’investissement (hors emprunt) ................................... Remboursement d’emprunts ........................................................... 22,8 23,9 72,9 Recettes (hors emprunt) ................................................................... Emprunts ............................................................................................. 5,0 114,6 Total ..................................................................................................... 119,6 Total ..................................................................................................... 119,6 En exécution, le comptes agrégé des collectivités territoriales et des groupements à fiscalité propre, à la fin de l’exercice 2006, se présente ainsi (en milliards d’euros et en termes d’opérations réelles) : Section de fonctionnement Dépenses Recettes Dépenses de fonctionnement (hors personnel) ........................... Charges de personnel ...................................................................... Autres charges de gestion courante ............................................. Charges financières .......................................................................... Excédent de fonctionnement ......................................................... 25,4 40,7 54,0 3,8 29,7 Recettes non fiscales ......................................................................... Recettes fiscales ................................................................................ 65,1 88,5 Total ..................................................................................................... 153,6 Total ..................................................................................................... 153,6 Section d’investissement Dépenses Recettes Dépenses d’investissement (hors emprunt) ................................... Remboursement d’emprunts ........................................................... Variation du fonds de roulement (positive) ................................... 50,5 12,3 2,3 Excédent de fonctionnement ......................................................... Recettes hors emprunt ..................................................................... Emprunts ............................................................................................. 29,7 18,4 17,0 Total ..................................................................................................... 65,1 Total ..................................................................................................... 65,1 44 No 1 - Janvier 2008 - collectivités territoriales Le premier tableau fait très nettement ressortir l’importance du déséquilibre affectant les finances de l’Etat et l’intérêt qu’il y aurait, entre autres éléments, pour apprécier de façon claire et synthétique la performance de sa gestion financière, à le présenter, à la fois en prévision et en exécution des opérations (6). Les prévisions pour 2007 font, en effet, ressortir que les emprunts de l’Etat ne pourront être consacrés qu’à hauteur de 16,5 % au financement de ses investissements, 63,6 % étant destinés à financer le remboursement du capital des emprunts antérieurement contractés et 19,9 % au financement des charges de fonctionnement. Le financement de ces deux derniers types de dépenses caractérise la spirale du surendettement. En effet, des ressources de long terme financent des emplois de court terme et la mobilisation d’emprunts nouveaux pour rembourser d’anciens emprunts revient à payer deux fois une charge d’intérêt pour une même ressource d’emprunt disponible. Ce surendettement se manifeste d’ailleurs par le poids des charges financières prévues au budget 2007 où elles représentent 15,4 % du total des dépenses de fonctionnement (hors reversement de recettes). En comparaison de cette situation, la structure financière des collectivités locales apparaît satisfaisante. En effet, en 2006, 100 % de leurs emprunts ont été consacrés au financement de leurs investissements. Ces derniers ont été financés par autofinancement propre à hauteur de 34,5 % et leurs charges financières n’ont représenté que 3,1 % du total de leurs charges de fonctionnement. Toutefois, ces charges ont progressé de 6,5 % en moyenne par an de 2002 à 2006, si bien qu’après avoir enregistré une capacité de financement excédentaire jusqu’en 2003 (+ 0,4 milliard d’euros), les collectivités locales connaissent un besoin de financement croissant, passé de 2,5 milliards d’euros en 2004 à 4,9 milliards d’euros en 2006, soit 0,32 % du PIB (7). Il paraît donc inéluctable qu’elles soient appelées à s’associer à l’effort de réduction du déficit global des finances publiques auquel l’Etat s’est engagé