RESUME
Prévoir le stade tumoral pathologique d’un
cancer de prostate permet de diminuer le
n o m b r e de prostatectomies inutiles,
effectuées pour des cancers non significatifs
et surtout pour des cancers ayant jà
dépassé les limites anatomiques de la
capsule prostatique. Si sur une large série,
la valeur prédictive du PSA pré-opératoire
est élevée, il ne permet qu’une estimation
grossière à titre individuel. Au dela de 25 à
30 ng/ml (Nle <4 ng/ml), l’extension extra-
capsulaire devient hautement probable. Les
biopsies prostatiques systématisées sont par
c o n t re un outil puissant de prédiction du
stade pathologique d’un cancer de prostate.
Il est recommandé détudier l’état des
espaces périprostatiques sur chaque
biopsie, l’existence d’envahissement péri-
nerveux, le nombre de biopsies positives et
l’état des vésicules séminales qui devraient
être analysées lorsque le PSA est supérieur
à 10 ng/ml. Consirer ces critères en
combinaison avec le taux de PSA permet de
diminuer le pourcentage de tumeur pT3
après prostatectomie radicale.
INTRODUCTION
Le pronostic du cancer prostatique dépend
des 2 critères que sont le volume tumoral e t
la d i ff é renciation tumorale. Les autres
critères ne sont que le reflet indirect du
volume et de la différenciation tumorale. Il
sagit de critère:
- C l i n i q u e: induration des tissus prostatique
ou périprostatique.
- I m a g e r i e (ultrasons, IRM): volume et
localisation de la partie observable (zone
hypoechogène ou dhyposignal) de la
t u m e u r.
- B i o l o g i q u e: PSA (taux sérique), densité du
PSA (rapporté au volume prostatique),
vélocité du PSA (variation dans le temps),
rapport PSA libre/PSA lié aux protéines
s é r i q u e s .
- H i s t o l o g i q u e (biopsies prostatiques):
longueur ou pourcentage de cancer sur
chaque biopsie, nombre de biopsies positives
lors dune cartographie, biopsies des tissus
péri-prostatiques (aponévroses, vésicules
séminales), histo-pathologie (grade de
Gleason), facteur de prolifération cellulaire
(ploïdie, angiogénèse, PCNA).
Dans cette étude, nous avons sélectionné les
critères concernant le P S A et les b i o p s i e s
EVALUATION PRE-OPERATOIRE DU STADE
PATHOLOGIQUE DU CANCER PROSTATIQUE
CLINIQUEMENT LOCALISE PAR LE PSA
ET LES BIOPSIES PROSTATIQUES
A. VILLERS, J.C. BARON, B. CIPOLLA, V. RAVERY, O. HAILLOT
et le Sous-Comité Cancer de Prostate Localisé du CCAFU
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p r o s t a t i q u e s et précisé leur rôle dans
lévaluation pré-opératoire du stade
pathologique du cancer prostatique.
Rôle du PSA dans lévaluation pré-
opératoire du stade pathologique
Plus de 40% des patients qui subissent une
prostatectomie radicale pour un
adénocarcinome prostatique localiont une
tumeur dépassant les limites de la glande.
Cette sous stadification est liée à labsence
de méthode dévaluation précise du stade
exact de la tumeur, comme lont montré
GR E S K O V I C H (12), OE S T E R L I N G (19) et
Stamey (24, 25).
PSA et stade Clinique
MY R T L E (18) a étud le taux de PSA chez
553 patients et a constaté quil était élevé
chez 81% dentre eux. Le pourcentage de
patients ayant un taux de PSA au dessus du
taux de référence augmentait
progressivement avec le stade.
Ces résultats ont été retrouvés dans la série
de Stamey (25) chez 209 patients (Ta b l e a u
1). Dans cette série, le PSA était compris
entre 3,1 et 40 ng/ml dans les stades intra-
capsulaires, et de 10,2 à 563 ng/ml dans les
stades extra-capsulaires. Il existait donc un
recouvrement des taux entre les stades intra
et extra-capsulaires.
