Paul HERNU - Gestion et Finances Publiques

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collectivités territoriales
Paul HERNU
Président de section de chambre régionale des comptes
Vice-président du club comptable des juridictions financières
Fiabilité des comptes et évaluation de la performance
dans les collectivités locales
La fiabilité des comptes recouvre les notions de régularité, de sincérité et d’image fidèle. Pour être considérés comme fiables, les
comptes des collectivités locales doivent donc, en application de
leur référentiel comptable et des instructions déclinant ce référentiel, être réguliers, sincères et donner une image fidèle de leur patrimoine et de leur situation financière. Cette définition de la fiabilité
des comptes est, bien entendu, commune avec celle énoncée
pour les comptes de l’Etat par l’article 27, 3e alinéa, de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1er août 2001.
L’évaluation de la performance consiste, pour les collectivités
locales, comme pour toute collectivité publique, à mesurer le
résultat des activités sur la base des « 3E » : économie, efficience
et efficacité. La mesure de l’économie rapporte le coût à l’importance ou au nombre des moyens employés, celle de l’efficience
les résultats (production de biens ou de services) au coût des
moyens employés et celle de l’efficacité les résultats obtenus aux
objectifs fixés. Deux types d’indicateurs sur trois, les indicateurs
d’économie et d’efficience, font ainsi appel à la notion de coût.
Pour être le plus fidèle possible à la définition de l’efficience, équivalente à celle de productivité dans le secteur marchand, la notion
de coût physique doit céder le pas à celle de coût financier et la
valorisation doit être effectuée en coût complet, c’est-à-dire intégrer toutes les charges de fonctionnement des moyens humains
ou matériels qui, directement ou indirectement, contribuent aux
activités de la collectivité.
Focalisée pour une large part sur la notion de coût, l’évaluation
de la performance gagne donc à pouvoir s’appuyer sur des
comptes fiables dont la régularité, la sincérité et la fidélité sont
seules à même de garantir une incorporation exhaustive et une
évaluation rigoureuse des charges de fonctionnement correspondant au coût complet recherché.
A cet égard et au stade actuel de mise au point des référentiels
comptables, l’articulation de la comptabilité budgétaire et de la
comptabilité générale apparaît plus satisfaisante pour les collectivités locales que pour l’Etat. Dans un cas comme dans l’autre, on
relève l’absence ou l’insuffisance de référentiel pour la comptabilité d’analyse des coûts. Ce sont les conditions de mise en œuvre
du cadre budgétaire et comptable qui, actuellement, différencient le plus les collectivités locales de l’Etat.
L’ARTICULATION DE LA COMPTABILITÉ BUDGÉTAIRE
ET DE LA COMPTABILITÉ GÉNÉRALE,
SUPPORT D’UNE BONNE ÉVALUATION
DE LA PERFORMANCE
Les trois types de comptabilités
définis pour l’Etat dans la LOLF
Le chapitre V de la LOLF, intitulé « Des comptes de l’Etat », dispose,
en son article 27 que : « L’Etat tient une comptabilité des recettes
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et des dépenses budgétaires et une comptabilité générale de
l’ensemble de ses opérations. En outre, il met en œuvre une
comptabilité destinée à analyser les coûts des différentes actions
engagées dans le cadre des programmes. » L’article 28 de la
LOLF précise, en outre, que : « La comptabilisation des recettes
et des dépenses budgétaires obéit aux principes suivants :
– les recettes sont prises en compte au titre du budget de l’année
au cours de laquelle elles sont encaissées ;
– les dépenses sont prises en compte au titre du budget de
l’année au cours de laquelle elle sont payées ».
L’article 30 de la LOLF indique, pour sa part, que : « La comptabilité générale de l’Etat est fondée sur le principe de la constatation des droits et obligations. Les opérations sont prises en
compte au titre de l’exercice auquel elles se rattachent, indépendamment de leur date de paiement ou d’encaissement. »
Selon ces dispositions, la comptabilité budgétaire est définie
comme une comptabilité de caisse. Le fait générateur des enregistrements comptables est constitué par l’encaissement de la
recette ou le paiement de la dépense et l’année de comptabilisation est celle au cours de laquelle intervient l’encaissement ou
le décaissement, y compris au cours de la période complémentaire à l’année civile, dont la durée ne peut excéder vingt jours
selon les termes de l’article 28 de la LOLF. En réalité, la comptabilité budgétaire de l’État comporte deux volets. L’un retrace les
encaissements de recettes et les décaissements de dépenses
selon les critères précités et permet de présenter le résultat budgétaire ou le solde d’exécution des lois de finances. L’autre volet
rend compte de la consommation des autorisations d’engagement et des crédits de paiement définis à l’article 8 de la LOLF.
La comptabilité générale de l’Etat se distingue de la comptabilité
budgétaire sous deux aspects : le fait générateur de l’écriture
comptable et le périmètre des opérations comptabilisées. En tant
que comptabilité des droits constatés, le fait générateur n’est pas
le décaissement de la dépense, mais la constatation de l’obligation ou de la dette, ou l’encaissement de la recette, mais la
constatation du droit ou de la créance. En comptabilité d’exercice, le droit constaté ne prend pas seulement comme critère la
réception ou l’envoi de la facture, mais plus largement le critère
du service fait, même si, à la fin de l’exercice, la facture n’est pas
reçue ou envoyée, en raison notamment du fait que la date de
constatation ou d’évaluation du service fait ne correspond pas
à la date prévue pour la facturation. Enfin, en tant que comptabilité patrimoniale, la comptabilité générale de l’Etat incorpore
toutes les charges et tous les produits qui n’ont pas vocation à se
traduire par un décaissement ou un encaissement, mais qui ont
une incidence sur la variation de son patrimoine et que l’on qualifie de charges ou de produits « calculés », tels les variations de
stocks, l’amortissement des immobilisations, le provisionnement
des dépréciations d’actifs ou des risques et charges.
