
Une approche prospective des métiers de la gynécologie : des
évolutions contrastées, des stratégies spécifiques.
Résumé
Dans les établissements de soins, le partage des rôles entre spécialités médicales (médecins,
chirurgiens, anesthésistes,…), soignants (infirmières, kinésithérapeutes,...) et managers (de
ressources humaines, de communication, de la qualité…) est en perpétuelle évolution. Le contour et
le contenu des métiers de la santé sont, sans cesse, redéfinis par les mutations technologiques,
médicales, sociales, économiques, démographiques,… Dans cette dynamique de changements, les
professionnels de la santé se livrent souvent à des combats de territoires, de pouvoir, de
reconnaissance, etc. Dans ces conditions, comment les métiers de la gynécologie évoluent-ils ? Le
métier de sage-femme, semble en expansion, alors que celui du gynécologue médical est en déclin,
voire en extinction. Le métier de gynécologue obstétricien, quant à lui, se trouve dans une « niche »
protégée par une compétence distinctive. Ainsi, alors que ces trois métiers sont proches l’un de
l’autre, leurs situations et leurs évolutions semblent contrastées et chaque groupe de professionnels
semble mettre en œuvre une stratégie particulière afin de pérenniser son métier. Ce travail s’appuie
sur l’approche prospective pour essayer de comprendre la dynamique des évolutions de ces métiers
de la gynécologie.
Mots-clés : prospective des métiers, santé, sage-femme, gynécologie, glissement des tâches.
Introduction
La sage-femme vient de rejoindre la profession médicale, suite à l’intégration de sa première année
de formation dans le premier cycle des études médicales (PCEM1)(Thuilliez, 2006) suivie de
l’obligation de passer le concours commun avec les futurs médecins et futurs chirurgiens dentistes
(JORF, 2002). C’est l’aboutissement d’une stratégie proactive ou d’une stratégie d’intention (Hamel
& Prahalad, 1989) mise en place par le corps des sages-femmes depuis plusieurs décennies. D’autre
part, le diplôme de gynécologue médical a été supprimé en 1986 et il a fallu la mobilisation et les
actions de certains groupes de pression pour qu’il soit enfin rétabli en 2003(JORF, 2003). De son
côté le métier de gynécologue obstétricien semble profiter de sa compétence spécifique (Penrose,
1959; Wernerfelt, 1984; Arrègle, 2000) de chirurgie gynécologique pour être moins vulnérable que
celui du gynécologue médical.
Cet article a pour objectif d’explorer et essayer d’expliquer les évolutions contrastées de ces métiers.
Dans un premier temps, il expose une approche systémique de la place des métiers de la gynécologie
dans les structures de soins et il s’interroge sur les mutations de ces métiers (1). Ensuite, il tente
d’expliquer les forces de changement à l'origine de ces mutations (2). Enfin, il présente une esquisse
des évolutions futures de ces métiers (3).
1 Une approche systémique de la place des métiers de la gynécologie dans les
structures de soins
Dans une perspective systémique (Bertalanffy, 1993) l’organisation sanitaire peut être modélisée en
niveaux (figure 1) dont chacun définit et contrôle les règles de jeu et donne du sens au niveau
inférieur ou niveau contrôlé. Celui-ci justifie, à son tour, l’existence du niveau supérieur ou niveau
contrôleur (Mélèse, 1990 ;Genelot, 1992). Même si, dans ces organisations, une partie des acteurs se
distingue par son expertise médicale ou paramédicale et pourrait inviter le chercheur à proposer une
structure ad-hocratique (Mintzberg, 1982), nous pouvons soutenir que l’entrée en force des méthodes
managériales dans le domaine de la santé (Smida, 2006) permet d’intégrer cette ad-hocratie dans le
schéma systémique de la figure 1.