PSA et stade pathologique
Le taux de PSA pré-opératoire sélève
également en fonction du stade pathologique
(après prostatectomie radicale), et en fonction
du volume du cancer calculé sur la pièce (26).
Cette corrélation entre le taux du PSA pré-
opératoire et le volume tumoral sur la pièce
opératoire (p<0,001, r=0,56) a été confirmée
par BLACKWELL (4).
PA R T I N E T WA L S H (20,21) ont fait la même
constatation concernant la moyenne du taux
de PSA selon le stade. Celui-ci variait de
façon significative si la tumeur était localisée
à la prostate, franchissait la capsule, les
vésicules séminales ou sil existait un
envahissement ganglionnaire (Tableau 2).
Dans la série de la Mayo Clinic de 311 patients
de T1 à T3 (4), le PSA pré-opératoire (Nle < 4
ng/ml) était corré au stade pathologique
(p<0,001, r=0,38). La médiane du PSA pré-
opératoire était de 7,6 ng/ml en cas de tumeur
confinée à l’organe, de 11,3 ng/ml en cas de
tumeur dépassant les limites prostatiques et N-
et de 26,4 en cas de tumeur N+.
Dans la série de ZIETMAN (33) de 62 patients
T1-T2, 52% étaient pT3. Le PSA pré-
opératoire (Nle < 2,5 ng/ml) était corréau
stade pathologique (p=0,08).
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Tableau 1 : PSA en fonction du stade clinique
(25)
Stade Nombre Moyenne PSA P
clinique (Nle < 2,5) (1DS)
C+D1 57 101,6 (19,9)
Versus
B2 + B3 68 29,5 (4,9) < 0,01
A2 + B1 57 12,3 (1,6) < 0,01
Tableau 2 : Stade pathologique sur la pièce de
prostatectomie radicale en fonction du taux de
PSA (20)
PSA (ng/ml)
Hybritech (1DS)
Localisé à la prostate 5,6 (0,6)
Franchissement 7,7 (0,7)
de la capsule
Envahissement des 23,2 (6,2)
vésicules séminales
Envahissement 26,2 (6,3)
ganglionnaire
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Le taux de PSA est donc proportionnel au
stade clinique, au stade pathologique et au
volume de la tumeur sur la pièce de
prostatectomie radicale.
Le taux de PSA chez un patient donné
permet-il de prédire le stade pathologique?
ER C O L E (10) a constaté que le taux de PSA
pouvait donner une indication pour
d i f férencier les cancers intra-capsulaires de
ceux ayant dépassé les limites de la glande.
En effet, dans cette série de 74 patients, le
PSA était supérieur à 10 ng/ml avant la
prostatectomie chez 59% de ceux ayant un
cancer extra-capsulaire et seulement 7% de
ceux qui avaient un cancer intra-capsulaire.
Cependant, un taux inférieur à 10 ng/ml ne
pouvait être utile pour prévoir un cancer intra-
capsulaire. Si 61% de ces patients avaient bien
un cancer intra-capsulaire, 39% avaient un
cancer extra-capsulaire.
Ces données ont été confirmées par
OE S T E R L I N G (19). Sur une série de 178
patients, la sensibili dun taux de PSA
supérieur à10 ng/ml pour prédire le
franchissement capsulaire, l’envahissement
des vésicules minales ou la présence de
métastases ganglionnaires était
respectivement de 20%, 61% et 71% tandis
que la spécificité était respectivement de 90%,
87% et 82%.
Dans la série de LANGE (17) de 100 patients,
la VPP dun PSA pré-opératoire supérieur à
10 ng/ml pour prédire un cancer extra-
capsulaire était de 78% et la VPN de 61%.
Dans la série de SH I N O H A R A (23) de 155
patients, la médiane du PSA pré-opératoire
était de 8,6 ± 15,1 ng/ml en cas de tumeur
dépassant les limites prostatiques. La VPP du
PSA pré-opératoire >12 ng/ml était de 77 % et
la VPN était de 77 %. Dans la série de
RAV E RY(22) de 100 patients T1 à T2, 45 %
étaient pT3. Le PSA pré-opératoire (Nle < 2,5
ng/ml) était corrélé au stade pathologique. La
VPP dun PSA pré-opératoire pour prédire
l’extension extra-capsulaire était de 65 % pour
1 PSA > 25 ng/ml et de 34 % pour un PSA <
25ng/ml.