No 1 - Janvier 2008 -
collectivités territoriales
Ces différences de critères de fait générateur et de périmètre des
enregistrements comptables, entre la comptabilité budgétaire et
la comptabilité générale de l’Etat, expliquent l’écart entre le
résultat budgétaire et le résultat de la comptabilité générale ou
résultat patrimonial. Mais une troisième différence est à l’origine
de cet écart. En effet, dans le compte général de l’Etat joint au
projet de loi de règlement en application de l’article 54 de la
LOLF, le résultat budgétaire, contrairement au résultat patrimonial, agrège les opérations d’investissement et les opérations de
fonctionnement. Ainsi, pour l’exercice 2006, le déficit budgétaire
s’élève à 40,242 milliards d’euros contre un déficit de 31,619 milliards d’euros pour le résultat patrimonial et un état spécifique,
intégré au compte général de l’Etat et reproduit ci-après,
présente le retraitement des opérations qui permet de passer
d’un résultat à l’autre.
(En milliards d’euros)
Solde budgétaire ........................................................................
– 40,242
Opérations augmentant le résultat patrimonial par rapport
au solde budgétaire :
– dépenses d’investissement inscrites au bilan ......................
– restes à recouvrer sur créances de l’année courante ......
+ 123,953
+ 13,824
Opérations diminuant le résultat patrimonial par rapport au
solde budgétaire :
– recettes d’investissement inscrites au bilan .........................
– valeur comptable des cessions d’immobilisations ..............
– recettes sur créances des années antérieures ...................
– acomptes d’impôt sur les sociétés encaissés en 2006 et
rattachés comptablement en 2007 .....................................
– soldes des opérations d’inventaire (charges et produits de
fonctionnement « calculés », stocks, amortissements et
provisions, charges à payer et produits à recevoir) ..........
– autres .....................................................................................
Résultat patrimonial ................................................................
– 94,261
– 5,826
– 8,371
– 5,995
– 13,053
– 1,648
– 31,619
Seul le résultat patrimonial ou résultat de fonctionnement de la
comptabilité générale, excluant les opérations d’investissement,
fondé sur les droits constatés, la comptabilité d’exercice et incorporant les charges et les produits calculés en fin d’exercice au
moment des opérations d’inventaire, peut servir de base à l’évaluation de la performance et la comptabilité générale former le
socle de la comptabilité d’analyse des coûts des actions engagées dans le cadre des programmes telle que définie à l’article 27
de la LOLF.
L’articulation entre comptabilité générale et comptabilité d’analyse des coûts peut être ainsi schématisée :
Charges de fonctionnement de la comptabilité générale
+ Charges supplétives
– Charges non incorporables
= Charges retenues pour le calcul des coûts complets de
fonctionnement en comptabilité d’analyse des coûts (CAC)
Les charges supplétives sont les charges non enregistrées dans les
charges de fonctionnement de la comptabilité générale qui correspondent à la rémunération (fictive) de moyens de fonctionnement : par exemple, la rémunération (coût d’opportunité) des
capitaux propres investis (pour une entreprise) et, pour l’Etat, le
coût de certains avantages en nature au titre de l’occupation
« gratuite » des bâtiments (1).
Les charges non incorporables sont, par exemple, les charges à
caractère exceptionnel, telles les dotations aux provisions de certains risques qui, n’étant pas récurrentes et représentatives des
charges de la gestion courante, n’ont pas être incorporées dans
un calcul de coûts complets.
- No 1 - Janvier 2008
Ce calcul s’opère donc, dans un premier temps, par retraitement
des charges de fonctionnement enregistrées en comptabilité
générale. Mais, comme le rappelle le rapport de la Cour des
comptes sur les résultats et la gestion budgétaires de l’Etat pour
l’année 2006 (note en bas de la p. 79) : « Les coûts complets sont
calculés en intégrant l’ensemble des moyens mobilisés, directement ou indirectement, pour conduire une action ou pour
atteindre un objectif. » Le calcul des coûts complets suppose
donc, dans un deuxième temps, une méthodologie comportant
notamment la définition de clés analytiques de répartition pour
ventiler les charges de fonctionnement indirectes entre les différentes actions d’un même programme et obtenir le coût complet
de ces actions par sommation des charges directes et de la
quote-part de charges indirectes qui s’y rapportent.
Comme le souligne la Cour des comptes dans le rapport précité
(p. 79), la comptabilité d’analyse des coûts de l’Etat reste encore
très lacunaire, en raison de la non-prise en compte de données
issues de la comptabilité générale (charges à payer, provisions
et amortissement des immobilisations...), mais également de
l’adaptation de clés analytiques de répartition des charges indirectes simplement amorcée, sans être généralisée. La Cour souligne également, dans le même rapport (p. 82), que « la mesure
de la performance ne pourra revêtir une cohérence d’ensemble
et un degré de signification conforme aux exigences de la LOLF
que lorsque aura été établi... un lien plus étroit entre les données
issues de la comptabilité budgétaire et celles propres à la comptabilité générale. » Sur cet aspect, elle recommande (p. 12 du
rapport) l’engagement de travaux pour définir un véritable référentiel de comptabilité budgétaire et assurer son articulation
avec le référentiel de comptabilité générale. A cet égard, on
peut penser, par exemple, qu’une meilleure articulation de l’un
des deux volets de la comptabilité budgétaire, consacré à la
consommation des autorisations d’engagement de dépenses,
serait de nature à fiabiliser, sur le critère du service fait, le rattachement des charges de fonctionnement en comptabilité
générale.
En résumé, l’évaluation de la performance des actions de l’Etat
semble être lancée sur de bons rails, au regard du caractère
étendu du cadre comptable prévu dans la LOLF. Toutefois,
l’absence de véritable référentiel de comptabilité budgétaire et
de comptabilité d’analyse des coûts et les lacunes de la comptabilité générale qui ont fait l’objet de treize réserves substantielles
de la part de la Cour dans son rapport de certification des
comptes de l’exercice 2006, ne permettent pas encore (2) à l’Etat
de disposer d’un système budgétaro-comptable fiable et
complet pour une bonne évaluation de la performance de ses
activités.