dans le cadre du programme européen de stabilité et de croissance. Pour les administrations publiques locales, dans lesquelles les collectivités locales représentent plus de 90 % des dépenses, cela signifie un besoin de financement ramené à 0,1 % du PIB et un rythme moyen annuel de progression des dépenses de 2,2 % en volume contre 3,3 % de 1996 à 2006 (8). Pour maîtriser davantage leurs dépenses, les collectivités locales ont besoin d’un contrôle financier interne et d’un contrôle de gestion solides destinés à évaluer leur performance et, en particulier, le coût et l’efficience de leurs activités. A cet égard, la fiabilité de leurs comptes paraît garantie, a priori, par une connexion parfaite de la comptabilité budgétaire et de la comptabilité générale. La tenue d’une comptabilité des engagements de dépenses a vocation à renforcer cette connexion et à fiabiliser le rattachement à l’exercice concerné, sur le critère du service fait, des charges de fonctionnement n’ayant pas donné lieu à réception de facture en fin d’exercice. En outre, cette comptabilité vise à prendre en compte, dans le résultat de fonctionnement du compte administratif (compte d’exécution budgétaire présenté par l’ordonnateur à son assemblée délibérante), les restes à réaliser, c’est-à-dire les engagements de dépenses de fonctionnement n’ayant pas donné lieu à service fait en fin d’exercice, reportables au budget de l’année suivante. Ce cadre budgétaire et comptable pourrait être optimisé en intégrant un référentiel de comptabilité analytique, dont le contenu se limiterait à l’articulation avec la comptabilité générale et à la méthode de répartition des charges indirectes, laissant ainsi aux collectivités locales la possibilité de l’adapter aux spécificités de leurs interventions. Ainsi articulé et complété, le cadre budgétaire et comptable fournirait, en théorie, à la comptabilité d’analyse des coûts, un socle de comptabilité générale solide pour une bonne évaluation de la performance dans les collectivités locales. Toutefois, les conditions actuelles de sa mise en œuvre compromettent cette bonne évaluation. - No 1 - Janvier 2008 LES CONDITIONS DE MISE EN ŒUVRE DU CADRE BUDGÉTAIRE ET COMPTABLE DES COLLECTIVITÉS LOCALES AU REGARD DE L’ÉVALUATION DE LEUR PERFORMANCE Les insuffisances affectant la tenue de la comptabilité générale et de la comptabilité budgétaire En premier lieu, la présentation annuelle (sous la forme d’un tableau de flux) et bisannuelle (sous la forme d’un tableau des soldes cumulés) d’un état de l’actif actualisé, conforme à l’inventaire de l’ordonnateur, constitue une condition fondamentale de la fiabilité de la comptabilité générale. Pour de nombreuses collectivités locales, cette condition fondamentale a été perdue de vue depuis de nombreuses années. Elles sont alors conduites à présenter, par exemple, des comptes 21 non mis à jour par les travaux comptabilisés aux comptes 23, des créances de travaux aux comptes 237 ou 238 ou à caractère financier dans les comptes 27, anciennes et non apurées, ou des comptes 24 d’immobilisations mises à disposition dans le cadre des transferts de compétences aux établissements de coopération intercommunale, non tenus ou mouvementés pour des valeurs incertaines. De manière plus grave, il arrive parfois que les comptes 21 ou 23 soient rendus anormalement créditeurs, en raison notamment de l’absence d’inventaire et de suivi comptable des immobilisations cédées et de la sortie d’actif de ces immobilisations à une valeur dépassant leur prix de revient ou leur valeur nette comptable. L’absence d’inventaire fiable et actualisé des immobilisations propres à la collectivité conduit également, assez souvent, à une confusion entre les dépenses d’investissement pour des immobilisations destinées à demeurer dans le patrimoine de la collectivité et les dépenses d’investissement pour des immobilisations destinées à des tiers. Cette confusion s’opère par enregistrement, en classe 2 au lieu de la classe 3 en comptabilité de stocks, d’immobilisations (terrains, VRD et bâtiments) destinées à être revendues, ou par enregistrement en classe 2 au lieu du comptes 458 de travaux réalisés pour le compte de tiers. Plus souvent encore, lorsque ces travaux sont comptabilisés dans les comptes 458, leur montant reste en solde à l’actif sans suivi de leur apurement. La fiabilité de la comptabilité générale repose, en second lieu, sur un rattachement rigoureux à L’exercice concerné des charges de fonctionnement ayant donné lieu à service fait sans réception de facture à la fin de l’exercice. En cette matière, une exploitation au plan national du fichier comptable des communes pour l’exercice 2005, a fait ressortir que 45,3 % des communes de 3 500 habitants et plus, astreintes à opérer ce rattachement, s’étaient totalement abstenues de le faire en 2005. La fiabilité de la comptabilité générale suppose, en troisième lieu, la mise en place d’un dispositif rigoureux de repérage et de suivi des dépréciations d’actifs, ainsi que des risques et charges nécessitant la constitution de provisions. En ce domaine, l’article R. 2321-2 du Code général des collectivités territoriales a rendu obligatoires, à compter de 2006, les provisions pour couvrir le risque de la collectivité, en cas de contentieux, d’avoir à supporter une charge, en cas de redressement ou de liquidation judiciaire, de perdre tout ou partie de la valeur des titres ou créances ou de voir mettre en jeu les garanties détenues auprès de l’organisme soumis à cette procédure collective, dans le cas, enfin, de créances sur les tiers, de perdre les recettes correspondantes en raison d’un recouvrement compromis. Toutes les autres (6) Plus largement, une note en annexe 2 montre les différences de critères sur lesquels s’appuie l’appréhension de l’équilibre financier de l’Etat et des collectivités locales. (7) Rapport de la Cour des comptes en juin 2007 sur la situation et les perspectives des finances publiques (p. 39). (8) Ibid (p. 58). 45 collectivités territoriales formes de risques ou de charges probables sont également provisionnables, mais de façon facultative. A cet égard, les insuffisances du contrôle interne aux collectivités et la tenue lacunaire des annexes aux états financiers, ne permettent pas, le plus souvent, un repérage, une valorisation et un suivi satisfaisants des dépréciations d’actifs, ainsi que des risques et charges à provisionner. Enfin, la fiabilité de la comptabilité générale repose sur une articulation effective avec la comptabilité budgétaire portant sur les engagements de dépenses de fonctionnement, tant pour le rattachement rigoureux des charges de fonctionnement à l’exercice concerné sur le critère du service fait, que pour le report sur l’exercice suivant des charges de fonctionnement engagées et n’ayant pas donné lieu à service fait en fin d’exercice. En ce domaine, de nombreuses collectivités ne tiennent pas de comptabilité d’engagement fiable respectant rigoureusement le principe d’antériorité ou de concomitance de l’engagement comptable par rapport à l’engagement juridique. L’amélioration des contrôles sur la mise en œuvre du cadre budgétaire et comptable pour l’évaluation de la performance En ce qui concerne les comptes de l’Etat, l’article 31 de la LOLF dispose que : « Les comptables publics, chargés de la tenue et de l’établissement des comptes de l’Etat, veillent au respect des principes et règles mentionnés aux articles 27 à 30 (régularité, sincérité et fidélité des comptes). Ils s’assurent notamment de la sincérité des enregistrements comptables et du respect des procédures. » Dans ce rôle de garant, les comptables publics de l’Etat ne sont pas isolés puisque, selon le nouveau dispositif conçu par la direction générale de la comptabilité publique (DGCP), leur contrôle devient un contrôle des processus comptables dont font partie les services des ordonnateurs. Fondé sur des référentiels de contrôle interne, des guides de procédures et de méthodologie des contrôles, communs aux ordonnateurs et aux comptables, validé par une démarche d’audit comptable, ce type de contrôle peut déboucher sur un contrôle partenarial des processus comptables, le tout piloté par la DGCP et une mission d’audit placée sous l’égide d’un comité national présidé par le DGCP. Dans ce dispositif d’ensemble, le comptable public de l’Etat se voit reconnaître un droit d’accès et de contrôle sur les sources et les modes de traitement des informations budgétaires et comptables tout le long de la chaîne d’exécution des opérations comptables, y compris sur les opérations situées en amont de ses prises en charge comptables, ainsi que sur les informations ayant trait aux engagements hors bilan. Ce droit d’accès et de contrôle lui permet, en particulier dans la période d’inventaire de fin d’exercice, de contrôler les opérations relatives aux stocks, au suivi des immobilisations et des créances, aux amortissements des immobilisations et aux provisions pour dépréciation d’actifs ou pour risques et charges, ainsi qu’au rattachement des charges et des produits de fonctionnement à l’exercice. Sous les réserves importantes d’une meilleure articulation entre comptabilité budgétaire et comptabilité générale et des compléments substantiels à apporter au référentiel de comptabilité d’analyse des coûts, ce dispositif paraît réunir les conditions préalables à une mise en œuvre satisfaisante de cette