Dans les séries publiées en 1990 et 1993 par
PARTIN (20,21) et en 1993 par FRAZIER (11) les
mêmes constatations (Tableaux 3 et 4) ont été
faites avec un autre test de PSA (Nle < 4
ng/ml). FR A Z I E R ( 1 1) a précisé létat
denvahissement des marges dexérèse après
prostatectomie en fonction du taux de PSA
pré-opératoire et de son évolution post-
opératoire: 226 patients ont été étudiés (102
tumeurs confinées à l’organe, 71 à la pièce de
prostatectomie, 53 pièces avec marg e s
positives). Il existait une diff é r e n c e
significative des moyennes selon que la
tumeur était confinée à l’organe (6 ng/ml), ou
au spécimen (10,4 ng/ml) ou que les marg e s
étaient positives (24,3 ng/ml). Cependant un
taux de PSA donné ne prédisait pas avec
fiabilité l’état des marges d’exérèse.
Une situation particuliére est à mentionner,
comme l’a montré STAMEY (27): une élévation
importante du taux de PSA pouvant être
supérieure à 100 ng/ml peut être associée à
une tumeur limitée à la glande prostatique s’il
sagit dune tumeur antérieure, développée
dans la zone de transition.
Ainsi, sauf aux valeurs extrêmes, un taux de
PSA pré-opératoire ne permet pas, à lui seul et
pour un patient donné, de prédire avec
fiabilité, le stade du cancer sur la pièce de
prostatectomie. La coexistence très fréquente
du cancer avec une hypertrophie bénigne peut
expliquer cette constatation. La contribution
de cette hypertrophie bénigne à l’élévation du
PSA est difficile à préciser (20). De plus il
existe une relation inverse entre
l’indifférenciation tumorale et la sécrétion de
PSA par les cellules tumorales, comme l’ont
montré les études de l’immunoréactivité du
PSA sur les lames histologiques (9).
Localisation, guidage et nombre de biopsies
HODGE (15) a réalisé des biopsies échoguidées
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transrectales systématisées chez 43 patients
ayant déeu des biopsies dirigées au doigt
négatives. Les biopsies échoguidées ont
permis de mettre en évidence un cancer de
prostate chez 53 % de ces patients, la
sensibilité des biopsies échoguidées apparait
donc plus importante que celle des biopsies
dirigées au doigt.
La voie périnéale comporte un risque infectieux
moins important mais est moins précise que la
voie endorectale et nécessite une anesthésie
cutanée. Ces caractéristiques doivent faire
limiter l’utilisation de la voie périnéale.
Comparaison entre biopsies dirigées sur les
zones hypoéchogènes et biopsies
prostatiques systématisées.
- En cas de toucher rectal suspect
Biopsies dirigées sur les zones
hypoéchogènes seules
En cas de toucher rectal suspect,
l’échographie endorectale permet didentifier
des zones hypoéchogènes dans 86% des cas.
Les biopsies de ces zones hypoéchogènes
mettent en évidence un cancer de prostate
dans 52% des cas ce qui fait un rendement
global de diagnostic de cancer de prostate de
45% (5,8,16).