La comparaison
du cadre budgétaire et comptable
des collectivités locales à celui de l’Etat (3)
Le cadre budgétaire et comptable des collectivités locales se
distingue fortement de celui de l’Etat, en raison d’une connexion
quasi totale (4) de la comptabilité budgétaire et de la comptabilité générale.
(1) Sur ce plan, l’expérimentation lancée d’une évaluation du loyer à comptabiliser
au profit de l’agence « France-domaine » par les services de l’Etat installés dans
des bâtiments dont il est propriétaire, devrait permettre d’incorporer la charge de
loyer aux charges de fonctionnement de ces services.
(2) Cette constatation doit être nuancée par la prise en compte du fait que les
nouvelles règles budgétaro-comptables d’enregistrement des données ne sont
devenues pleinement applicables qu’à partir de l’exercice 2006 et qu’il faut nécessairement un temps d’adaptation pour que les services de l’Etat rendent compte
de leurs actions en termes de coûts et de résultats.
(3) Une note en annexe 1 illustre cette comparaison.
(4) Depuis l’exercice 2006, l’instruction budgétaire et comptable M 14, applicable
notamment aux communes et aux EPCI, prévoit la débudgétisation des recettes
d’investissement au titre des ICNE et des provisions et celle des dépenses d’investissement au titre de la reprise des ICNE et des provisions. Toutefois, cette débudgétisation importe peu ici, dans la mesure où elle n’affecte pas les opérations de
fonctionnement, plus particulièrement les charges de fonctionnement seules prises
en compte pour la mesure des coûts complets.
43
collectivités territoriales
Dans les collectivités locales, l’une et l’autre appliquent, en effet,
les mêmes critères d’enregistrement comptable des données,
qu’il s’agisse du critère des droits constatés pour l’enregistrement
de la créance ou de la dette au titre de l’exercice où elles sont
constatées, indépendamment de leur encaissement ou décaissement, du critère du service fait pour le rattachement des
charges et des produits de fonctionnement, indépendamment
de la réception ou de l’envoi de la facture, ou du critère de prise
en comptes des opérations d’inventaire en fin d’exercice, sous la
forme de charges et de produits « calculés », pour la mise à jour
complète des variations du patrimoine.
Cette connexion parfaite entre les deux comptabilités s’exprime,
contrairement à l’Etat, par la présentation d’un compte unique
de résultat des opérations de fonctionnement, identique en
comptabilité budgétaire et en comptabilité générale, sans le
besoin d’un état spécifique destiné au raccordement des deux
comptabilités. Plus largement, les états financiers des collectivités
locales présentent les opérations en deux sections, une section
de fonctionnement et une section d’investissement, le solde de
chacune d’elles exprimant un résultat identique de la comptabilité budgétaire et de la comptabilité générale (5), avec une section de fonctionnement détaillant les charges et les produits à
l’origine d’une variation du patrimoine et une section d’investissement enregistrant les variations du patrimoine et permettant,
en fin d’exercice, une actualisation des soldes de bilan.
Cette répartition des opérations entre deux sections n’est pas
retenue, au stade de leur exécution, dans le compte général de
l’Etat et la LOLF ne contient aucune disposition expresse en la
matière. Par contre, son article 51 prévoit qu’en prévision, une
présentation des recettes et des dépenses budgétaires en une
section de fonctionnement et une section d’investissement soit
jointe à la loi de finances de l’année.
L’état joint à la loi de finances de 2007 peut être synthétisé de la
façon suivante (en milliards d’euros) :
(5) Sous réserve de la débudgétisation partielle précitée, en investissement, des
ICNE et des provisions.
Section de fonctionnement
Dépenses
Recettes
Dépenses de fonctionnement (hors personnel) ...........................
Charges de personnel ......................................................................
Autres charges de gestion courante .............................................
Charges financières ..........................................................................
Dotations aux amortissements et provisions ..................................
Reversements sur recettes ...............................................................
33,55
119,15
62,17
39,19
–
62,72
Recettes non fiscales .........................................................................
Recettes fiscales ................................................................................
Produits financiers ..............................................................................
Déficit (prévisionnel) de la section de fonctionnement ..............
26,31
267,17
0,52
22,78
Total .....................................................................................................
316,78
Total .....................................................................................................
316,78
Section d’investissement
Dépenses
Recettes
Déficit de fonctionnement (prévisionnel) ......................................
Dépenses d’investissement (hors emprunt) ...................................
Remboursement d’emprunts ...........................................................
22,8
23,9
72,9
Recettes (hors emprunt) ...................................................................
Emprunts .............................................................................................
5,0
114,6
Total .....................................................................................................
119,6
Total .....................................................................................................
119,6
En exécution, le comptes agrégé des collectivités territoriales et des groupements à fiscalité propre, à la fin de l’exercice 2006, se présente
ainsi (en milliards d’euros et en termes d’opérations réelles) :
Section de fonctionnement
Dépenses
Recettes
Dépenses de fonctionnement (hors personnel) ...........................
Charges de personnel ......................................................................
Autres charges de gestion courante .............................................
Charges financières ..........................................................................
Excédent de fonctionnement .........................................................
25,4
40,7
54,0
3,8
29,7
Recettes non fiscales .........................................................................
Recettes fiscales ................................................................................
65,1
88,5
Total .....................................................................................................
153,6
Total .....................................................................................................
153,6
Section d’investissement
Dépenses
Recettes
Dépenses d’investissement (hors emprunt) ...................................
Remboursement d’emprunts ...........................................................
Variation du fonds de roulement (positive) ...................................
50,5
12,3
2,3
Excédent de fonctionnement .........................................................
Recettes hors emprunt .....................................................................
Emprunts .............................................................................................
29,7
18,4
17,0
Total .....................................................................................................
65,1
Total .....................................................................................................