comptabilité dédiée à l’évaluation de la performance des actions de l’Etat. L’inexistence d’un dispositif d’audit comptable de ce type dans les collectivités locales explique, pour une bonne part, les insuffisances affectant actuellement la tenue de leur comptabilité budgétaire et de leur comptabilité générale, nonobstant l’articulation prévue entre ces deux comptabilités. Aussi, pour satisfaire aux conditions préalables à la mise en œuvre d’une comptabilité d’analyse des coûts nécessaire à l’évaluation de leur 46 performance, les collectivités locales pourraient-elles mieux garantir la fiabilité de leur système budgétaire et comptable, en renforçant leur dispositif de contrôle interne, de façon complémentaire à l’intensification de l’audit externe. Il ne peut, en effet, y avoir de bonne évaluation de la performance sans garantie apportée à la fiabilité des comptes, comme le montrent les illustrations suivantes. La fiabilité des comptes pour une bonne évaluation de la performance La tenue d’un état de l’actif actualisé annuellement en termes physique et financier, séparant les immobilisations propres utilisées par les services de la collectivité par rapport aux immobilisations mises à disposition d’une autre collectivité, ou destinées à être revendues, ou encore représentatives de travaux pour comptes de tiers, peut seule fournir une assiette fiable pour le calcul des amortissements à intégrer dans les coûts complets de fonctionnement. Cela suppose également une correcte évaluation des cessions d’immobilisations pour leur valeur nette comptable, une tenue de la comptabilité de stocks des immobilisations destinées à la vente et une reprise régulière en recette de fonctionnement des subventions d’équipement affectées au financement des immobilisations amortissables pour compenser partiellement la charge d’amortissement. S’agissant des immobilisations mises à disposition d’une autre collectivité, notamment d’un EPCI, leur juste valorisation permet non seulement de les extraire de l’assiette des amortissements à supporter par la collectivité opérant le transfert, mais également, au-delà de l’objectif d’évaluation de la performance, de définir une base objective pour des relations financières équilibrées entre les communes et les communautés dotées de la taxe professionnelle unique, ces dernières devant calculer leurs attributions de compensation à reverser à leurs communes membres en tenant compte de la valeur nette comptable et donc des charges d’amortissement des immobilisations transférées. En second lieu, la mesure de coûts complets suppose le rattachement de toutes les charges de fonctionnement à l’exercice concerné. A cet égard, le contrôle financier interne doit veiller à ce qu’il n’y ait pas de report d’un exercice sur l’autre des factures reçues en cours ou en fin d’exercice (« factures dans le tiroir »), et à ce que la comptabilité d’engagement fournisse une base fiable pour le rattachement à l’exercice concerné de toutes les charges de fonctionnement ayant donné lieu à service fait en fin d’exercice sans réception de facture (charge courue et non échue). En troisième lieu, il ne peut y avoir de bonne évaluation des coûts complets sans un provisionnement des dépréciations récurrentes de l’actif immobilisé ou de l’actif circulant (stocks et créances), ainsi que des risques et charges récurrents ou non exceptionnels (pertes de change, garanties d’emprunts, grosses réparations...). Enfin, l’absence de comptabilité de stocks obligatoire, en dehors du cas des stocks de terrains aménagés destinés à être revendus ou des biens ou matières transformés par la collectivité, applicable aux matières premières non destinées à la transformation, aux matières ou fournitures consommables, constitue actuellement une limite sérieuse du cadre comptable pour l’obtention de coût complets dont la levée renforcerait l’évaluation de la performance. Le souci d’une meilleure évaluation de la performance de l’action publique semble constituer de plus en plus, dans les collectivités locales de taille importante, un des facteurs endogènes de recherche d’une plus grande fiabilité comptable. Parmi ces facteurs, on peut également citer la volonté de rétablir des relations financières mieux équilibrées entre communautés à fiscalité propre et communes membres, ainsi que le besoin exprimé par un nombre croissant d’exécutifs locaux de disposer d’informations No 1 - Janvier 2008 - collectivités territoriales comptables fiables pour leur communication financière en direction de leur assemblée délibérante, de leurs partenaires financiers ou commerciaux ou, plus largement, de leur opinion publique. A ces facteurs endogènes, s’ajoute, dans le contexte