19e Congrès de Maîtrise des Risques et Sûreté de Fonctionnement - Dijon 21-23 octobre 2014
Introduction
Décider dans un monde incertain. Prévention, prévision, protection, mitigation... sont autant
de termes qui placent la ville et ses habitants sous un chapeau sémantique protecteur. Les
décideurs sont rassurés, la population est sécurisée. Pourtant, des évènements d’exception
comme l’explosion de l’usine AZF à Toulouse, l’ouragan Katrina, ou encore la catastrophe
nucléaire de Fukushima, nous rappellent la limite des plans de maitrise des risques initiaux.
En quelques minutes, le bassin de vie se transforme en terrain de crise, dévoilant ses
vulnérabilités. Entre risque et crise, la rupture provoquée par l’évènement modifie les
temporalités. La préparation à long terme fait place à l’urgence de l’immédiat. Ainsi, c’est
dans l’anticipation et la préparation que la décision doit être déclenchée, et le décideur
protégé.
Dans ce contexte de gestion des risques majeurs, et au sein d’organisations qualifiées de
dynamiques et complexes, c’est au maire, représentant de proximité de l’État, que revient la
responsabilité de protéger ses administrés. Dépositaire des pouvoirs de police, il est directeur
des opérations de secours sur son territoire. Décideur intuitif, il est placé dans un écosystème
décisionnel où se mêlent chaos des évènements, diversité des acteurs, pression temporelle,
incertitudes des effets, et responsabilité des conséquences. Dans un tel contexte soumis à
l’affectif et au recours de plus en plus important aux systèmes technologiques, la décision doit
être préservée de la perte de sens (WEICK, 1993) qui peut mettre en péril l’organisation.
Dans ce but, appréhender la notion d’éthique est primordial pour rester lucide et pragmatique
devant la catastrophe. Le constat est fait au niveau international : les catastrophes impactent
les droits fondamentaux et comportent des enjeux éthiques importants1. Respect et mise en
œuvre de principes éthiques communs sont plébiscités par le conseil de l’Europe 2 Les
principes généraux que sont la solidarité, la responsabilité commune, la non-discrimination,
l’humanité, l’impartialité, la neutralité, la coopération et la prévention constituent le socle
d’un futur droit international des catastrophes. Les premiers constats tirés d’une série
d’entretiens réalisés sur une période de 3 ans (2012/2013/2014) sur un panel de responsable
opérationnels de la sécurité civile ont permis de mettre en évidence le caractère implicite de
l’éthique et sa présence intrinsèque dans leurs processus de prise de décision3.
Pour autant, la déclinaison de ces grands principes éthiques dans la réalité opérationnelle
rencontre des difficultés d’application. Entre logiques parapluies, querelles de clochers et
éviction du public comme acteur à part entière, la mise en œuvre des politiques locales de
prévention des risques majeurs tient fréquemment lieux de jeux d’acteurs difficilement
coopératifs. Les systèmes de valeurs qui sous-tendent les perceptions, décisions et actions
rentrant dans le champ de la gouvernance des risques majeurs sont sous-entendus et peu
partagés, alors qu’ils pourraient devenir des leviers pour l’effectivité des dispositifs locaux de
prévention.
1 Rapport scientifique du programme de recherche ANR « Catastrophes et droits fondamentaux »).
2 Accord Européen et Méditerranéen sur les risques majeurs Résolution 2010-2 du Comité des Correspondants Permanents
sur les valeurs éthiques et la résilience aux catastrophes, Conseil de l’Europe Saint-Pétersbourg, le 28 septembre 2010.
3 RICHARD PH, LACLEMENCE P, 2013 Ville intelligente et sécurité globale. Convergences, avantages et limites pour de
nouveaux paradigmes. Focus sur la gestion des crises de sécurité civile, Acte du Workshop International sur la Sécurité
Globale.
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