65,1
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collectivités territoriales
Le premier tableau fait très nettement ressortir l’importance du
déséquilibre affectant les finances de l’Etat et l’intérêt qu’il y
aurait, entre autres éléments, pour apprécier de façon claire et
synthétique la performance de sa gestion financière, à le présenter, à la fois en prévision et en exécution des opérations (6).
Les prévisions pour 2007 font, en effet, ressortir que les emprunts
de l’Etat ne pourront être consacrés qu’à hauteur de 16,5 % au
financement de ses investissements, 63,6 % étant destinés à
financer le remboursement du capital des emprunts antérieurement contractés et 19,9 % au financement des charges de fonctionnement. Le financement de ces deux derniers types de
dépenses caractérise la spirale du surendettement. En effet, des
ressources de long terme financent des emplois de court terme
et la mobilisation d’emprunts nouveaux pour rembourser
d’anciens emprunts revient à payer deux fois une charge
d’intérêt pour une même ressource d’emprunt disponible. Ce
surendettement se manifeste d’ailleurs par le poids des charges
financières prévues au budget 2007 où elles représentent 15,4 %
du total des dépenses de fonctionnement (hors reversement de
recettes).
En comparaison de cette situation, la structure financière des
collectivités locales apparaît satisfaisante. En effet, en 2006, 100 %
de leurs emprunts ont été consacrés au financement de leurs
investissements. Ces derniers ont été financés par autofinancement propre à hauteur de 34,5 % et leurs charges financières n’ont
représenté que 3,1 % du total de leurs charges de fonctionnement. Toutefois, ces charges ont progressé de 6,5 % en moyenne
par an de 2002 à 2006, si bien qu’après avoir enregistré une capacité de financement excédentaire jusqu’en 2003 (+ 0,4 milliard
d’euros), les collectivités locales connaissent un besoin de financement croissant, passé de 2,5 milliards d’euros en 2004 à 4,9 milliards d’euros en 2006, soit 0,32 % du PIB (7). Il paraît donc inéluctable qu’elles soient appelées à s’associer à l’effort de réduction
du déficit global des finances publiques auquel l’Etat s’est
engagé dans le cadre du programme européen de stabilité et
de croissance. Pour les administrations publiques locales, dans
lesquelles les collectivités locales représentent plus de 90 % des
dépenses, cela signifie un besoin de financement ramené à 0,1 %
du PIB et un rythme moyen annuel de progression des dépenses
de 2,2 % en volume contre 3,3 % de 1996 à 2006 (8).
Pour maîtriser davantage leurs dépenses, les collectivités locales
ont besoin d’un contrôle financier interne et d’un contrôle de
gestion solides destinés à évaluer leur performance et, en particulier, le coût et l’efficience de leurs activités. A cet égard, la
fiabilité de leurs comptes paraît garantie, a priori, par une
connexion parfaite de la comptabilité budgétaire et de la comptabilité générale. La tenue d’une comptabilité des engagements
de dépenses a vocation à renforcer cette connexion et à fiabiliser
le rattachement à l’exercice concerné, sur le critère du service
fait, des charges de fonctionnement n’ayant pas donné lieu à
réception de facture en fin d’exercice. En outre, cette comptabilité vise à prendre en compte, dans le résultat de fonctionnement du compte administratif (compte d’exécution budgétaire
présenté par l’ordonnateur à son assemblée délibérante), les
restes à réaliser, c’est-à-dire les engagements de dépenses de
fonctionnement n’ayant pas donné lieu à service fait en fin
d’exercice, reportables au budget de l’année suivante.
Ce cadre budgétaire et comptable pourrait être optimisé en intégrant un référentiel de comptabilité analytique, dont le contenu
se limiterait à l’articulation avec la comptabilité générale et à la
méthode de répartition des charges indirectes, laissant ainsi aux
collectivités locales la possibilité de l’adapter aux spécificités de
leurs interventions. Ainsi articulé et complété, le cadre budgétaire
et comptable fournirait, en théorie, à la comptabilité d’analyse
des coûts, un socle de comptabilité générale solide pour une
bonne évaluation de la performance dans les collectivités
locales. Toutefois, les conditions actuelles de sa mise en œuvre
compromettent cette bonne évaluation.
- No 1 - Janvier 2008
LES CONDITIONS DE MISE EN ŒUVRE
DU CADRE BUDGÉTAIRE ET COMPTABLE
DES COLLECTIVITÉS LOCALES
AU REGARD DE L’ÉVALUATION
DE LEUR PERFORMANCE
Les insuffisances affectant la tenue
de la comptabilité générale
et de la comptabilité budgétaire
En premier lieu, la présentation annuelle (sous la forme d’un
tableau de flux) et bisannuelle (sous la forme d’un tableau des
soldes cumulés) d’un état de l’actif actualisé, conforme à l’inventaire de l’ordonnateur, constitue une condition fondamentale de
la fiabilité de la comptabilité générale. Pour de nombreuses collectivités locales, cette condition fondamentale a été perdue de
vue depuis de nombreuses années. Elles sont alors conduites à
présenter, par exemple, des comptes 21 non mis à jour par les
travaux comptabilisés aux comptes 23, des créances de travaux
aux comptes 237 ou 238 ou à caractère financier dans les
comptes 27, anciennes et non apurées, ou des comptes 24
d’immobilisations mises à disposition dans le cadre des transferts
de compétences aux établissements de coopération intercommunale, non tenus ou mouvementés pour des valeurs incertaines.
De manière plus grave, il arrive parfois que les comptes 21 ou 23
soient rendus anormalement créditeurs, en raison notamment de
l’absence d’inventaire et de suivi comptable des immobilisations
cédées et de la sortie d’actif de ces immobilisations à une valeur
dépassant leur prix de revient ou leur valeur nette comptable.