actuel, le facteur exogène de recherche de meilleurs dispositifs visant la réduction du déficit et de l’endettement publics. L’amélioration de la fiabilité comptable au service de l’évaluation de la performance est appelée à trouver une place privilégiée parmi ces dispositifs, la connaissance précise du coût et de l’efficience de leurs activités devant conduire l’Etat, comme les collectivités locales, à une maîtrise renforcée de l’évolution de leurs dépenses. ANNEXE 1 L’ARTICULATION DES COMPTABILITÉS DE L’ÉTAT ET DES COLLECTIVITÉS LOCALES POUR LA MESURE DES COÛTS COMPLETS DE FONCTIONNEMENT Le cadre comptable général . Pour l’Etat, l’article 27 de la LOLF prévoit la tenue de trois types de comptabilité : – une comptabilité budgétaire ; – une comptabilité générale ; – une comptabilité d’analyse des coûts. . Le cadre réglementaire, pour les collectivités locales, ne prévoit que la comptabilité budgétaire et la comptabilité générale. Toutefois, un nombre croissant de collectivités locales de taille importante paraît vouloir s’engager dans une démarche d’évaluation de la performance qui nécessite une comptabilité d’analyse des coûts. . L’articulation entre comptabilité générale et comptabilité d’analyse des coûts doit emprunter le même schéma dans le secteur public et dans le secteur privé. Dans le secteur public, ce schéma doit être similaire pour l’Etat et les collectivités locales. L’articulation de la comptabilité budgétaire et de la comptabilité générale pour les collectivités locales La connexion et la superposition quasi parfaites des deux comptabilités, s’agissant du fait générateur ou du périmètre des enregistrements comptables, permettent de considérer que la comptabilité budgétaire, sous le volet de la comptabilité des engagements de dépenses de fonctionnement, contribue à la fiabilisation des charges à enregistrer dans la comptabilité générale des collectivités locales. Actuellement, ce type de superposition entre les deux comptabilités n’existe pas pour la présentation des comptes de l’Etat. Les divergences, sur ce point, peuvent être illustrées à l’aide des deux diagrammes ci-contre : Ces deux diagrammes font ressortir les différences très importantes d’articulation entre comptabilité budgétaire et comptabilité générale pour l’Etat et les collectivités locales. En effet, pour les collectivités locales, la superposition quasi parfaite des deux comptabilités permet de s’assurer que toutes les charges mandatées en comptabilité budgétaire (charges payées, charges à payer et charges « calculées ») sont bien enregistrées, pour des montants identiques, en comptabilité générale. Par ailleurs, l’enregistrement des restes à réaliser (charges engagées n’ayant pas donné lieu à service fait), en comptabilité budgétaire, permet de reporter et de réinscrire ces restes au budget - No 1 - Janvier 2008 de l’exercice suivant. Ajoutés aux crédits nouveaux, ils s’incorporent au total des crédits ouverts au titre dudit exercice. De surcroît, avant d’être reportés au budget de l’exercice suivant, les restes à réaliser doivent être inscrits au compte administratif de l’exercice courant, ce qui garantit une bonne continuité et une bonne maîtrise de l’exécution du cycle budgétaire pluriannuel des collectivités locales, par incorporation des restes à réaliser dans leur résultat budgétaire. En ce qui concerne l’Etat, la comptabilité budgétaire n’offre pas ces possibilités de bonne articulation avec la comptabilité générale. En effet, les charges à payer (charges ayant donné lieu à service fait sans réception de facture en fin d’exercice), rattachables à l’exercice en comptabilité générale, ne sont pas individualisées et valorisées en comptabilité budgétaire. De manière générale, les charges engagées et non payées (non mandatées), en comptabilité budgétaire, considérées comme des autorisations d’engagement (AE) « consommées », ne distinguent pas les charges à payer (service fait) et les restes à réaliser (service non fait). En tant que telles, ces autorisations d’engagement ne sont pas reportées au budget de l’exercice suivant, mais les crédits de paiement correspondants doivent l’être pour assurer le règlement des engagements de l’exercice précédent. Le maintien d’une comptabilité budgétaire à deux volets, l’un assurant le suivi de la consommation des AE et des CP, sans distinction des AE ayant donné lieu ou non à service fait, l’autre enregistrant les charges sur le critère du paiement et servant au calcul du résultat budgétaire, fait ressortir un écart entre les charges prises en compte, en terme de résultat comptable, en comptabilité générale et en comptabilité budgétaire, qui correspond aux charges à payer (engagées avec service