Biopsies systématisées associées aux
biopsies des zones hypoéchogènes ( Ta b l e a u
5)
La réalisation de biopsies systématisées dans
les deux lobes (cartographie), au niveau de
l’apex, de la partie médiane de chaque lobe et
de la base prostatique en plus de biopsies des
86
Tableau 3 : Stade pathologique en fonction du PSA préopératoire (21): 702 patients
PSA ng/ml Nombre de Tumeur confinée Franchissement Invasion des Métastases
Hybritech patients à la glande capsule VS ganglionnaires
n (%) n (%) n (%) n (%)
0-4 284 211 (75) 65 (23) 4 (1) 4 (1)
4-10 246 131 (53) 78 (32) 8 (3) 29 (12)
10-20 118 31 (26) 45 (38) 21 (18) 21 (18)
20-30 27 7 (26) 10 (37) 3 (11) 7 (26)
30-40 12 1 (8) 2 (17) 4 (33) 5 (42)
40-50 8 1 (13) 2 (25) 3 (37) 2 (25)
>50 8 —— 1 (13) 1 (13) 6 (74)
Tableau 4 : Extension du cancer sur la pièce de prostatectomie en fonction du PSA pré-opératoire (11)
PSA
Extension n = 149 < 4 4-10 > 10
- confinée à l’organe 63 65,6% 56,8% 23,3%
- confinée au spécimen 48 21,9% 34,1% 35,6%
- marges positives 38 12,5% 9,1% 41,1%
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zones hypoéchogènes, permet de retrouver un
adénocarcinome prostatique dans 57% des cas
chez les patients avec un toucher rectal
suspect.
Au total, la cartographie biopsique est
supérieure aux biopsies uniquement dirigées
sur les zones hypoéchogènes pour le
diagnostic de cancer de prostate lorsque le
toucher rectal est anormal.
- En cas de toucher rectal non suspect
Biopsies des zones hypoéchogènes seules
Lorsque le toucher rectal nest pas suspect,
léchographie endorectale met en évidence
des zones hypoéchogènes dans 25,3 % des
cas. Les biopsies de ces zones hypoéchogènes
révèlent un adénocarcinome prostatique dans
15,2 % des cas pour un rendement global de
3,8 % de cancers de prostate dans les
populations étudiées ((5,6,8,32).
Biopsies systématisées associée à des
biopsies des zones hypoéchogènes (Ta b l e a u
6)
Les biopsies systématisées permettent de
trouver un adénocarcinome prostatique dans
10,2 % des cas.
Comparaison des deux techniques de
biopsies dirigées et systématisées:
Lorsque les auteurs ont comparé les deux
techniques, le rendement des biopsies
systématisées a éà chaque fois supérieur à
celui des biopsies dirigées sur les zones
hypoéchogènes. Les biopsies dirigées
uniquement sur les zones hypoéchogènes
n’ont pas permis le diagnostic de 2 cancers sur
7 pour Coplen (6) et Hodge (16) et 12 cancers
sur 14 pour Vallancien (32). Dans la série de
Bichat (3) portant sur 186 patients, les
biopsies systématisées ont permis un taux de
détection 17% supérieur à celui des seules
biopsies dirigées sur des zones
hypoéchogènes.
Au total, les biopsies échoguidées
systématisées ont une sensibilité supérieure
aux seules biopsies dirigées sur les zones
suspectes ou hypoéchogènes pour le
diagnostic de cancer, que le toucher re c t a l
soit suspect ou non. En cas de toucher
rectal suspect, l’association de biopsies
systématisées aux biopsies dirigées est
recommandée.
Rôle des biopsies systématisées et dirigées
dans l’évaluation de l’extension tumorale
locale
Appréciation du volume tumoral
Lestimation du volume tumoral par
l’échographie transrectale seule nest pas
fiable (29). Lorsque le toucher rectal est
normal, les biopsies systématisées risquent de
mettre en évidence un cancer de volume
inférieur à 0,5 cc, cliniquement non
87
Tableau 5 Résultats des biopsies sysmaties
associées aux biopsies diries sur les zones
hypoéchogènes en cas de TR suspect
Fréquence de
n biopsies positives
n %
HAMMEREr (13) 502 280 (55,8)
HODGE (16) 136 83 (62)
Total 638 363 (57)
Tableau 6 : Résultats des biopsies sysmatisées
en association à des biopsies dirigées sur les
zones hypoéchogènes en cas de TR non suspect
n cancer (%)
HAMMERER (13) 149 12 (8)
VALLANCIEN (32) 100 14 (14)
COPLEN (6) 73 7 (10)
Total (%) 322 33 (10,2)
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