L’absence d’inventaire fiable et actualisé des immobilisations propres à la collectivité conduit également, assez souvent, à une
confusion entre les dépenses d’investissement pour des immobilisations destinées à demeurer dans le patrimoine de la collectivité
et les dépenses d’investissement pour des immobilisations destinées à des tiers. Cette confusion s’opère par enregistrement, en
classe 2 au lieu de la classe 3 en comptabilité de stocks, d’immobilisations (terrains, VRD et bâtiments) destinées à être revendues,
ou par enregistrement en classe 2 au lieu du comptes 458 de
travaux réalisés pour le compte de tiers. Plus souvent encore,
lorsque ces travaux sont comptabilisés dans les comptes 458, leur
montant reste en solde à l’actif sans suivi de leur apurement.
La fiabilité de la comptabilité générale repose, en second lieu,
sur un rattachement rigoureux à L’exercice concerné des
charges de fonctionnement ayant donné lieu à service fait sans
réception de facture à la fin de l’exercice. En cette matière,
une exploitation au plan national du fichier comptable des
communes pour l’exercice 2005, a fait ressortir que 45,3 % des
communes de 3 500 habitants et plus, astreintes à opérer ce
rattachement, s’étaient totalement abstenues de le faire en 2005.
La fiabilité de la comptabilité générale suppose, en troisième lieu,
la mise en place d’un dispositif rigoureux de repérage et de suivi
des dépréciations d’actifs, ainsi que des risques et charges nécessitant la constitution de provisions. En ce domaine, l’article R. 2321-2 du Code général des collectivités territoriales a rendu
obligatoires, à compter de 2006, les provisions pour couvrir le
risque de la collectivité, en cas de contentieux, d’avoir à supporter une charge, en cas de redressement ou de liquidation
judiciaire, de perdre tout ou partie de la valeur des titres ou
créances ou de voir mettre en jeu les garanties détenues auprès
de l’organisme soumis à cette procédure collective, dans le cas,
enfin, de créances sur les tiers, de perdre les recettes correspondantes en raison d’un recouvrement compromis. Toutes les autres
(6) Plus largement, une note en annexe 2 montre les différences de critères sur
lesquels s’appuie l’appréhension de l’équilibre financier de l’Etat et des collectivités
locales.
(7) Rapport de la Cour des comptes en juin 2007 sur la situation et les perspectives
des finances publiques (p. 39).
(8) Ibid (p. 58).
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collectivités territoriales
formes de risques ou de charges probables sont également provisionnables, mais de façon facultative. A cet égard, les insuffisances du contrôle interne aux collectivités et la tenue lacunaire
des annexes aux états financiers, ne permettent pas, le plus
souvent, un repérage, une valorisation et un suivi satisfaisants
des dépréciations d’actifs, ainsi que des risques et charges à
provisionner.
Enfin, la fiabilité de la comptabilité générale repose sur une articulation effective avec la comptabilité budgétaire portant sur les
engagements de dépenses de fonctionnement, tant pour le rattachement rigoureux des charges de fonctionnement à l’exercice concerné sur le critère du service fait, que pour le report sur
l’exercice suivant des charges de fonctionnement engagées et
n’ayant pas donné lieu à service fait en fin d’exercice. En
ce domaine, de nombreuses collectivités ne tiennent pas de
comptabilité d’engagement fiable respectant rigoureusement le
principe d’antériorité ou de concomitance de l’engagement
comptable par rapport à l’engagement juridique.
L’amélioration des contrôles
sur la mise en œuvre
du cadre budgétaire et comptable
pour l’évaluation de la performance
En ce qui concerne les comptes de l’Etat, l’article 31 de la LOLF
dispose que : « Les comptables publics, chargés de la tenue et
de l’établissement des comptes de l’Etat, veillent au respect des
principes et règles mentionnés aux articles 27 à 30 (régularité,
sincérité et fidélité des comptes). Ils s’assurent notamment de la
sincérité des enregistrements comptables et du respect des procédures. » Dans ce rôle de garant, les comptables publics de
l’Etat ne sont pas isolés puisque, selon le nouveau dispositif conçu
par la direction générale de la comptabilité publique (DGCP),
leur contrôle devient un contrôle des processus comptables dont
font partie les services des ordonnateurs. Fondé sur des référentiels
de contrôle interne, des guides de procédures et de méthodologie des contrôles, communs aux ordonnateurs et aux comptables, validé par une démarche d’audit comptable, ce type de
contrôle peut déboucher sur un contrôle partenarial des processus comptables, le tout piloté par la DGCP et une mission
d’audit placée sous l’égide d’un comité national présidé par le
DGCP.
Dans ce dispositif d’ensemble, le comptable public de l’Etat se
voit reconnaître un droit d’accès et de contrôle sur les sources et
les modes de traitement des informations budgétaires et comptables tout le long de la chaîne d’exécution des opérations
comptables, y compris sur les opérations situées en amont de ses
prises en charge comptables, ainsi que sur les informations ayant
trait aux engagements hors bilan. Ce droit d’accès et de contrôle
lui permet, en particulier dans la période d’inventaire de fin
d’exercice, de contrôler les opérations relatives aux stocks, au
suivi des immobilisations et des créances, aux amortissements des
immobilisations et aux provisions pour dépréciation d’actifs ou
pour risques et charges, ainsi qu’au rattachement des charges et
des produits de fonctionnement à l’exercice. Sous les réserves
importantes d’une meilleure articulation entre comptabilité budgétaire et comptabilité générale et des compléments substantiels
à apporter au référentiel de comptabilité d’analyse des coûts,
ce dispositif paraît réunir les conditions préalables à une mise en
œuvre satisfaisante de cette comptabilité dédiée à l’évaluation
de la performance des actions de l’Etat.
L’inexistence d’un dispositif d’audit comptable de ce type dans
les collectivités locales explique, pour une bonne part, les insuffisances affectant actuellement la tenue de leur comptabilité
budgétaire et de leur comptabilité générale, nonobstant l’articulation prévue entre ces deux comptabilités. Aussi, pour satisfaire
aux conditions préalables à la mise en œuvre d’une comptabilité d’analyse des coûts nécessaire à l’évaluation de leur
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performance, les collectivités locales pourraient-elles mieux
garantir la fiabilité de leur système budgétaire et comptable, en
renforçant leur dispositif de contrôle interne, de façon complémentaire à l’intensification de l’audit externe.