fait). S’ajoutent à cet écart les charges « calculées » (amortissements, provisions...) qui ne font pas l’objet d’un engagement en comptabilité budgétaire. Le défaut d’articulation ou de superposition entre le premier volet de la comptabilité budgétaire et la comptabilité générale ne permet pas à l’Etat de maîtriser au mieux le déroulement de son cycle budgétaire pluriannuel. ANNEXE 2 CRITÈRES D’ÉQUILIBRE FINANCIER POUR L’ÉTAT ET LES COLLECTIVITÉS LOCALES Pour l’Etat Dans le projet de loi de finances 2007 de l’Etat, le déficit budgétaire est évalué à 41,7 milliards d’euros. Il se décompose de la façon suivante (en milliards d’euros) : – déficit de fonctionnement ........................................................ – dépenses d’investissement (hors remboursement d’emprunt) – recettes d’investissement .......................................................... Total .................................................................................................. 22,8 + 23,9 – 5,0 41,7 Pour respecter ses engagements à l’égard de l’Union européenne, dans le cadre du programme de stabilité et de croissance, la France doit réduire le déficit des administrations publiques en deçà de 3 % du PIB. Selon le projet de loi de finances 2007, la réduction du déficit budgétaire de l’Etat à 41,7 milliards d’euros, soit 5,3 milliards d’euros de moins que le déficit prévu par la loi de finances de 2006, devrait permettre de ramener à 2,5 % du PIB le déficit des administrations publiques (Etat, Sécurité sociale et collectivités locales) et de diminuer la dette publique de un point de PIB. Le déficit, ou besoin de financement au sens européen, calculé pour l’Etat, comme pour les autres administrations publiques, comprend toutes les opérations d’investissement (hors emprunt), en dépenses et en recettes, à l’exclusion des opérations financières (dotations en capital, prêts ou avances...). 47 collectivités territoriales COLLECTIVITÉS LOCALES Illustration de la superposition de la comptabilité budgétaire et de la comptabilité générale (charges de fonctionnement) Exercice N Charges payées Charges engagées Charges à payer Total des crédits engagés Crédits à annuler Absence d'engagement Total des mandats de rattachement (2) Total des mandats de paiement (1) Total des crédits ouverts Charges « calculées » Total des mandats d'ordre (3) Restes à réaliser Service fait sans réception facture Engagement sans service fait Opérations d'inventaire : stocks, amortissements et provisions Absence d'engagement Total des crédits ouverts de (N + 1) Exercice (N + 1) Crédits nouveaux ouverts en (N + 1) Reports Restes à réaliser de l'exercice N Exercice N : charges de fonctionnement enregistrées en comptabilité budgétaire = charges de fonctionnement enregistrées en comptabilité générale = 1 + 2 + 3 ÉTAT Illustration de l'absence de superposition de la comptabilité budgétaire et de la comptabilité générale (charges de fonctionnement) COMPTABILITÉ BUDGÉTAIRE Exercice N Charges engagées Charges payées Total des mandats de paiement Total des crédits ouverts (autorisation d'engagement) Total des autorisations Total des autorisations d'engagement d'engagement « consommées » non « consommées » Exercice (N + 1) Crédits à annuler Possibilité de report de tout ou partie des AE non « consommées » de (N) Total des autorisations nouvelles d'engagement en (N + 1) COMPTABILITÉ GÉNÉRALE DE N Charges payées Charges à payer Total des mandats de paiement (1) Total des mandats de rattachement pour service fait sans réception de facture (2) Charges « calculées » Charges engagées Restes à réaliser pour engagement sans service fait Total des mandats d'ordre (3) AE non reportés au budget de (N + 1) Charges de fonctionnement incorporées dans le résultat budgétaire = 1 Charges de fonctionnement enregistrées en comptabilité générale = 1 + 2 + 3 48 No 1 - Janvier 2008 - collectivités territoriales La maîtrise du déficit global de l’Etat en 2007 est appréciée au regard de deux critères principaux : – pour les recettes, une hypothèse de croissance du PIB entre 2 et 2,5 % ; – pour les dépenses, une progression limitée à 0,8 %, soit un point de moins que l’inflation prévisionnelle. Cette définition et ces critères, appliqués à la maîtrise du déficit, ne permettent pas de faire ressortir l’importance et la gravité du déséquilibre affectant les finances de l’Etat. Ils négligent de faire apparaître l’inadéquation du mode de financement des dépenses par les recettes. Comme le montre le tableau présenté en page 6, 16,5 % seulement du montant des emprunts de l’Etat sont consacrés au financement des investissements, le reste étant réservé au financement du remboursement des emprunts antérieurement