Il ne peut, en effet, y avoir de bonne évaluation de la performance sans garantie apportée à la fiabilité des comptes, comme
le montrent les illustrations suivantes.
La fiabilité des comptes
pour une bonne évaluation
de la performance
La tenue d’un état de l’actif actualisé annuellement en termes
physique et financier, séparant les immobilisations propres utilisées
par les services de la collectivité par rapport aux immobilisations
mises à disposition d’une autre collectivité, ou destinées à être
revendues, ou encore représentatives de travaux pour comptes
de tiers, peut seule fournir une assiette fiable pour le calcul des
amortissements à intégrer dans les coûts complets de fonctionnement. Cela suppose également une correcte évaluation des
cessions d’immobilisations pour leur valeur nette comptable, une
tenue de la comptabilité de stocks des immobilisations destinées
à la vente et une reprise régulière en recette de fonctionnement
des subventions d’équipement affectées au financement des
immobilisations amortissables pour compenser partiellement la
charge d’amortissement. S’agissant des immobilisations mises à
disposition d’une autre collectivité, notamment d’un EPCI, leur
juste valorisation permet non seulement de les extraire de
l’assiette des amortissements à supporter par la collectivité opérant le transfert, mais également, au-delà de l’objectif d’évaluation de la performance, de définir une base objective pour des
relations financières équilibrées entre les communes et les
communautés dotées de la taxe professionnelle unique, ces dernières devant calculer leurs attributions de compensation à
reverser à leurs communes membres en tenant compte de la
valeur nette comptable et donc des charges d’amortissement
des immobilisations transférées.
En second lieu, la mesure de coûts complets suppose le rattachement de toutes les charges de fonctionnement à l’exercice
concerné. A cet égard, le contrôle financier interne doit veiller à
ce qu’il n’y ait pas de report d’un exercice sur l’autre des factures
reçues en cours ou en fin d’exercice (« factures dans le tiroir »),
et à ce que la comptabilité d’engagement fournisse une base
fiable pour le rattachement à l’exercice concerné de toutes les
charges de fonctionnement ayant donné lieu à service fait en fin
d’exercice sans réception de facture (charge courue et non
échue).
En troisième lieu, il ne peut y avoir de bonne évaluation des coûts
complets sans un provisionnement des dépréciations récurrentes
de l’actif immobilisé ou de l’actif circulant (stocks et créances),
ainsi que des risques et charges récurrents ou non exceptionnels
(pertes de change, garanties d’emprunts, grosses réparations...).
Enfin, l’absence de comptabilité de stocks obligatoire, en dehors
du cas des stocks de terrains aménagés destinés à être revendus
ou des biens ou matières transformés par la collectivité, applicable aux matières premières non destinées à la transformation,
aux matières ou fournitures consommables, constitue actuellement une limite sérieuse du cadre comptable pour l’obtention
de coût complets dont la levée renforcerait l’évaluation de la
performance.
Le souci d’une meilleure évaluation de la performance de
l’action publique semble constituer de plus en plus, dans les collectivités locales de taille importante, un des facteurs endogènes
de recherche d’une plus grande fiabilité comptable. Parmi ces
facteurs, on peut également citer la volonté de rétablir des relations financières mieux équilibrées entre communautés à fiscalité
propre et communes membres, ainsi que le besoin exprimé par
un nombre croissant d’exécutifs locaux de disposer d’informations
No 1 - Janvier 2008 -
collectivités territoriales
comptables fiables pour leur communication financière en direction de leur assemblée délibérante, de leurs partenaires financiers
ou commerciaux ou, plus largement, de leur opinion publique.
A ces facteurs endogènes, s’ajoute, dans le contexte actuel, le
facteur exogène de recherche de meilleurs dispositifs visant la
réduction du déficit et de l’endettement publics. L’amélioration
de la fiabilité comptable au service de l’évaluation de la performance est appelée à trouver une place privilégiée parmi ces
dispositifs, la connaissance précise du coût et de l’efficience de
leurs activités devant conduire l’Etat, comme les collectivités
locales, à une maîtrise renforcée de l’évolution de leurs dépenses.
ANNEXE 1
L’ARTICULATION
DES COMPTABILITÉS DE L’ÉTAT
ET DES COLLECTIVITÉS LOCALES
POUR LA MESURE
DES COÛTS COMPLETS
DE FONCTIONNEMENT
Le cadre comptable général
. Pour l’Etat, l’article 27 de la LOLF prévoit la tenue de trois types
de comptabilité :
– une comptabilité budgétaire ;
– une comptabilité générale ;
– une comptabilité d’analyse des coûts.
. Le cadre réglementaire, pour les collectivités locales, ne prévoit que la comptabilité budgétaire et la comptabilité générale.
Toutefois, un nombre croissant de collectivités locales de taille
importante paraît vouloir s’engager dans une démarche d’évaluation de la performance qui nécessite une comptabilité d’analyse des coûts.
. L’articulation entre comptabilité générale et comptabilité
d’analyse des coûts doit emprunter le même schéma dans le
secteur public et dans le secteur privé. Dans le secteur public, ce
schéma doit être similaire pour l’Etat et les collectivités locales.
L’articulation de la comptabilité budgétaire
et de la comptabilité générale
pour les collectivités locales
La connexion et la superposition quasi parfaites des deux comptabilités, s’agissant du fait générateur ou du périmètre des enregistrements comptables, permettent de considérer que la comptabilité budgétaire, sous le volet de la comptabilité des
engagements de dépenses de fonctionnement, contribue à la
fiabilisation des charges à enregistrer dans la comptabilité générale des collectivités locales.
Actuellement, ce type de superposition entre les deux comptabilités n’existe pas pour la présentation des comptes de l’Etat.
Les divergences, sur ce point, peuvent être illustrées à l’aide des
deux diagrammes ci-contre :
Ces deux diagrammes font ressortir les différences très importantes d’articulation entre comptabilité budgétaire et comptabilité générale pour l’Etat et les collectivités locales.
En effet, pour les collectivités locales, la superposition quasi parfaite des deux comptabilités permet de s’assurer que toutes les
charges mandatées en comptabilité budgétaire (charges
payées, charges à payer et charges « calculées ») sont bien enregistrées, pour des montants identiques, en comptabilité générale.
Par ailleurs, l’enregistrement des restes à réaliser (charges engagées n’ayant pas donné lieu à service fait), en comptabilité budgétaire, permet de reporter et de réinscrire ces restes au budget
- No 1 - Janvier 2008
de l’exercice suivant. Ajoutés aux crédits nouveaux, ils s’incorporent au total des crédits ouverts au titre dudit exercice. De surcroît,
avant d’être reportés au budget de l’exercice suivant, les restes
à réaliser doivent être inscrits au compte administratif de l’exercice courant, ce qui garantit une bonne continuité et une bonne
maîtrise de l’exécution du cycle budgétaire pluriannuel des collectivités locales, par incorporation des restes à réaliser dans leur
résultat budgétaire.
En ce qui concerne l’Etat, la comptabilité budgétaire n’offre pas
ces possibilités de bonne articulation avec la comptabilité générale. En effet, les charges à payer (charges ayant donné lieu à
service fait sans réception de facture en fin d’exercice), rattachables à l’exercice en comptabilité générale, ne sont pas individualisées et valorisées en comptabilité budgétaire. De manière
générale, les charges engagées et non payées (non mandatées),
en comptabilité budgétaire, considérées comme des autorisations d’engagement (AE) « consommées », ne distinguent pas les
charges à payer (service fait) et les restes à réaliser (service non
fait). En tant que telles, ces autorisations d’engagement ne sont
pas reportées au budget de l’exercice suivant, mais les crédits de
paiement correspondants doivent l’être pour assurer le règlement
des engagements de l’exercice précédent. Le maintien d’une
comptabilité budgétaire à deux volets, l’un assurant le suivi de la
consommation des AE et des CP, sans distinction des AE ayant
donné lieu ou non à service fait, l’autre enregistrant les charges
sur le critère du paiement et servant au calcul du résultat budgétaire, fait ressortir un écart entre les charges prises en compte,
en terme de résultat comptable, en comptabilité générale et en
comptabilité budgétaire, qui correspond aux charges à payer
(engagées avec service fait). S’ajoutent à cet écart les charges
« calculées » (amortissements, provisions...) qui ne font pas l’objet
d’un engagement en comptabilité budgétaire. Le défaut d’articulation ou de superposition entre le premier volet de la comptabilité budgétaire et la comptabilité générale ne permet pas à
l’Etat de maîtriser au mieux le déroulement de son cycle budgétaire pluriannuel.
ANNEXE 2
CRITÈRES D’ÉQUILIBRE FINANCIER
POUR L’ÉTAT ET LES COLLECTIVITÉS LOCALES
Pour l’Etat
Dans le projet de loi de finances 2007 de l’Etat, le déficit budgétaire est évalué à 41,7 milliards d’euros. Il se décompose de la
façon suivante (en milliards d’euros) :
– déficit de fonctionnement ........................................................
– dépenses d’investissement (hors remboursement d’emprunt)
– recettes d’investissement ..........................................................
Total ..................................................................................................
22,8
+ 23,9
– 5,0
41,7
Pour respecter ses engagements à l’égard de l’Union européenne, dans le cadre du programme de stabilité et de
croissance, la France doit réduire le déficit des administrations
publiques en deçà de 3 % du PIB. Selon le projet de loi de finances
2007, la réduction du déficit budgétaire de l’Etat à 41,7 milliards
d’euros, soit 5,3 milliards d’euros de moins que le déficit prévu par
la loi de finances de 2006, devrait permettre de ramener à 2,5 %
du PIB le déficit des administrations publiques (Etat, Sécurité
sociale et collectivités locales) et de diminuer la dette publique
de un point de PIB.
Le déficit, ou besoin de financement au sens européen, calculé
pour l’Etat, comme pour les autres administrations publiques,
comprend toutes les opérations d’investissement (hors emprunt),
en dépenses et en recettes, à l’exclusion des opérations financières (dotations en capital, prêts ou avances...).
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collectivités territoriales
COLLECTIVITÉS LOCALES
Illustration de la superposition de la comptabilité budgétaire et de la comptabilité générale
(charges de fonctionnement)
Exercice N
Charges
payées
Charges
engagées
Charges
à payer
Total des crédits engagés
Crédits à annuler
Absence d'engagement
Total
des mandats
de rattachement
(2)
Total des mandats
de paiement (1)
Total
des crédits
ouverts
Charges
« calculées »
Total
des mandats
d'ordre (3)
Restes
à réaliser
Service fait sans
réception facture
Engagement
sans service fait
Opérations
d'inventaire :
stocks,
amortissements
et provisions
Absence
d'engagement
Total des crédits
ouverts de (N + 1)
Exercice (N + 1)
Crédits nouveaux ouverts en (N + 1)
Reports
Restes à réaliser de l'exercice N
Exercice N : charges de fonctionnement enregistrées en comptabilité budgétaire = charges de fonctionnement enregistrées en comptabilité générale = 1 + 2 + 3
ÉTAT
Illustration de l'absence de superposition de la comptabilité budgétaire
et de la comptabilité générale (charges de fonctionnement)
COMPTABILITÉ BUDGÉTAIRE
Exercice N
Charges
engagées
Charges
payées
Total des mandats de paiement
Total
des crédits ouverts
(autorisation
d'engagement)
Total des autorisations
Total des autorisations d'engagement
d'engagement « consommées »
non « consommées »
Exercice (N + 1)
Crédits à annuler
Possibilité de report de tout ou partie des AE
non « consommées » de (N)
Total des autorisations nouvelles
d'engagement en (N + 1)
COMPTABILITÉ GÉNÉRALE
DE N
Charges
payées
Charges
à payer
Total des mandats de paiement (1) Total
des mandats
de rattachement
pour service fait
sans réception
de facture (2)
Charges
« calculées »
Charges
engagées
Restes
à réaliser
pour
engagement
sans
service
fait
Total
des mandats
d'ordre (3)
AE non reportés au budget de (N + 1)
Charges de fonctionnement incorporées dans le résultat budgétaire = 1
Charges de fonctionnement enregistrées en comptabilité générale = 1 + 2 + 3
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No 1 - Janvier 2008 -
collectivités territoriales
La maîtrise du déficit global de l’Etat en 2007 est appréciée au
regard de deux critères principaux :
– pour les recettes, une hypothèse de croissance du PIB entre 2
et 2,5 % ;
– pour les dépenses, une progression limitée à 0,8 %, soit un point
de moins que l’inflation prévisionnelle.