contractés, à hauteur de 63,6 %, et au financement des charges de fonctionnement, à hauteur de 19,9 %. Or, le respect d’une des règles d’or du bon équilibre financier impose de consacrer l’intégralité des emprunts à long ou moyen terme au financement des investissements et de s’assurer que l’autofinancement prélevé sur les recettes de fonctionnement couvre au moins le remboursement en capital des emprunts. L’Etat est donc loin de respecter cette règle d’or et, tant le mode de présentation de son résultat budgétaire, que les critères retenus pour la maîtrise de son déficit budgétaire, ne le conduisent pas au respect de cette règle (9). Pour les collectivités locales Les états financiers présentés par les collectivités locales (compte administratif de l’ordonnateur et comptes de gestion du comptable) distinguent nettement, en deux sections, les opérations de fonctionnement et les opérations d’investissement, tant en prévision, qu’en exécution pour ce qui concerne le compte administratif. Dans ces états, le tableau relatif à la section de fonctionnement fait ressortir l’autofinancement prélevé sur les recettes de fonctionnement pour financer les dépenses d’investissement et le tableau relatif à la section d’investissement permet de s’assurer que les ressources propres de la collectivité, incluant cet autofinancement, couvrent le remboursement du capital des emprunts et, au-delà, le financement d’une partie des dépenses d’investissements, de telle façon à prévenir une situation de surendettement. Cette approche, consacrée par l’article L. 1612-4 du Code général des collectivités territoriales, obligeant à prévoir à la section d’investissement du budget un montant de ressources propres au moins égal au montant du remboursement du capital des emprunts, garantit le respect de la règle d’or du bon équilibre financier selon laquelle les emprunts à long et moyen terme ne peuvent financer que des dépenses d’investissement. De façon plus générale, le mode de présentation des états financiers des collectivités locales conduit à rapprocher trois critères ou trois variables clés synthétisant les conditions de réalisation de leur équilibre financier : la capacité d’autofinancement, la capacité de désendettement mesurée par le rapport entre l’encours de dette d’emprunt et l’autofinancement brut et la capacité d’investissement. L’interdépendance de ces trois variables résume les conditions de maîtrise de l’équilibre financier. Ainsi, en cas de réduction de sa capacité d’autofinancement et de détérioration de sa capacité de désendettement, la collectivité doit se résoudre à diminuer ses dépenses d’investissement pour réduire son appel à l’emprunt, avant de pouvoir limiter ses dépenses de fonctionnement pour restaurer sa capacité d’autofinancement. (9) Le respect de cette règle d’or n’est prévu, ni par les engagements européens de la France, ni par la LOLF. Le résultat budgétaire, au sens de Maastricht, mêle, pour l’Etat, comme pour les autres administrations publiques, les opérations de fonctionnement et d’investissement (hors opérations financières). De son côté, la LOLF prévoit une évaluation de la performance financière de l’Etat à partir de la mesure de la performance des actions dans chaque programme, sans référence expresse, en la matière, au solde d’exécution des charges par rapport aux produits de fonctionnement, ni même au solde global d’exécution des dépenses par rapport aux recettes. Le chômage baisse depuis début 2006 Le taux de chômage au sens du Bureau international du travail est désormais établi à partir d’une définition qui le rapproche des statistiques européennes. Selon cette nouvelle approche, il s’élève à 8,1 % de la population active en France métropolitaine au deuxième trimestre de 2007. Depuis le début de 2006, le taux de chômage diminue régulièrement, après une légère augmentation en 2005. En moyenne pour l’année 2006, comme en 2005 et en 2004, il s’établit à 8,8 % de la population active pour la France métropolitaine, soit 2,4 millions de personnes. Au deuxième trimestre de 2007, 8,1 % des actifs résidant en France métropolitaine sont au chômage au sens du Bureau international du travail (BIT). Cette estimation s’appuie sur l’enquête Emploi. Après avoir été stable en 2004, le taux de chômage au sens du BIT a légèrement augmenté en 2005. Il est passé de 8,9 % au quatrième trimestre de 2004 pour la France métropolitaine à 9,1 % au premier trimestre de 2006. Il a ensuite baissé régulièrement pour atteindre 8,1 % au deuxième trimestre de 2007, soit 2,2 millions de personnes. Cette décrue du chômage n’est toutefois pas encore perceptible en moyenne annuelle. INSEE Première nº 1164, novembre 2007. - No 1 - Janvier 2008 49