Cette définition et ces critères, appliqués à la maîtrise du déficit,
ne permettent pas de faire ressortir l’importance et la gravité du
déséquilibre affectant les finances de l’Etat. Ils négligent de faire
apparaître l’inadéquation du mode de financement des
dépenses par les recettes. Comme le montre le tableau présenté
en page 6, 16,5 % seulement du montant des emprunts de l’Etat
sont consacrés au financement des investissements, le reste étant
réservé au financement du remboursement des emprunts antérieurement contractés, à hauteur de 63,6 %, et au financement
des charges de fonctionnement, à hauteur de 19,9 %. Or, le respect d’une des règles d’or du bon équilibre financier impose de
consacrer l’intégralité des emprunts à long ou moyen terme au
financement des investissements et de s’assurer que l’autofinancement prélevé sur les recettes de fonctionnement couvre au
moins le remboursement en capital des emprunts. L’Etat est donc
loin de respecter cette règle d’or et, tant le mode de présentation
de son résultat budgétaire, que les critères retenus pour la maîtrise
de son déficit budgétaire, ne le conduisent pas au respect de
cette règle (9).
Pour les collectivités locales
Les états financiers présentés par les collectivités locales (compte
administratif de l’ordonnateur et comptes de gestion du
comptable) distinguent nettement, en deux sections, les opérations de fonctionnement et les opérations d’investissement, tant
en prévision, qu’en exécution pour ce qui concerne le compte
administratif.
Dans ces états, le tableau relatif à la section de fonctionnement
fait ressortir l’autofinancement prélevé sur les recettes de fonctionnement pour financer les dépenses d’investissement et le tableau
relatif à la section d’investissement permet de s’assurer que les
ressources propres de la collectivité, incluant cet autofinancement,
couvrent le remboursement du capital des emprunts et, au-delà,
le financement d’une partie des dépenses d’investissements, de
telle façon à prévenir une situation de surendettement.
Cette approche, consacrée par l’article L. 1612-4 du Code
général des collectivités territoriales, obligeant à prévoir à la section d’investissement du budget un montant de ressources propres au moins égal au montant du remboursement du capital des
emprunts, garantit le respect de la règle d’or du bon équilibre
financier selon laquelle les emprunts à long et moyen terme ne
peuvent financer que des dépenses d’investissement.
De façon plus générale, le mode de présentation des états financiers des collectivités locales conduit à rapprocher trois critères
ou trois variables clés synthétisant les conditions de réalisation de
leur équilibre financier : la capacité d’autofinancement, la capacité de désendettement mesurée par le rapport entre l’encours
de dette d’emprunt et l’autofinancement brut et la capacité
d’investissement. L’interdépendance de ces trois variables
résume les conditions de maîtrise de l’équilibre financier. Ainsi, en
cas de réduction de sa capacité d’autofinancement et de détérioration de sa capacité de désendettement, la collectivité doit
se résoudre à diminuer ses dépenses d’investissement pour réduire
son appel à l’emprunt, avant de pouvoir limiter ses dépenses de
fonctionnement pour restaurer sa capacité d’autofinancement.
(9) Le respect de cette règle d’or n’est prévu, ni par les engagements européens
de la France, ni par la LOLF. Le résultat budgétaire, au sens de Maastricht, mêle,
pour l’Etat, comme pour les autres administrations publiques, les opérations de
fonctionnement et d’investissement (hors opérations financières). De son côté, la
LOLF prévoit une évaluation de la performance financière de l’Etat à partir de la
mesure de la performance des actions dans chaque programme, sans référence
expresse, en la matière, au solde d’exécution des charges par rapport aux produits
de fonctionnement, ni même au solde global d’exécution des dépenses par rapport aux recettes.
Le chômage baisse depuis début 2006
Le taux de chômage au sens du Bureau international du travail est désormais établi à partir d’une
définition qui le rapproche des statistiques européennes. Selon cette nouvelle approche, il s’élève à
8,1 % de la population active en France métropolitaine au deuxième trimestre de 2007. Depuis le
début de 2006, le taux de chômage diminue régulièrement, après une légère augmentation en 2005.
En moyenne pour l’année 2006, comme en 2005 et en 2004, il s’établit à 8,8 % de la population
active pour la France métropolitaine, soit 2,4 millions de personnes.
Au deuxième trimestre de 2007, 8,1 % des actifs résidant en France métropolitaine sont au chômage
au sens du Bureau international du travail (BIT). Cette estimation s’appuie sur l’enquête Emploi.
Après avoir été stable en 2004, le taux de chômage au sens du BIT a légèrement augmenté en 2005.
Il est passé de 8,9 % au quatrième trimestre de 2004 pour la France métropolitaine à 9,1 % au premier
trimestre de 2006. Il a ensuite baissé régulièrement pour atteindre 8,1 % au deuxième trimestre de
2007, soit 2,2 millions de personnes.
Cette décrue du chômage n’est toutefois pas encore perceptible en moyenne annuelle.
INSEE Première nº 1164, novembre 2007.
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